Catégorie : Communiqué de presse

  • CP / Bercy, pas de profits sur le dos des droits humains !

    Une statue gonflable de plus de 10 mètres de haut, représentant la justice poignardée dans le dos, est érigée devant Bercy, pour demander au gouvernement français de cesser de faire primer les profits économiques sur les droits humains et l’environnement : ces derniers mois, le ministère de l’économie a en effet fait pression pour affaiblir le projet de directive européenne sur le devoir de vigilance, notamment en ce qui concerne le secteur financier et les obligations climatiques des entreprises.

    Via cette action, nos associations et syndicats se mobilisent pour sauver l’ambition de cette directive qui pourrait enfin réguler les multinationales et apporter plus de justice aux personnes affectées dans le monde, en leur donnant accès aux tribunaux européens. 

    Paris est la première étape d’un tour d’Europe qu’effectuera la statue dans le cadre de la campagne européenne “Justice is everybody’s business”, dont la majorité de nos organisations sont membres. 

    Le choix du lieu est bien sûr hautement symbolique : les voix des personnes demandant aux décideur.ses politiques de ne pas vider de son sens la directive sur le devoir de vigilance des entreprises s’élèvent devant Bercy, représentation du pouvoir et des décisions économiques. 

    En février 2022 s’ouvrait un moment historique pour lutter contre l’impunité des multinationales, lorsque la Commission Européenne publiait enfin une proposition de directive pour imposer des obligations contraignantes aux entreprises européennes pour prévenir et faire cesser les violations des droits humains et les dommages environnementaux qui se produisent dans leurs chaînes de valeur mondiales.

    Alors que les négociations en trilogue – entre la Commission, le Conseil et le Parlement – ont commencé cet été, ce temps fort de justice est en danger du fait de la position de certains Etats membres dont la France.

    Bien que pionnière avec la loi sur le devoir de vigilance adoptée en 2017, la France fait pression pour affaiblir différents aspects du texte : elle a notamment poussé le Conseil à adopter une exclusion de facto du secteur financier (1), ce qui empêcherait d’autres pays de tenir légalement responsables des banques comme BNP Paribas, qui financent impunément l’expansion des énergies fossiles. La France est également parmi les Etats demandant de rejeter les améliorations apportées au texte par le Parlement européen en termes de renforcement des obligations climatiques et de la responsabilité juridique à y associer.

    La présidence espagnole du Conseil de l’UE sera chargée dans les prochaines semaines de demander aux Etats membres ce qu’ils sont prêts à concéder au Parlement mais aussi leurs lignes rouges. Alors que dans quelques jours les ministres européens de l’économie et des finances se réunissent à Santiago de Compostela, nous nous mobilisons à Paris pour appeler les Etats membres dont la France, à réhausser l’ambition qu’ils portent dans les négociations. 

    A cette occasion, nos organisations publient aujourd’hui un document d’analyse (2) détaillant les failles du projet de directive européenne à la lumière des premières actions en justice fondées sur la loi française sur le devoir de vigilance, et faisant des recommandations aux décideurs pour arbitrer au mieux entre les différentes versions du texte.

    Contacts

    Notes

    1. Voir l’enquête de l’Observatoire des multinationales : “La France a-t-elle torpillé le « devoir de vigilance » européen pour complaire au CAC40 et à BlackRock ?”, 4 juillet 2023
    2. Directive européenne sur le devoir de vigilance et contentieux français – Enseignements et recommandations, septembre 2023
  • CP / Procès climatique contre TotalEnergies : l’action des associations et collectivités jugée irrecevable, une décision inquiétante

    Paris, 6 juillet 2023 – Dans le contentieux climatique engagé contre TotalEnergies par une coalition d’associations et de collectivités (1), le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a jugé l’action en justice irrecevable. Reposant sur une interprétation inquiétante de la loi sur le devoir de vigilance et des dispositions relatives au préjudice écologique, cette décision vient restreindre l’accès à la justice pour les associations et collectivités. Après plusieurs années de procédure, le tribunal refuse d’examiner l’impact des activités de TotalEnergies sur le dérèglement climatique. 

    En janvier 2020, une coalition d’associations et de collectivités a assigné TotalEnergies devant le tribunal judiciaire de Nanterre. Rejointe en septembre 2022 par trois collectivités supplémentaires et Amnesty International France, la coalition demande que la pétrolière soit contrainte de prendre les mesures nécessaires pour s’aligner avec l’objectif 1,5°C de l’Accord de Paris, conformément à la loi sur le devoir de vigilance (2).

    La procédure a tout d’abord été retardée par TotalEnergies qui a contesté, sans succès, la compétence du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce. Depuis 2022, le dossier est confié au juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Paris, désormais seul compétent pour juger les affaires relatives au devoir de vigilance, chargé de trancher certaines questions de procédure.  

    Dans une ordonnance rendue ce jour, le juge de la mise en état a déclaré l’action judiciaire irrecevable. Une décision inquiétante alors que plusieurs autres actions judiciaires fondées sur la loi sur le devoir de vigilance ont également été déclarées irrecevables ces derniers mois : Projets Tilenga et EACOP en février, affaire Suez/Chili en juin, et EDF Mexique en décembre.  

    Le juge a considéré que TotalEnergies n’aurait pas régulièrement été mise en demeure au motif que les demandes formulées dans l’assignation n’étaient pas strictement identiques à celles du courrier de mise en demeure envoyé à la multinationale en juin 2019. Cette condition de la stricte identité entre les demandes de la mise en demeure et celles de l’assignation n’existe tout simplement pas dans la loi sur le devoir de vigilance.    

    Bien que la loi sur le devoir de vigilance n’impose aucune phase de « discussion » ou de « conciliation » obligatoire entre les entreprises et les associations ou personnes affectées, cette ordonnance ainsi que les précédentes décisions, prétextent un manque de dialogue pour juger irrecevables les actions judiciaires. Alors que la coalition a interpellé, échangé et rencontré les dirigeants de l’entreprise avant la mise en demeure, ce qui n’est aucunement imposé par la loi, le juge n’a pas pris en compte ces différents échanges préalables, considérant que « de simples réunions ne peuvent constituer un avertissement solennel ». D’autant plus que TotalEnergies n’a manifesté aucune volonté de dialogue et d’avancée en amont de l’action judiciaire.

