Catégorie : Actualités

  • Numéro 14 de la newsletter des affaires climatiques – la proposition de directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises

    Chères lectrices, chers lecteurs,

    La situation internationale nous rappelle l’urgence de notre action, celle qui œuvre pour la justice climatique et environnementale. Notamment, en ce qu’il est, désormais, vital pour nos sociétés de se libérer de notre dépendance aux énergies fossiles mais, également, de développer notre indépendance alimentaire. Indépendance, sécurité alimentaire qui devront nécessairement passer par une agriculture plus soutenable à l’échelle européenne. C’est l’outil du droit qu’a choisi Notre Affaire à Tous afin d’œuvrer pour la justice climatique et environnementale. Chaque jour, les recours portés en ces matières, à travers le monde, nous démontrent la force de cet outil. 

    Ce mois-ci, nous avons choisi de traiter, en focus de la proposition de directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises. Vous pourrez, par ailleurs, écouter notre podcast sur les suites de l’Affaire du Siècle.

    Pour notre partie contentieux climatique, nous abordons la question de la saisine, par un groupe d’enfants, du Comité de droits de l’enfant en ce que la crise climatique porterait atteinte à leurs droits fondamentaux. Egalement, l’affaire Milieudefensie avec la condamnation de la société Shell pour la méconnaissance de son devoir de vigilance en n’adoptant pas de mesures suffisantes promptes à faire baisser ses émissions de gaz à effet de serre. 

    Dans la partie contentieux environnemental général de la lettre, vous trouverez : l’appréciation, par la CEDH, du projet de forage en Arctique; la question de la responsabilité de la société absorbante du fait de la société absorbée; l’indemnisation des agriculteurs du fait de leur exposition aux produits phyotsanitaires; la décision du Conseil constitutionnel sur la prolongation de la “Montagne d’or” en Guyane et  le recours contre le déversement de produits chimiques dans les eaux vietnamiennes par une société Taïwanaise. 

    Chères lectrices, chers lecteurs, nous vous souhaitons une très bonne lecture !

    Si vous avez des questions, observations ou souhaitez contribuer à cette lettre, n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse suivante sandycassanbarnel@gmail.com.

    Bonne lecture.

    Sandy Cassan-Barnel

    Juriste, référente du groupe veille-international

    AFFAIRES CLIMATIQUES

    Devoir de vigilance européen : quelques réflexions sur la proposition de directive de la Commission

    Le 29 avril 2020, le commissaire européen à la justice Didier Reynders annonçait le lancement d’une initiative législative européenne sur le devoir de vigilance. 22 mois plus tard, le 23 février dernier, la Commission européenne a publié une proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (corporate sustainability due diligence). Malgré quelques avancées, cette proposition reste très en deçà des attentes qu’avait suscitées l’annonce initiale, et ce alors même que le Parlement avait adopté une résolution contenant des recommandations ambitieuses sur le sujet. L’intense lobbying mené depuis près de deux ans par les multinationales a laissé des traces. 

    Le devoir de vigilance, dont la loi française du 27 mars 2017 est le précurseur, vise à exiger des entreprises qu’elles identifient, préviennent et réparent les atteintes et les risques d’atteinte aux droits humains et à l’environnement susceptibles de résulter de leurs activités. Il est né du constat à la fois de l’inadaptation des règles traditionnelles d’engagement de la responsabilité et de l’échec des mécanismes de droit souple mis en œuvre de manière volontaire par les entreprises, face à la mondialisation et à la délocalisation des atteintes à l’environnement et aux droits humains qui en résulte.

    Julia Thibord

    Avocate au Barreau de Paris et Bénévole de Notre Affaire À Tous

    Podcast – Les suites de l’affaire du siècle

    Sandy Cassan-Barnel, juriste bénévole pour Notre Affaire à Tous, analyse le deuxième jugement relatif à l’Affaire du siècle dans le podcast droit de l’environnement #4. 

    Affaires climatiques

    C. Sacchi et al v. Argentine, Brésil, France, Allemagne et Turquie

    Comité des Droits de l’Enfant, 

    12 Octobre, 2021

    Le comité des droits de l’enfants considère que la crise climatique “menace gravement l’exercice des droits protégés par la Conventions”. Il affirme qu’il est compétent pour statuer sur des atteintes transfrontalières, mais que la communication est, en l’espèce, irrecevable pour non-épuisement  des recours internes.

    Caroline Juneja

    Bénévole de Notre Affaire À Tous

    Tribunal de La Hague, Milieudefensie et al. v. Royal Dutch Shell

    26 mai 2021, C/09/571932 / HA ZA 19-379

    L’affaire Shell est le pendant « privée » de l’affaire Urgenda, qui était elle dirigée contre le gouvernement néerlandais. L’association Milieudefensie a invoqué les mêmes fondements juridiques : violation des droits de l’homme et duty of care (notion pouvant être traduite en devoir de diligence ou obligation de protection). