Catégorie : Multinationales

  • Parlement européen : en pleine COP 30, droite et extrême droite s’allient pour sacrifier le climat et les droits humains 

    Parlement européen : en pleine COP 30, droite et extrême droite s’allient pour sacrifier le climat et les droits humains 

    Communiqué de presse, Paris, le 13 novembre 2025 – Par une alliance inédite de la droite et de tous les groupes d’extrême droite, le Parlement européen a adopté ce jour sa position concernant l’« Omnibus I », un texte de dérégulation revenant de manière brutale sur des avancées pourtant cruciales pour la protection des droits humains, de l’environnement et du climat. Sous la pression intense des lobbies et de puissances étrangères (Etats-Unis, Qatar), ce vote porte un coup très dur au devoir de vigilance européen (CSDDD) qui oblige les entreprises à prévenir et réparer leurs atteintes aux droits humains et à l’environnement.

    Loin des caméras tournées vers la COP 30 à Belém, le Parlement européen a adopté aujourd’hui sa position sur la directive Omnibus I. Cette proposition de la Commission européenne, taillée sur mesure pour les lobbies industriels et jugée potentiellement illégale par une centaine de professionnels du droit européen, remet brutalement en cause certaines règles obligeant les entreprises à prévenir et réparer les atteintes qu’elles causent au climat, à l’environnement et aux droits humains.

    Dans une alliance inédite qui marque un tournant dans l’histoire du Parlement européen, la droite et l’extrême droite ont démantelé la CSDDD en affaiblissant les positions déjà inquiétantes de la Commission européenne et du Conseil de l’Union européenne. Les Républicains de François-Xavier Bellamy ont donc voté avec le Rassemblement National de Jordan Bardella, le parti Reconquête de Sarah Knafo et le parti Identité Libertés de Marion Maréchal Le Pen.

    Feignant de « simplifier » la vie des entreprises pour améliorer leur « compétitivité », la position du Parlement européen propose ainsi de revenir sur :

    • Les seuils d’application. Le Parlement propose de restreindre de manière significative le champ d’application du devoir de vigilance européen, en le limitant aux entreprises de plus de 5 000 salariés et de 1,5 milliards de chiffre d’affaires pour les entreprises européennes.
    • La responsabilité civile. Le Parlement européen accepte la proposition de la Commission européenne de renoncer à la création d’un régime européen de responsabilité civile.
    • Les plans de transition climatique. En pleine COP 30, les député.e.s ont voté pour intégralement supprimer l’obligation pour les multinationales d’adopter et de mettre en œuvre des mesures de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre, pourtant indispensables pour atteindre l’objectif de l’accord de Paris. 
    • Harmonisation maximale. Le Parlement propose de limiter la possibilité laissée aux Etats membres de proposer des dispositions plus protectrices dans leur législation nationale. 
    • Quant à la directive sur le reporting en matière de durabilité (CSRD), également concernée par l’Omnibus I, le Parlement propose d’augmenter le seuil d’application à 1750 salariés et 450M€ de chiffre d’affaires (contre 1000 salariés et 50M€ de chiffre d’affaires dans la proposition de la Commission).

    Ces reculs sont le résultat d’une soumission historique des eurodéputé·es à :

    • Un chantage politique délétère. Ce résultat fait suite à des mois de chantage politique qui ont vu la droite européenne (PPE) menacer de s’allier avec l’extrême droite européenne pour obtenir un texte aussi faible que possible. Aujourd’hui, pour la première fois, la droite européenne (PPE) et l’extrême droite ont ouvertement agi de concert pour vider la CSDDD de sa substance : l’intégralité des amendements déposés conjointement par la droite et l’extrême droite et soumis au vote ont été adoptés.
    • Une pression incessante des puissances étrangères. La position adoptée par le Parlement européen constitue un nouvel exemple du renoncement actuel de l’Union européenne face aux pressions extérieures. Alors qu’elle peut imposer ses règles à toutes les entreprises actives en Europe, les député.e.s ont fait le choix de la compromission, cédant à la pression diplomatique du Qatar et des Etats-Unis.
    • Des demandes de lobbies omniprésents. Les multinationales – pétro-gazières notamment – ont fortement poussé pour affaiblir la CSDDD, s’attaquant frontalement au volet climatique du texte. Le secteur privé, et notamment le patronat français et allemands avaient eux aussi fait pression sur les parlementaires en appelant à une abrogation pure et simple du texte.

    Pourtant, nombre d’acteurs (société civile, syndicats, professeurs de droits et avocats, économistes, Banque centrale européenne…) ont alerté sur le caractère délétère de cette initiative visant à démanteler les normes européennes en matière environnementale, sanitaire et sociale. La médiatrice de l’Union européenne a d’ailleurs ouvert une enquête suite à ces alertes, et une contestation de ce processus législatif devant les tribunaux se profile.

    Nos organisations dénoncent fermement cette capitulation du Parlement européen face à certains intérêts privés et étrangers. En remettant en cause les protections durement acquises pour les travailleurs et travailleuses, les droits humains et l’environnement, les parlementaires européens trahissent les valeurs de l’Union européenne et ajoutent à l’instabilité législative et à la crise démocratique en cours.

    Alors que le Conseil de l’Union européenne a déjà adopté sa position de négociation sur l’Omnibus I, ce vote du Parlement ouvre la voie à des négociations entre institutions européennes pour s’accorder sur une version définitive du texte et entériner ces reculs historiques.

    Face à ce rapprochement historique de la droite et de l’extrême droite pour affaiblir la protection du climat et des droits humains, les États Membres, dont la France, doivent défendre l’intérêt général et le devoir de vigilance dans le cadre du trilogue à venir.

