BRUXELLES, 25 mai 2022 – L’avocate ukrainienne spécialisée dans l’environnement Svitlana Romanko, soutenue par le Global Legal Action Network (GLAN) et plusieurs organisations du mouvement climat, a déposé aujourd’hui une plainte alléguant que les mesures proposées par la Commission européenne pour mettre fin à l’importation des combustibles fossiles russes sont insuffisantes et constituent une violation du droit européen et des obligations en matière de droits humains.

Les plaignants affirment que les importations continues de pétrole et de gaz russes par l’UE financent la guerre de la Russie en Ukraine, et que la Commission européenne ne prend pas en compte toutes les mesures disponibles pour mettre fin aux importations le plus rapidement possible.

S. Romanko, co-fondatrice de la campagne Stand With Ukraine, a déposé la plainte auprès de la Médiatrice européenne Emily O’Reilly (Ombudsman), chargée d’enquêter sur les plaintes pour mauvaise administration contre les institutions et organes de l’UE. Le Global Legal Action Network (GLAN), le groupe de campagne Avaaz, l’association française Notre Affaire à Tous, et l’ONG environnementale allemande Deutsche Umwelthilfe sont également co-plaignants.

L’UE a jusqu’à présent proposé d’éliminer progressivement le pétrole russe d’ici à la fin de 2022 et de construire de nouveaux terminaux d’importation de GNL pour remplacer le gaz russe. Le plan REPowerEU publié par la Commission la semaine dernière contient quelques mesures positives visant à réduire la dépendance à l’égard de la Russie et à accélérer la transition vers une énergie propre, mais les plaignants estiment qu’il ne va pas assez loin. 

La plainte s’appuie sur des études identifiant les mesures immédiates que l’UE pourrait prendre pour réduire la demande de pétrole et de gaz dans les transports et les bâtiments, et énonce que les plans actuels de la Commission alimenteraient de nouvelles menaces pour les droits humains liées au changement climatique.

Les plaignants demandent à la Médiatrice de recommander à la Commission européenne d’évaluer l’impact de ses importations russes sur les violations des droits humains commises par la Russie en Ukraine, de réduire le plus rapidement possible ces simportations et d’identifier la mise en œuvre la plus respectueuse possible au niveau climatique. En 2019, les institutions de l’UE se sont conformées aux avis de la Médiatrice dans 79 % des cas.

Svitlana Romanko, avocate spécialiste de l’environnement et cofondatrice de Stand With Ukraine, a déclaré : « L’UE dit être solidaire de l’Ukraine, pourtant les milliards d’euros que les membres de l’UE continuent de payer pour les combustibles fossiles russes financent directement la machine de guerre de Poutine et ses crimes de guerre scandaleux, tout en aggravant la crise climatique. Il est temps pour la Commission européenne d’évaluer les véritables impacts de ses actions et de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à ses importations de combustibles fossiles russes – immédiatement. » 

Les exportations de pétrole et de gaz de la Russie ont représenté 45 % de son budget fédéral en 2021, selon l’Agence internationale de l’énergie. L’UE est son plus gros client, payant plus de 50 milliards d’euros pour les importations d’énergie russe depuis que la Russie a envahi l’Ukraine, selon le Center for Research on Energy and Clean Air. Dans le même temps, l’UE n’a envoyé qu’un milliard d’euros d’aide étrangère à l’Ukraine.

Gerry Liston, responsable juridique du Global Legal Action Network, a déclaré : « L’UE ne peut pas chercher à limiter sa contribution à la crise ukrainienne en aggravant sa contribution à la crise climatique. Afin de remplacer l’approvisionnement en gaz russe par des sources provenant d’ailleurs, l’UE propose de construire de nouvelles infrastructures de combustibles fossiles. C’est précisément ce que le Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres, a récemment qualifié de « folie morale et économique » en s’appuyant sur les dernières données scientifiques du GIEC. »

Paul Mougeolle, membre de l’ONG environnementale française Notre Affaire à Tous :
« La stratégie actuelle de l’UE visant à réduire progressivement la dépendance n’est pas adéquate : la lenteur des réductions des importations de combustibles fossiles russes fait grimper les prix mondiaux des combustibles fossiles, ce qui signifie finalement plus d’argent pour la Russie. La Commission européenne doit proposer des mesures plus drastiques pour arrêter de financer le Kremlin, faire face à la crise climatique et s’assurer que personne n’est laissé pour compte en Europe, car la hausse des prix touchera durement les consommateurs les plus vulnérables. »

Citations complémentaires

Oleh Savytskyi, expert en politique climatique et énergétique du Ukrainian Climate Network

« L’UE fait trop peu et trop tard pour réduire les approvisionnements en combustibles fossiles russes, qui sont le nerf de la guerre. La plupart des discussions portent sur le remplacement du gaz russe par des approvisionnements en GNL et sur la recherche d’autres fournisseurs de pétrole, tandis que les solutions pour un changement économique structurel, qui n’ont que trop tardé face à l’urgence climatique, sont largement absentes du débat. Nous appelons la Commission européenne et les gouvernements nationaux à respecter leurs engagements en matière d’action climatique et à éliminer progressivement les combustibles fossiles, en commençant par les approvisionnements russes. »

Nataliia Lytvyn, coordinatrice de la Energy Transition coalition of Ukrainian NGOs, municipalities and citizens, et coordinatrice de projet de l’ONG ukrainienne Ecoclub : « Les finances provenant du pétrole, du gaz et du charbon russes sont utilisées par Poutine pour fournir des armes à ses forces militaires qui ont déjà tué des milliers d’Ukrainiens. En tant que coalition pour la Transition Énergétique, nous avons appelé à plusieurs reprises les pays à interdire l’importation de tous les combustibles fossiles russes. L’État agresseur peut être arrêté, et il faut le faire maintenant. »

Sascha Müller-Kraenner, PDG de Deutsche Umwelthilfe : « Se contenter de remplacer le pétrole et le gaz russes à l’identique par d’autres fournisseurs ne résoudra rien. Alors que nous devons nous débarrasser des importations d’énergie russe dès que possible, la construction de terminaux de GNL ne fera qu’alimenter les crises climatiques et créer de nouvelles dépendances. L’UE doit trouver de meilleures réponses que cela. C’est pourquoi nous avons besoin d’une évaluation complète de toutes les mesures disponibles. »

Dominika Lasota, Fridays for Future Pologne : « L’Union européenne doit prendre conscience que tant que l’argent est envoyé de ses États membres à Poutine, elle est responsable du soutien de la machine de guerre russe. Si nous voulons être une communauté qui garantit la protection des droits humains, se libérer des autocrates et des combustibles fossiles doit être une priorité absolue. »

Co-plaignants : Stand With Ukraine, Global Legal Action Network, Avaaz, Notre affaire à tous et Deutsche Umwelthilfe.

Soutiens de la plainte : Environment – People – Law, Energy Transition Coalition, Ecoclub, Ecoaction, Ekoltava, ForestCom, Coalition of NGOs Enough Poisoning Kryvyi Rih, Extinction Rebellion Ukraine

Contacts presse :

Notre Affaire à Tous Justine Ripoll, responsable de campagnes & Paul Mougeolle, coordinateur juridique :
justine.ripoll@notreaffaireatous.org – 06 42 21 37 36

Gerry Liston, legal officer at the Global Legal Action Network, gliston@glanlaw.org

Svitlana Romanko, environmental lawyer and co-founder of Stand With Ukraine, svitlana.romanko@gmail.com