Lancé il y a plus de deux ans le recours en justice contre l’inaction climatique de l’État porté par Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France et Oxfam France, arrive enfin à son dénouement : son audience au tribunal administratif de Paris aura lieu aujourd’hui à 13h45. Le jugement devrait ensuite être rendu sous quinzaine.

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Nous sommes 2,3 millions » : c’est le message inscrit ce matin sur une affiche géante de 3m sur 30m posée sur la voie Georges Pompidou, à deux pas du tribunal administratif de Paris, par des citoyen·ne·s soutenant l’Affaire du Siècle. Une action symbolique qui vise à rappeler à l’État qu’il fait face aujourd’hui aux 2,3 millions de signataires de la pétition en soutien au recours (pétition en ligne la plus signée de l’histoire en France).

Alors que la crise climatique reste au plus haut des préoccupations des Français·es1 même avec la crise sanitaire, et que de nouveaux records de chaleur ont été battus en 2020, l’État ne cesse de repousser le passage à l’action. Les émissions de gaz à effet de serre pendant ce quinquennat ont continué de baisser deux fois trop lentement par rapport aux trajectoires prévues dans la loi. Le Haut conseil pour le climat analysait en décembre dernier que deux tiers du plan de relance n’allait pas dans le bon sens et risquait de contribuer à la hausse des émissions. Enfin, le projet de loi sur le climat faisant suite à la Convention Citoyenne, rabote ou supprime de nombreuses propositions de la Convention, si bien qu’il ne permettra pas d’atteindre l’objectif d’au moins 40% de baisse des émissions à 2030 par rapport à 1990 – et donc encore moins le nouvel objectif européen d’au moins 55% de réduction en 2030.

Une étape décisive pour la justice climatique

Qu’est-ce qui se joue à cette audience ? Le rapporteur public présentera ses conclusions sur le dossier juridique de l’Affaire du Siècle, c’est-à-dire la décision qu’il recommande au tribunal de prendre. Les avocat·e·s des 4 organisations requérantes rappelleront ensuite les obligations climatiques de l’État et les manquements à ses engagements. L’État pourra à son tour s’exprimer. Le Tribunal enverra ensuite l’affaire en délibéré et pourrait annoncer la date à laquelle il rendra sa décision, généralement sous quinze jours.

Que peut obtenir l’Affaire du Siècle ?

Les organisations de l’Affaire du Siècle sont optimistes sur le fait que le tribunal reconnaisse l’inaction climatique de l’État, c’est-à-dire la « carence fautive » que constitue le non-respect par l’État des objectifs de réduction de gaz à effet de serre inscrits dans de multiples textes de loi. Les magistrats pourraient également contraindre l’État à prendre les mesures nécessaires pour atteindre ses engagements à l’horizon 2030 et 2050.

Enfin, nous espérons que la justice reconnaisse l’obligation générale faite à l’État de lutter contre les changements climatiques, qui découle notamment de la Charte de l’Environnement de 2004, de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Une telle décision serait historique et inscrirait dans le droit que la lutte contre les changements climatiques est indispensable à la protection des droits fondamentaux.

Le levier juridique joue désormais un rôle essentiel face à la crise climatique : le 19 novembre dernier, dans le cadre du dossier de Grande-Synthe2, le Conseil d’État a affirmé le caractère contraignant des objectifs climatiques inscrits dans la loi (ce qui n’était jusqu’alors pas le cas), et a donné trois mois au gouvernement pour justifier qu’il mettait bien en place toutes les mesures nécessaires pour respecter ses engagements3. Aux Pays-Bas, en décembre 2019, la Cour Suprême a confirmé l’obligation faite à l’État de réduire ses émissions de 25% par rapport aux niveaux de 1990. Le tribunal administratif de Paris pourrait ainsi s’inscrire dans la continuité de cette dynamique, et rajouter une pierre à l’édifice en ordonnant à la France d’agir dès à présent.

Notes

  1. Les Français face au changement climatique, sondage Kantar pour Oxfam France, décembre 2020.
  2. L’Affaire du Siècle est intervenante volontaire dans le dossier.
  3. Émissions de gaz à effet de serre : le Gouvernement doit justifier sous 3 mois que la trajectoire de réduction à horizon 2030 pourra être respectée, communiqué

Contacts presse

Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo, 06 86 41 71 81 – cecilia@notreaffaireatous.org
Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente, 07 87 50 74 90 – p.torrente@fnh.org
Greenpeace France : Kim Dallet, 06 33 58 39 46 – kim.dallet@greenpeace.org
Oxfam France : Marion Cosperec, 07 68 30 06 17 – mcosperec@oxfamfrance.org