Catégorie : Général

  • « Cinq ans de Pôles Régionaux Environnementaux : état des lieux d’un nouveau pôle judiciaire spécialisé pour la protection du Vivant »,  à l’heure de la transposition de la directive sur la criminalité environnementale

    Communiqué de presse, 10 décembre 2025Notre Affaire À Tous-Lyon publie son premier rapport : « Cinq ans de Pôles Régionaux Environnementaux : état des lieux d’un nouveau pôle judiciaire spécialisé pour la protection du Vivant » et propose 10 recommandations pour l’amélioration de la justice pénale et civile environnementale en France !

    La délinquance verte est la 4ème source de revenus criminels après la drogue, la contrefaçon et la traite d’êtres humains, et pourtant la majorité des infractions environnementales poursuivies par les tribunaux français en 2019 se soldaient par un classement sans suite ou un simple rappel à la loi.

    Pour faire face à cette invisibilisation de la justice environnementale, le législateur a créé 37 Pôles régionaux environnementaux, dits « PRE » , répartis sur tout le territoire  en adoptant la loi du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée.

    Mais 5 ans plus tard, le résultat n’est toujours pas à la hauteur ! Une institution méconnue, aucun·e magistrat·e spécialisé·e à 100% sur le contentieux environnemental, des assistant·es spécialisé·es environnement contractualisé·es, des services d’enquêtes en sous-effectifs et visés par des velléités de coupes budgétaires, une absence de transparence sur le budget alloué à l’institution …

    Il est plus que temps d’agir et d’assurer aux PRE les moyens de rendre sereinement la justice environnementale !

    Notre Affaire À Tous Lyon recommande ainsi de :  

    • Informer et sensibiliser les avocat·es et le grand public à l’existence des PRE pour favoriser l’accroissement du volume du contentieux environnemental
    • Spécialiser des magistrat·es à 100% sur le contentieux environnemental
    • Pérenniser le statut des assistant·es spécialisé·es et des attaché·es de justice environnement
    •  Renforcer les effectifs et les moyens matériels au sein des services d’enquête spécialisés
    • Répartir plus clairement les compétences entre les services d’enquête environnementaux, favoriser la cosaisine, renforcer le dialogue entre les juridictions judiciaires et administratives
    • Prévoir suffisamment de créneaux pour des « audiences environnementales dédiée » au sein des tribunaux
    • Allouer un budget adapté et transparent aux PRE
    • Assurer la participation active de tous les services d’enquête en COLDEN et renforcer leur communication avec les PRE
    • Doter tous les PRE des territoires dits ultramarins d’assistant·es spécialisé·es environnement ou d’attaché·es de justice environnement ainsi que de parquetier·es référent·es
    • Mener des études statistiques approfondies sur les PRE et favoriser les échanges entre les parties prenantes des PRE pour évaluer et améliorer leur efficacité

    La prochaine étape ? D’ici au 21 mai 2026, la France a l’obligation de transposer effectivement la directive 2024/1203 du 11 avril 2024 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal. Elle doit pour ce faire « veiller à ce que les autorités nationales chargées de détecter les infractions pénales environnementales, d’enquêter sur celles-ci, de les poursuivre ou de les juger disposent d’un personnel qualifié en nombre suffisant et de ressources financières, techniques et technologiques suffisantes pour l’exercice effectif de leurs fonctions liées à la mise en œuvre de la directive. »  Soyons ambitieux·ses et renforçons nos PRE !

    Contact presse

    Léna Curien, administratrice de NAAT Lyon, lyon@notreaffaireatous.org

  • TOUS HUMAINS – 10 décembre – Journée internationale des droits humains : Un recours en justice pour exiger le respect des droits humains de 3 millions d’ « Ultramarin·es » 

    Communiqué de presse de Kimbé Rèd F.W.I. et Notre Affaire à Tous, 10 décembre 2025En cette journée internationale des droits humains, rappelons que la France exclut d’un traité des droits humains, la Charte sociale européenne,  trois millions de personnes qui ne peuvent y faire appel pour demander le respect de leur droit du travail, à l’éducation, au logement, à la santé, ou encore à l’eau potable et à un environnement sain. L’association antillaise Kimbé Rèd F.W.I., membre de la Fédération Internationale des Droits Humains (FIDH) et l’association Notre Affaire à Tous, engagées contre les discriminations d’accès à l’eau potable dans les territoires dits d’Outre-mer, déposent ce-jour une demande indemnitaire préalable réclamant réparation pour les préjudices liés à cette discrimination et à la privation de recours en matière de droits humains.

    Depuis l’adoption de la Charte sociale européenne en 1961 (1), la France n’a jamais acté l’applicabilité de ce texte jumeau de la Convention européenne des droits de l’Homme aux populations des «Outre-mer ». Cela est permis par une clause limitant l’application de ce traité au seul territoire «métropolitain », héritage colonial qui persiste dans ce texte dont la portée est censée être universelle.

    Très concrètement, c’est pour cette raison qu’en mars 2025, le Comité européen des droits sociaux, d’une part, a déclaré irrecevable le recours de Kimbé Rèd F.W.I. porté par la FIDH sur l’accès à l’eau potable et la contamination au chlordécone aux Antilles et, d’autre part, a écarté le rapport de Kimbé Rèd FWI sur la crise du coût de la vie dans les « Outre-mer ». 

    La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), dans une déclaration officielle publiée en septembre 2024, avait pourtant estimé cette situation contraire au droit international des droits humains et à la Constitution française. Suite à une levée de boucliers des parlementaires, le Gouvernement s’est alors engagé à trois reprises (2) devant le Parlement à résoudre la situation avant la fin du mois d’avril 2025, ce qui ne nécessiterait que l’envoi d’un paragraphe écrit par la France au Conseil de l’Europe. Pourtant, ces communications politiques n’ont pas été suivies d’action.

