Sortie du guide juridique sur la lutte contre l’artificialisation des sols

Mercredi 13 décembre 2023, Notre Affaire à Tous publie le guide juridique sur la lutte contre l’artificialisation des sols, qui réunit les principales conséquences juridiques et contentieuses de l’objectif Zéro Artificialisation Nette consacré par la loi climat et résilience de 2021.

Ce guide permettra aux citoyens et citoyennes et aux juristes de s’approprier les nouveaux outils juridiques mis à disposition pour lutter contre l’artificialisation des sols. Il peut également éclairer les élus sur les nouvelles obligations en aménagement, et sur leurs possibilités d’actions.

Pourquoi un guide sur la lutte contre l’artificialisation des sols ?

Soutenant juridiquement les collectifs locaux dénonçant l’artificialisation des sols gagnant le territoire, Notre Affaire à Tous s’est mobilisée autour de l’objectif Zéro Artificialisation Nette, consacré par la loi climat et résilience. L’artificialisation des sols est en effet l’enjeux sous-jacent de la plupart des luttes locales, le droit de l’environnement ne parvenant pas à mettre justement en balance tous les enjeux qui gravitent autour de l’implantation de projets, et autour de la planification.

L’objectif Zéro Artificialisation Nette (ZAN), fixé à 2050, marque une nouvelle étape dans la lutte contre l’artificialisation des sols portée par les collectifs en lutte contre les projets polluants, qui devra désormais être accompagnée par tous les acteurs territoriaux et nationaux.

Notre Affaire à Tous a suivi tout au long de l’année 2022 et 2023 les débats parlementaires autour du ZAN, et a mené des échanges avec des élus et des associations dans le but de produire une analyse critique de ce dispositif juridique et d’en percevoir les opportunités contentieuses. 

L’association porte depuis sa création l’appropriation du droit par les citoyen.ne.s pour la justice climatique. Ce guide vient enrichir les autres productions de Notre Affaire à tous qui participent à la démocratisation de l’outil juridique : 

Notre Affaire à Tous a souhaité donc concevoir un guide clés en main incluant : 

  • un rappel historique des politiques de sobriété foncières précédant la loi climat et résilience de 2021
  • une analyse critique du dispositif juridique ZAN applicable aujourd’hui
  • un point sur les perspectives contentieuses, en faisant état de certaines recherches jurisprudentielles, et en rappelant les principales règles procédurales permettant de s’organiser dans le but de réaliser une action juridique.

La lutte contre l’artificialisation des sols est une nécessité impérieuse

En France, l’explosion de l’industrialisation durant le XXe siècle a drastiquement favorisé l’étalement urbain et l’artificialisation des espaces naturels, agricoles et forestiers. En 2021, il était estimé que les aires urbaines couvraient alors 22% du sol français, contre 7% en 1936. L’artificialisation des sols poursuit un rythme vertigineux puisqu’elle augmente 4 fois plus vite que la population. L’artificialisation a augmenté en moyenne de 57 600 hectares par an entre 1982 et 2018 (soit de 72% sur cette période), et pourrait augmenter de 288000 hectares supplémentaires (une surface équivalente à celle du Luxembourg) d’ici 2030 si aucune mesure n’est mise en oeuvre pour lutter contre ce phénomène. 

L’artificialisation des sols a des effets négatifs notamment sur : 

  • les fonctions écologiques du sol ; 
  • l’érosion de la biodiversité ; 
  • le dérèglement climatique ; 
  • le cadre de vie ; 
  • la souveraineté alimentaire ; 
  • les questions sociales.

Remettre en cause notre utilisation des sols est donc un enjeu majeur.

De l’incitation à la dissuasion

De la décentralisation jusqu’à la loi climat et résilience, une conscientisation croissante a permis d’accorder une place relative des enjeux environnementaux et climatiques dans l’aménagement et l’urbanisme.

Néanmoins, malgré la mise en place d’outils d’urbanisme et l’existence d’un certain niveau de contrainte pesant sur les acteurs de la lutte contre la consommation d’ENAF, on constate que le recul de ces espaces subsiste, avec une moyenne d’artificialisation des sols équivalent à 24 000 hectares par an en moyenne sur la précédente décennie.

Les politiques de sobriété foncière ont certes permis une conscientisation croissante des territoires, mais les mesures incitatives n’ont pas suffit à enrayer les risques causés par l’artificialisation des sols qui se poursuit.

Analyse critique de l’objectif ZAN

Alors que les ambitions de la Convention Citoyenne pour le Climat ont été fortement réduites lors de la discussion de la loi Climat et Résilience, le dispositif juridique de lutte contre l’artificialisation des sols finalement adopté suscite aujourd’hui des contestations des deux côtés de l’échiquier politique : décrié par les associations pour son manque d’ambition, il est accusé à l’opposé par certains élus d’être déconnecté des enjeux de leurs territoires.

Plusieurs textes ont ensuite été publiés, tentant de trouver l’équilibre entre maintien des objectifs, prise en compte des réticences manifestées, et anticipation de résolution de litiges de gouvernance sur la mise en œuvre du ZAN. 

Perspectives contentieuses

La loi Climat et Résilience offre de nouvelles perspectives de planification et de développement, et avec celles-ci de nouvelles perspectives de contentieux qui devront être mises en œuvre à bon escient pour lutter efficacement contre l’artificialisation des sols.

Envisager un contentieux n’implique pas nécessairement de se mettre dans une posture de défiance, et peut tout à fait correspondre à un projet de plaidoyer, de discussion avec les collectivités et les porteurs de projets. Connaître la loi et faire valoir son droit à s’opposer à un projet apporte de la valeur aux échanges et de la consistance dans les arguments. Le contentieux révèle un échec du dialogue démocratique et environnemental qui doit avoir lieu avant la mise en œuvre d’un projet.