Catégorie : Affaire du Siècle

  • Nouvelle étape : nos demandes devant les juges pour que l’Etat respecte sa trajectoire climatique

    Mardi 6 avril, l’Affaire du Siècle a déposé de nouveaux éléments scientifiques et juridiques, pour permettre aux juges de “déterminer avec précision les mesures qui doivent être ordonnées à l’État”[1] pour que la France respecte enfin ses engagements pour le climat et compense son inaction passée.

    Une question inédite en droit

    Rappelez-vous, le 3 février 2021, dans une décision historique, la justice a reconnu l’illégalité de l’inaction climatique de la France, et le préjudice écologique causé par ses émissions excessives de gaz à effet de serre. La faute de l’État établie, le tribunal administratif de Paris devrait désormais condamner l’État à agir en conséquence.
    Les juges ne se substituent pas au gouvernement et au parlement : le pouvoir judiciaire n’a pas pour rôle de définir la politique climatique de la France. En revanche, le tribunal peut contraindre l’État à enfin respecter ses propres engagements !

    👉 Lire les “observations complémentaires” de l’Affaire du Siècle, déposées le 6 avril

    Climat : quand l’État est hors-la-loi

    Dans les 100 pages que nous avons déposées cette semaine au tribunal, nous avons donc démontré en détail que les mesures prises jusqu’ici ne permettent pas à la France de respecter ses objectifs. Nous avons également signalé aux juges un certain nombre de points sur lesquels l’État n’applique pas la loi.

    Ainsi, par exemple, un an et demi après l’adoption de la première loi Énergie-climat du quinquennat d’Emmanuel Macron, moins de la moitié des décrets et ordonnances ont été publiés. Ces textes sont pourtant essentiels à la mise en œuvre effective de la rénovation énergétique des bâtiments, un secteur clé pour lutter contre le réchauffement climatique.

    Pire encore, alors que le secteur des transports est non seulement le secteur le plus émetteur, mais également le seul secteur dont les émissions ont augmenté depuis 1990 [2], moins d’un quart des mesures d’application de la loi d’orientation des mobilités (LOM) de 2019, existent. Un frein majeur au développement des mobilités douces et du ferroviaire…

    Nous soulignons également qu’aucun dispositif de suivi et d’évaluation des mesures n’est en place, même quand ils sont prévus dans la loi !

    En dépit des preuves, le gouvernement continue de nier

    Avec mauvaise foi, l’État continue, dans ses mémoires déposés en janvier, à prétendre que sa politique climatique est suffisante, et met en avant le respect des budgets carbone en 2019 et 2020. Nous rappelons donc aux juges que le budget carbone de 2019 a été rehaussé de près de 5%, soit presque au même niveau que la période 2015-2018, précisément parce que la France n’avait pas réussi à respecter ses objectifs sur cette période ! C’est comme si, pour réussir une épreuve de saut en hauteur, l’État abaissait la barre afin de la franchir plus facilement.
    Quant à 2020, si les émissions de la France ont baissé, c’est uniquement dû à la crise du Covid-19, et non à la mise en place d’actions structurantes pour le climat.

    Comme dans son précédent mémoire, l’État joue la carte de la quantité plutôt que de la qualité et affirme que de nombreuses mesures ont été mises en place… sans les détailler, ni justifier de leur impact supposé sur les émissions de gaz à effet de serre françaises.

    Ainsi par exemple, dans le secteur des bâtiments, l’étude réalisée par Carbone 4 pour l’Affaire du Siècle, montre qu’au mieux, les mesures engagées et vantées par le gouvernement “ne permettraient d’effectuer qu’un peu plus de la moitié des rénovations requises par la Stratégie nationale bas carbone sur la période (2,7 millions contre 4,5 millions) pour espérer atteindre les objectifs climat de la France sur le résidentiel.

    Sur les transports, l’État met en avant le soutien à l’achat de “véhicules à faibles émissions”, alors même que le Haut Conseil pour le Climat juge cette mesure “ambigüe” et signale que “le seuil d’éligibilité actuel est néanmoins totalement incohérent avec le signal d’une transition bas-carbone rapide.” L’État est par contre particulièrement silencieux sur son absence de soutien au ferroviaire, un levier pourtant essentiel pour la transition écologique…

    La France doit agir, vite

    Nous demandons donc aux juges de contraindre l’État à agir, et en particulier à mettre en place les mesures nécessaires et prévues par la loi, pour :

    • respecter les objectifs de réduction des émissions de GES qu’il s’est fixés ;
    • développer les transports ferroviaires ;
    • faire véritablement évoluer le parc automobile français vers des véhicules à faibles émissions ;
    • soutenir les mobilités douces ;
    • rénover effectivement 500 000 logements par an ;
    • rattraper le retard accumulé par le passé sur la rénovation énergétique ;
    • augmenter la surface agricole en bio ;
    • réduire la consommation d’engrais ;
    • réduire la consommation de viande ;
    • effectuer un suivi et une évaluation sincères de la politique climatique de la France.

    Nous insistons sur l’urgence qu’il y a à agir, comme le tribunal l’a lui-même souligné, “le non-respect de la trajectoire [que l’État] s’est fixée pour atteindre ces objectifs engendre des émissions supplémentaires de gaz à effet de serre, qui se cumuleront avec les précédentes et produiront des effets pendant toute la durée de vie de ces gaz dans l’atmosphère, soit environ 100 ans, aggravant ainsi le préjudice écologique”.

    Une nouvelle feuille de route pour la France est nécessaire

    Un texte en particulier encadre la politique climatique de la France : la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), qui est censée être notre feuille de route pour arriver à la neutralité carbone en 2050.
    Or la SNBC, telle qu’elle est rédigée, présente de nombreuses limites. D’une part, la trajectoire prévue n’est pas crédible, en repoussant l’essentiel de l’effort de réduction à plus tard. D’autre part, la SNBC ne prend en compte que les “émissions territoriales” de la France, c’est-à-dire uniquement les gaz à effet de serre émis sur le territoire français, et ne comptabilise donc pas les émissions liées au transport international et les “émissions importées”, celles générées par la fabrication à l’étranger de produits consommés en France. Ces dernières représentent pourtant 57% de notre empreinte carbone.

    Enfin, l’Union européenne est sur le point de relever à 55% (contre 40% aujourd’hui) l’objectif de réduction des émissions à l’horizon 2030, il faut donc dès maintenant anticiper l’effort supplémentaire.

