Chères lectrices, chers lecteurs,
Pour cette vingt-et-unième newsletter des affaires climatiques et environnementales, vous trouverez en focus un article sur l’encadrement juridique des impacts de l’élevage sur l’eau.
Ensuite, vous retrouverez les chroniques de deux décisions récentes en matière de contentieux climatique : le contentieux du refus du gouvernement français d’octroyer un permis de recherches d’hydrocarbures pour des raisons climatiques et la première victoire d’un recours climat en Asie.
Concernant les affaires environnementales, deux contentieux intéressants sont commentés : la confirmation d’un refus permis de construire au regard de la gestion de la ressource en eau en France et une transaction modèle conclue entre des associations et le gouvernement de Michigan concernant les injustices environnementales liés aux infrastructures de gestion des déchets.
Enfin, un article détaille les enjeux et les accords trouvés à la “COP 16 biodiversité” qui s’est déroulée en novembre en Colombie.
Très bonne lecture et merci d’être toujours aussi nombreux et nombreuses à lire ce courrier ! Et si vous souhaitez, vous aussi, vous investir dans la rédaction des prochains numéros, c’est par ici.
Clarisse Macé, co-référente du groupe de travail veille-international
Sommaire
Focus – Encadrement juridique des impacts environnementaux de l’élevage
Affaires climatiques
- Le Conseil d’État a validé le refus d’un permis de recherche d’hydrocarbure fondé sur la trajectoire climatique de la France.
- Première victoire dans un recours climat asiatique, la loi climat est jugée inconstitutionnelle par la cour constitutionnelle de Corée du Sud car elle viole les droits humains des jeunes pétitionnaires.
Affaire environnementale
Focus : Encadrement juridique des impacts environnementaux de l’élevage
En France, l’agriculture utilise 58 % de l’eau douce consommée annuellement. Cette eau sert principalement à l’abreuvage des animaux et à l’irrigation des cultures (6,8% des surfaces agricoles étaient irriguées en 2020). Cette eau vient principalement de la pluie, les prélèvements dans les milieux naturels sont minoritaires et principalement utilisés pour l’irrigation des cultures (à 80 %).
Si l’agriculture ne peut se faire sans eau, les quantités consommées varient grandement selon le système d’agriculture et la nourriture produite. D’une part, certaines cultures nécessitent de grandes quantités d’eau, notamment le maïs fourrager. D’autre part, la production de viande et de produits laitiers nécessite de nourrir et d’abreuver des animaux pendant un certain temps, ce qui fait augmenter la quantité d’eau nécessaire à la production de calories ou de grammes de nourriture.
Un autre enjeux de l’agriculture est la pollution de l’eau, qu’elle soit prévue ou prévisible (produits phytosanitaires, nitrates et algues vertes…) ou accidentelle (déversement de fumier dans des cours d’eau, fuites des stations d’épuration des usines agro-industrielles…).
En l’absence de volonté politique, des contentieux nationaux et locaux traditionnels mais également des contentieux innovants sont envisageables.
Affaires climatiques
Le Conseil d’État consacre le droit de refuser la délivrance d’un permis exclusif de recherches d’hydrocarbures pour le motif d’intérêt général de la limitation du réchauffement climatique.
Suite au refus du permis exclusif de recherches d’hydrocarbures liquides ou gazeux par le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l’économie et des finances, la société EG Lorraine SAS a obtenu l’annulation de ladite décision par le tribunal administratif de Strasbourg pour excès de pouvoir. L’appel par la ministre de la transition écologique contre ce jugement ayant été rejeté, cette dernière s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’État.
Par une décision rendue le 24 juillet 2024, le Conseil d’État a jugé que l’administration était en droit de refuser la délivrance d’un permis exclusif de recherches d’hydrocarbures pour le motif d’intérêt général de limitation du réchauffement climatique par la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation des énergies fossiles.
Première victoire dans un recours climat asiatique : la loi climat de la Corée du Sud est jugée inconstitutionnelle.
Le 28 août 2024, la Cour constitutionnelle de Corée du Sud a rendu une décision qui déclare inconstitutionnel l’article 8.1 de la loi climat sud-coréenne (« Carbon Neutrality Act ») qui pose une réduction minimale obligatoire des émissions de gaz à effet de serre, estimant que celui-ci viole les droits fondamentaux des demandeurs à l’action.
Affaire environnementale
Accord innovant au Michigan pour la justice environnementale autour des sites de stockage de déchets dangereux.
Un accord a été conclu entre le ministère de l’environnement, des grands lacs et de l’énergie de l’état du Michigan (États-Unis d’Amérique) et des associations environnementales ainsi que des habitants locaux afin de limiter les pratiques discriminatoires en matière d’autorisations d’installations de stockage et de traitement des déchets dangereux. L’accord innove notamment en mettant en place des dispositifs renforcés de traduction pour rendre accessibles les débats publics et documents majeurs des dossiers déposés ainsi qu’en obligeant les entreprises candidates à compléter leur dossier par une analyse de justice environnementale.
Bonus : De l’accord de Paris, ville lumière, à l’accord de Cali, la succursale du Ciel ?
La COP 16 a suscité beaucoup d’intérêt, notamment par le fait que le secteur privé commence à s’intéresser aux questions de protection de la biodiversité. La Colombie devait organiser la COP 16 et après une hésitation entre Bogotá (la capitale) et Cali, il a été décidé que la COP 16 devait se tenir à Cali. Cette décision doit être saluée. Cette décision permet de sortir du centralisme, qui imprègne les institutions en Colombie.
La COP 16 à Cali devait être un moment de renaissance pour la ville après des années de tension. Sur le plan international, la COP 16 avait l’objectif d’une part de transmettre un message de paix, dans une période marquée par des conflits et des guerres dans le monde entier, et d’autre part contribuer à la formulation d’un modèle économique respectueux, en paix avec la nature et qui tienne compte de l’importance de conserver et utiliser durablement les ressources biologiques.
S’agissant du droit international de l’environnement, la COP 16 était très attendue car plusieurs acteurs militaient pour un accord marquant une nouvelle ère dans la protection de la biodiversité à l’échelle mondiale. Finalement, la COP 16 a été marquée par certaines avancées en matière de protection de la biodiversité mais les résultats des négociations sont en deçà des attentes.