A l’heure où se clôturent les débats sur le projet de Loi « Climat et résilience » en commission à l’Assemblée Nationale, Terre de Liens, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne et Notre Affaire à Tous dénoncent une coquille vide sur le front de la lutte contre l’artificialisation des sols, responsable de la disparition des terres agricoles et de l’effondrement de la biodiversité. Dérogations laissées ouvertes pour les surfaces commerciales inférieures à 10 000 m2, laisser-aller sur le développement des plateformes logistiques, notamment de e-commerce, absence de fiscalité contraignante : aucun des sujets clés permettant un recul net de l’artificialisation des terres agricoles n’est inscrit dans le projet de Loi.

Loi Climat & résilience : le règne de la « bonne volonté »

Une déclaration solennelle pétrie de bonnes intentions, c’est aujourd’hui le chemin que prend le projet de loi Climat & Résilience porté par le Gouvernement.

« Deux ans après l’inscription de l’objectif « zéro artificialisation nette » dans le Plan Biodiversité, qui n’est concrètement pas appliqué sur le terrain, avec cette nouvelle Loi il faudra encore attendre pour des mesures contraignantes. » s’indigne Astrid Bouchedor, chargée de plaidoyer de Terre de liens. « Pour lutter contre l’artificialisation, le projet de loi se focalise sur le renforcement des documents d’urbanisme, une approche qui s’est montrée inefficace ces 30 dernières années. » poursuit-elle.

Car si les objectifs de réduction par 2 du rythme de l’artificialisation d’ici 2031, fixés par le projet de loi sont louables, les exceptions réglementaires, qui sont à l’origine d’une grande part de l’artificialisation en France, auront toujours la part belle. Ainsi, le moratoire sur l’urbanisme commercial n’intègre toujours pas les plateformes logistiques responsables d’une partie de l’artificialisation des terres agricoles.

Il exclut notamment les entrepôts de e-commerce, créant de fait un déséquilibre réglementaire majeur pour ce secteur alors qu’il a déjà détruit plus de 81 000 emplois nets dans le commerce physique” précise Alma Dufour, chargée de campagne aux Amis de la Terre. De même, la possibilité de dérogation ouverte aux surfaces commerciales inférieures à 10 000 m2, qui recouvrent 80 % des projets d’urbanisme commercial, rend la mesure très limitée.

Au-delà des exceptions, la notion d’artificialisation « nette » inscrite dans loi implique une compensation qui est aujourd’hui dévoyée de son principe en se focalisant sur un dédommagement financier.

Enfin, certaines thématiques pourtant centrales comme la création d’une fiscalité dissuasive ou la lutte contre la vacance des logements ne sont pas abordées dans le projet de loi.

Des constats alarmants : tous les 6 ans, l’équivalent des terres agricoles d’un département français artificialisé

Au rythme où se poursuit l’artificialisation des terres en France et à l’heure où la crise sanitaire a rappelé l’importance de la sécurité de l’approvisionnement alimentaire, il est pourtant capital d’agir.

En France, 50 à 60 000 ha sont artificialisés chaque année, soit l’équivalent des terres agricoles d’un département tous les 6 ans. L’artificialisation concerne majoritairement de terres agricoles riches, souvent en zones péri-urbaines ou littorales. Un changement de destination au profit de l’habitat, de zones industrielles et commerciales aux conséquences irréversibles. En cause : la logique de spéculation immobilière et le manque de rentrées fiscales de nombreuses collectivités, les rendant promptes à accepter n’importe quel projet sur leur territoire.

L’artificialisation est aussi responsable d’émissions significatives de gaz à effet de serre et l’une des causes les plus importantes de l’effondrement de la biodiversité en France.

Terre de Liens, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne et Notre Affaire à Tous appellent aujourd’hui les député.e.s qui travaillent sur le texte de Loi à :

  • Introduire des mesures fiscales dissuasives telles que : l’augmentation de la taxe sur les plus-values des terrains devenus constructibles ; la création d’une taxe d’artificialisation qui renchérirait l’aménagement des terres nues au prix de la réhabilitation des friches urbaines.
  • Modifier le moratoire sur l’urbanisme commercial en : incluant la construction des plateformes logistiques, notamment à destination du commerce en ligne ; réduisant les possibilités de dérogation à 2 000 m2 ; et en ajoutant un volet de lutte contre la vacance de logements.

Alors que le Gouvernement est aujourd’hui plus que jamais scruté pour son engagement pour le climat, la lutte contre l’artificialisation des sols et pour un meilleur partage des terres est un enjeu capital dont les politiques doivent se saisir d’urgence tant les conséquences sur la biodiversité et la disparition des terres agricoles sont irréversibles.

Contacts presse :

Nathalie Blin : n.blin@terredeliens.org, 06 77 96 26 56

Alma Dufour, alma.dufour@amisdelaterre.org, 06 67 92 36 89

Chloé Gerbier, gerbierchloe@gmail.com06 46 43 55 09