    Le sujet sera évoqué à la conférence de haut niveau sur la Charte sociale européenne prévue à Chișinău, les 18-19 mars 2026, à laquelle la France participera. Nous donnons donc trois mois à l’État pour notifier officiellement l’inclusion des territoires dits d’Outre-mer au périmètre intégral de la Charte sociale européenne. Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous, « cette discrimination n’est pas un problème local : elle porte atteinte à notre conception même d’égalité nationale ».

    « Priver quelqu’un de ses droits humains revient à le déposséder de son humanité » – Nelson Mandela. Pour Sabrina Cajoly, fondatrice de Kimbé Rèd FWI, qu’en 2025, France et Europe puissent encore exclure des millions de personnes — en majorité Afrodescendant·es et autochtones — d’un traité des droits humains est intolérable car cela revient à nier leur humanité. Sur le sujet, la campagne « Tous humains », portée par Kimbé Rèd FWI, a rassemblé des dizaines de personnalités, et plus de 3000 signatures soutien, pour visibiliser cette discrimination. 

    Notes

    (1) Ratifiée par la France en 1973.

    (2) Les 19 mars, 8 avril et 9 avril 2025. Cet engagement a été renouvelé au Secrétaire général du Conseil de l’Europe le 11 avril, lors de la visite de ce dernier à l’Élysée et au Quai d’Orsay.

    Contacts presse

    Sabrina Cajoly, Kimbé Rèd F.W.I., Guadeloupe : kimberedfwi@gmail.com

    Emma Feyeux, Notre Affaire à Tous : emma.feyeux@notreaffaireatous.org

  • Noël avant l’heure pour les multinationales et l’extrême droite : l’UE s’accorde pour démanteler le devoir de vigilance européen

    Communiqué de presse, Paris, 9 décembre 2025 Les représentant·e·s des États membres de l’Union européenne et du Parlement européen ont trouvé cette nuit un accord sur l’Omnibus I, une directive destinée à affaiblir le devoir de vigilance européen (CSDDD). À la suite d’une alliance historique entre droite et extrême droite au Parlement européen, et confrontés à des ingérences étrangères (États-Unis, Qatar…) et industrielles incessantes, les États membres et la Commission ont fait le choix de la capitulation. Le compromis trouvé éloigne fatalement la CSDDD de son objectif : prévenir et réparer les atteintes aux droits humains et à l’environnement commises par les multinationales. L’accord politique doit désormais être formellement voté par le Conseil et le Parlement européen dans les prochains jours.

    Le cocktail était explosif : de nombreux acteurs alertaient sur les reculs envisagés par l’Omnibus I, l’irrégularité de la procédure législative engagée, un lobbying agressif contre les textes du Pacte Vert, et l’alliance politique historique de la droite européenne avec l’extrême droite contre ce texte. Le Conseil de l’UE et le Parlement européen auraient pu résister tout le long du processus législatif. Las, cette nuit, les États membres et le Parlement se sont mis d’accord pour démanteler le devoir de vigilance européen :

    • Le compromis acte le relèvement des seuils d’application du devoir de vigilance européen afin que ce dernier ne s’applique qu’aux sociétés de plus de 5 000 salarié·e·s et réalisant plus d’1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires. Le nombre de sociétés concernées s’en trouverait réduit à peau de chagrin. 
    • Le compromis entérine la suppression pure et simple du volet climatique de la directive sur le devoir de vigilance européen. L’extrême droite européenne et les lobbies ont obtenu que les entreprises n’aient plus pour obligation d’adopter des plans de transition climatique visant à garantir la compatibilité de leur modèle et de leur stratégie économiques avec les objectifs de l’Accord de Paris.
    • Le compromis n’épargne pas la responsabilité civile, pilier fondamental du devoir de vigilance. Très loin d’une simplification, le compromis acte le fait de ne plus harmoniser le régime de responsabilité civile, conduisant à une fragmentation des régimes juridiques selon les États membres, au détriment à la fois des victimes et des entreprises.
    • Enfin, le délai pour la transposition est à nouveau repoussé d’un an, à juillet 2028. Les nouvelles obligations ne s’appliqueront aux entreprises qu’à partir de juillet 2029. A nouveau les multinationales gagnent du temps. 

    Ces reculs auront des effets néfastes très concrets pour les personnes affectées par les activités des multinationales, en Europe et ailleurs. 

    Au-delà de ses impacts environnementaux et sociaux, l’issue de ce trilogue marque un tournant historique : les institutions européennes ont rompu le cordon sanitaire et accepté que l’extrême-droite et les lobbies européens mais aussi étrangers tiennent la plume pour légiférer en Europe.

    Il s’agit du premier texte de dérégulation d’une série annoncée par la Commission européenne, présageant du pire pour l’avenir du droit européen.

    Face à ces avancées funestes, nos organisations appellent la France à se montrer à la hauteur des enjeux et de ses engagements passés en refusant fermement ce compromis réactionnaire.

    Contacts presse

    ActionAid France – Chloé Rousset – chloe.rousset@actionaid.org

    Amis de la Terre France – Marcellin Jehl : marcellin.jehl@amisdelaterre.org

    BLOOM – Pauline Bricault : paulinebricault@bloomassociation.org

    CCFD-Terre solidaire – Sophie Rebours : s.rebours@ccfd-terresolidaire.org

    Notre Affaire à Tous – Justine Ripoll : justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    Oxfam France – Lea Guerin : lguerin@oxfamfrance.org

    Reclaim Finance – Olivier Guérin : olivier@reclaimfinance.org

    Sherpa – Lucie Chatelain : lucie.chatelain@asso-sherpa.org 

  • Climat – La France de nouveau face à la justice pour non-respect de sa “part juste” dans l’effort mondial

    Communiqué de presse, Notre Affaire à Tous, Paris, 4 décembre 2025 À l’issue d’une COP30 jugée insuffisante sur le partage équitable de l’effort climatique, Notre Affaire à Tous saisit la justice et dévoile un nouveau recours contre l’État français : le “Procès pour la Part Juste”. L’association demande à la justice de reconnaître que la France accuse un retard persistant dans la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, et ne respecte pas sa contribution équitable à la lutte contre le changement climatique, au regard de son impact réel, bien au-delà de ses seules émissions territoriales.