    C’est pourquoi nous demandons également à la justice d’ordonner à l’État de revoir sa copie, et de réécrire une politique climatique qui permette effectivement à la France de respecter ses engagements pour le climat.

    👉 Lire les “observations complémentaires” de l’Affaire du Siècle, déposées le 6 avril

    Les prochaines étapes

    L’État peut à nouveau déposer des mémoires pour faire valoir ses arguments, auxquels nous répondrons si cela nous semble nécessaire. Les juges examineront en détail les faits et arguments exposés, puis fixeront une nouvelle date d’audience.
    Le Tribunal administratif de Paris pourrait décider d’attendre la décision que rendra le Conseil d’Etat sur le recours de Grande-Synthe, que nous soutenons également, avant de rendre son jugement dans l’Affaire du Siècle. Ce dernier pourrait donc intervenir entre l’été et la fin de l’année.

    Notes

    [1] Paragraphe 39 de la décision du tribunal administratif de Paris

    [2] Selon les statistiques du Ministère de la transition écologique et solidaire

  • CP / Jour du dérèglement : ce mercredi 17 mars 2021, l’État français entame son découvert climatique

    Le 17 mars 2021, c’est le Jour du dérèglement : la France a émis, en 77 jours, l’intégralité des gaz à effet de serre qu’elle devra émettre en une année en 2050 pour respecter son objectif de neutralité carbone. À partir de maintenant, la France vit donc à crédit du climat. Cette date toujours précoce, malgré le ralentissement des émissions de gaz à effet de serre sous l’effet des mesures sanitaires, montre bien l’ampleur du chemin qu’il reste à parcourir en trente ans pour atteindre la neutralité carbone : en effet,  à ce rythme, la neutralité carbone ne pourra être atteinte qu’en 2084, soit avec 34 ans de retard.

    Pour obtenir cette date, l’Affaire du Siècle, avec l’appui de Carbone 4, s’est fondée sur les chiffres de la Stratégie nationale bas carbone, feuille de route de la France pour mener le pays à la neutralité carbone en 2050. Pour respecter cet objectif, la France devra, selon la SNBC, émettre au plus 80 mégatonnes de CO2 par an en 2050, soit la capacité annuelle d’absorption du carbone, notamment par les forêts et les sols. Or, en 2021, malgré les mesures restrictives liées à la situation sanitaire, la France devrait tout de même émettre 389 mégatonnes de CO2 équivalent (MtCO2e).

    Le Jour du dérèglement arrive cette année douze jours plus tard que l’an dernier car les mesures sanitaires continuent de provoquer un ralentissement voire un arrêt de certains secteurs émetteurs [1]. Il s’agit d’une évolution totalement conjoncturelle, d’une situation subie, et qui ne résulte pas de nouvelles mesures politiques climatiques ambitieuses et durables. En outre, le risque d’effet rebond aussitôt les restrictions levées demeure très important. Ce fut le cas après la crise financière de 2008. 

    « Alors que l’État vient d’être condamné pour inaction climatique, il n’a plus de temps à perdre pour prendre enfin des mesures qui permettront à la France de réduire efficacement, et sur la durée, ses émissions de gaz à effet de serre, tout en respectant la justice sociale. Or le projet de loi Climat et résilience n’est pas du tout à la hauteur de l’urgence climatique [2]. Le travail parlementaire des prochaines semaines doit drastiquement en renforcer l’ambition. Le risque d’une opportunité manquée est immense, si aucune mesure d’ampleur n’est prise dans les secteurs des bâtiments, des transports et de l’agriculture, principaux postes d’émissions en France. »

    Les organisations de l’Affaire du Siècle

    Face à l’insuffisance patente de ce projet de loi, plus de 200 organisations ont appelé à une “marche pour une vraie loi climat” le 28 mars prochain, une preuve de plus que les ONG et les citoyennes et citoyens demandent des actions fortes et concrètes pour le climat.

    Méthodologie

    Le calcul a été effectué par le cabinet de conseil indépendant Carbone 4, sur demande des organisations formant l’Affaire du Siècle (Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France, et Oxfam France). Une estimation des émissions de 2021 a été réalisée sur la base de la tendance historique des émissions françaises corrigées des variations climatiques jusqu’en 2018 (source : Ministère de la transition écologique), et sur la baisse conjoncturelle des émissions observée en 2020 sous l’effet de la Covid-19 (estimation du MTES : -12% par rapport à 2019). La limite d’émissions annuelles choisie pour la neutralité carbone est celle que l’État lui-même s’est fixée dans la loi et la Stratégie nationale bas carbone : maximum 80 MtCO2e, qui correspond aux capacités prévues d’absorption du carbone en France pendant un an en 2050.Conformément aux règles de calcul des émissions territoriales de la France, ce calcul exclut les émissions liées au transport maritime et aérien ainsi que les émissions dites importées.

    Notes

    1. L’année dernière, toute l’épargne carbone de la France avait déjà été utilisée avant le premier confinement. Le jour du dérèglement arrivant le 5 mars 2020, ce dernier n’a pas reculé sous l’effet de la crise sanitaire, malgré un recul estimé des émissions françaises de 52 MtCO2e par rapport à 2019.

    2. Le Conseil national de la transition écologique (26/01), le Conseil économique, social et environnemental (27/01) et le Haut Conseil pour le Climat (23/02) ont tous les trois jugé que le projet de loi était insuffisant au regard des objectifs climatiques de la France.

    Contacts presse

    • Oxfam France : Élise Naccarato – 06 17 34 85 68
    • Greenpeace France : Kim Dallet – 06 33 58 39 46
    • Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente – 07 87 50 74 90
    • Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo – 06 86 41 71 81
  • CP / L’Affaire du Siècle dépose de nouvelles pièces dans le dossier Grande-Synthe : l’État n’en fait décidément pas assez

    Les organisations de l’Affaire du Siècle viennent de déposer de nouvelles pièces au recours de la ville de Grande-Synthe devant le Conseil d’État. Sans surprise, elles démontrent que les politiques climatiques actuelles ne permettront pas à la France d’atteindre ses objectifs à l’horizon 2030, pas plus que le projet de loi Climat et résilience présenté la semaine dernière en conseil des ministres.

    Le 19 novembre dernier, le Conseil d’État a donné trois mois au gouvernement pour « justifier que la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre à horizon 2030 pourra être respectée » [1]. Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France et Oxfam France, qui soutiennent l’action en justice de la commune de Grande-Synthe [2], ont mandaté le cabinet d’expertise indépendant Carbone 4 pour répondre à la question posée par les juges.

