Le 28 janvier 2020, quatorze collectivités territoriales*, aux côtés des associations Notre Affaire à Tous, Sherpa, ZEA, les Eco Maires et FNE, assignent la multinationale Total en justice et demandent qu’il lui soit ordonné de prendre les mesures nécessaires pour réduire drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre. Il s’agit du premier contentieux climatique en France visant à rehausser les ambitions climatiques d’une multinationale du pétrole.

Les raisons de l’action

Total et les territoires qui se défendent : et si nous mettions enfin les entreprises face à leurs responsabilités ?

Cette action en justice a débuté le 23 octobre 2018, lorsque le collectif de collectivités et d’associations (rejoint en janvier 2020 par la FNE et la région Centre) a interpellé TOTAL face à l’absence de toute référence au changement climatique dans son premier plan de vigilance, malgré son obligation légale, issue de la loi sur le devoir de vigilance du 27 mars 2017, de prendre des mesures propres à prévenir les atteintes aux droits humains et à l’environnement résultant de ses activités. Ni la publication d’un second plan de vigilance en mars 2019, ni les échanges avec la direction de Total, y compris une rencontre avec son Président Directeur Général, Patrick Pouyanné, n’ont abouti à une évolution substantielle des engagements climatiques de Total. Les ambitions climatiques de Total sont clairement en inadéquation avec la trajectoire 1,5°C, la seule réellement cohérente avec les objectifs de l’accord de Paris.

Après avoir formellement mis Total en demeure le 19 juin 2019, le collectif de collectivités et d’associations se voit aujourd’hui contraint de saisir la justice. Il  se fonde sur la loi relative au devoir de vigilance, ainsi que sur l’obligation de vigilance environnementale découlant de la charte de l’environnement.

14 collectivités territoriales, Notre Affaire à Tous et quatre associations assignent Total en justice pour manquement au devoir de vigilance.

NOTRE OBJECTIF

Face à l’inaction de l’Etat en matière de régulation des multinationales, notamment en matière climatique, les collectivités et associations demandent ainsi au tribunal judiciaire de Paris d’enjoindre Total de reconnaître les risques générés par ses activités et de s’aligner sur une trajectoire compatible avec une limitation du réchauffement climatique à 1,5°C. 

* Les collectivités impliquées dans l’action en justice contre Total : Arcueil, Bayonne, Bègles, Bize-Minervois, Centre Val de Loire, Correns, Est-Ensemble Grand, Grenoble, La Possession, Mouans-Sartoux, Nanterre, New-York, Paris, Poitiers, Sevran et Vitry-le-François.

CHRONOLOGIE DE L’ACTION

15 Mars 2018 : Publication par Total d’un premier plan de vigilance (v. pp. 96 – 104 du document de référence).

22 Octobre 2018 : Interpellation de Total menée par Notre Affaire à Tous, Sherpa, ZEA, les Eco Maires et 13 collectivités en raison de l’absence totale des enjeux climatiques dans le premier plan de vigilance de Total.

14 Janvier 2019 : Réponse du « directeur juridique groupe » de Total à l’interpellation : acceptation d’intégration du climat au second plan de vigilance et proposition de réunion.

20 Mars 2019 : Publication par Total d’un second plan de vigilance (v. pp. 93 – 110 du document de référence), reprenant partiellement des éléments de son reporting en matière climatique.

28 Mai 2019 : Publication par Notre Affaire à Tous, 350.org et Les Amis de la Terre du rapport « Total : la stratégie du chaos climatique », avec le soutien de Sherpa, Les Eco Maires, Attac et l’Observatoire des Multinationales.

18 Juin 2019 : Réunion entre les parties prenantes et le PDG de Total.

19 juin 2019 : Mise en demeure formelle de Total par les 14 collectivités et 4 associations.

17 Septembre 2019 : Rejet de la mise en demeure par Total, « la voie contentieuse n’est pas la voie appropriée pour apporter des solutions relatives à la lutte contre le changement climatique » selon le « directeur juridique groupe » de Total.

28 janvier 2020 : Assignation de Total devant le Tribunal judiciaire de Nanterre. Le collectif s’est désormais élargi avec la région Centre et France Nature Environnement. 

11 février 2021 : Rejet par le Tribunal judiciaire de Nanterre de l’exception d’incompétence soulevée par Total – devenue TotalEnergies – qui souhaitait porter le litige devant le tribunal de commerce 

18 novembre 2021 : Confirmation de la compétence du tribunal judiciaire par la Cour d’appel de Versailles

10 février 2022 : Transfert du dossier au tribunal judiciaire de Paris à la suite de l’adoption de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire qui fait du Tribunal judiciaire de Paris le seul compétent en matière de devoir de vigilance 

21 septembre 2022 : Intervention d’Amnesty International France et des villes de Paris, New-York, Poitiers qui rejoignent la coalition

10 février 2023 : Demande de mesures provisoires pour suspendre des nouveaux projets pétroliers et gaziers

6 juillet 2023 : Action de la coalition jugée irrecevable par le juge de la mise en état qui considère que la mise en demeure n’a pas été effectuée de façon régulière au motif que les demandes formulées dans l’assignation ne sont pas strictement les mêmes que celles contenues dans le courrier de mise en demeure envoyé en juin 2019. 

10 novembre 2023 : Appel de la décision du tribunal judiciaire de Paris ; La coalition conteste la restriction à l’accès à la justice et soulève une question d’impartialité de la décision en raison de possibles liens familiaux entre le juge de la mise en état et un haut cadre de TotalEnergies

5 mars 2024 : Audience devant la cour d’appel de Paris.

18 Juin 2024 : Date attendue du délibéré de la cour d’appel.