Communiqué de presse – 3 février 2020
Dans son jugement sur l’Affaire du Siècle, prononcé le 3 février 2021, le tribunal administratif de Paris reconnaît la responsabilité de l’État français dans la crise climatique et juge illégal le non-respect de ses engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L’État est également reconnu responsable de “préjudice écologique”. Les ONG requérantes dans l’Affaire du Siècle se félicitent de cette première victoire et espèrent un jugement plus historique encore au printemps : l’Etat pourrait être condamné à prendre des mesures supplémentaires sur le climat.
Pour les organisations de l’Affaire du Siècle : “Plus de deux ans après le début de notre action, soutenue par 2,3 millions de personnes, cette décision marque une première victoire historique pour le climat et une avancée majeure du droit français. Ce jugement marque aussi une victoire de la vérité : jusqu’ici, l’État niait l’insuffisance de ses politiques climatiques, en dépit de l’accumulation de preuves (dépassement systématique des plafonds carbone, rapports du Haut Conseil pour le Climat, etc.). Alors que le nouveau projet de loi Climat de ce gouvernement est, de son propre aveu, insuffisant pour atteindre les objectifs fixés [1], nous espérons que la justice ne se limitera pas à reconnaître la faute de l’État, mais le contraindra aussi à prendre enfin des mesures concrètes permettant a minima de respecter ses engagements climatiques.”
Pour la première fois, l’État français reconnu fautif en matière de lutte contre les changements climatiques
La justice a tranché : l’État français commet une faute en n’adoptant pas les mesures suffisantes pour lutter contre les changements climatiques et réduire les émissions de gaz à effet de serre, conformément aux objectifs qu’il s’est lui-même fixés. C’est la première fois que la justice reconnaît que la France est responsable d’inaction climatique.
Avec cette reconnaissance de la faute de l’État, toutes les victimes directes des changements climatiques en France pourront désormais se tourner vers la justice et s’appuyer sur ce jugement pour demander réparation des préjudices qu’elles subissent. L’État va enfin devoir assumer les conséquences de décennies d’inaction sur le climat.
L’inaction climatique de l’État porte atteinte à l’environnement
Le Tribunal a également reconnu le préjudice écologique, c’est-à-dire les dommages causés à l’environnement, par le dépassement par la France de ses plafonds annuels d’émissions de gaz à effet de serre. C’est une première en droit français : avec cette décision, le tribunal administratif estime qu’une personne publique, au même titre qu’une personne privée, peut être tenue responsable d’un dommage causé à l’environnement.
L’État bientôt contraint par la justice à réparer les conséquences de son inaction ?
Une nouvelle décision du Tribunal au printemps [2] pourrait condamner l’État à prendre des mesures supplémentaires pour lutter concrètement et efficacement contre la crise climatique. La reconnaissance de la faute que constitue son inaction climatique était une condition indispensable pour contraindre l’État à agir. Cette première étape historique désormais franchie, la justice doit maintenant statuer sur la façon dont l’État doit s’y prendre pour mettre fin à ses actions illégales, et, au-delà, réparer les dommages causés par les gaz à effet de serre émis en trop, par rapport à ses objectifs.
Notes aux rédactions
Le Tribunal a également reconnu le préjudice moral causé par l’inaction de l’Etat aux quatre organisations co-requérantes (Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France et Oxfam France).
1. Une étude d’impact réalisée par le gouvernement lui-même montre que la loi ne permettra de n’atteindre que la moitié, voire les deux tiers des objectifs
2. Le Tribunal a rouvert l’instruction pour deux mois afin de permettre à l’Etat et aux ONG d’échanger de nouveaux arguments sur la réparation du préjudice écologique
Cette seconde décision pourrait intervenir après le jugement du Conseil d’État attendu dans le dossier porté par la commune de Grande-Synthe et soutenu par l’Affaire du Siècle, dans lequel il est demandé à l’État de prouver qu’il pourra se conformer à ses objectifs climat à l’horizon 2030 [3]. En l’absence de preuves satisfaisantes apportées par l’État, le Conseil d’État pourrait le condamner à prendre des mesures supplémentaires.
3. La décision du Conseil d’État du 19 novembre 2020 dans le dossier Grande-Synthe