    La conclusion de l’étude réalisée par Carbone 4 est sans appel : « il est certain que les mesures adoptées ou envisagées par l’État, notamment dans le cadre du projet de loi Climat et résilience, ne permettront pas d’atteindre l’objectif global de réduction de 40% des émissions de GES à 2030 par rapport à 1990. » L’étude intitulée « L’État français se donne-t-il les moyens de son ambition climat ? » [3], couvre l’ensemble des secteurs d’émissions couverts par la SNBC [4], et explore en détail les mesures sur trois secteurs représentant la moitié des émissions de gaz à effet de serre de la France : le transport de personnes, le logement et l’agriculture. 

    Pour Guillaume Hannotin, l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation qui représente les organisations de l’Affaire du Siècle devant le Conseil d’État : « L’étude de Carbone 4 démontre de façon rigoureuse et transparente que des mesures supplémentaires sont nécessaires pour que la France respecte ses objectifs 2030, objectifs que le Conseil d’État a jugé contraignants le 19 novembre dernier. À l’heure où toutes les institutions du pays, en dernier lieu la juridiction administrative, reconnaissent l’urgence qu’il y a à agir contre le dérèglement climatique, l’on ne peut qu’être surpris par la posture du gouvernement consistant à dire que son action est suffisante. Il y a un véritable hiatus entre la perpétuelle affirmation d’objectifs ambitieux et les mesures mises en place. En réalité, la politique climatique de la France repose sur de la pensée magique. »

    Pour les organisations de l’Affaire du Siècle : « Alors que l’insuffisance du projet de loi Climat et résilience a été pointée du doigt de toutes parts [5], ces nouveaux éléments nous donnent bon espoir que, dès cet été, la justice ordonne à l’État de prendre enfin des mesures concrètes pour réduire effectivement les émissions de gaz à effet de serre et remettre la France sur le chemin tracé par l’Accord de Paris. L’été 2021 pourrait donc marquer un véritable tournant pour le climat ! »

    Le Conseil d’État a en effet annoncé qu’il rendrait sa décision à l’été. En cas de non-respect par l’État d’une éventuelle condamnation, le Conseil d’État a déjà annoncé un suivi et la possibilité d’une astreinte. [6]

    En parallèle, dans le recours de l’Affaire du Siècle, le tribunal administratif de Paris a reconnu, le 3 février dernier, la responsabilité de l’État français dans la crise climatique, l’illégalité de son inaction et la nécessité de réparer les dommages ainsi causés. Les juges ont donné à l’Affaire du Siècle et à l’État jusqu’au 6 avril pour produire de nouveaux arguments qui lui permettraient de « déterminer avec précision les mesures qui doivent être ordonnées à l’État » [7]. 

    Notes

    1. communiqué de presse et décision du Conseil d’État du 19 novembre 2020
    2. La commune de Grande-Synthe a déposé un recours au Conseil d’État en décembre 2018. L’Affaire du Siècle est intervenante volontaire dans le dossier et a déposé un premier mémoire en février 2020.
    3. L’étude de Carbone 4 « L’État français se donne-t-il les moyens de son ambition climat ? » démontre que « ces trois secteurs clés accuseront un retard important sur leurs objectifs » de réduction des émissions. Carbone 4 montre par exemple que le nombre de rénovations performantes attendues sur le parc de logements (2,7 millions) ne correspond qu’à un peu plus de la moitié de ce qu’il faudrait réaliser sur la période d’après la SNBC (4,5 millions).
    4. La SNBC est la Stratégie nationale bas carbone, feuille de route de l’État pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre de la France, qui fixe notamment les budgets carbone annuels.
    5. Avis du CESE ; avis du Conseil d’État ; avis du Haut Conseil pour le Climat.
    6. https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/pollution-de-l-air-et-gaz-a-effet-de-serre-suites-donnees-aux-decisions-de-juillet-et-novembre-2020 
    7. Communiqué de presse et décision du tribunal administratif de Paris

    Contacts presse

    Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo, 06 86 41 71 81 – cecilia@notreaffaireatous.org
    Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente, 07 87 50 74 90 – p.torrente@fnh.org
    Greenpeace France : Kim Dallet, 06 33 58 39 46 – kim.dallet@greenpeace.org
    Oxfam France : Marion Cosperec, 07 68 30 06 17 – mcosperec@oxfamfrance.org

  • L’Etat condamné pour inaction climatique !

    L’Etat condamné pour inaction climatique !

    ON A GAGNÉ ! Plus de deux ans après la mobilisation incroyable qui a porté l’Affaire du Siècle, nous avons remporté une victoire HISTORIQUE pour le climat !

    Pour la première fois, la justice vient de reconnaître que l’inaction climatique de l’État est illégale, que c’est une faute, qui engage sa responsabilité. C’est une avancée majeure du droit français !

    Ce jugement est une victoire de la vérité : jusqu’ici, l’État niait l’insuffisance de ses politiques climatiques, en dépit de l’accumulation de preuves. Nous espérons maintenant que la justice ne se limitera pas à reconnaître la faute de l’État, mais le contraindra aussi à prendre enfin des mesures concrètes permettant a minima de respecter ses engagements climatiques ! Cette victoire, c’est grâce à vous, grâce aux 2,3 millions de personnes qui soutiennent l’Affaire du Siècle depuis 2018.

    Un immense MERCI pour votre mobilisation ! Avec ce jugement extraordinaire, dès aujourd’hui, la justice climatique prend un nouveau tournant.

    Décryptage de cette décision historique

    Dans son jugement sur l’Affaire du Siècle, le tribunal administratif de Paris reconnaît la responsabilité de l’État français dans la crise climatique et juge illégal le non-respect de ses engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L’État est également reconnu responsable de “préjudice écologique”. Nous espèrons un jugement plus historique encore au printemps : l’Etat pourrait être condamné à prendre des mesures supplémentaires sur le climat.

    Si la décision d’aujourd’hui est historique c’est pour de multiples raisons : Le juge reconnaît, au sein de la décision, l’urgence à agir et les dangers liés au changement climatique, en citant les rapports du GIEC et en mentionnant la vulnérabilité de la population française, ce que nous documentons dans notre rapport “Un climat d’inégalités”. 

