
Communiqué de presse, Notre Affaire à Tous, Paris, 4 décembre 2025 – À l’issue d’une COP30 jugée insuffisante sur le partage équitable de l’effort climatique, Notre Affaire à Tous saisit la justice et dévoile un nouveau recours contre l’État français : le “Procès pour la Part Juste”. L’association demande à la justice de reconnaître que la France accuse un retard persistant dans la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, et ne respecte pas sa contribution équitable à la lutte contre le changement climatique, au regard de son impact réel, bien au-delà de ses seules émissions territoriales.
Dans la continuité de l’Affaire du Siècle et du recours Grande-Synthe, deux décisions judiciaires ayant reconnu la carence de l’État français face à l’urgence climatique, ce nouveau Procès pour la Part Juste marque une nouvelle étape.
Porté par des fondements juridiques renforcés, notamment la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) des “Aînées suisses pour le Climat” d’avril 2024 et l’avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ) de juillet 2025, et par les nouveaux objectifs climatiques de l’Union européenne (paquet Fit for 55), ce recours entend établir les obligations de la France au regard de son impact réel dans la crise climatique.Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous, “Ce recours porte devant la justice une question jusque-là essentiellement débattue dans les espaces politiques et diplomatiques : le principe d’équité, qui impose à chaque pays d’assumer sa part juste dans l’effort climatique mondial. C’est une obligation légale à laquelle la France est soumise, comme l’a rappelé la Cour internationale de justice, et nous en demandons l’application devant le Conseil d’Etat.”
Un retard grandissant dans l’action climatique de la France
Malgré des obligations juridiques en la matière, la France n’est toujours pas à la hauteur pour atteindre ses objectifs climatiques, notamment celui de neutralité carbone en 2050.
Alors que l’Union européenne a relevé son ambition climatique en 2021 via le paquet Fit for 55, fixant une réduction des émissions de -55% d’ici 2030 (contre -40% auparavant), la France continue de prendre du retard.
En 2024, les émissions françaises de gaz à effet de serre ont ainsi diminué de seulement 1,8%, alors que l’objectif est fixé à environ 5% par an. Les premières estimations pour 2025 font état d’un ralentissement encore plus inquiétant, avec une baisse prévue pour l’heure à seulement 0,8% (1). Les dernières annonces politiques et budgétaires sont loin d’être rassurantes et entérinent encore davantage le manque d’ambition de la France : réduction du périmètre de MaPrimeRénov, baisse du Fonds Vert, etc. Ce ralentissement se couple à une fragilisation de plus en plus forte des puits de carbone, rendant d’autant plus incertaine l’atteinte de la neutralité carbone (2).
Le recours montre ainsi que la trajectoire de la France est incompatible avec l’objectif de limiter le réchauffement à 1,5°C, pourtant jugé essentiel par la CEDH (3) et la CIJ (4) pour protéger les droits fondamentaux.
L’effort climatique doit être équitable
L’effort climatique ne peut pas être réparti de manière strictement égale entre les pays. Les États qui ont historiquement le plus contribué au réchauffement et qui disposent des moyens économiques les plus importants doivent réduire leurs émissions plus vite et plus fortement que les autres. C’est le principe des “responsabilités communes mais différenciées” de la diplomatie climatique, précisé par l’avis récent de la CIJ et par la décision des “Aînées suisses pour le Climat” de la CEDH. Cette dernière établit l’obligation des États à adopter une trajectoire de réduction équitable, intégrant leurs émissions historiques et leur niveau de développement économique.
“Responsabilités communes mais différenciées” : reconnaître le véritable impact de la France
Ce nouveau contentieux diffère des précédents recours climatiques, qui portaient essentiellement sur les émissions territoriales récentes. Il intègre ainsi l’équité entre les pays pour déterminer la responsabilité réelle de la France. Sur la base de travaux scientifiques, le Procès pour la Part Juste prend ainsi en compte :
- les émissions historiques (depuis 1990 pour ce recours),
- les émissions importées,
- les émissions nettes (et non brutes),
- le niveau de développement économique de la France.
Il apparaît de cette analyse que la France est très en deçà de sa contribution équitable à la lutte contre le changement climatique. La France a ainsi déjà consommé la quasi-totalité de sa « part juste » du budget carbone mondial compatible avec l’objectif de 1,5°C.
La France a l’obligation et la capacité de faire baisser les émissions mondiales
Cette situation n’est pas une fatalité. La France peut adopter des objectifs plus ambitieux et se donner les moyens de les atteindre : selon le Haut Conseil pour le Climat, “le renforcement des politiques publiques existantes permettrait de relancer la dynamique de baisse des émissions” (5).
Outre la réduction accélérée de ses émissions territoriales, qui doit être faite de façon juste, la France peut :
- réduire ses émissions importées ;
- réglementer les entreprises françaises, y compris les multinationales ;
- contribuer de manière ambitieuse aux financements internationaux et à la transition juste à l’étranger via des dons.
L’équité dans la lutte contre le changement climatique a marqué l’année 2025 : avis consultatifs de la CIJ et de la Cour interaméricaine des droits de l’homme sur les obligations climatiques des Etats, COP30 à Belém, 10 ans de l’Accord de Paris. Ce procès place désormais la France face à la justice : elle doit agir de manière plus conséquente et équitable pour respecter ses obligations climatiques.

Conférence de presse de Notre Affaire à Tous – annonce du Procès pour la Part Juste à l’Académie du Climat
Notes
(1) Baromètre du CITEPA
(2) Haut Conseil pour le Climat, Rapport Annuel 2025, p.5
(3) Décision de la CEDH, Affaire Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, 09/04/2024
(4) Avis consultatif de la CIJ sur les Obligations des États en matière de changement climatique, 23/07/2025
(5) Haut Conseil pour le Climat, rapport annuel 2025, p.19
Contact presse
Marine Coynel, Chargée de communication chez Notre Affaire à Tous : marine.coynel@notreaffaireatous.org