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    Notre Affaire à Tous : justine.ripoll@notreaffaireatous.org

  • La Cour Internationale de Justice prend ses responsabilités et rappelle très clairement à tous les Etats du monde leurs obligations en matière climatique

    La Cour Internationale de Justice prend ses responsabilités et rappelle très clairement à tous les Etats du monde leurs obligations en matière climatique

    Réactive presse La Cour internationale de Justice (CIJ) vient de rendre son avis consultatif très attendu concernant les obligations juridiques des États en matière de changement climatique. Saisie par l’Assemblée générale des Nations Unies, suite à la mobilisation de pays insulaires particulièrement impactés et de jeunes, la Cour devait répondre à deux questions suivantes : quelles sont les obligations des États, en vertu du droit international, face à la crise climatique ? Quelles sont les conséquences juridiques en cas de manquement ?

    A l’unanimité, la Cour confirme des standards d’obligations élevés pour tous les Etats de faire leur part dans la lutte contre le changement climatique et que ces obligations doivent être guidées par des valeurs de justice et d’équité, notamment en prenant en compte les responsabilités et capacités différenciées des Etats. Elle appelle également les Etats à réguler les acteurs privés très émetteurs. 

    Les principaux éléments de l’avis rendu sont : 

    • 1.5°C. La Cour constate que les conséquences graves et profondes du changement climatique impactent les écosystèmes et les êtres humains. Au vu de la menace urgente et existentielle que fait peser la crise climatique, chaque degré compte et l’objectif de maintenir le réchauffement climatique à 1.5°C fait consensus. 
    • Des obligations plus larges que celles de l’Accord de Paris. Les obligations des Etats ne se limitent pas aux engagements de l’Accord de Paris ou autres traités spécifiques au changement climatique, mais découlent de très nombreux traités internationaux et du droit international coutumier. 
    • Tous les pays du monde sont concernés. Les Etats qui ne sont pas parties aux conventions tels que l’Accord de Paris ont la charge de la preuve de démontrer qu’ils se conforment au droit international général et aux obligations climatiques. Ils ne sont pas dispensés d’obligations, ni prémunis des conséquences juridiques en cas de manquements. 
    • L’inaction climatique est une violation des droits humains. Le droit international relatif aux droits humains s’applique à la lutte contre la crise climatique. La Cour Internationale de Justice reconnaît également le droit à un environnement sain, y compris pour les générations futures. 
    • Types d’obligations. Les Etats ont des obligations d’atténuation des émissions pour maintenir le réchauffement climatique à 1.5°C, en mettant en place des règles et mesures appropriées pour réduire rapidement et considérablement les émissions de GES, mais aussi d’adaptation au changement climatique et de coopération. Les principes qui doivent guider ces obligations sont ceux de la responsabilité commune mais différenciée, le principe de précaution, la diligence raisonnable, l’équité et l’équité intergénérationnelle. 
    • Responsabilité commune mais différenciée. Tous les Etats doivent faire leur part dans la lutte contre le changement climatique, mais la part des efforts de chaque État dépend de sa responsabilité historique (émissions passées), et de sa capacité, matérielle et financière, actuelle à réduire ses émissions. 
    • Obligation de coopération. Le devoir qu’ont les Etat de coopérer est intrinsèquement lié au devoir de prévenir les dommages significatifs, car les efforts que les États déploient pourraient ne pas être effectifs sans coopération (assistance financière, transfert de technologies, renforcement de capacité etc.). 
    • Sortie des énergies fossiles. Le fait pour les États de ne pas prendre les mesures appropriées, notamment en matière de production et de consommation de combustibles fossiles, d’octroi de licences d’exploration de combustibles fossiles ou de subventions, peut constituer un fait illicite.
    • Obligation de régulation des multinationales. Les Etats ont le devoir de réglementer les acteurs privés. 
    • COP 30. Les décisions des COP sont des éléments d’interprétation complétant les obligations existantes. La coopération financière entre les Etats et les obligations de réparation et de compensation financière (fonds pertes et préjudices) ont également été reconnus par la Cour.

    Un avis qui s’applique aux tribunaux du monde entier. Bien que l’avis de la Cour soit consultatif et pose les bases du cadre juridique international, il est pertinent pour toutes les juridictions nationales qui pourront rendre des décisions de justice contraignantes. 

    Contacts presse

    Jérémie Suissa, Délégué général : direction@notreaffaireatous.org

    Justine Ripoll, Responsable de campagnes : justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    Anne Stevignon, Juriste Contentieux Multinationales : anne.stevignon@notreaffaireatous.org

  • Associations et syndicats disent non à la vague de dérégulation environnementale et sociale

    Communiqué de presse, Paris, le 17 juin 2025 – Une vingtaine d’associations et syndicats ont mené aujourd’hui une action place de Breteuil à Paris pour dénoncer la vague de dérégulation environnementale et sociale en cours en Europe, notamment via la directive « Omnibus I » actuellement en négociation au niveau du Conseil de l’UE et du Parlement européen. Ils alertent sur la position du gouvernement français et exigent que la voix de la société civile et l’avis des Français·es soient entendus.

    © Basile Barjon / Les Amis de la Terre France

    À l’image des politiques brutales du président américain Donald Trump, la Commission européenne attaque les obligations des entreprises en matière de respect des droits humains, du climat et de l’environnement, avec sa proposition de directive « Omnibus I ». Présentée en février 2025, elle propose de revenir sur des directives phares adoptées récemment sur le devoir de vigilance des entreprises (CSDDD) et sur la publication d’informations en matière de durabilité des entreprises (CSRD).