    Face à l’urgence d’agir, le juge affirme ensuite que l’Etat peut être tenu pour responsable de carence dans la lutte contre le changement climatique, car il s’est lui-même engagé, par des accords internationaux, dont l’Accord de Paris, à lutter pour réduire les effets du dérèglement climatique. A cette fin, l’Etat s’est engagé à réduire les émissions de GES de la France, pour cela il a institué des budgets carbone. Or, l’État ne respecte pas ces budgets, et le juge conclut que le non-respect du budget carbone 2015-2018 ayant abouti à une révision de cet objectif est en lien avec l’aggravation du changement climatique.

    Le juge affirme donc que l’Etat, au regard de l’inaction ayant entraîné le dépassement des objectifs, doit être considéré comme responsable d’un préjudice écologique. L’action en réparation du préjudice écologique devant le juge administratif est donc ouverte par le tribunal administratif de Paris pour la première fois.

    L’action est ouverte de manière large à toutes associations ayant dans ses statuts la protection de l’environnement. L’Etat, responsable de préjudice écologique devra d’abord réparer celui-ci en nature, la somme d’un euro étant en inadéquation avec la réalité du préjudice. Si le préjudice dure toujours, le juge pourra enjoindre à l’État de respecter ses engagements et de faire cesser le préjudice. 

    Pour juger de l’actualité du préjudice, le juge donne deux mois aux ministres pour prouver que le préjudice a bien cessé.

    Quelle suite pour l’Affaire du Siècle ?

    L’État bientôt contraint par la justice à réparer les conséquences de son inaction ?

    La procédure juridique n’est pas terminée. La reconnaissance de la faute que constitue son inaction climatique était une condition indispensable pour contraindre l’État à agir. Cette première étape historique désormais franchie, la justice doit maintenant décider s’il ordonne à l’Etat de prendre des mesures supplémentaires pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, respecter ses engagements pour le climat et lutter contre la crise climatique ! 

    Une nouvelle audience aura lieu au printemps. D’ici là, nous allons déposer de nouveaux arguments pour démontrer que les actions prévues sont insuffisantes et que la justice doit contraindre l’Etat à lutter efficacement et concrètement contre le dérèglement climatique !

    La portée de cette décision

    La décision fera date au niveau international. Parce que ce sont des actions comme ça qui poussent les citoyens à travers le monde à se lever pour demander à la justice de protéger leurs droits fondamentaux et à imposer aux gouvernements d’agir plus vite, plus fort, pour lutter contre le changement climatique, dont les conséquences déjà désastreuses aujourd’hui le seront encore plus par la suite.

    C’est d’ailleurs comme ça qu’est née notre Affaire à Tous, suite à la première victoire d’Urgenda aux Pays-Bas. Avec l’envie de faire la même chose en France, de faire reconnaître la responsabilité de l’Etat, de le pousser à agir. Et plus largement pour que la justice fasse émerger de nouvelles responsabilités en matière climatique et environnementale, notamment pour les entreprises.

    Cette nouvelle responsabilité climatique, amorcée par la décision de ce jour, Notre Affaire à Tous et des dizaines d’autres à travers le monde, œuvrent pour la voir largement reconnue, envers les acteurs publics comme privés.

    Comment vous pouvez agir

    Partagez la vidéo de cette victoire historique avec vos proches, sur Facebook, sur Twitter, sur Instagram, envoyez-leur cet email… 

    Ensemble, aujourd’hui, nous avons remporté une victoire cruciale face à l’urgence climatique. Mais ce n’est pas fini, la mobilisation doit continuer pour obliger l’Etat à agir. 

    Merci de votre soutien !

  • PR / A historic decision in the Case of the Century: the French State is found liable for its insufficient climate action

    Press release – February 3, 2020

    In its Case of the Century decision, issued on the 3rd of February 2021, the Paris Administrative court acknowledged the French State’s responsibility in the climate crisis. It also recognised that it was illegal for the State not to respect its commitments in reducing greenhouse gas emissions. The Court recognised that climate change constitutes an « environmental damage » to which the State’s inaction has contributed » An additional decision is to come in the spring: the Court may then sentence the Government to take additional climate measures.

    The organisations bringing the Case of the Century stated, « More than two years after the start of our action, supported by 2,3 million people, this decision marks the first historic victory for climate and a major step forward in French law. This decision is also a victory for the truth: until now, the State denied its lack of action on climate change, despite accumulating evidence of the contrary (regularly exceeding carbon budgets as widely acknowledged by governmental agencies and advisory councils…). The Court recognises that the new « Climate » bill is not sufficient to reach currently fixed objectives. We very much hope that justice will not limit itself to recognising the State’s fault, but will also force it to take concrete measures to respect its climate commitments. »

    The French State’s lack of sufficient action against climate change is recognised for the first time

    The Court judged that the French State is at fault for not adopting sufficient measures to fight climate change and reduce France’s greenhouse gas emissions up to  the objectives that France set for itself. It is the first time that a French court has recognised that the State is accountable for climate inaction. With such recognition of the State’s fault, every direct climate change victim in France will be able to turn to justice to claim for damages. The State will have to face its responsibility for years of insufficient climate action.

    The State’s insufficient climate action is directly harmful to the environment

    The Court has also recognised « that the State contributed to the harm done to the environment (the « environmental damage ») by exceeding France’s annual carbon budgets ». This judgment is a first in French law in that public entities are now as liable for pure environmental damage as private entities.

    The Court likely to mandate the State to repair the consequences of its inaction

    An additional court decision in the Spring [2] could sentence the State to take additional measures to tangibly and effectively fight the climate crisis. Recognising  the State’s lack of sufficient climate action, which constitutes a fault, was a necessary condition to force the State to take action. With this first historic step taken, the Court must now decide how to put an end to the State’s illegal actions (or lack thereof), and beyond that, how to repair the harm already done by the excess of greenhouse gas emissions compared to France’s objectives.

    Note to editors

    The court has also recognised the moral prejudice caused by the government’s insufficient action to four of the co-defendants (Notre Affaire à Tous, the Nicolas Hulot Foundation, Greenpeace France,Oxfam France).

    1. An impact study led by the government itself shows that the legislation will only allow it to go half or two thirds of the way in terms of climate objectives.

    2. The court has reopened an investigation for 2 months to allow more discussion between the State and the NGOs 

    The Court could issue this decision after the State Council’s one in the Case brought by the city of Grande Synthe and supported by the Case of the Century. In the Grande Synthe’s Case, the Court asks the State to prove it can conform to its 2030 climate objectives. In the absence of satisfactory evidence brought by the State, the State Council could sentence it to take additional action. In both cases, the Case of the Century organisations will submit further evidence proving that France does not take sufficient action.