    Le juge a aussi considéré que certaines associations et collectivités étaient irrecevables faute d’intérêt à agir en justice au titre de la prévention du préjudice écologique, en contradiction frontale avec la position du Conseil d’État dans la décision Grande-Synthe (3). Alors que l’action au titre du préjudice écologique est ouverte à « toute personne ayant intérêt ou qualité à agir », telles que « les associations » et « les collectivités territoriales », cette décision vient restreindre leur possibilité de saisir la justice pour prévenir les risques de dommages graves à l’environnement  causés par les activités d’une multinationale. En définitive, cette décision empêche à nouveau la tenue d’un débat judiciaire sur l’inaction climatique d’une multinationale. 

    Le juge considère par ailleurs que les collectivités n’auraient pas d’intérêt à agir, au motif que les effets du changement climatique seraient mondiaux, et pas limités à leur territoire. Ouvrir l’accès à la justice aux collectivités en matière climatique rendrait le contentieux « impossible à maîtriser », alors même qu’il s’agit aujourd’hui de la seule action engagée devant le juge judiciaire par des communes exposées aux effets de la catastrophe climatique. 

    Le devoir de vigilance oblige pourtant les multinationales à prévenir les risques d’atteintes aux droits humains, à la santé et à l’environnement causés par leurs activités. La coalition déplore donc fortement cette décision, qui va à l’encontre des nombreux rapports soulignant l’urgence climatique (4). 

    Les associations et collectivités étudient les suites judiciaires à donner à cette ordonnance. La coalition reste convaincue que la voie judiciaire est indispensable pour lutter contre l’impunité des multinationales en matière de dérèglement climatique. Malgré des premières décisions très décevantes sur les actions fondées sur le devoir de vigilance, les organisations et collectivités engagées dans la coalition continueront à mobiliser les leviers juridiques pour que les acteurs du dérèglement climatique aient à répondre des conséquences de leurs activités à l’échelle planétaire comme à l’échelle locale.   

    Contact presse

    Marine Coynel, chargée de communication chez Notre Affaire à Tous

    marine.coynel@notreaffaireatous.org

    Notes

    (1) Sherpa, Amnesty International France, France Nature Environnement, Notre Affaire à Tous, ZEA, les Eco Maires et les villes de Paris, New York, Arcueil, Bayonne, Bègles, Bize-Minervois, Centre Val de Loire, Champneuville, Correns, Est-Ensemble Grand Paris, Grenoble, La Possession, Mouans-Sartoux, Nanterre, Sevran et Vitry-le-François.

    (2) La première décision du Conseil d’Etat N° 427301 du 19 novembre 2020 a accordé l’intérêt à agir dans un contentieux climatique contre l’Etat à la ville de Grande-Synthe mais aussi à Paris, Grenoble et Notre Afffaire A Tous, trois organisations requérantes dans le présent contentieux. Plus précisément, la décision du Conseil d’Etat n’impose pas la particularité du préjudice écologique aux collectivités et associations demanderesses

    (3) La première décision du Conseil d’Etat N° 427301 du 19 novembre 2020 a accordé l’intérêt à agir dans un contentieux climatique contre l’Etat à la ville de Grande-Synthe mais aussi à Paris, Grenoble et Notre Afffaire A Tous, trois organisations requérantes dans le présent contentieux. Plus précisément, la décision du Conseil d’Etat n’impose pas la particularité du préjudice écologique aux collectivités et associations demanderesses

    (4) UN-HLEG, Integrity matters net zero commitments by businesses financial institutions, cities and region, novembre 2022 ; AIE, Net Zero by 2050, A Roadmap for the Global Energy Sector, mai 2021. 

  • CP / Pesticides et effondrement de la biodiversité : un jugement historique condamne l’Etat français

    Paris, le 29 juin 2023. Le Tribunal administratif de Paris a rendu un verdict historique dans le cadre du recours Justice pour le Vivant qui oppose 5 ONG environnementales à l’Etat et Phyteis, le lobby de l’agrochimie en France. La justice reconnaît pour la première fois la responsabilité de l’Etat dans l’effondrement du Vivant, et ses insuffisances dans l’évaluation des risques des pesticides.

    Cette journée marque un tournant dans la lutte contre l’effondrement de la biodiversité en France. Alors que l’on constate un déclin de 76 % à 82 % des insectes volants au cours des 27 dernières années en Europe[1], une diminution de 57 % des oiseaux des milieux agricoles depuis 1980[2], le jugement rendu aujourd’hui par le Tribunal administratif reconnaît, pour la première fois, l’existence d’un préjudice écologique résultant d’une contamination généralisée de l’eau, des sols et de l’air par les pesticides et de l’effondrement du vivant et la faute de l’Etat français dans cette situation. 

    Le tribunal reconnaît les failles des procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides, démontrées par les associations, et juge que ces failles relèvent de la responsabilité directe de l’Etat. Il reconnaît également un lien de causalité direct entre les insuffisances de l’évaluation des risques et le déclin de la biodiversité. 

    Le tribunal n’ordonne toutefois pas à l’Etat de revoir les méthodologies d’évaluation des risques – contrairement à ce que préconisait la rapporteure publique, estimant qu’il ne peut être établi juridiquement avec certitude qu’une meilleure évaluation permettrait de « modifier significativement la nature ou le nombre [des pesticides] mis sur le marché ». Sur ce dernier point, les associations feront appel devant la Cour administrative d’appel de Paris, et introduiront, en parallèle, un nouveau recours devant le Conseil d’Etat pour obtenir la mise en œuvre de cette décision.