    Face au silence opposé à leurs demandes de rendez-vous auprès de l’Elysée et de Matignon (1), une large coalition d’organisations a dénoncé aujourd’hui un scandale démocratique européen et français aux conséquences catastrophiques, à travers une mise en scène satirique de
    manifestant·e·s pro-dérégulation demandant par exemple le rétablissement du travail forcé et de la déforestation, tandis qu’une parodie d’Emmanuel Macron inaugurait la « Place de la simplification ».

    La France avait pourtant été pionnière en 2017 en adoptant sa loi sur le devoir de vigilance, saluée comme une avancée historique pour les droits humains et l’environnement. Cependant, la France retourne sa veste et tourne le dos à la société civile, aux victimes de violations de droits humains et à une partie des acteurs économiques français, en s’alignant avec les lobbys.

    Reprenant les demandes de l’extrême droite souhaitant démanteler les avancées sociales et environnementales européennes, Emmanuel Macron annonçait le 19 mai, lors du sommet Choose France, vouloir aller plus loin encore que la directive « Omnibus I » et supprimer définitivement la CSDDD (2).

    Ce revirement s’inscrit dans un élan inquiétant en France, où les normes sociales et environnementales sont attaquées sous couvert de « simplification » (3). Le gouvernement s’enfonce ainsi dans une tendance qui va à l’encontre des préoccupations des Français·es qui, sondé·e·s par OpinionWay pour Reclaim Finance et le Forum citoyen pour la justice économique début juin 2025, se sont prononcé·e·s à plus de 80 % en faveur de l’obligation pour les multinationales de respecter le climat et les droits humains, y compris parmi les sympathisant·e·s de la majorité présidentielle et LR.

    Au niveau européen, la directive « Omnibus I » est une des premières pierres posées sur la voie d’une dérégulation massive risquant de balayer les avancées du Pacte Vert (4). Les associations s’alarment d’autant plus qu’une enquête a été ouverte par la médiatrice de l’Union européenne suite à une plainte de 8 associations, condamnant le caractère non démocratique, opaque et précipité du processus de l’« Omnibus I ». La médiatrice donnera ses conclusions le 18 juin 2025.

    La Commission européenne et le gouvernement français nous emmènent donc sur une voie où tout le monde perdra : les populations du Sud global, les peuples autochtones, les travailleur·euse·s ici et là-bas, les syndicats, les citoyen·ne·s européen·ne·s, les femmes et les minorités de genre, l’environnement et le climat, les finances publiques, et les entreprises elles-mêmes.

    Le Conseil de l’UE finalise actuellement sa position et le Parlement européen démarre l’examen du texte. Il n’est pas trop tard pour que nos organisations soient entendues et pour faire cesser ces attaques contre les droits humains, l’environnement et le climat.

    Nous demandons notamment de :

    • Maintenir l’obligation de devoir de vigilance au-delà des partenaires directs des entreprises pour couvrir toute leur chaîne de valeur ;
    • Conserver la consultation de toutes les parties prenantes et veiller à ce que leur engagement soit central tout au long du processus du devoir de vigilance ;
    • Conserver la possibilité d’engager la responsabilité civile d’une entreprise en cas de manquement aux obligations prévues par la directive ;
    • Conserver l’obligation pour les entreprises de mettre en oeuvre leurs plans de transition climatique ;
    • De soutenir l’inclusion à terme des services financiers dans le devoir de vigilance européen.

    Les détails de nos recommandations sont à consulter ici

    Contact presse

    Justine Ripoll, responsable de campagnes : justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    Notes

    (1) Certaines de nos organisations ont envoyé des courriers au Président et au Premier ministre en janvier et en avril 2025, mais n’ont pas reçu de réponse à ce jour, malgré de très nombreuses relances.

    (2) Nos organisations ont condamné l’annonce du Président Emmanuel Macron le 20 mai 2025 dans un communiqué de presse commun.

    (3) Notamment récemment à travers le projet de loi de simplification de la vie économique voté ce mardi 17 juin à l’Assemblée nationale et la proposition de loi visant à lever les contraintes du métier d’agriculteur.

    (4) Notamment le report du règlement contre la déforestation, la révision de la politique agroalimentaire, la révision du règlement concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, etc.

  • Greenwashing : à l’audience, TotalEnergies persiste et signe

    Greenwashing : à l’audience, TotalEnergies persiste et signe

    Communiqué de presse, Paris – Pour la première fois en France, une multinationale pétro-gazière a dû répondre devant un tribunal de la sincérité et de la promotion de ses engagements climatiques auprès des consommateurs, à l’aune de ses actes. L’audience au fond du recours pour pratiques commerciales trompeuses contre TotalEnergies s’est tenue cet après-midi devant le Tribunal judiciaire de Paris, dans une salle comble. Cette action inédite, initiée en 2022 par Les Amis de la Terre France, Greenpeace France et Notre Affaire à Tous, avec le soutien de ClientEarth, vise à faire reconnaître comme trompeuse la campagne de communication de l’entreprise opérée en 2021 autour de son changement de nom vers TotalEnergies. Le jugement sera rendu le 23 octobre prochain.

    Pour nos organisations, ce recours s’est imposé pour dénoncer le fossé entre les communications tendant à verdir l’image de TotalEnergies et la poursuite de sa stratégie d’expansion massive des hydrocarbures. Au cœur du dossier : une campagne de publicité diffusée auprès de millions de consommateurs français, où TotalEnergies prétend être un acteur majeur de la transition énergétique, affiche un objectif de “neutralité carbone” et distille des affirmations fallacieuses sur les prétendues vertus environnementales du gaz fossile et des agrocarburants. 