    Contacts

    Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo – 06 86 41 71 81 – cecilia@notreaffaireatous.org
    Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente – 07 87 50 74 90 – p.torrente@fnh.org
    Greenpeace France : Kim Dallet – 06 33 58 39 46 – kim.dallet@greenpeace.org
    Oxfam France : Elise Naccarato – 06 17 34 85 68 – enaccarato@oxfamfrance.org

  • CP / Jugement historique dans l’Affaire du Siècle : l’État condamné pour inaction climatique

    Communiqué de presse – 3 février 2020

    Dans son jugement sur l’Affaire du Siècle, prononcé le 3 février 2021, le tribunal administratif de Paris reconnaît la responsabilité de l’État français dans la crise climatique et juge illégal le non-respect de ses engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L’État est également reconnu responsable de “préjudice écologique”. Les ONG requérantes dans l’Affaire du Siècle se félicitent de cette première victoire et espèrent un jugement plus historique encore au printemps : l’Etat pourrait être condamné à prendre des mesures supplémentaires sur le climat.

    Pour les organisations de l’Affaire du Siècle : “Plus de deux ans après le début de notre action, soutenue par 2,3 millions de personnes, cette décision marque une première victoire historique pour le climat et une avancée majeure du droit français. Ce jugement marque aussi une victoire de la vérité : jusqu’ici, l’État niait l’insuffisance de ses politiques climatiques, en dépit de l’accumulation de preuves (dépassement systématique des plafonds carbone, rapports du Haut Conseil pour le Climat, etc.). Alors que le nouveau projet de loi Climat de ce gouvernement est, de son propre aveu, insuffisant pour atteindre les objectifs fixés [1], nous espérons que la justice ne se limitera pas à reconnaître la faute de l’État, mais le contraindra aussi à prendre enfin des mesures concrètes permettant a minima de respecter ses engagements climatiques.”

    Pour la première fois, l’État français reconnu fautif en matière de lutte contre les changements climatiques

    La justice a tranché : l’État français commet une faute en n’adoptant pas les mesures suffisantes pour lutter contre les changements climatiques et réduire les émissions de gaz à effet de serre, conformément aux objectifs qu’il s’est lui-même fixés. C’est la première fois que la justice reconnaît que la France est responsable d’inaction climatique.

    Avec cette reconnaissance de la faute de l’État, toutes les victimes directes des changements climatiques en France pourront désormais se tourner vers la justice et s’appuyer sur ce jugement pour demander réparation des préjudices qu’elles subissent. L’État va enfin devoir assumer les conséquences de décennies d’inaction sur le climat.

    L’inaction climatique de l’État porte atteinte à l’environnement

    Le Tribunal a également reconnu le préjudice écologique, c’est-à-dire les dommages causés à l’environnement, par le dépassement par la France de ses plafonds annuels d’émissions de gaz à effet de serre. C’est une première en droit français : avec cette décision, le tribunal administratif estime qu’une personne publique, au même titre qu’une personne privée, peut être tenue responsable d’un dommage causé à l’environnement. 

    L’État bientôt contraint par la justice à réparer les conséquences de son inaction ?

    Une nouvelle décision du Tribunal au printemps [2] pourrait condamner l’État à prendre des mesures supplémentaires pour lutter concrètement et efficacement contre la crise climatique. La reconnaissance de la faute que constitue son inaction climatique était une condition indispensable pour contraindre l’État à agir. Cette première étape historique désormais franchie, la justice doit maintenant statuer sur la façon dont l’État doit s’y prendre pour mettre fin à ses actions illégales, et, au-delà, réparer les dommages causés par les gaz à effet de serre émis en trop, par rapport à ses objectifs.

    Notes aux rédactions

    Le Tribunal a également reconnu le préjudice moral causé par l’inaction de l’Etat aux quatre organisations co-requérantes (Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France et Oxfam France). 

    1. Une étude d’impact réalisée par le gouvernement lui-même montre que la loi ne permettra de n’atteindre que la moitié, voire les deux tiers des objectifs

    2. Le Tribunal a rouvert l’instruction pour deux mois afin de permettre à l’Etat et aux ONG d’échanger de nouveaux arguments sur la réparation du préjudice écologique 

    Cette seconde décision pourrait intervenir après le jugement du Conseil d’État attendu dans le dossier porté par la commune de Grande-Synthe et soutenu par l’Affaire du Siècle, dans lequel il est demandé à l’État de prouver qu’il pourra se conformer à ses objectifs climat à l’horizon 2030 [3]. En l’absence de preuves satisfaisantes apportées par l’État, le Conseil d’État pourrait le condamner à prendre des mesures supplémentaires. 

    3. La décision du Conseil d’État du 19 novembre 2020 dans le dossier Grande-Synthe

  • CP / Audience de l’Affaire du Siècle au tribunal : un pas de plus vers une victoire historique pour le climat

    Communiqué de presse – 14 janvier 2021

    L’inaction climatique de la France est une faute qui engage la responsabilité de l’Etat. C’est en substance ce qu’a déclaré Amélie Fort-Besnard, la rapporteure publique [1], lors de l’audience de l’Affaire du Siècle au tribunal administratif de Paris cet après-midi.

    Plus de deux ans après le début de la procédure initiée en décembre 2018 par Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France et Oxfam France, l’audience de l’Affaire du Siècle s’est déroulée aujourd’hui, marquant le premier grand procès climatique en France. La décision du tribunal est attendue sous quinze jours. 

    Pour les organisations de l’Affaire du Siècle : « si le tribunal suit les conclusions de la rapporteure publique, la responsabilité de l’Etat français dans le dérèglement climatique serait reconnue du fait de l’insuffisance de ses actions. Ce serait une avancée historique du droit français et une victoire majeure pour le climat et pour la protection de chacun et chacune face aux conséquences du dérèglement climatique. Toutes les victimes des changements climatiques pourraient alors s’appuyer sur cette jurisprudence pour faire valoir leur droit et obtenir réparation. L’Etat subirait alors une forte pression pour enfin mettre en œuvre les actions nécessaires pour limiter le réchauffement à 1,5°C. »

    La rapporteure publique estime, en effet, que l’Etat a bien commis une faute, qui engage sa responsabilité, en ne prenant pas toutes les mesures nécessaires pour respecter ses engagements sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elle précise que c’est l’Etat lui-même qui a déterminé sa trajectoire climatique destinée à respecter ses objectifs nationaux et ses engagements internationaux sur le climat. La rapporteure publique propose au tribunal de condamner l’Etat à verser aux ONG la somme d’1 euro symbolique pour la réparation du préjudice moral causé, ce que demandaient les associations.

