Communiqué de presse, Paris, le 30 janvier 2025 – Le Tribunal Administratif a rendu un premier jugement concernant le recours en justice d’Eau de Paris contre les nouveaux forages pétroliers à Nonville, en Seine-et-Marne [1]. Il reconnaît l’illégalité de certains aspects de l’autorisation de travaux et accorde 10 mois à Bridge Énergies et au préfet de Seine-et-Marne pour régulariser le projet. Cette décision donne donc un répit bienvenu : les travaux sont suspendus. Cependant, selon les associations, le projet n’est pas régularisable. Leur combat continue pour que le juge parvienne à la même conclusion dans 10 mois.
Le Tribunal Administratif de Melun accorde 10 mois de sursis à la société Bridge Énergies et au préfet de Seine et Marne pour régulariser le projet de nouveaux forages pétroliers à Nonville sur deux points :
- l’étude de l’impact du projet sur l’environnement, basée sur des inventaires datant de plus de dix ans, et jugée très insuffisante,
- le montant des garanties financières, nécessaires par exemple en cas d’accident, qui n’a pas été fixé dans l’arrêté préfectoral.
Par ailleurs, le tribunal a obligé la société Bridge Energies à imperméabiliser le fossé périphérique de sa concession afin de mieux contenir les eaux de pluies polluées, reconnaissant ainsi les risques inhérents à l’exploitation de pétrole dans cet environnement fragile.
Face à ce jugement offrant un répit avant le début des travaux – qui auraient autrement commencé en mai – les associations intervenantes volontaires dans le recours en justice d’Eau de Paris [2] sont soulagées.
Cependant, le jugement écarte de façon très sommaire de nombreux arguments juridiques soulevés par les requérants.
Louis Cofflard, avocat représentant Les Amis de la Terre France, France Nature Environnement Ile-de-France, France Nature Environnement Seine-et-Marne, le Réseau Action Climat et Reclaim Finance déclare : “Ce jugement permet de contredire les affirmations du Ministre et de Bridge Énergies en reconnaissant l’illégalité, en l’état, de l’autorisation très controversée de créer les deux nouveaux puits de forage. Il ne permet pas en revanche de trancher tous les points du contentieux, loin s’en faut, et en particulier s’agissant de l’application de la réforme des titres miniers, et du nouveau Plan Local d’urbanisme de Nonville qui n’a pas entendu permettre l’installation de ces nouveaux puits de forage.”
Les associations regrettent également que le Tribunal ait balayé les arguments climatiques contre ces forages.
Marine Yzquierdo, avocate représentant l’association Notre Affaire à Tous, déclare : “La décision du tribunal sur le volet climatique paraît anachronique. Les décisions rendues au Royaume-Uni [3] nous le rappellent : l’impact sur le climat des projets de forages pétroliers doit être pris en compte. Alors que nous battons des records de température mondiale depuis des années, il existe un consensus scientifique clair : tout nouveau forage pétrolier est incompatible avec une limitation du réchauffement climatique à 1,5°C.”
Dans l’attente de la suite de la procédure judiciaire, les associations continueront à se mobiliser pour faire annuler ce projet.
Alors qu’au niveau international, tous les voyants climatiques sont au rouge depuis l’élection de Donald Trump, dix ans après la COP21, la France doit être exemplaire, en refusant d’exploiter de nouveaux gisements fossiles.
contacts presse
- Juliette Renaud, coordinatrice des Amis de la Terre France : juliette.renaud@amisdelaterre.org
- Adeline Paradeise, juriste de Notre Affaire à Tous : adeline.paradeise@notreaffaireatous.org
- Jean-François Dupont, FNE Seine-et-Marne : fne77@orange.fr
- Maxime Colin, Juriste à FNE Ile-de-France : maxime.colin@fne-idf.fr
Notes
[1] Il y a un an, la préfecture de Seine-et-Marne autorisait l’entreprise pétrolière Bridge Énergies à forer deux nouveaux puits de pétrole à Nonville, en Seine-et-Marne. Les risques de pollution de sources d’eau stratégiques pour l’alimentation de Paris et des territoires avoisinants en eau potable ont alerté la régie Eau de Paris, qui a saisi le Tribunal administratif de Melun pour faire annuler l’arrêté préfectoral autorisant les travaux miniers. Le recours d’Eau de Paris souligne les graves insuffisances de l’étude d’impact environnemental, notamment sur la ressource en eau et la biodiversité.
[2] En octobre dernier, six associations (Les Amis de la Terre France, FNE Ile-de-France, FNE Seine-et-Marne, Notre Affaire à Tous, le Réseau Action Climat et Reclaim Finance) sont intervenues pour soutenir le recours en justice d’Eau de Paris via des arguments complémentaires. Ces associations pointent notamment la non compatibilité de ces forages avec le respect des engagements de la France à sortir des énergies fossiles.
[3] Il s’agit de la décision de la décision du 29 janvier 2025 de la Court of Session d’Edimbourg et de la décision du 20 juin 2024 de la Cour suprême du Royaume-Uni. Sur la première, voir notamment l’article du Monde de ce jour : https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/01/30/au-royaume-uni-la-justice-annule-l-autorisation-de-deux-champs-petrolier-et-gazier-en-mer-du-nord_6523365_3244.html