    La stratégie d’expansion fossile de l’entreprise reste en contradiction flagrante avec les objectifs de l’accord de Paris, son objectif affiché de “neutralité carbone” et le consensus de la communauté scientifique. Pour rappel, plus de 97 % de la production d’énergie globale de TotalEnergies reste assurée par les hydrocarbures et près de 80 % de ses investissements sont toujours orientés vers le développement des énergies fossiles.

    Pour Justine Ripoll, responsable de campagne chez Notre Affaire à Tous : « Total savait depuis les années 1970 l’impact de ses activités fossiles sur le climat. Malgré ses connaissances, l’entreprise a d’abord préféré nier la réalité, puis instrumentaliser la science et enfin empêcher toutes les réglementations fossiles d’émerger. Aujourd’hui, Total cherche à faire croire aux consommateurs qu’elle est en transition vers la neutralité carbone. C’est une tromperie, et cette tromperie, comme les précédentes, nous fait collectivement perdre un temps inestimable dans la lutte contre la crise climatique. » 

    Les plaidoiries ont mis en lumière les déclarations trompeuses, voire les contre-vérités, déroulées par TotalEnergies dans sa campagne de communication. A titre d’exemple, la major explique que le gaz est une énergie de transition que l’on pourrait distinguer des autres énergies fossiles. Ses arguments sur le sujet ont été démontés au regard de l’impact climatique réel du gaz fossile, et de la stratégie d’investissement de l’entreprise qui verrouille notre société dans la dépendance à cette énergie pour encore des décennies, à rebours de l’urgence de réduire les émissions des gaz à effet de serre.

    Pour Juliette Renaud, coordinatrice des Amis de la Terre France : « Depuis des années, Total martèle dans ses communications et publicités le fait que le gaz serait une “énergie propre”, un “allié des énergies renouvelables”, “une énergie de transition”. La réalité est que Total fonde sa soi-disant transition énergétique sur le développement massif de cette énergie fossile très polluante : non seulement ces projets gaziers aggravent le dérèglement climatique mais ils sont aussi liés à de graves violations de droits humains comme au Mozambique, et nous rendent tributaires de régimes autoritaires comme la Russie. » 

    L’avocate de Total a accusé les associations d’instrumentaliser le droit de la consommation. Mais l’enjeu fondamental de ce recours est bien celui de la protection des consommateurs face à la désinformation. Nos associations, légitimes à poursuivre sur ce sujet, ont rappelé que le droit de la consommation impose une communication honnête et vérifiable, y compris en matière climatique et environnementale.

    Pour Sarah Fayolle, chargée de campagne chez Greenpeace France : « Total met en avant des engagements climatiques illusoires qui détournent l’attention des consommateurs de la réalité de son business fossile. La major fausse aussi la compréhension, par le public, des vraies solutions et des mesures de politique publique nécessaires à la préservation du climat. Alors que l’État ne joue pas aujourd’hui son rôle de régulateur, nous espérons que la justice nous entendra et fera le choix de protéger les consommateurs. »

    Enfin, cette affaire s’inscrit dans un contexte international où de plus en plus d’entreprises sont attaquées pour des pratiques similaires. Les décisions des régulateurs et des juridictions de différents pays en matière de greenwashing se multiplient, notamment à l’encontre de majors pétrolières. Sur d’autres sujets, la communication de TotalEnergies a déjà été jugée trompeuse, comme en Allemagne en 2023, en Afrique du Sud en 2024 et au Royaume-Uni en 2025.

    Pour Jonathan White, juriste chez ClientEarth : « Si l’industrie fossile parvient à tromper le public en lui faisant croire qu’elle s’attaque à la crise climatique et que ses produits sont des solutions, alors une chose est sûre : elle continuera à fonctionner comme si de rien n’était, et nous irons tout droit vers la catastrophe climatique. »

    Le jugement sera rendu le 23 octobre prochain. Il pourrait créer un précédent important en France, mais aussi aux niveaux européen et international, et envoyer un signal fort à l’ensemble des entreprises qui exploitent les énergies fossiles.

    Contacts presse

    Contacts presse sur ce sujet :

    Les Amis de la Terre France : Juliette Renaud – juliette.renaud@amisdelaterre.org

    Greenpeace France : Franck Mithieux – franck.mithieux@greenpeace.org

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll – justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    ClientEarth : Anaïs Rivalier – arivalier@clientearth.org

  • 8 français·es sur 10 veulent obliger les multinationales à respecter le climat et les droits humains

    Paris, le 4 juin 2025 – Plus de 80 % des Français·es veulent que les multinationales soient obligées de prévenir leurs impacts sociaux, environnementaux et climatiques, ainsi que ceux de leurs sous-traitants. C’est le résultat d’un nouveau sondage OpinionWay pour Reclaim Finance et le Forum citoyen pour la justice économique  (1). Ce sondage intervient peu après la proposition d’Emmanuel Macron de supprimer un texte clé pour la régulation des multinationales, le devoir de vigilance européen des entreprises. Les organisations de la société civile appellent le gouvernement à prendre en compte l’avis des Français·es et à défendre la directive sur le devoir de vigilance (CSDDD) et la directive sur la publication d’informations en matière de durabilité des entreprises (CSRD), en cours de révision.  

    D’après ce sondage OpinionWay pour Reclaim Finance et le FCJE (2) : 

    • 8 Français·es sur 10 (81 %) veulent que les multinationales soient tenues responsables de leurs impacts sociaux, environnementaux et climatiques et ceux de leurs partenaires et sous-traitants.
    • 86 % veulent que les pouvoirs publics régulent les entreprises pour qu’elles soient plus transparentes et préviennent leurs impacts, et ce même si des coûts supplémentaires existent pour les entreprises. 
    • 90 % veulent que les multinationales s’engagent dans la lutte contre le dérèglement climatique, et soient obligées d’adopter et de mettre en place des plans de transition compatibles avec la limitation du réchauffement planétaire à +1,5°C (3).