    L’Affaire du Siècle demande également à la justice de contraindre l’Etat à prendre des mesures supplémentaires pour le climat, pour enfin respecter ses propres engagements. Sur ce point, la rapporteure publique n’écarte pas une injonction à agir mais conseille au Tribunal de réserver sa décision pour plus tard, afin de permettre aux ONG et à l’Etat d’échanger sur la réalité de l’action climatique de l’état, et dans l’attente que le Conseil d’Etat rende sa décision dans l’affaire de Grande-Synthe [2].

    Enfin, la rapporteure publique propose au tribunal de reconnaître l’existence d’un préjudice écologique devant les juridictions administratives, alors qu’il n’était jusqu’à présent retenu que devant les instances judiciaires. Cela constituerait une avancée majeure pour le droit environnemental. Une telle décision marquerait aussi une meilleure prise en compte de la Nature en droit. La rapporteure publique suggère au Tribunal qu’une personne publique, à l’instar d’une personne privée, pourrait être tenue responsable d’un dommage causé directement à l’environnement. Elle propose enfin de retenir que le changement climatique cause un tel dommage et que l’Etat en est en partie responsable. 

    L’inadéquation de l’action de l’Etat face à la crise climatique est désormais soulignée, démontrée et pointée du doigt de toutes parts. Pourtant, le projet de loi issu de la Convention citoyenne pour le climat, qui sera débattu en mars prochain au Parlement, est, de l’aveu même de l’Etat, insuffisant pour lui permettre de respecter ses objectifs climatiques [3]. La balle est désormais dans le camp du gouvernement pour enfin revoir sa copie et prendre les mesures ambitieuses et nécessaires pour lutter contre le changement climatique.

    Notes aux rédactions

    [1] Rapporteure publique : magistrate indépendante qui propose au Tribunal une analyse complète du droit existant pour guider la décision et faire évoluer le droit si nécessaire.

    [2] L’Etat a versé au dossier, après la clôture de l’instruction, deux mémoires sur l’injonction à agir dont les avocates et avocats des ONG n’ont pas eu accès en amont de l’audience du 14 janvier. Ce délai permettra un débat contradictoire. 

    [3] Une étude d’impact réalisée par le gouvernement lui-même montre que la loi ne permettra de réaliser qu’au maximum la moitié ou les deux tiers du chemin.  

    Contacts presse :

    Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo – 06 86 41 71 81 – cecilia@notreaffaireatous.org 

    Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente – 07 87 50 74 90 – p.torrente@fnh.org 

    Greenpeace France : Kim Dallet – 06 33 58 39 46 – kim.dallet@greenpeace.org 

    Oxfam France : Marion Cosperec – 07 68 30 06 17 – mcosperec@oxfamfrance.org 

  • CP / L’Affaire du Siècle au Tribunal : l’Etat a rendez-vous aujourd’hui avec 2,3 millions de personnes

    Lancé il y a plus de deux ans le recours en justice contre l’inaction climatique de l’État porté par Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France et Oxfam France, arrive enfin à son dénouement : son audience au tribunal administratif de Paris aura lieu aujourd’hui à 13h45. Le jugement devrait ensuite être rendu sous quinzaine.

    Télécharger les images de l’action

    Nous sommes 2,3 millions » : c’est le message inscrit ce matin sur une affiche géante de 3m sur 30m posée sur la voie Georges Pompidou, à deux pas du tribunal administratif de Paris, par des citoyen·ne·s soutenant l’Affaire du Siècle. Une action symbolique qui vise à rappeler à l’État qu’il fait face aujourd’hui aux 2,3 millions de signataires de la pétition en soutien au recours (pétition en ligne la plus signée de l’histoire en France).

    Alors que la crise climatique reste au plus haut des préoccupations des Français·es1 même avec la crise sanitaire, et que de nouveaux records de chaleur ont été battus en 2020, l’État ne cesse de repousser le passage à l’action. Les émissions de gaz à effet de serre pendant ce quinquennat ont continué de baisser deux fois trop lentement par rapport aux trajectoires prévues dans la loi. Le Haut conseil pour le climat analysait en décembre dernier que deux tiers du plan de relance n’allait pas dans le bon sens et risquait de contribuer à la hausse des émissions. Enfin, le projet de loi sur le climat faisant suite à la Convention Citoyenne, rabote ou supprime de nombreuses propositions de la Convention, si bien qu’il ne permettra pas d’atteindre l’objectif d’au moins 40% de baisse des émissions à 2030 par rapport à 1990 – et donc encore moins le nouvel objectif européen d’au moins 55% de réduction en 2030.

    Une étape décisive pour la justice climatique

    Qu’est-ce qui se joue à cette audience ? Le rapporteur public présentera ses conclusions sur le dossier juridique de l’Affaire du Siècle, c’est-à-dire la décision qu’il recommande au tribunal de prendre. Les avocat·e·s des 4 organisations requérantes rappelleront ensuite les obligations climatiques de l’État et les manquements à ses engagements. L’État pourra à son tour s’exprimer. Le Tribunal enverra ensuite l’affaire en délibéré et pourrait annoncer la date à laquelle il rendra sa décision, généralement sous quinze jours.

    Que peut obtenir l’Affaire du Siècle ?

    Les organisations de l’Affaire du Siècle sont optimistes sur le fait que le tribunal reconnaisse l’inaction climatique de l’État, c’est-à-dire la « carence fautive » que constitue le non-respect par l’État des objectifs de réduction de gaz à effet de serre inscrits dans de multiples textes de loi. Les magistrats pourraient également contraindre l’État à prendre les mesures nécessaires pour atteindre ses engagements à l’horizon 2030 et 2050.

    Enfin, nous espérons que la justice reconnaisse l’obligation générale faite à l’État de lutter contre les changements climatiques, qui découle notamment de la Charte de l’Environnement de 2004, de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Une telle décision serait historique et inscrirait dans le droit que la lutte contre les changements climatiques est indispensable à la protection des droits fondamentaux.