    Dans la continuité de l’Affaire du Siècle et du recours Grande-Synthe, deux décisions judiciaires ayant reconnu la carence de l’État français face à l’urgence climatique, ce nouveau Procès pour la Part Juste marque une nouvelle étape.
    Porté par des fondements juridiques renforcés, notamment la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) des “Aînées suisses pour le Climat” d’avril 2024 et l’avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ) de juillet 2025, et par les nouveaux objectifs climatiques de l’Union européenne (paquet Fit for 55), ce recours entend établir les obligations de la France au regard de son impact réel dans la crise climatique.Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous, “Ce recours porte devant la justice une question jusque-là essentiellement débattue dans les espaces politiques et diplomatiques : le principe d’équité, qui impose à chaque pays d’assumer sa part juste dans l’effort climatique mondial. C’est une obligation légale à laquelle la France est soumise, comme l’a rappelé la Cour internationale de justice, et nous en demandons l’application devant le Conseil d’Etat.”

    Un retard grandissant dans l’action climatique de la France

    Malgré des obligations juridiques en la matière, la France n’est toujours pas à la hauteur pour atteindre ses objectifs climatiques, notamment celui de neutralité carbone en 2050. 

    Alors que l’Union européenne a relevé son ambition climatique en 2021 via le paquet Fit for 55, fixant une réduction des émissions de -55% d’ici 2030 (contre -40% auparavant), la France continue de prendre du retard.

    En 2024, les émissions françaises de gaz à effet de serre ont ainsi diminué de seulement 1,8%, alors que l’objectif est fixé à environ 5% par an. Les premières estimations pour 2025 font état d’un ralentissement encore plus inquiétant, avec une baisse prévue pour l’heure à seulement 0,8% (1). Les dernières annonces politiques et budgétaires sont loin d’être rassurantes et entérinent encore davantage le manque d’ambition de la France : réduction du périmètre de MaPrimeRénov, baisse du Fonds Vert, etc. Ce ralentissement se couple à une fragilisation de plus en plus forte des puits de carbone, rendant d’autant plus incertaine l’atteinte de la neutralité carbone (2). 

    Le recours montre ainsi que la trajectoire de la France est incompatible avec l’objectif de limiter le réchauffement à 1,5°C, pourtant jugé essentiel par la CEDH (3) et la CIJ (4) pour protéger les droits fondamentaux.

    L’effort climatique doit être équitable

    L’effort climatique ne peut pas être réparti de manière strictement égale entre les pays. Les États qui ont historiquement le plus contribué au réchauffement et qui disposent des moyens économiques les plus importants doivent réduire leurs émissions plus vite et plus fortement que les autres. C’est le principe des “responsabilités communes mais différenciées” de la diplomatie climatique, précisé par l’avis récent de la CIJ et par la décision des “Aînées suisses pour le Climat” de la CEDH. Cette dernière établit l’obligation des États à adopter une trajectoire de réduction équitable, intégrant leurs émissions historiques et leur niveau de développement économique.

    “Responsabilités communes mais différenciées” : reconnaître le véritable impact de la France

    Ce nouveau contentieux diffère des précédents recours climatiques, qui portaient essentiellement sur les émissions territoriales récentes. Il intègre ainsi l’équité entre les pays pour déterminer la responsabilité réelle de la France. Sur la base de travaux scientifiques, le Procès pour la Part Juste prend ainsi en compte :

    • les émissions historiques (depuis 1990 pour ce recours),
    • les émissions importées,
    • les émissions nettes (et non brutes),
    • le niveau de développement économique de la France.

    Il apparaît de cette analyse que la France est très en deçà de sa contribution équitable à la lutte contre le changement climatique. La France a ainsi déjà consommé la quasi-totalité de sa « part juste » du budget carbone mondial compatible avec l’objectif de 1,5°C.

    La France a l’obligation et la capacité de faire baisser les émissions mondiales

    Cette situation n’est pas une fatalité. La France peut adopter des objectifs plus ambitieux et se donner les moyens de les atteindre : selon le Haut Conseil pour le Climat, “le renforcement des politiques publiques existantes permettrait de relancer la dynamique de baisse des émissions” (5).

    Outre la réduction accélérée de ses émissions territoriales, qui doit être faite de façon juste, la France peut :

    • réduire ses émissions importées ;
    • réglementer les entreprises françaises, y compris les multinationales ;
    • contribuer de manière ambitieuse aux financements internationaux et à la transition juste à l’étranger via des dons.

    L’équité dans la lutte contre le changement climatique a marqué l’année 2025 : avis consultatifs de la CIJ et de la Cour interaméricaine des droits de l’homme sur les obligations climatiques des Etats, COP30 à Belém, 10 ans de l’Accord de Paris. Ce procès place désormais la France face à la justice : elle doit agir de manière plus conséquente et équitable pour respecter ses obligations climatiques.