    Le tribunal donne par ailleurs à l’État jusqu’au 30 juin 2024 pour : 

    • Prendre toutes les mesures utiles pour respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto ; 
    • Protéger réellement, comme la loi l’y oblige déjà, les eaux souterraines du territoire français des effets des pesticides et de leur résidus

    «  La justice a tranché : après des décennies d’inaction, l’Etat est enfin reconnu coupable de l’effondrement de la biodiversité par son incapacité à mettre en œuvre une évaluation des risques des pesticides réellement protectrice du Vivant. Mais c’est aussi sa capacité à agir et la possibilité de renverser cette situation dramatique que cette décision met en lumière. Les solutions pour inverser la tendance existent, il faut les mettre en place de toute urgence. » commentent les associations.

    La responsabilité de l’Etat et le préjudice qui en résulte, est caractérisé par : une contamination généralisée, diffuse, chronique et durable des sols et des eaux par les pesticides ; le déclin de la diversité et de la biomasse de nombreuses espèces (pollinisateurs et autres insectes, amphibiens, reptiles, oiseaux, organismes aquatiques, vers de terre, ainsi que de nombreuses autres espèces composant la faune et la flore terrestre et aquatique) ; et, plus généralement, la détérioration des chaînes trophiques et de l’ensemble des écosystèmes indispensables à la vie humaine, animale et végétale. 

    POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, les 5 ONG environnementales du collectif Justice pour le Vivant, ont fait des propositions fondées sur la science pour faire évoluer les méthodologies d’évaluation des pesticides avant leur mise sur le marché. 

    Face à la gravité de la situation, elles appellent d’ores et déjà le gouvernement à prendre ses responsabilités. Il doit revoir d’urgence les procédures d’évaluation des risques, réévaluer la dangerosité des près de 3 000 produits phytopharmaceutiques homologués en France [4], retirer du marché les substances problématiques, et s’assurer que de nouvelles substances toxiques pour le vivant n’y fassent pas leur entrée. 

    Les ONG se tiennent à la disposition des ministres concernés, des parlementaires souhaitant comprendre les implications de cette condamnation pour les prochains projets de loi de planification agricole et solliciteront l’ANSES pour lui présenter des solutions rapidement déployables.

    « Il s’agit d’une première étape indispensable pour enrayer l’extinction en cours. Face à l’urgence de la situation, L’Etat peut et doit maintenant mener les transformations nécessaires rapidement, en s’appuyant sur la science indépendante et de manière transparente », rappellent les associations.

    Contact presse

    Justine Ripoll – Notre Affaire à Tous

    justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    Sources

    [1] Cour des comptes, Le soutien à l’agriculture biologique, Rapport public thématique, juin 2022, p. 203

    [2] Birdlife International, Etat des Populations d’Oiseaux dans le Monde, 2022

    [3] Rigal, S et al. PNAS, Farmland practices are driving bird populations decline across Europe 2023. https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2216573120
    [4] ephy.anses.fr

  • CP / Courrier à la Première Ministre : La France ne doit pas abandonner son ambition en matière de Zéro artificialisation nette

    A l’occasion de l’ouverture des débats à l’assemblée nationale sur la proposition de loi sénatoriale visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires, Notre Affaire à Tous, le Réseau Action Climat, la Fondation pour la Nature et l’Homme, la Ligue pour la Protection des Oiseaux, et Humanité et Biodiversité, ont souhaité adresser leur inquiétudes et leurs demandes quant aux ambitions du dispositif ZAN.

    Madame la Première Ministre,

    La proposition de loi actuellement en discussion devant le Parlement menace profondément la réalisation de l’objectif de zéro artificialisation nette. Mesure phare de la loi climat et résilience, cette mesure est particulièrement stratégique pour permettre à la France de tenir ses engagements en matière climatique et environnementale, et constitue le cœur des arguments avancés par l’État dans les procès climatiques dont il est l’objet pour justifier son action climatique.

    La loi climat et résilience de 2021 a posé un objectif de zéro artificialisation nette en 2050, imposant une étape de réduction de l’artificialisation des sols à échéance 2031 de moitié par rapport à la décennie précédente (2011-2021). La proposition de loi sénatoriale relative au dispositif ZAN menace ces objectifs en délaissant la force contraignante du dispositif et en multipliant les dérogations à la comptabilisation des espaces artificialisés.

    Les associations de défense de l’environnement demandent à ce que soit maintenue la force contraignante élevée et chiffrée que fixe la loi climat et résilience, notamment en inscrivant explicitement dans la loi la compatibilité des SCoTs, PLUi, et cartes communales avec les SRADDETs (1) afin de garantir l’atteinte des objectifs fixés nécessaires à la préservation des sols. Afin de répondre aux craintes des territoires concernant la création d’une forme de tutelle de la Région, nous proposons également de revoir la manière dont la territorialisation du ZAN est réalisée, en donnant la responsabilité aux territoires de trouver un accord, éventuellement arbitré par l’Etat. 

    Sans mesure concrète de réduction de l’artificialisation des sols, celle-ci continuerait sur un rythme de 20 000 hectares par an (France Stratégie). Ce développement priverait les sols de leur capacité à stocker le carbone, amplifierait l’érosion de la biodiversité, et aggraverait les risques climatiques (inondations, incendies…) comme cela a été récemment le cas lors des inondations en Emilie-Romagne.

    Ces mesures sont indispensables, au vu du constat des politiques d’aménagement passées qui, malgré l’affichage croissant d’exigence de sobriété foncière, ne sont pas parvenues à réduire suffisamment le rythme de l’artificialisation des sols face au développement économique des territoires.

    Pourtant, l’Etat ainsi que les parlementaires enclenchent à bas bruit l’abandon du dispositif ZAN consacré par la loi climat et résilience, en détricotant exigence par exigence, et en accordant de multiples dérogations. Si le dispositif initial nécessitait effectivement des adaptations  afin de prendre en compte les contraintes de l’échelon local, les avancées réglementaires et législatives précédemment acquises font actuellement l’objet d’un réel retour en arrière.