    Le levier juridique joue désormais un rôle essentiel face à la crise climatique : le 19 novembre dernier, dans le cadre du dossier de Grande-Synthe2, le Conseil d’État a affirmé le caractère contraignant des objectifs climatiques inscrits dans la loi (ce qui n’était jusqu’alors pas le cas), et a donné trois mois au gouvernement pour justifier qu’il mettait bien en place toutes les mesures nécessaires pour respecter ses engagements3. Aux Pays-Bas, en décembre 2019, la Cour Suprême a confirmé l’obligation faite à l’État de réduire ses émissions de 25% par rapport aux niveaux de 1990. Le tribunal administratif de Paris pourrait ainsi s’inscrire dans la continuité de cette dynamique, et rajouter une pierre à l’édifice en ordonnant à la France d’agir dès à présent.

    Notes

    1. Les Français face au changement climatique, sondage Kantar pour Oxfam France, décembre 2020.
    2. L’Affaire du Siècle est intervenante volontaire dans le dossier.
    3. Émissions de gaz à effet de serre : le Gouvernement doit justifier sous 3 mois que la trajectoire de réduction à horizon 2030 pourra être respectée, communiqué

    Contacts presse

    Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo, 06 86 41 71 81 – cecilia@notreaffaireatous.org
    Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente, 07 87 50 74 90 – p.torrente@fnh.org
    Greenpeace France : Kim Dallet, 06 33 58 39 46 – kim.dallet@greenpeace.org
    Oxfam France : Marion Cosperec, 07 68 30 06 17 – mcosperec@oxfamfrance.org

  • The Case of the Century: Chronology of the legal action

    Why turn to the courts?

    State inaction is illegal! The state is obliged to respect its national, European and international commitments and to protect its citizens’ human rights. The victims of climate change are now visible. Citizens have clearly understood the widening gap between words and deeds, and that nothing is really being done today to counter the current climate crisis. 

    All means of action have been used: individual actions, citizen mobilizations, boycotts as well as non-violent resistance. But neither the big polluters nor the States have answered the citizens and scientists calls for climate action. Today, France is not keeping its commitments, even those it has set itself. 

    December 18, 2018: launch of the Case of the Century

    On 18 December 2018, Notre Affaire à Tous, in partnership with the Fondation pour la Nature et l’Homme, Greenpeace France and Oxfam France, initiated « l’Affaire du Siècle », the climate litigation case against the French State. The aim of this case is to have the judge recognise the general obligation of the French State to act in the fight against climate change, in order to protect French citizens’ rights against the dangerous impacts of climate change. The petition of support was signed by more than 2 million people in just a few weeks.

    March 14, 2019: filing of the summary request at the Administrative Court of Paris

    On February 15, 2019, the Minister of the Ecological and Solidary Transition rejected the request of NGOs Notre Affaire à Tous, Greenpeace France, Oxfam France and the Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme. They were seeking, on the one hand, to get compensation for the damages suffered as a result of the State’s faults in the fight against climate change and, on the other hand, to urge the State to put an end to all of its failures concerning climate issues.

    On Thursday, March 14, 2019, they filed their lawsuit tackling the State’s inaction over climate change via a « summary request » before the Administrative Court of Paris.

    May 20, 2019: Filing of the additional brief to the Court

    Following the summary request filed for the Case of the Century before the Paris Administrative Court on March 14, the lawyers of Notre Affaire à Tous, the Nicolas Hulot Foundation for Nature and Mankind, Greenpeace France and Oxfam France filed an additional brief detailing all the arguments of the climate litigation case against the French State for climate inaction. This filing officially launched the beginning of the trial period.

    June 24, 2020: The State files its reply

    Nearly sixteen months after the start of the case, the State finally responds to the arguments filed against it by Notre Affaire à Tous, the Nicolas Hulot Foundation, Greenpeace France and Oxfam France, for the Case of the Century. In its 18-page defense brief, the State rejects the arguments presented by the co-plaintiff organizations and denies the deficiencies pointed out, even though they had, in the meantime, been confirmed by the French High Council for the Climate. This response comes at a time when two other organizations – the Fondation Abbé Pierre and the Fédération Nationale d’Agriculture Biologique – are presenting their arguments in support of the Case of the Century to the court.

    September 4, 2020: The Case of the Century files its reply to the State’s arguments

    Our lawyers filed our « reply brief » (i.e. our counter-arguments) on September 4, 2020 and 100 testimonies from the « Climate Witnesses » platform launched by the Case of the Century in December 2019. 

    In the reply brief, we remind the court that the responsibility of the State is indeed engaged, by demonstrating that it failed to establish an effective legal framework, and to implement the human and financial means to ensure its respect. The State has a crucial role to play, as regulator, investor and catalyst at all levels. The Case of the Century also demonstrates that by failing to meet its targets for reducing greenhouse gas emissions, energy efficiency and renewable energies, it has itself directly contributed to the climate crisis: between 2015 and 2019, France emitted approximately 89 million tons of CO2 equivalent in excess of its targets – the equivalent of two and a half months of emissions for the entire country (at the pre-covid rate). 

    January 14, 2021: Hearing of the Case of the Century

    The hearing of the Case of the Century will take place before the Paris Administrative Court on January 14, 2021 at 1:45 pm, more than two years after the launch of this unprecedented legal action against the State’s climate inaction. 

    At the hearing on Thursday, the public rapporteur will present his conclusions, i.e., the decision he recommends the court to take. The lawyers of the Case of the Century, who have demonstrated the State’s faults, will then take the floor to recall our arguments :

    • The State has an obligation to protect us in the face of the climate crisis, yet it is far from respecting its commitments:
    • France has systematically exceeded the carbon ceilings it had set for itself;
    • The target of 23% renewable energy in 2020 is not respected;
    • The delay in the energy renovation of buildings is such that the pace should be multiplied by 10 by 2030;
    • Greenhouse gas emissions in the transport sector have fallen by only 1.5%, whereas the target was -15%!

    The State, as a defendant, is then also supposed to take the floor. It is not supposed to develop new arguments. The Court is expected to render its decision about two weeks after the hearing, at the end of January.

  • 14 janvier 2021 : L’Affaire du Siècle au Tribunal

    14 janvier 2021 : L’Affaire du Siècle au Tribunal

    Le 14 janvier 2021, plus de deux ans après le lancement de l’action en justice contre l’Etat français et le soutien de plus de 2,3 millions de personnes, l’Affaire du Siècle avait rendez-vous au tribunal pour son audience ! La décision finale devrait ensuite être rendue dans 15 jours.