    Crédit : Rémy El Sibaïe
    Conférence de presse de Notre Affaire à Tous – annonce du Procès pour la Part Juste à l’Académie du Climat

    Notes

    (1) Baromètre du CITEPA

    (2) Haut Conseil pour le Climat, Rapport Annuel 2025, p.5

    (3) Décision de la CEDH, Affaire Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, 09/04/2024

    (4) Avis consultatif de la CIJ sur les Obligations des États en matière de changement climatique, 23/07/2025

    (5) Haut Conseil pour le Climat, rapport annuel 2025, p.19

    Contact presse

    Marine Coynel, Chargée de communication chez Notre Affaire à Tous : marine.coynel@notreaffaireatous.org

  • Loi Industrie Verte : Notre Affaire à Tous et Zero Waste France demandent l’annulation des décrets

    Loi Industrie Verte : Notre Affaire à Tous et Zero Waste France demandent l’annulation des décrets

    Communiqué de presse, Paris, le 9 septembre 2024 – Dans les décrets d’application de la loi Industrie Verte publiés entre les deux tours des législatives, le gouvernement opère un détricotage massif et systématique du droit de l’environnement industriel, qui augmente significativement les risques de catastrophes industrielles. Notre Affaire à Tous, Zero Waste France et leurs antennes locales alertent sur les risques pour l’environnement et la santé des populations déjà impactées.

    Alors que le gouvernement a pris, dans l’entre-deux-tours des législatives, plusieurs décrets (1) liés à la loi Industrie Verte, Notre Affaire à Tous, Zero Waste France et leurs antennes locales ont déposé vendredi 6 septembre des recours gracieux demandant leur annulation. 

    Pour les associations,  ces textes sont illégaux et opèrent un détricotage massif et systématique des garde-fous mis en place ces dernières décennies pour prévenir les risques industriels et protéger l’environnement et les populations. 

    Un affaiblissement du principe du pollueur-payeur 

    En premier lieu, à l’encontre des préconisations des instances nationales et européennes (2), les décrets pris cet été minent le principe fondamental du pollueur-payeur. Après l’explosion de l’usine AZF (3), le champ des garanties financières applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) avait été étendu afin de contraindre les entreprises à prendre en charge les frais de dépollution résultant de catastrophes industrielles (4). Or, le gouvernement a décidé de supprimer les garanties financières pour les ICPE soumises à autorisation (5), pourtant les plus dangereuses. 

    En supprimant ces garanties, le gouvernement accroît le risque qu’en cas de pollution ou de catastrophe industrielle, les frais pour couvrir la dépollution incombent exclusivement à l’Etat, ou pire, que celle-ci ne soit pas réalisée faute de moyens”, alerte Adeline Paradeise, juriste de Notre Affaire à Tous. 

    La protection des espèces fragilisée

    En second lieu, la loi Industrie Verte introduit la possibilité de reconnaître de manière anticipée l’existence d’une raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM) en matière de dérogation à la réglementation sur les espèces protégées (6). Concrètement, cette initiative permet à l’entreprise de déroger plus facilement au droit des espèces protégées, et complexifie au contraire la tâche des associations de défense de l’environnement (7). Cette procédure s’applique à un très large éventail de projets industriels, et en particulier, à ceux bénéficiant de la qualification de “projet d’intérêt national majeur”. C’est le cas de la future usine de recyclage chimique des plastiques Eastman à Saint-Jean-de-Folleville (Seine-Maritime – 76) à qui le gouvernement (8) a attribué cette qualification le 5 juillet 2024, alors qu’une enquête publique était encore en cours (9). 

    A travers la reconnaissance anticipée de la RIIPM, la loi Industrie Verte vient acter une baisse généralisée du niveau de protection des espèces végétales et animales concernées, contraire au droit européen, qui plus est au profit de projets industriels dont l’intérêt pour la transition écologique n’est pas contrôlé”, commente Bénédicte Kjaer Kahlat, responsable juridique de Zero Waste France. “Pire, à travers cette procédure, le gouvernement prive pour une large part les collectivités territoriales et les associations environnementales de leur droit de regard et de leurs moyens d’action”.

    La future usine Eastman pourrait devenir le plus grand projet au monde de recyclage chimique par solvolyse, c’est-à-dire de traitement des déchets plastiques par recours à un solvant, en l’occurrence du méthanol. Alors qu’il existe plusieurs études défavorables à ce type de technologies (10), l’installation a bénéficié de près de 100 millions d’euros de financements publics de l’ADEME et de la Région Normandie. Le projet aurait des impacts significatifs sur la biodiversité et la qualité de l’air, et comporte par ailleurs un risque élevé de dispersion de microplastiques dans l’environnement. 

    La décision du gouvernement, en pleine crise institutionnelle, de qualifier le projet Eastman “d’intérêt national majeur” est lourde de conséquences pour les écosystèmes et la santé humaine”, résume Bénédicte Kjaer Kahlat. “Il s’agit aussi d’une question démocratique. Les citoyen·nes et les associations doivent pouvoir participer à chaque étape de la construction des politiques publiques et y être réellement entendu·es”.

    Un allègement des procédures périlleux pour les écosystèmes et la santé humaine

    Enfin, les décrets dénoncés par Notre Affaire à Tous et Zero Waste France méconnaissent le principe de non-régression en matière environnementale, en allégeant les procédures et en permettant de nombreuses dérogations en matière de gestion des pollutions industrielles (11).

    Le gouvernement souhaite rassurer les marchés, les investisseurs et les nouveaux exploitants par l’allègement de nombreuses mesures et procédures”, analyse Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous. “Mais cela ne doit pas se faire au détriment de la protection du vivant et des milieux sujets à une forte pollution, surtout dans le contexte actuel, où les risques, en particulier industriels, pour la santé environnementale sont de plus en plus inquiétants, à l’instar du scandale des “polluants éternels””.

    NOTES

    (1)  Décrets n° 2024-704 du 5 juillet 2024, n° 2024-708 du 5 juillet 2024 et n° 2024-742 du 6 juillet 2024.

    (2)  Cour des comptes de l’UE (juillet 2021) ; Commission d’enquête sénatoriale sur les sols pollués (septembre 2020).