    En effet, afin que le dispositif ZAN soit opposable et  territorialisé à petite échelle, la loi Climat et résilience prévoit d’accorder à la région, et notamment à travers le Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), d’importantes prérogatives en matière d’orientations d’aménagement pour une gestion économe des sols. Pour en assurer l’effectivité, la première version du décret d’application de la loi (2)(relatif à la territorialisation) impose un « rapport de compatibilité » entre les SCOTs et les règles du SRADDET fixant des objectifs chiffrés, ce afin de permettre d’assurer la déclinaison territorialisée de ces objectifs. Ce « rapport de compatibilité  » permet de s’assurer que les documents locaux d’urbanisme respectent l’esprit des objectifs régionaux qui découlent eux-mêmes de la loi climat et résilience

     Ce mécanisme est la pierre angulaire de l’effectivité de l’objectif ZAN. 

    Nous constatons avec la plus grande inquiétude que les discussions actuellement en cours, notamment la proposition de loi sénatoriale visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires, envisagent  une  régression très problématique du dispositif en remettant en cause le rapport de compatibilité au profit d’un rapport de simple « prise en compte ». Cela signifierait que les documents d’urbanisme locaux pourraient déroger aux  orientations fondamentales de la norme supérieure, le SRADDET, en justifiant de l’intérêt d’une opération particulière. Cette évolution correspondrait finalement à transformer une obligation en simple recommandation, ce qui, en somme,  reviendrait à un abandon de l’objectif ZAN. Si la difficulté résidait dans le fait que le décret SRADDET contredirait la loi, nous vous invitons à modifier la loi pour y inscrire explicitement le lien de compatibilité. 

    Le décret d’application relatif à la territorialisation de l’objectif ZAN, actuellement en révision, quant à lui, participe également à l’abandon du dispositif ZAN en transformant l’obligation d’édicter de telles règles en simple possibilité ; et en supprimant l’exigence de fixer des objectifs chiffrés de réduction du rythme de l’artificialisation des sols à échelle infrarégionale dans les règles du SRADDET. En cela, le nouveau décret prend seulement acte du fait que certaines régions ont appliqué les dispositions de la loi climat, quand d’autres ne l’ont pas fait. 

    La planification écologique qui vous est confiée impose  de consolider les objectifs clés de la loi climat et résilience, et pour ce faire de garantir la force contraignante des mesures de réduction de l’artificialisation des sols et de les préciser au travers de chiffres applicables à échelle locale. Les reculs aujourd’hui envisagés, conjugués aux nombreuses dérogations votées au Sénat, conduiraient à un abandon de fait de l’objectif ZAN.

    A terme, l’incapacité du Gouvernement à maintenir l’exigence de sobriété foncière renforcera la vulnérabilité des territoires et des populations aux impacts du dérèglement climatique. Les premiers réfugiés climatiques français sont apparus en février 2023 du fait de la montée des eaux (3) qui entraine des risques sur déjà plus de 800 communes (4), tandis qu’au cours du même mois de février, la communauté de communes du Pays de Fayence a suspendu tous les permis de construire pour 5 ans, pour cause de sécheresse, avant que le préfet du Var confirme ce choix dans un courrier du 10 mars (5). Si le ZAN doit être la politique qui planifie la fin de l’étalement urbain, nous devons avoir à l’esprit que les sécheresses portent en elles le risque d’impossibilités d’urbanisation de fait, brutales, non concertées. Que deviendront les quotas d’artificialisation des territoires frappés par les sécheresses et l’impossibilité de construire davantage ?

    Ainsi, il nous semble crucial non pas d’affaiblir la portée du ZAN, mais au contraire de conforter le dispositif et de l’articuler avec les autres domaines de planification écologique, notamment concernant la ressource en eau. 

    Au regard des catastrophes climatiques qui touchent d’ores et déjà le territoire français, il est impératif d’imposer des mesures ambitieuses de sauvegarde de la biodiversité, principale alliée face à ces phénomènes. Il est par conséquent impensable d’abandonner l’objectif ZAN. C’est pourquoi nous vous demandons, Madame la Première Ministre, une décision politique forte pour préserver et réaffirmer l’importance des objectifs de “zéro artificialisation nette”. 

    Nous vous prions d’agréer, Madame la Première Ministre, l’expression de notre très haute considération. 

    Signataires

    Jérémie Suissa, Délégué Général (Notre Affaire à Tous)

    Morgane Créach, Directrice, Réseau Action Climat

    Matthieu Orphelin, Directeur Général, Ligue pour la Protection des Oiseaux, 

    Stéphanie Clément-Grandcourt, Directrice Générale, Fondation pour la Nature et l’Homme

    Sandrine Bélier, Directrice, Humanité et Biodiversité

    Copie à M. Christophe Béchu, Ministre de la transition écologique

    1.  ou les Plan locaux d’urbanisme (PLU) non soumis à un  SCOT
    2.  Article R 4251-8-1 du Code général des collectivités territoriales
    3. France TV Info, Réchauffement climatique : quand la mer grignote le littoral, 3 février 2023 , disponible sur : <https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/rechauffement-climatique-quand-la-mer-grignote-le-littoral_5638901.html>
    4. Décret n° 2022-750 du 29 avril 2022 établissant la liste des communes dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral, disponible sur : <https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045726134>
    5. Courrier de M. Le préfet du Var, “ressource en eau et urbanisme sur le territoire de la communauté de communes du Pays de Fayence”, 10 mars 2023, disponible sur : <https://www.cc-paysdefayence.fr/wp-content/uploads/2023/03/PJ-3-Courrier-prefet-eau-urba-10.03.23-1.pdf >

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    Marine Coynel, Chargée de communication – Notre Affaire à Tous
    marine.coynel@notreaffaireatous.org

  • L’Affaire du Siècle demande une astreinte d’un milliard d’euros pour obliger l’État à agir 

    Ce mercredi 14 juin 2023, les organisations de l’Affaire du Siècle (Notre Affaire à tous, Greenpeace France et Oxfam France) ont déposé un nouveau mémoire au tribunal administratif de Paris. Elles constatent que l’État n’a pas pris toutes les mesures nécessaires pour réparer le préjudice écologique et demandent donc au tribunal de prononcer une astreinte financière de 1,1 milliard d’euros pour obliger l’État à agir.