    Ces résultats confirment le soutien massif des Français·es pour une régulation ambitieuse des multinationales afin d’assurer la transparence et la responsabilité des entreprises en matière de droits humains, de protection de l’environnement et d’action climatique. 

    Or, ce sont précisément les réglementations déjà établies en la matière qui sont aujourd’hui menacées par le président Macron (4), qui a proposé une suppression de la directive européenne sur le devoir de vigilance, et par le gouvernement qui soutient la proposition de directive de la Commission européenne dite « Omnibus ». Celle-ci propose de revenir sur les directives CSRD et CSDDD, notamment en réduisant de 80 % le nombre d’entreprises devant publier des informations socio-environnementales et en remettant en cause la mise en œuvre des plans de transition climatiques (5). Le Conseil de l’Union européenne devrait désormais adopter sa position sur ce texte avant la fin du mois de juin. 

    Reclaim Finance et les organisations du Forum citoyen pour la justice économique appellent le gouvernement français à répondre aux préoccupations des Français·es, également partagées par de nombreuses entreprises, économistes, acteurs financiers (6), et à arrêter son offensive contre ces textes clés pour le climat, l’environnement et les droits humains.

    Notes

    (1) Le Forum citoyen pour la justice économique est un lieu d’expertise, d’expression publique et de plaidoyer sur les questions relatives à la régulation des acteurs économiques. Ses membres sont : ActionAid France, Alternatives économiques, Amis de la Terre France, Amnesty International France, Bloom, CCFD-Terre Solidaire, le Centre Français d’Information sur les Entreprises (CFIE), le Collectif Ethique sur l’étiquette, Confédération Française et Démocratique du Travail (CFDT), la Confédération Générale du Travail (CGT), Greenpeace France, la Ligue des Droits de l’Homme (LDH), Notre Affaire à Tous, Sherpa, Oxfam France.

    (2) Sondage OpinionWay pour Reclaim Finance et le Forum citoyen pour la justice économique (juin 2025). Sondage auprès de 1018 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. L’échantillon a été constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d’âge, de catégorie socioprofessionnelle, de catégorie d’agglomération et de région de résidence.

    (3) Les résultats montrent aussi que le soutien à un encadrement des multinationales fait l’objet d’un consensus transpartisan. Les sympathisants des partis de gauche comme ceux du parti présidentiel y sont massivement favorables. Mais c’est aussi le cas d’une très large majorité des sympathisants des partis politiques traditionnellement associés à des positions de dérégulation et pour un renforcement de l’Omnibus, comme Les Républicains et Le Rassemblement National.

    (4) Emmanuel Macron, qui avait pourtant appelé à mettre en place une directive européenne sur le devoir de vigilance, a exprimé le 19 mai son intention de supprimer de « nombreuses contraintes et régulations » pesant sur les entreprises, ciblant spécifiquement la CSDDD, pourtant déjà en cours de révision.

    (5) Note de position du Forum citoyen pour la justice économique. 

    (6) Reclaim Finance, Le monde économique, financier et la société civile contre le texte Omnibus, 2025.

  • Décision historique dans “l’Affaire RWE” en Allemagne : Pour la première fois, un tribunal affirme clairement que les géants du fossile peuvent être tenus responsables des dommages qu’ils ont causés

    Réactive – La Cour d’appel de Hamm a rendu ce 28 mai une décision historique dans l’affaire qui oppose l’agriculteur péruvien Saúl Luciano Lliuya à la société énergétique allemande RWE depuis plus de dix ans.

    Dans ce contentieux inédit, Lliuya demandait à RWE de contribuer au financement des mesures de prévention contre le risque d’inondation pesant sur sa maison à Huaraz au Pérou, à hauteur de 0,47% de leur coût. Ce risque résulte de la fonte accélérée d’un glacier situé en surplomb de la ville, dont il impute une part de responsabilité aux émissions historiques de gaz à effet de serre de l’entreprise. 

    Par sa décision du 28 mai, la Cour a reconnu de manière inédite qu’une entreprise comme RWE peut, en principe, être tenue civilement responsable des dommages résultant de ses émissions de gaz à effet de serre. Les juges ont notamment : 

    • rejeté l’argument selon lequel les émissions de RWE (0,4% des émissions mondiales) seraient marginales pour ouvrir droit à une action en justice, estimant au contraire que la part de cette entreprise dans les émissions mondiales rend un examen de sa responsabilité pleinement légitime.
    • rejeté l’argument selon lequel l’action climatique ne relèverait que du politique. Ils ont notamment souligné qu’il appartient au pouvoir judiciaire de garantir le respect des droits fondamentaux des victimes, y compris leur droit de propriété.
    • retenu que la complexité du changement climatique n’exclut pas la responsabilité : le facteur déterminant en matière de causalité est que les centrales de RWE ont significativement contribué à l’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, et que le risque d’inondation est une conséquence directe du changement climatique.
    • estimé qu’à partir de 1965 au moins, les principaux émetteurs pouvaient raisonnablement prévoir les conséquences néfastes de leurs activités et devaient donc en assumer la responsabilité juridique. 
    • souligné que la reconnaissance de la responsabilité de RWE ne crée pas de distorsion de concurrence : elle est au contraire de nature à mettre fin à l’avantage injuste dont bénéficient les entreprises les plus émettrices au détriment de celles qui ont déjà entamé leur transition.
    • précisé enfin que l’existence de permis d’exploitation délivrés par les autorités publiques ne saurait exonérer une entreprise de sa responsabilité en cas d’atteinte disproportionnée aux droits d’une personne privée.