    (3)  L’explosion en 2001 à Toulouse de cette usine de fabrication d’engrais, appartenant à une filiale du groupe Total-Fina-Elf, a causé le décès de 30 personnes et plus de 8 000 personnes ont été blessées.

    (4)  Loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.  

    (5)  Articles 57, 58, 62 et 64 du Décret n° 2024-742 du 6 juillet 2024 portant diverses dispositions d’application de la loi industrie verte et de simplification en matière d’environnement.

    (6)  Articles L. 300-6 du Code de l’urbanisme et L. 411-2-1 du Code de l’environnement.

    (7)  Plastique : en Normandie, le projet de recyclage chimique Eastman suscite l’inquiétude | Zero Waste France 

    (8)  Décret n° 2024-708 du 5 juillet 2024 qualifiant de projet d’intérêt national majeur l’usine de recyclage moléculaire des plastiques de la société Eastman à Saint-Jean-de-Folleville.

    (9)  Registre Numérique EASTMAN/CEN ST JEAN FOLLE VILLE SEINE MARITIME.

    (10)  Rollinson, A., Oladejo, J. (2020). Chemical Recycling: Status, Sustainability, and Environmental Impacts. Global Alliance for Incinerator Alternatives. doi:10.46556/ONLS4535 ; Greenpeace, Deception by the Numbers, septembre 2020 ; Peter Quicker, Status, potentials and risks of Chemical recycling of waste plastics – Study on the evaluation of approaches for the feedstock recycling of plastic waste – RWTH Publications.

    (11)  Articles 39 et 42 du Décret n° 2024-742 du 6 juillet 2024 portant diverses dispositions d’application de la loi industrie verte et de simplification en matière d’environnement.

    Contacts presse

    Adeline Paradeise, juriste de Notre Affaire à Tous – adeline.paradeise@notreaffaireatous.org

    Manon Richert, responsable communication de Zero Waste France – manon.richert@zerowastefrance.org

  • Crise de l’eau en Guadeloupe et à Mayotte : Notre Affaire à Tous apporte son soutien aux collectifs citoyens qui ont déposé plainte. 

    Communiqué de presse de l’association Notre Affaire à Tous et des collectifs La Goutte d’Eau et PADO, 05 septembre 2024 – À l’heure où de graves pollutions au chlordécone privent encore d’eau les habitant.e.s de nombreuses communes en Guadeloupe, c’est en soutien aux initiatives locales lancées par les collectifs La Goutte d’Eau en Guadeloupe et PADO à Mayotte que l’association Notre Affaire à Tous se joint aux procédures pénales engagées pour déterminer les responsables de la crise de l’eau dans ces deux territoires. Il est grand temps de faire reconnaître les fautes à l’origine de ces crises et de réparer les préjudices subis par des centaines de milliers d’habitants des territoires français dits d’Outre-mer, engendrés par les problématiques graves d’accès à l’eau potable. 

    Suite aux plaintes déposées en février 2023 par plus de 200 plaignants du collectif La Goutte d’eau en Guadeloupe, et en décembre 2023 par une trentaine de plaignants du collectif PADO à Mayotte, des enquêtes préliminaires ont été ouvertes pour déterminer les responsabilités de toutes les personnes physiques et morales susceptibles d’être engagées en raison du manque d’accès à l’eau en quantité et en qualité suffisante dans ces deux territoires. Ces plaintes, portées par le cabinet VIGO, ont aussi été soutenues par la Ligue des droits de l’Homme. Comme l’affirme Sabrina Cajoly, plaignante de La Goutte d’eau et fondatrice de Kimbé Rèd – French West Indies, association antillaise de droits humains ayant porté l’action au niveau international : “La population guadeloupéenne est résiliente mais elle n’est pas résignée. Elle réclame justice, égalité et de l’eau potable au robinet”. Désormais, pour le collectif PADO, “seul on va plus vite, ensemble on va plus loin : les collectifs ultramarins commencent à travailler ensemble pour faire reconnaître les politiques discriminatoires qui touchent systématiquement les territoires d’Outre-Mer”.

    Toutefois, malgré les mois qui passent, les coupures d’eau encore régulières et la multiplication des interdictions officielles de consommer l’eau, les phases d’instruction de ces enquêtes n’ont toujours pas été ouvertes, privant les plaignants mahorais et guadeloupéens d’un accès effectif à la justice. En faisant part à la juridiction de son intention de se constituer partie civile dès l’ouverture d’une instruction, Notre Affaire à Tous souhaite rappeler le droit à un procès équitable dans un délai raisonnable, aujourd’hui mis à mal. Si la justice manque de moyens partout en France, cette problématique est accentuée dans les territoires dits d’Outre-Mer. Il n’est pas acceptable que des victimes dont les droits fondamentaux et les besoins vitaux sont ignorés ne puissent pas faire valoir leurs préjudices devant la justice rapidement. Les associations et collectifs appellent donc à une ouverture urgente des instructions, afin de pouvoir apporter leur concours à la manifestation de la vérité sur les raisons qui ont mené à ces graves problèmes d’accès à l’eau potable en Guadeloupe et à Mayotte.

    Pour rappel, la Guadeloupe souffre depuis des décennies de problématiques de coupures, de pollutions graves de l’eau – notamment au chlordécone, un pesticide hautement toxique – et d’infrastructures défaillantes. Ce constat a conduit plus de 70 experts des Nations Unies – dont plusieurs comités et rapporteurs – à exhorter la France à prendre des mesures d’urgence pour assurer l’accès à l’eau potable de la population tout en réalisant des travaux sur le moyen et le long terme pour remédier durablement à la situation. À Mayotte, la sécheresse de 2023 et l’apparition du choléra en 2024 ont révélé des difficultés structurelles aggravées depuis des années par tous les acteurs de la gouvernance de l’eau, dans un territoire particulièrement vulnérable. 