    L’inaction climatique de la France est une faute qui engage la responsabilité de l’Etat” : c’est ce qu’a dit la rapporteure publique à l’audience tant attendue de l’Affaire du Siècle au Tribunal administratif de Paris, le 14 janvier ! Si le tribunal suit les conclusions de la rapporteure publique (ce qui est généralement le cas au tribunal administratif), la responsabilité de l’Etat français dans le dérèglement climatique serait reconnue du fait de l’insuffisance de ses actions ! Ce serait une avancée historique du droit français et une victoire majeure pour le climat et pour la protection de chacun et chacune face aux conséquences du dérèglement climatique.

    Les conclusions énoncées marquent une avancée juridique sans précédent. Elles s’inscrivent dans le sens de l’histoire : après la bataille pour nos droits civils et politiques, puis pour nos droits sociaux au 20e siècle, le 21e siècle est celui de la construction de nos droits climatiques et environnementaux !

    Après 5 ans d’existence, nous sommes ravi-es de voir que nos arguments sont entendus ! Au moment du lancement de l’Affaire du Siècle il y a deux ans, il s’agissait d’une action en justice inédite qui s’était fortement inspirée des victoires et combats menés dans d’autres pays : notamment celle d’Urgenda aux Pays-Bas en 2015, qui a d’ailleurs été un moteur pour la création de Notre Affaire à Tous ! 5 ans plus tard, nous nous réjouissons que la rapporteure publique s’inscrive dans la lignée ambitieuse du mouvement mondial pour la justice climatique. 

    L’outil du droit est puissant et essentiel dans la lutte contre le changement climatique. Le message est clair : les Etats doivent agir. Leur inaction n’est pas seulement dangereuse et inconsciente, elle est illégale.

    Nous devrions connaître la décision dans une quinzaine de jours mais avons bon espoir que le juge suive les conclusions de la rapporteure publique. Rendez-vous pour une décision qui sera très certainement inédite et déterminante.

    Les conclusions de la rapporteure publique

    • La rapporteure publique estime que l’Etat a bien commis une faute, qui engage sa responsabilité, en ne prenant pas toutes les mesures nécessaires pour respecter ses engagements climatiques
    • Elle précise que c’est l’Etat lui-même qui a déterminé sa trajectoire climatique destinée à respecter ses objectifs et engagements internationaux.
    • La rapporteure publique n’écarte pas une injonction à agir mais conseille au Tribunal de réserver sa décision pour plus tard, afin de permettre aux ONG et à l’Etat d’échanger sur la réalité de l’action climatique de l’Etat, et dans l’attente que le Conseil d’Etat rende sa décision dans l’affaire de Grande-Synthe.
    • Enfin, la rapporteure publique propose au tribunal de reconnaître l’existence d’un préjudice écologique devant les juridictions administratives, alors qu’il n’était jusqu’à présent retenu que devant les instances judiciaires. Cela constituerait une avancée majeure pour le droit environnemental.

    L’inadéquation de l’action de l’Etat face à la crise climatique est désormais soulignée, démontrée et pointée du doigt de toutes parts. La balle est désormais dans le camp du gouvernement pour enfin revoir sa copie et prendre les mesures ambitieuses et nécessaires pour lutter contre le changement climatique. 

    La reconnaissance de la culpabilité et de la responsabilité de l’Etat pourrait ouvrir la voie pour que d’autres citoyens demandent réparation de leurs préjudices. Les victimes des changements climatiques pourraient alors s’appuyer sur cette jurisprudence pour faire valoir leur droit et obtenir réparation. L’Etat subirait alors une forte pression pour enfin mettre en œuvre les actions nécessaires pour limiter le réchauffement à 1,5°C.

    Nous étions mobilisé-es toute la journée du 14 janvier !

    « Nous sommes 2,3 millions » : le 14 janvier à 8h30, pour rappeler à l’État qu’il répondait aux 2,3 millions de personnes qui soutiennent l’Affaire du Siècle, nous avons affiché en grand ce message juste à côté du Tribunal administratif de Paris, sur une affiche géante de 3m sur 30m ! Une action symbolique qui vise à rappeler à l’État que son inaction nous impacte toutes et tous.

    Partagez notre vidéo sur les réseaux sociaux et à vos proches : montrons à l’État que nous sommes plus mobilisé-e-s que jamais !

    « Nous sommes 2,3 millions » : pour rappeler à l’État qu’il répond aux 2,3 millions de personnes qui soutiennent l’Affaire du Siècle, nous avons affiché en grand ce message juste à côté du Tribunal administratif de Paris ! Une action symbolique qui vise à rappeler à l’État que son inaction nous impacte toutes et tous.

    Partagez cette vidéo sur les réseaux sociaux et à vos proches : montrons à l’État que nous sommes plus mobilisé-e-s que jamais pour cette étape décisive !

    Alors que la crise climatique est au plus haut des préoccupations des Français·es, que de nouveaux records de chaleur ont été battus en 2020 et que les Français-es en payent déjà les conséquences, le gouvernement ne cesse de repousser le passage à l’action.

    Le levier juridique

    Le levier juridique est en passe de tenir un rôle essentiel face à la crise climatique : le 19 novembre dernier, le Conseil d’État a affirmé le caractère contraignant des objectifs climatiques inscrits dans la loi (ce qui n’était jusqu’alors pas le cas), et a donné trois mois au gouvernement pour justifier qu’il mettait bien en place toutes les mesures nécessaires pour respecter ses engagements. Aux Pays-Bas, en décembre 2019, la Cour Suprême a confirmé l’obligation faite à l’État de réduire ses émissions de 25 % par rapport aux niveaux de 1990. Le tribunal administratif de Paris pourrait ainsi s’inscrire dans la continuité de cette dynamique. 

    Si la décision est positive, cette action en justice historique et inédite pourrait faire jurisprudence et ouvrir véritablement la voie à une justice climatique en France. Grâce à ce recours, la carence de l’État en matière de lutte contre le changement climatique pourrait être actée par un tribunal. Ce tribunal pourrait imposer à l’État un renforcement et une augmentation des mesures de lutte contre le réchauffement climatique. Cette décision s’appliquerait au niveau national et sur cette base, les citoyens pourraient en bénéficier et à leur tour faire valoir leurs droits et préjudices en lien avec le changement climatique.