    Malheureusement, le tribunal a suivi l’avis de l’expert nommé par la Cour et a conclu que le risque d’inondation pour Huaraz n’était pas suffisamment élevé pour fonder une action en justice. Des individus comme Saúl sont confrontés à des risques et dommages considérables en raison des émissions de sociétés telles que RWE, mais l’ère de l’impunité est révolue grâce aux efforts de Saúl.

    Il s’agit d’une victoire majeure pour les communautés vulnérables du monde entier, qui aura des répercussions importantes sur les 40 procès en cours qui visent à obtenir une réparation pour des dommages climatiques. Les entreprises fortement émettrices de GES ne sont pas les seules concernées : les investisseurs dans les industries à forte intensité carbone doivent désormais évaluer sérieusement leur exposition au risque contentieux. “Un jalon a été posé : l’ère de l’impunité des grandes multinationales fossiles  touche à sa fin. Les progrès réalisés dans le domaine de la science permettent désormais d’établir un lien clair entre les phénomènes météorologiques extrêmes et les activités très émettrices de GES. Le droit s’affirme progressivement comme un levier stratégique dans la lutte contre la crise climatique, et les entreprises fossiles ne peuvent plus se soustraire aux conséquences juridiques de leurs activités”, affirme Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous.

    Contact presse

    Anne Stevignon, juriste chargée de contentieux et de plaidoyer : anne.stevignon@notreaffaireatous.org

  • L’examen de la proposition « Omnibus » s’intensifie alors que la médiatrice de l’UE ouvre une enquête suite à la plainte des ONG

    L’examen de la proposition « Omnibus » s’intensifie alors que la médiatrice de l’UE ouvre une enquête suite à la plainte des ONG

    Communiqué de presse – Les ONG saluent la décision de la Médiatrice européenne d’ouvrir une enquête sur les modalités selon lesquelles  la Commission a élaboré son premier « paquet de simplification Omnibus », à la suite d’une plainte déposée par ces organisations.

    La Médiatrice européenne  a annoncé aujourd’hui l’ouverture d’une enquête sur le non-respect présumé par la Commission de ses lignes directrices relatives à l’amélioration de la réglementation lors de la préparation de la proposition dite « Omnibus ». Elle procédera à une inspection de certains documents du dossier de la Commission et rencontrera le personnel concerné de la Commission avant le 18 juin.

    Cette décision fait suite à une plainte officielle déposée par une coalition de huit ONG, dont Notre Affaire à Tous, concernant le processus décisionnel contestable de la Commission concernant le paquet de simplification Omnibus. Pour rappel, cette procédure vise à modifier les principales lois sur le développement durable des entreprises, telles que la directive sur le devoir de vigilance des entreprises (CS3D).

    Les ONG affirment que la Commission s’est affranchie d’une évaluation d’impact appropriée et d’une large consultation publique, allant ainsi à l’encontre de ses propres préconisations établies dans les lignes directrices sur l’amélioration de la réglementation. Les ONG reprochent également à la Commission d’avoir enfreint une des principales obligations procédurales prévues par la loi européenne sur le climat, à savoir la réalisation d’une évaluation de la cohérence climatique. Pour les ONG, il s’agit là d’un cas flagrant de mauvaise administration, susceptible d’engager la responsabilité institutionnelle de la Commission.

    ClientEarth, Anti-Slavery International, Clean Clothes Campaign, European Coalition for Corporate Justice, Friends of the Earth Europe, Global Witness, T&E et Notre Affaire A Tous ont déclaré : « Cette action rapide et décisive de la médiatrice de l’UE souligne l’importance des questions soulevées dans notre plainte. Les reculs précipités de la Commission sur trois éléments clés du Green Deal – y compris les lois visant à s’attaquer aux coûts environnementaux et humains des chaînes de valeur mondiales – ont complètement ignoré les droits des personnes et de la planète ».

    Les ONG ont également souligné les implications politiques significatives de la proposition Omnibus. Elles ont ajouté : « En raison de l’absence de preuves, du manque d’études d’impact et d’un processus profondément entaché par la mainmise des entreprises, la Commission empêche les décideurs politiques du Conseil et du Parlement européen d’être pleinement informés des conséquences de leurs votes sur le climat, l’environnement, les droits de l’homme et, par conséquent, sur l’économie dans son ensemble. Cela sape la légitimité démocratique de la Commission et pose de sérieux défis à l’État de droit ».

    La décision de la médiatrice de l’UE intervient dans une période particulièrement stratégique, des discussions clés sur le paquet Omnibus étant prévues au COREPER mercredi prochain.

    Contact presse

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll, responsable des campagnes – justine.ripoll@notreaffaireatous.org 

  • TotalEnergies : le greenwashing et la “stratégie climat” de la multinationale pour la première fois au tribunal le 5 juin

    TotalEnergies : le greenwashing et la “stratégie climat” de la multinationale pour la première fois au tribunal le 5 juin

    Communiqué de presse, Paris – Ce vendredi 23 mai, TotalEnergies convoque son assemblée générale annuelle. Dans un discours bien rodé, l’entreprise se satisfera d’être « la plus engagée dans la transition énergétique parmi les Majors », défendant le gaz comme « énergie de transition » et sa trajectoire de neutralité carbone. Mais cette année, c’est surtout devant la justice que TotalEnergies devra justifier de la sincérité de sa stratégie climat. Le jeudi 5 juin 2025, se tiendra au Tribunal judiciaire de Paris l’audience au fond du recours pour pratiques commerciales trompeuses engagé, en mars 2022, par Les Amis de la Terre France, Greenpeace France et Notre Affaire à Tous, avec le soutien de ClientEarth. 