    Ces situations, qui résultent d’un désengagement de l’État sur ces questions et d’une inadaptation discriminatoire des politiques publiques d’accès à l’eau, impactent lourdement la dignité et les droits fondamentaux des habitant.e.s : droit à la santé, droit à l’éducation, droit à un environnement sain, droit au logement, droit à un niveau de vie décent, droit à la vie privée et familiale… Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous, “les scandales se succèdent dans les territoires d’Outre-Mer et l’hexagone continue à refuser de prendre le problème au sérieux et à mettre chacun devant ses responsabilités. Nous espérons que les tribunaux contribueront à la reconnaissance de ces injustices. Les habitant.es de Guadeloupe et de Mayotte ont le droit d’avoir de l’eau potable comme tous.tes les citoyen.nes français.es.”

    Contact presse

    Emma Feyeux, Notre Affaire à Tous : emma.feyeux@notreaffaireatous.org

  • Bien vivre à Pierre-Bénite, PFAS contre terre et Notre Affaire à Tous, demandent l’annulation et la suspension par la justice de l’extension de l’activité PFAS de Daikin​

    Communiqué de Notre Affaire à Tous, Bien vivre à Pierre-Bénite et PFAS contre terre, 3 juin 2024, 4 juin 2024 – Vendredi 31 mai 2024, Bien vivre à Pierre-Bénite avec les contributions du collectif PFAS contre terre et de Notre Affaire à Tous, dépose un recours contentieux à l’encontre de l’arrêté préfectoral du 1er février 2024 laissant DAIKIN CHEMICALS FRANCE étendre son activité sur le site d’Oullins-Pierre-Bénite. La suspension immédiate, pour défaut d’étude d’impact, est également demandée. Il est irresponsable de laisser cet industriel producteur de PFAS  augmenter sa production alors qu’il se situe dans la zone la plus contaminée de France  par les “polluants éternels” (Le Monde). 

    L’arrêté préfectoral contesté (n° DDPP-DREAL 2024-19) prend acte de l’extension et adopte des prescriptions complémentaires accordées à la société Daikin concernant l’exploitation d’une nouvelle unité de production et stockage de produits chimiques. L’arrêté autorise ainsi des rejets supplémentaires de substances chimiques dans l’air et accorde à l’industriel un délai de 36 mois pour proposer un plan de substitution, et non directement la substitution des produits PFAS. Il prévoit également l’impossibilité technico-économique à cette substitution. La journaliste Emilie Rosso (France 3 région AURA), avait révélé le 3 avril 2024 dernier que les produits concernés seraient le bisphénol A fluoré et l’hexafluoropropylène (HPF), deux PFAS. 

    Cette extension fait suite à la relocalisation de l’activité de DAIKIN depuis les Pays-Bas, due à une plus forte réglementation dans ce pays. Il est également nécessaire que la France et l’Europe se dotent d’une réglementation plus exigeante pour protéger les citoyen.nes et donner la priorité à la santé environnementale. 

    Depuis l’émission Vert de Rage révélant la contamination aux PFAS du sud de Lyon, citoyen.nes, associations, syndicats et politiques se mobilisent pour l’interdiction des PFAS et pour établir les responsabilités dans la pollution du sud de Lyon. Le 30 mai dernier, le Sénat a adopté la proposition de loi interdisant l’utilisation de PFAS dès 2026 pour les textiles d’habillement (2030 pour les autres textiles), les produits de fart et les cosmétiques. ​​Les polluants éternels sont à l’origine de graves problèmes pour la santé : cancers, problèmes liés à la thyroïdes, infertilité… Il est donc incompréhensible qu’au moment où la société demande l’interdiction des PFAS, DAIKIN en augmente ses rejets dans l’air. 

    Citation de Jean Paul Massonnat, membre de Bien vivre à Pierre-Bénite : « L’association Bien vivre à Pierre-Bénite a décidé d’attaquer en justice un arrêté qui ne met pas toutes les chances du côté de la population. Après 2 ans de découverte du scandale de la contamination par les PFAS, il est grand temps que les organismes ou les personnes chargés de nous protéger remplissent efficacement leur mission, et rétablissent une confiance qu’ils n’auraient jamais dû perdre. Difficile d’imaginer qu’un industriel agrandisse de 1400m² son unité de production sans inconvénient ? Nous sommes privés d’une enquête environnementale qui aurait permis de lever le voile sur des activités maintenues volontairement dans l’obscurité. Nous, riverains, exigeons de la transparence.”

    Citation de Camille Panisset, secrétaire de Notre Affaire à Tous – Lyon  : “Pour les riverains mobilisés depuis deux ans contre la pollution aux PFAS, l’extension de l’activité de DAIKIN prouve une nouvelle fois l’irresponsabilité des industriels et la complaisance de la Préfecture face à l’augmentation des rejets de PFAS nocifs pour leur santé et le vivant en général. La situation lyonnaise est en total décalage avec la prise de conscience nationale du scandale des PFAS, au moment même où le législateur s’en saisit. ” 

    Le collectif PFAS contre terre apporte son soutien à cette action en justice, par une pétition : “Cette nouvelle unité de production est un véritable scandale dans le scandale car rendue opérationnelle par l’État dans le mépris total des populations riveraines contaminées. La préfecture affirme que « cette unité ne conduit pas à des rejets [de molécules PFAS] dans l’eau » alors que ce sont les rejets aériens qui sont dénoncés s’agissant de Daikin. Est-ce cela le « crime industriel facilité par l’État ? ». 

    Initiative citoyenne, Bien vivre à Pierre-Bénite, PFAS contre terre et Notre Affaire à Tous sont mobilisés au nom du principe de précaution pour annuler cet arrêté préfectoral incompréhensible qui fait monter d’un cran la mobilisation et la colère des riverains. La demande de suspension sera examinée par le Tribunal administratif de Lyon le 17 juin prochain. 