    Action du collectif Affaire du Siècle devant le Tribunal Administratif de Paris le 14 juin 2023 dans le cadre du recours en justice pour inaction climatique. © Emeric Fohlen

    L’État n’a pas pris les mesures structurelles à la hauteur des enjeux et des besoins pour faire face au dérèglement climatique. C’est pourquoi l’Affaire du Siècle apporte un nouvel élément à la procédure qui l’oppose à l’État, représenté par plusieurs ministères du gouvernement. Les organisations demandent au tribunal administratif de Paris d’exiger de l’État qu’il prenne des mesures supplémentaires et de payer une somme de 1,1 milliard d’euros pour les neuf premiers semestres de retard déjà cumulés (122 millions d’euros pour chaque semestre de retard supplémentaire). L’objectif : forcer le gouvernement à prendre des mesures structurelles pour que la France réduise durablement ses émissions de gaz à effet de serre.

    Pour les organisations de l’Affaire du Siècle, « le gouvernement n’a pas exécuté la décision du juge prise en octobre 2021 puisqu’il n’a pas pris des mesures pour rattraper son retard. Or, plus la France tarde à mettre en place une véritable politique climatique à la hauteur des enjeux, plus la transition pour faire face aux impacts de l’inaction passée coûtera cher. En manquant à ses responsabilités aujourd’hui, le gouvernement vit à crédit des générations à venir. »


    Pour établir ce montant, les organisations se sont reposées sur la méthode Quinet, dite aussi de la « valeur de l’action pour le climat », qui a été définie par une commission d’expertise présidée par le haut-fonctionnaire Alain Quinet, à l’époque économiste au sein du cabinet du Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin.


    La valeur de l’action pour le climat évalue le coût au-dessus duquel il est plus cher de réparer l’impact de tonnes de CO2 émises que d’investir pour les éviter.

    Si le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa) a récemment calculé une baisse significative des émissions de CO2, cet effort n’est en effet pas imputable à des politiques structurelles qu’aurait prises le gouvernement pour redresser la situation, mais plutôt à des facteurs conjoncturels : les effets encore perceptibles de la crise sanitaire de 2020, un hiver particulièrement doux, la crise énergétique et l’inflation des prix ont favorisé une baisse significative de la consommation d’énergie, et donc des émissions de gaz à effet de serre.

    Le gouvernement a cependant affirmé à l’envi avoir bien rempli ses objectifs. Pourtant, il a refusé à l’Affaire du Siècle de consulter la liste des mesures mises en place, malgré l’intervention de la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) qui plaide en faveur des organisations.

    Dans un contexte où chacun peut désormais ressentir les impacts de la crise climatique, les organisations de l’Affaire du Siècle restent plus que jamais mobilisées et vigilantes pour faire en sorte que l’État prenne les mesures structurelles nécessaires pour protéger les citoyennes et les citoyens.

    © Emeric Fohlen

    Conférence de Presse de l’Affaire du Siècle à l’Académie du Climat à Paris le 14 juin 2023 dans le cadre du recours en justice pour inaction climatique. © Emeric Fohlen
  • CP / Vigilance climatique de 26 multinationales françaises : Notre Affaire à Tous alerte de nouveau sur de potentiels graves manquements à la loi dans son Benchmark 2023

    Lundi 12 juin, Notre Affaire à Tous publie sa quatrième édition 2023 du Benchmark de la vigilance climatique des multinationales qui passe au crible les mesures de vigilance climatique de 26 grandes entreprises françaises emblématiques issues de secteurs d’activités fortement émetteurs.

    Depuis la loi du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance, les grandes entreprises françaises sont tenues d’adopter un plan de vigilance qui identifie les risques d’atteinte aux droits humains et à l’environnement ainsi que les mesures de vigilance raisonnables propres à éviter la survenance de ces risques, dont ceux liés au climat. Comme les Etats qui peuvent être attaqués et condamnés pour inaction climatique (à l’image de l’Etat français dans Grande-Synthe et l’Affaire du Siècle), les grandes entreprises font également face à des risques juridiques de responsabilité en la matière. (1) 

    Notre Affaire À Tous publie cette année un quatrième rapport annuel consécutif sur la vigilance climatique mesurant les performances climatiques de 26 multinationales françaises figurant parmi les plus émettrices de gaz à effet de serre (GES).

    Les enseignements du Benchmark 2023

    En 2023, trois ans après la première édition du Benchmark, les multinationales françaises les plus émettrices reconnaissent désormais presque toutes que le devoir de vigilance s’applique au climat (2). Cependant, aucune entreprise analysée n’est en mesure de démontrer sa conformité avec nos critères de vigilance climatique qui évaluent la transparence des entreprises et la crédibilité de l’alignement avec l’Accord de Paris. 

    Si les engagements d’alignement avec l’Accord de Paris se multiplient, aucune annonce n’est pour l’instant garantie par des mesures concrètes suffisamment crédibles. Plus précisément, les objectifs climatiques publiquement affichés par les entreprises analysées ne permettraient de réduire leurs émissions d’ici 2030 que de 20% par rapport à 2019, dans le meilleur des cas. Toutefois, ces objectifs manquent sérieusement de crédibilité, et un écart important subsiste avec la cible de -50 % d’émissions d’ici 2030, correspondant à l’objectif 1,5°C de l’Accord de Paris. 

    Plus généralement, les multinationales françaises continuent de sérieusement spéculer avec le climat : elles développent des technologies de décarbonation incertaines, font dépendre les réductions d’émissions de régulations et d’aides étatiques tout en effectuant du lobbying anti-climat. Pour se justifier, nombre d’entre elles continuent d’essayer de limiter leurs responsabilités individuelles en renvoyant à la responsabilité collective et au caractère global du réchauffement climatique. Ces positions vont à l’encontre des obligations de vigilance auxquelles elles sont tenues individuellement. Les manquements manifestes de Natixis, la Société Générale, Carrefour, Casino, Bolloré, Auchan, TotalEnergies, Aéroport de Paris et BNP Paribas sont à cet égard particulièrement préoccupants. 