    Cette action inédite en France vise à faire reconnaître le greenwashing massif orchestré par le géant pétro-gazier, notamment lors de son changement de nom en 2021. Au cœur de ce recours : une campagne de publicité diffusée auprès de millions de consommateurs français, où TotalEnergies prétend être un acteur majeur de la transition énergétique. Elle y avance un objectif de « neutralité carbone » et vante les mérites du gaz fossile comme énergie de transition, « la moins polluante » et « la moins émettrice de gaz à effet de serre » des énergies fossiles. Des affirmations aux consommateurs dont le tribunal aura à juger, au vu de la stratégie d’expansion fossile de l’entreprise en contradiction flagrante avec les objectifs de l’accord de Paris et le consensus de la communauté scientifique.

    Malgré les tentatives procédurales de TotalEnergies pour tenter de tuer le procès dans l’œuf, en 2023, la justice a rejeté les moyens de procédure soulevés par la major. C’est la première fois qu’un tribunal français examinera la sincérité des engagements climatiques d’une entreprise exploitante d’énergies fossiles à l’aune de ses actes, et la légalité de publicités présentant le gaz comme une énergie de transition. Un enjeu crucial, alors que la dépendance à ces énergies est au cœur de l’actualité : crise climatique et événements extrêmes associés, crise sociale, souveraineté énergétique, instabilités géopolitiques.

    Le recours s’appuie sur le droit de la consommation et sur une analyse rigoureuse de la communication de TotalEnergies, qui multiplie les messages sur sa prétendue action climatique, tout en poursuivant l’ouverture de nouveaux champs pétroliers et gaziers et le développement de projets fossiles extrêmement problématiques dans le monde entier – en Ouganda, au Mozambique, au Suriname, et ailleurs. Ces messages visent à rassurer les consommateurs et à verdir l’image de la marque, sans refléter la réalité : plus de 97 % de la production d’énergie globale de TotalEnergies reste assurée par les hydrocarbures et plus de 70 % de ses investissements sont orientés vers les énergies fossiles.

    Face à une crise climatique qui s’aggrave, et alors que l’État français reste défaillant dans son rôle de régulateur, les associations demandent à la justice de protéger les consommateurs face à la désinformation environnementale. Pour les associations requérantes, le droit de la consommation est clair : il impose une communication honnête et vérifiable, y compris en matière climatique et environnementale. Ce recours pourrait créer un précédent important en France, mais aussi aux niveaux européen et international, et envoyer un signal fort à l’ensemble des entreprises qui exploitent les énergies fossiles. C’est la stratégie globale de dissimulation des responsabilités climatiques des puissants groupes pétro-gaziers qui est en question.

    Ce 5 juin, la justice devra trancher : les promesses climatiques peuvent-elles continuer à être brandies comme argument de communication, alors qu’elles masquent des choix industriels incompatibles avec les objectifs affichés ? TotalEnergies doit désormais rendre des comptes sur son greenwashing, sa stratégie climat en trompe-l’œil et sa logique d’expansion fossile mortifère. 

    La date du jugement sera annoncée à la fin de l’audience. Celui-ci devrait intervenir sous trois mois.

    Contacts presse

    Les Amis de la Terre France : Juliette Renaud
    juliette.renaud@amisdelaterre.org

    Greenpeace France : Franck Mithieux
    franck.mithieux@greenpeace.org

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll
    justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    ClientEarth : Anaïs Rivalier
    arivalier@clientearth.org

  • Macron balaye les droits humains et le climat d’un revers de main

    Macron balaye les droits humains et le climat d’un revers de main

    Communiqué de presse – Le Forum citoyen pour la justice économique et ses alliés condamnent vivement l’annonce du Président Emmanuel Macron visant à “écarter” définitivement la directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises (CS3D). 

    Entouré d’investisseurs et de lobbies industriels réunis au château de Versailles lors du sommet Choose France, Emmanuel Macron a exprimé hier son intention de supprimer de “nombreuses contraintes et régulations” pesant sur les entreprises, ciblant spécifiquement la CS3D, pourtant déjà en cours de révision.

    En déclarant vouloir “synchroniser” les actions de l’UE et des États-Unis en matière de réglementation, Emmanuel Macron attaque frontalement un texte crucial pour responsabiliser les multinationales, et que son parti avait pourtant soutenu. Ce revirement acte un alignement préoccupant de la France avec les politiques brutales du président américain Donald Trump, faisant aussi écho à la position du chancelier allemand Friedrich Merz. 

    Si la posture du Président français semble en décalage avec certaines déclarations récentes du gouvernement français et de nombreuses voix économiques et politiques sur le sujet, elle répond en revanche aux désirs de Jordan Bardella, dont le parti fait campagne depuis des mois pour abroger le devoir de vigilance et le Pacte Vert européen.

    Ce faisant, ces déclarations achèvent de démontrer l’alignement de la présidence française avec les contempteurs des droits humains et de la planète, et sa connivence avec des lobbies avides de dérégulation.

    A l’heure où la crise climatique et les inégalités s’aggravent, cette annonce va à rebours des urgences sociales et écologiques. Face à cette régression, le Forum citoyen pour la justice économique appelle à la mobilisation. Nous exhortons le président Emmanuel Macron à respecter ses engagements et à préserver ce texte fondamental pour responsabiliser les multinationales et protéger les victimes.