    Contact presse

    Marine Coynel, chargée de communication de Notre Affaire à Tous :
    marine.coynel@notreaffaireatous.org

  • Coupes budgétaires : Notre Affaire à Tous conteste devant le Conseil d’État le décret annulant 10 milliards d’euros de crédits

    Coupes budgétaires : Notre Affaire à Tous conteste devant le Conseil d’État le décret annulant 10 milliards d’euros de crédits

    Communiqué de presse – Notre Affaire à Tous s’associe à la requête introduite devant le Conseil d’État par l’Université Lyon 3 contestant la légalité du décret annulant 10 milliards de crédits. L’association dénonce ces coupes budgétaires arbitraires et contestables juridiquement, qui touchent particulièrement la protection de l’environnement.

    Notre Affaire à Tous s’inquiète de voir ainsi unilatéralement remis en cause les arbitrages et équilibres politiques votés moins de deux mois auparavant par les parlementaires, le tout en ayant eu recours à l’article 49-3 de la Constitution. La possibilité d’annuler des crédits doit être justifiée par un contexte exceptionnel et imprévisible, conduisant à une détérioration de l’équilibre budgétaire. Elle ne doit pas devenir un moyen pour le Gouvernement de faire passer des arbitrages budgétaires pour lesquels il n’obtient pas de majorité parlementaire. Pour l’association, une annulation de crédits d’une telle ampleur constitue une atteinte importante à la séparation des pouvoirs et remet en cause la souveraineté du parlement en matière budgétaire.

    La protection de l’environnement est la mission la plus touchée quantitativement par les annulations de crédits puisque ce sont plus de 2 milliards d’euros qui disparaissent, soit  plus de 10% des crédits prévus pour l’écologie dans le budget initial.

    Parmi les programmes les plus touchés, le programme MaPrimeRénov’ est ciblé par le gouvernement à hauteur de 1 milliard d’euros environ. Ce programme est pourtant présenté par le gouvernement lui-même comme la principale action pour la rénovation énergétique des habitations des Français.e.s. Le gouvernement souligne également que “MaPrimeRénov bénéficie davantage aux catégories de ressources modestes et très modestes qui représentent 68 % des bénéficiaires.” (1) Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous, “Ces coupes budgétaires représentent “en même temps” une atteinte aux ambitions environnementales de l’État et une mesure particulièrement injuste socialement. Cette décision aurait dû faire l’objet d’un débat parlementaire.” 

    Note

    (1) Annexe au projet de loi de finances pour 2024, Effort financier de l’Etat en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments, p. 16

    contact presse

    Adeline Paradeise, juriste en droit de l’environnement – adeline.paradeise@notreaffaireatous.org 

  • Lettre ouverte de la société civile : « Le climat mérite un vrai débat »

    Lettre ouverte à Monsieur le Premier ministre, Jean Castex et à Monsieur Richard Ferrand, Président de l’Assemblée nationale sur le manque de débat démocratique sur le projet de loi climat et résilience


    Paris, 22 mars 2021,

    Monsieur le Premier Ministre,
    Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,

    L’examen du projet de loi Climat et Résilience a débuté lundi 8 mars en commission spéciale. 25 % des 5000 amendements déposés par les députés ont été jugés irrecevables au motif qu’ils ne seraient pas en lien avec le projet de loi. La plupart d’entre eux visaient pourtant à permettre l’atteinte de nos objectifs climatiques ou reprenaient des propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat.

    La présidente de la commission spéciale de l’Assemblée nationale, Mme Maillart-Méhaignerie, juge que ces mesures sont hors du champ de la loi et les considère comme des « cavaliers législatifs » au titre de l’article 45 de la Constitution. Cet article établit pourtant que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte ».

    La jurisprudence du Conseil constitutionnel tend à en faire une interprétation plus limitative selon laquelle le champ de la loi est déterminé par le contenu du texte initial, donc par le Gouvernement. Alors que les parlementaires devraient défendre leur liberté de faire évoluer le texte et faire évoluer la jurisprudence, la présidente de la commission spéciale applique ici une interprétation particulièrement restrictive avec un taux d’irrecevabilité exceptionnellement important.

    Il s’agit aussi d’un refus de débat démocratique. En somme, le gouvernement en présentant un texte diminué, abandonnant des pans entiers des propositions de la convention citoyenne, n’a pas seulement trahi sa promesse envers les citoyens mais empêche le Parlement de débattre de ces sujets. Les députés de tous bords politiques qui avaient repris le flambeau des citoyens en déposant des amendements reprenant des mesures de la Convention Citoyenne mal, peu ou pas mises en œuvre jusqu’ici ont été déboutés.

    Alors que le Tribunal administratif de Paris vient de reconnaître les “carences fautives” de l’État dans la lutte contre le réchauffement climatique et que le Haut Conseil pour le Climat a jugé que le texte présenté par le gouvernement ne permettra pas de tenir nos engagements, cette restriction du débat parlementaire donne une mauvaise image du sérieux de nos institutions dans la lutte contre le dérèglement climatique.
    En plus de la mise à l’écart des amendements jugés irrecevables s’ajoute la décision d’appliquer un temps législatif programmé (TLP) pour la Séance plénière. Un temps de parole réduit de plus de moitié qui, de facto, empêchera certains amendements d’être défendus une fois le temps du groupe politique écoulé.
    Comment expliquer que dans une loi « climat et résilience », les députés ne puissent pas porter des amendements visant à renforcer la responsabilité environnementale des grandes entreprises et des acteurs financiers, à développer le transport ferroviaire, à mieux préserver les forêts, à limiter l’industrialisation de l’élevage ou à renforcer le dispositif du Forfait Mobilité Durable?