    Concernant la transparence au niveau des émissions directes et indirectes des entreprises, nécessaire pour identifier les leviers de décarbonation ainsi que l’étendue de la responsabilité individuelle de chaque entreprise, des progrès importants sont encore attendus pour retracer de manière sincère les émissions (en particulier au niveau du “scope 3”). Nous estimons que les 26 multinationales ont le pouvoir d’agir sur plus de 10 % des émissions mondiales.

    Ces résultats démontrent que le projet de directive européenne sur le devoir de vigilance (Corporate sustainability due diligence directive – CSDDD), dont la version du Parlement européen vise à intégrer explicitement les exigences d’identification d’émissions et d’alignement avec l’objectif 1,5°C, est nécessaire pour évacuer certains débats de principe.

    Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire A Tous, conclut : Cette année, nous constatons à nouveau que les entreprises considèrent le devoir de vigilance comme une “case à cocher” et non comme un levier de transformation de leurs modèles. Tant qu’elles ne retraceront pas correctement leurs émissions, ne reconnaîtront pas leurs obligations individuelles et ne mettront pas en place des mesures pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, elles continueront de s’exposer à des risques contentieux.”

    Notes

    [1] Au-delà de la loi sur le devoir de vigilance, toutes les personnes publiques et privées, et en particulier les grandes entreprises, doivent être prudentes et vigilantes en matière environnementale et doivent également prévenir les préjudices écologiques.

    [2] Veolia est la seule entreprise à considérer que le climat « ne relève pas du champ d’application de la loi sur le devoir de vigilance » (Veolia, Plan de vigilance 2022, p. 11).

    Contact presse

    Marine Coynel, chargée de communication chez Notre Affaire à Tous : marine.coynel@notreaffaireatous.org

  • FIFA found guilty of greenwashing

    Paris, June 7, 2023 – Red card for FIFA. Notre Affaire A Tous and 5 other European organizations have just had FIFA’s greenwashing recognized by the Commission suisse pour la loyauté, the body responsible for controlling advertising in Switzerland. This decision follows several complaints filed simultaneously in November 2022 with certain European advertising regulatory authorities (Switzerland, France, the UK, Belgium and the Netherlands), targeting the carbon neutrality claims surrounding the 2022 World Cup in Qatar.

    By November 2022, complaints against FIFA for unfair competition had been lodged by Notre Affaire A Tous (France), Alliance Climatique Suisse, Carbon Market Watch (Belgium), the New Weather Institute (UK) and Fossil Free Football and Reclame Fossietvrij (Netherlands) with the advertising regulators in each country. The plaintiff associations were astonished that FIFA could promote « a carbon-neutral World Cup ». The six associations relied in particular on a report by the NGO Carbon Market Watch (also a plaintiff), according to which the carbon neutrality claims made by the tournament organizers were grossly underestimated.

    In particular, the associations claimed that in calculating its CO2 emissions, FIFA had failed to take into account the impact of shuttle flights, the hundreds of daily flights enabling fans to connect their hotels in Dubai, Riyadh and Kuwait with Qatar, where the stadiums were located. FIFA had also only accounted for a minority of the CO2 emissions generated by the construction of the seven stadiums built for the event.  

    In a decision notified to the parties on June 6, 2023[1], the advertising regulator dismissed FIFA’s objections, stating bluntly that « FIFA sometimes worked with messages formulated in absolute terms and thus created the erroneous and misleading impression that the Football World Cup 2022 in Qatar had already achieved climate neutrality or carbon neutrality before and during the tournament. »

    The authority found that FIFA had not provided « credible evidence of how all CO2 emissions generated by the tournament could be offset in accordance with Swiss standards ».

    FIFA was therefore asked to « refrain in future from the contested allegations, in particular that the 2022 Football World Cup in Qatar would be climate and C02 neutral ».

    In pointing out the misleading nature of the advertising produced by FIFA, the Swiss Fair Trading Commission considered that the latter was in breach of the Federal Law on Unfair Competition, which could constitute a criminal offense. The decision may still be appealed by FIFA on grounds of arbitrariness. The associations are also considering what further action might be taken in other jurisdictions.

    For Jérémie Suissa, General Delegate of Notre Affaire A Tous, « this sends a very strong signal to the organizers of major international competitions: it is no longer possible to design absurdly climatic events while claiming to be carbon neutral. It is imperative that future competitions be designed to seriously integrate climate issues. »

    « This is an incredible decision! It sends out a strong message to all companies that would like to engage in Greenwashing, » enthuses Quentin Cuendet, a member of Avocats.e.s pour le Climat, the association that drew up the Swiss complaint. « This first victory is just the beginning, » adds Me Arnaud Nussbaumer, President of the association. « There are many climate-related battles to be fought, and we have considerable resources and support at our disposal to tackle them.

     [1] including non-Swiss plaintiffs, as all complaints were handled by the Swiss authority via the European coordination mechanism.

    Press contacts

    Notre Affaire à Tous

    • Jérémie Suissa (Paris, direction@notreaffaireatous.orgl) 

    Avocat-e-s pour le Climat

  • Greenwashing : Victoire contre la FIFA!

    Paris, 7 juin 2023 – Carton rouge pour la FIFA. Notre Affaire A Tous et 5 autres organisations européennes viennent de faire reconnaître le greenwashing de la FIFA devant la Commission Suisse pour la Loyauté, organisme chargé du contrôle de la publicité en Suisse. Cette décision fait suite à plusieurs plaintes déposées en novembre 2022 simultanément auprès de certaines autorités européennes de régulation de la publicité (Suisse, France, Royaume-Uni, Belgique et Pays-Bas), ciblant les allégations de neutralité carbone entourant la coupe du monde 2022 au Qatar.