    Nous appelons également le Président de la République à engager dès maintenant un dialogue constructif avec la société civile, dont les sollicitations ont jusqu’à présent trouvé porte close, afin de renforcer, et non affaiblir, la protection des droits humains, de l’environnement et du climat dans le monde.

    Contacts presse

    ActionAid France : Chloé Rousset, Chargée de campagne, Chloe.Rousset@actionaid.org

    Amis de la Terre France : Marcellin Jehl, chargé de plaidoyer multinationales, marcellin.jehl@amisdelaterre.org 

    CCFD-Terre Solidaire, Sophie Rebours, s.rebours@ccfd-terresolidaire.org

    Fédération Internationale pour les Droits Humains : Gaelle Dusepulchre, directrice adjointe du bureau Entreprises, droits humains et environnement, gdusepulchre@fidh.org 

    Max Havelaar France : Jules Montané, chargé de relations presse, j.montane@maxhavelaarfrance.org,

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll, responsable de campagnes, justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    Oxfam France :  Stanislas Hannoun, Responsable de la campagne Justice fiscale et Inégalités, shannoun@oxfamfrance.org 

    Sherpa : Lucie Chatelain, Responsable de plaidoyer et de contentieux – lucie.chatelain@asso-sherpa.org

    Reclaim Finance : Sarah Bakaloglou, chargée de relations presse, sarah@reclaimfinance.org,

  • Une nouvelle étude révèle l’ampleur de la déforestation liée à Casino au Brésil

    Une nouvelle étude révèle l’ampleur de la déforestation liée à Casino au Brésil

    Après des années de blocages procéduraux, les débats sur le fond contre le géant de la grande distribution Casino peuvent enfin débuter. Une excellente nouvelle pour la coalition, qui pourra désormais s’atteler à parler des sujets principaux de cette affaire : le respect des droits humains et la lutte contre la déforestation. A cette occasion, l’Instituto Centro de Vida (ICV) dévoile les résultats d’une nouvelle étude, la première à estimer l’ampleur de la déforestation du groupe Casino au Brésil entre 2018 et 2023. Pendant ces six années, ce sont jusqu’à 526 459 hectares d’écosystèmes qui auraient été détruits en lien avec la viande bovine vendue par le groupe français.

    L’Institut Centro de Vida

    Fondé en 1991, l’Instituto Centro de Vida (ICV) est une organisation de la société civile brésilienne avec une grande expérience dans l’étude des impacts socio-environnementaux des chaînes d’approvisionnement en viande bovine et en soja. Fort de leur solide expertise technique, l’ICV a souhaité soutenir le travail des 11 organisations de la coalition en estimant la superficie de la déforestation liée à la quantité de viande bovine vendue par le groupe Casino au Brésil. Ce travail minutieux est d’autant plus essentiel que les informations sur l’approvisionnement en viande bovine des distributeurs sont souvent insuffisantes et manquent de transparence.

    Le rapport

    Pour la première fois, grâce à ce nouveau rapport, nous disposons d’une estimation totale de la superficie des écosystèmes naturels détruits en lien avec les activités du groupe Casino au Brésil entre 2018 et 2023. L’ICV estime ainsi, dans son rapport, que jusqu’à 526 459 hectares d’écosystèmes naturels ont été perdus sur cette période, du fait des volumes de viande de bœuf vendus par le groupe.

    Cette période d’analyse couvre les six années pendant lesquelles le groupe Casino était tenu de respecter la loi sur au devoir de vigilance concernant les activités  de ses filiales Grupo Pão de Açúcar (GPA) et Assaí. Cette étude constitue un élément clé pour la coalition permettant d’évaluer l’étendue de l’impact de Casino et le montant des réparations demandées par les organisations brésiliennes et colombiennes.

    La méthodologie

    Pour élaborer cette étude, l’ICV s’est appuyé sur l’analyse de méthodologies précédemment utilisées pour estimer la responsabilité de la grande distribution dans la déforestation. Parmi ces méthodologies figure celle publiée par Envol Vert en 2020 dans son rapport Casino, (éco)responsable de la déforestation, qui a servi de base à notre assignation en justice. Ce nouveau travail confirme les ordres de grandeur qui avaient déjà été estimés.

    Cette méthodologie est dite conservatrice, puisque la déforestation est uniquement prise en compte d’une année sur l’autre, sans effet de cumul. Ainsi, d’autres choix méthodologiques auraient pu aboutir à des estimations bien plus importantes.

    Pour parfaire son travail, l’ICV a également présenté sa méthodologie de calcul à un groupe de six experts. Sélectionnés en raison de leurs expériences sur la durabilité et la traçabilité au sein des chaînes d’approvisionnement en viande bovine, leurs recommandations ont permis d’affiner la méthode de calcul proposée.

    Le manque de transparence

    Ce travail d’estimation par la société civile est nécessaire face au manque de transparence des acteurs de la filière bovine. Face au problème de la déforestation qui est systémique et repose sur des chaînes d’approvisionnement complexes, nous considérons qu’il est de la responsabilité des grands acteurs, dont les distributeurs et le groupe Casino, de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour l’endiguer. C’est pourquoi une analyse globale de l’empreinte déforestation du groupe Casino, au regard des volumes de viande bovine vendus dans ses magasins, nous apparaît indispensable.

    Tableau avec résultats finaux

    Les estimations des destructions d’écosystèmes – forêts, savanes et autres types de végétation – résultant des approvisionnements en viande bovine du groupe Casino entre 2018 et 2023 sont résumées dans le tableau ci-dessous. Il distingue ces destructions selon différents biomes, et est disponible en page 28 du rapport réalisé par l’Instituto Centro de Vida.