    Ce texte est issu d’un processus démocratique inédit visant à reconnecter les citoyens avec la décision publique et permettre l’adoption de mesures ambitieuses pour le climat acceptables par tous. La représentation nationale se doit d’être à la hauteur de cet enjeu.

    Monsieur le Premier ministre, Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, nous vous demandons de restaurer les conditions nécessaires au bon déroulement du débat parlementaire en assurant que les amendements ne soient pas censurés de la même manière lors du débat en séance publique.

    Signatures

    • Alofa Tuvalu
    • Alternatiba – Amis de la Terre France
    • ANV-COP21
    • Association négaWatt
    • Attac France
    • Auxilia Conseil
    • Canopée Forêts Vivantes
    • CCFD-Terre Solidaire – CFDT
    • Citoyens Pour Le Climat – CPLC
    • CJD
    • CLER Réseau pour la transition énergétique
    • CliMates
    • Commerce Equitable France
    • Confédération Paysanne
    • Enercoop
    • FAGE
    • France Nature Environnement
    • Fédération française des Usagers de la Bicyclette (FUB)
    • Fondation Abbé Pierre
    • Fondation Nicolas Hulot
    • France Nature Environnement
    • Geres 
    • Greenlobby 
    • Greenpeace
    • Hespul
    • Institut Veblen
    • Mouvement Impact France
    • Notre Affaire à Tous – NAAT
    • Oxfam France
    • Penser L’après
    • Reclaim Finance
    • REFEDD
    • Réseau Action Climat
    • Résilience France
    • Together For Earth
    • Transition France
    • Union syndicale Solidaires
    • WWF France
    • Zero Waste France
  • CP / Sortie de l’ouvrage « Les grandes affaires climatiques »

    Communiqué de presse – 21 octobre 2020

    Il y a quelques semaines est paru l’ouvrage « Les grandes affaires climatiques », sous la direction de Christel Cournil. En s’inscrivant dans la tradition juridique des célèbres « Grands arrêts », cet ouvrage est inédit dans sa démarche. Cette publication collective émanant de plus d’une trentaine d’auteurs aux profils variés (universitaires confirmés, jeunes chercheurs, avocats, juristes d’association), dont une dizaine de membres de Notre Affaire à Tous, a pour ambition de mettre en exergue les principaux contours de la « Justice climatique».  

    L’élaboration d’un tel ouvrage portant sur les grandes affaires climatiques peut étonner aux premiers abords tant le défi est de taille. Certes si l’on s’en tient au contentieux français, – encore embryonnaire –, les quelques espèces pendantes devant le juge civil ou administratif ne suffisent pas pour en faire un ouvrage. Si l’on élargit l’étude du contentieux climatique à l’échelle européenne, on trouve des espèces particulièrement innovantes sur le plan des stratégies judiciaires engagées (V. affaire People’s Climate case) et des recours déjà jugées devant les prétoires nationaux comme la désormais célèbre affaire néerlandaise Urgenda.

    La ligne éditoriale de ce projet a consisté à ne pas se limiter à cette échelle régionale en en élargissant le champ pour proposer le premier livre commentant les principales affaires climatiques du monde. L’ouvrage rassemble un échantillon représentatif d’affaires contentieuses rendues ou encore en instance dans le monde sur des questions climatiques très variées (demande indemnitaire de « victimes climatiques », contestation de projets jugés « climaticides », manque d’ambition climatique des États, non-respect des trajectoires de réduction des gaz à effet de serre, demande de désinvestissements dans les énergies fossiles, poursuites d’activistes, etc.). 

    Offrant un panorama sur une progressive métamorphose de la responsabilité des États et des entreprises, cet ouvrage permet de mieux cerner les arguments juridiques soulevés devant des « juges » très différents (juridiction nationale, tribunal régional, quasi-juridiction nationale ou internationale, mécanisme non juridictionnel, etc.). Ainsi dévoilées « côté à côte », ces affaires climatiques mettent en perspective autant les obstacles particulièrement importants que rencontrent les requérants que les « fenêtres » parfois semblables qu’ouvrent certains juges dans des systèmes juridiques pourtant très différents. Dès lors, les cruciales questions ayant trait à l’évolution de la responsabilité, à la justiciabilité en matière climatique, à l’intérêt à agir, à l’établissement du lien de causalité et à la délicate répartition de la « part » de responsabilité des nombreux émetteurs de gaz à effets de serre, y seront exposées. Sont également retracés les points communs entre les affaires (réception de l’Accord de Paris, invocation des droits fondamentaux, contrôle des actes réglementaires, injonction réparatrice, etc.).


    En définitive, cet ouvrage constitue un outil à la fois pratique et théorique à destination des universitaires, des avocats, des magistrats, des étudiants et des juristes des ONG qui travaillent sur la gouvernance climatique ; celle-ci devant désormais inclure les décisions rendues par les juges. 

    Pour Christel Cournil, « Ces affaires climatiques racontent des « histoires » sur les causes et les effets du changement climatique et identifient les « gagnants » et les « perdants potentiels » du changement climatique. Elles font alors ressortir divers enjeux politiques, juridiques et éthiques. La focalisation de ces contentieux sur certains types de plaignants comme des jeunes, des grands-mères, des peuples autochtones, un déplacé climatique, un fermier, un agriculteur, etc. propose un panorama de « victimes climatiques » en quête de justice ». 

    Contact presse

    Christel Cournil : christel.cournil@notreaffaireatous.org – 06 61 40 30 53 

     Christel Cournil est Professeure de droit public à Sciences Po Toulouse. Elle est membre du Laboratoire des Sciences Sociales du Politique (LASSP) et membre associé au IDPS de l’Université Sorbonne Paris Nord. Elle est également membre du Conseil d’Administration de Notre Affaire à Tous.