    En novembre 2022, des plaintes contre la FIFA pour concurrence déloyale avaient été déposées par Notre Affaire A Tous (France), l’Alliance Climatique Suisse, Carbon Market Watch (Belgique), le New Weather Institute (Grande-Bretagne) ainsi que Fossil Free Football et Reclame Fossietvrij (Pays-Bas) devant les instances de contrôle publicitaire de chaque pays. Les associations plaignantes s’étonnaient que la FIFA puisse promouvoir « une Coupe du Monde neutre en carbone ». Les six associations s’appuient en particulier sur un rapport de l’ONG Carbon Market Watch (plaignante elle aussi) selon lequel les allégations de neutralité carbone formulées par les organisateurs du tournoi sont largement sous-estimées.

    Les associations soutenaient notamment que dans le calcul de ses émissions de CO2, la FIFA n’avait pas tenu compte de l’impact des shuttle flights, ces centaines de vols quotidiens permettant aux supporters de relier leurs hôtels à Dubai, Riyad ou encore au Kowait avec le Qatar où se trouvaient les stades. La FIFA n’avait aussi comptabilisé qu’une partie minoritaire des émissions de CO2 générées par la construction des sept stades construits pour l’événement.  

    Dans une décision notifiée aux parties le 6 juin 2023[1], l’organisme de contrôle de la publicité a écarté les objections formulées par la FIFA en estimant sans détour que « La [FIFA] a parfois travaillé en recourant à des messages formulés en termes absolus et a ainsi suscité l’impression erronée et fallacieuse selon laquelle la Coupe du monde de football 2022 au Qatar aurait déjà atteint la neutralité climatique ou la neutralité carbone avant et pendant le tournoi »

    L’autorité a estimé que la FIFA n’a pas apporté la preuve « de manière crédible de quelle manière toutes les émissions de CO2 générées par le tournoi pouvaient être compensées conformément aux standards suisses ».

    Aussi, il est demandé à la FIFA de « renoncer à l’avenir aux allégations contestées, en particulier que la Coupe du monde de football organisée en 2022 au Oatar serait neutre pour le climat et en C02 ».

    En soulignant le caractère trompeur de la publicité produite par la FIFA, la Commission suisse pour la loyauté a considéré que cette dernière contrevenait à la Loi fédérale sur la concurrence déloyale, ce qui pourrait constituer une infraction pénale. La décision peut encore faire l’objet d’un recours pour arbitraire de la part de la FIFA. Les associations étudient également quelles suites pourraient être données à ce dossier devant d’autres juridictions. 

    Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire A Tous, “c’est un signal très fort qui est envoyé aux organisateurs de grandes compétitions internationales : il n’est plus possible de concevoir des événements climatiquement absurdes tout en prétendant être neutre en carbone. Les prochaines compétitions devront impérativement être conçues de manière à intégrer sérieusement les enjeux climatiques.

    « C’est une décision incroyable ! C’est un message fort pour toutes les entreprises qui voudraient se prêter au Greenwashing » se réjouit Me Quentin Cuendet, membre d’Avocat.e.s pour le Climat, l’association qui a élaboré la plainte helvétique. « Cette première victoire n’est qu’un début » rajoute Me Arnaud Nussbaumer, Président de l’association, « les combats climatiques sont nombreux, nous disposons d’importantes ressources et de soutiens pour les affronter ».

    Contacts presse

    Contact presse Notre Affaire à Tous

    • Jérémie Suissa (Paris, direction@notreaffaireatous.org)

    Contact presse Avocat-e-s pour le Climat

    Note

    [1]   y compris aux plaignants non suisses, toutes les plaintes ayant été traitées par l’autorité suisse via le mécanisme de coordination européen.

  • CP / Vallée de la chimie : 37 victimes et 10 associations et syndicats se mobilisent contre les PFAS dans le sud de Lyon

    Lundi 5 juin 2023, Lyon – Notre Affaire à Tous – Lyon et le cabinet Kaizen Avocat ont déposé, aux côtés de 37 victimes et de 9 associations et syndicats, un référé pénal environnemental (L. 216-13 du code de l’environnement) au Tribunal judiciaire de Lyon le 25 mai 2023 à l’encontre d’ARKEMA FRANCE, entreprise chimique produisant et rejetant des PFAS à Pierre-Bénite. Nous demandons la limitation à 1kg/mois des rejets de PFAS dans l’eau par ARKEMA FRANCE, afin de réduire au maximum cette pollution et une étude des risques sanitaires visant à évaluer l’ampleur de la contamination.

    Selon le rapport de l’IGEDD (Inspection générale de l’environnement et du développement durable) de décembre 2022, ARKEMA FRANCE rejette ainsi 3,5 tonnes par an de PFAS dans le Rhône, une pollution majeure documentée par l’ANSES depuis 2011 ! La société ARKEMA FRANCE exploite en effet une activité de fabrication de produits chimiques fluorés depuis 1957. En 2013, la DREAL, chargée de contrôler l’entreprise, avait d’ailleurs déjà demandé à ARKEMA de surveiller ses rejets en PFAS, ce que l’entreprise n’a pas fait. Ces rejets massifs causent de graves pollutions de l’eau, du sol, de l’air et du lait maternel exposant ainsi la population et les salarié.e.s de l’entreprise à des risques pour leur santé. On retrouve également des PFAS dans l’alimentation, ce qui impacte particulièrement les agriculteur.rice.s et les consommateur.trice.s.

    Le 31 mai 2022, Notre Affaire à Tous – Lyon avait déposé un premier référé à l’encontre d’ARKEMA FRANCE ciblant déjà la pollution aux PFAS. Depuis, des citoyen.ne.s et associations se sont mobilisés pour demander la fin des rejets aqueux de PFAS, une véritable transparence sur la nature et l’ampleur de la pollution et et une étude des risques sanitaires pour mieux connaître la contamination. Nous nous sommes réunis pour agir en justice et faire appliquer le principe de pollueur-payeur.

    Stop à l’impunité des pollueurs !

    Plusieurs documents montrent qu’ARKEMA FRANCE devait surveiller les substances “susceptibles de s’accumuler dans l’environnement” depuis 2007 et que la DREAL avait demandé dès 2013 à la société de surveiller ses rejets. Cette obligation de surveillance n’a pas été respectée par ARKEMA FRANCE, malgré la publication du rapport de l’ANSES en 2011 indiquant l’existence d’une grave pollution aux PFAS à Pierre-Bénite. Ces pollutions ont bien été commises délibérément par ARKEMA FRANCE, au détriment de la qualité de l’eau, de l’air et des sols, et donc de la santé de la population locale.

    Les solutions pour filtrer les PFAS étaient également connues, puisque les rejets du composé 6:2 FTS par ARKEMA sont en très nette diminution grâce à la mise en place en novembre 2022 d’un traitement par ultrafiltration puis par charbons actifs suite à un arrêté préfectoral.

    Afin de stopper ce scandale sanitaire et environnemental, 37 victimes, 10 associations et syndicats demandent au procureur de la République du Tribunal judiciaire de Lyon de saisir le juge des libertés et de la détention afin de faire cesser ces pollutions et d’étudier les risques sanitaires encourus par la population aux frais du pollueur.

    Plus de 17 000 sites sont contaminés en Europe et 2 100 le sont à des taux potentiellement dangereux pour la santé (source : “Forever pollution project”). Pierre-Bénite est l’un des sites les plus contaminés de France.

    Liste des associations et syndicats requérants : Notre Affaire à Tous – Lyon, Notre Affaire à Tous, Agribio Rhône Loire, Alternatiba ANV Rhône, Réseau AMAP AURA, Bien-Vivre à Pierre-Bénite, Fédération Syndicale Unitaire, La Ruche de l’écologie, Les Amis de l’Ile de la Table-Ronde, le Réseau Environnement Santé

    Contact presse

    Camille Panisset, Notre Affaire à Tous – Lyon
    camille.panisset@notreaffaireatous.org

    Pour les questions juridiques : Me Louise Tschanz – Cabinet Kaizen Avocat
    louise.tschanz@kaizen.avocat.fr

    Dossier de presse

    DP Vallée de la chimie 2023

  • CP / Audience de Justice pour le Vivant : premier pas vers une condamnation historique de l’Etat pour inaction face à l’effondrement de la biodiversité

    Paris, le 1er juin 2023 – Ce jeudi s’est tenue l’audience historique du procès Justice pour le Vivant, dans le cadre duquel 5 ONG environnementales attaquent l’Etat pour son inaction face à l’effondrement de la biodiversité. La rapporteure publique a demandé aux juges de condamner l’Etat pour ses carences en matière d’évaluation et de gestion des risques liés aux pesticides.  

    Les ONG environnementales POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, mobilisées dans le cadre du procès Justice pour le Vivant se sont réunies au Tribunal administratif de Paris pour une audience historique qui les oppose à l’Etat et au syndicat de l’agrochimie, Phyteis. 

    En s’appuyant sur les nombreuses études scientifiques citées par les associations, la rapporteure publique a fermement reconnu le préjudice écologique causé par l’utilisation massive des pesticides en France. Constatant l’effondrement des populations d’insectes, d’oiseaux, des vers de terre et de la faune aquatique, elle a décrit la situation de « contamination généralisée, diffuse, chronique et durable » des écosystèmes.

    Dans ses conclusions, la rapporteure publique propose au tribunal de condamner l’Etat pour sa carence fautive à mettre en place une évaluation des risques réellement protectrice de la biodiversité. Elle l’invite à enjoindre l’Etat de réexaminer la méthodologie d’évaluation des risques des pesticides pour l’environnement. Les associations mobilisées dans le cadre de Justice pour le Vivant ont produit dans leurs mémoires des propositions concrètes d’évolution des tests afin de prendre en compte les effets cocktails des pesticides, leurs effets sublétaux et les impacts sur les espèces et chaînes trophiques, que la méthodologie actuelle ne prend tout simplement pas en compte.

    « Avec cette audience, le mythe selon lequel les procédures d’évaluation des risques seraient réellement protectrices de la biodiversité a été balayé. Si les conclusions de la rapporteure publique sont suivies par le Tribunal, ce que nous espérons, l’Etat sera enfin contraint de mettre en place un système d’évaluation des risques fiable et robuste  pour empêcher la commercialisation des pesticides toxiques pour la biodiversité » ont conclu les associations.

    La rapporteure publique invite également le tribunal à condamner l’Etat en raison du non-respect de ses propres engagements en matière de réduction de l’usage des pesticides sur son territoire, prescrit dans les plans Ecophyto successifs, et de protection des eaux contre la pollution par les pesticides. Elle l’enjoint de ce fait à une dépollution effective des masses d’eau.

    De manière plus générale, la rapporteure publique propose d’enjoindre à l’Etat de mettre un terme à ces différents manquements constatés et de prendre, d’ici le 15 juin 2024,  « toute mesure utile de nature à réparer le préjudice écologique et prévenir l’aggravation des dommages  ».

    A l’audience, aucun représentant du gouvernement n’était présent, laissant de fait la défense de l’Etat aux mains de l’avocat de Phytéis, le syndicat qui regroupe les principales entreprises de l’agrochimie en France (Bayer, BASF, Syngenta, …), et dont l’intervention dans la procédure a été jugée recevable par la rapporteure publique.

    Cette audience constitue une première victoire dans une procédure historique commencée en janvier 2022. Les 5 ONG avaient alors déposé un recours en carence fautive contre l’Etat pour son inaction face à l’effondrement de la biodiversité, dans laquelle elles dénoncent précisément sa défaillance dans la mise en place de procédures d’évaluation des risques et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides réellement protectrices du Vivant.

    La décision du Tribunal administratif de Paris sera rendue publique le 15 juin prochain. 

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    Contacts presse

    POLLINIS
    Cécile Barbière, directrice de la communication
    cecileb@pollinis.org

    Notre Affaire à Tous
    Justine Ripoll, responsables des campagnes
    justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    ASPAS
    Cécilia Rinaudo
    cecilia.rinaudo@aspas-nature.org

    Biodiversité sous nos pieds
    Dorian Guinard
    daguinard@yahoo.fr

    ANPER-TOS
    Elisabeth Laporte
    juridique@anper-tos.fr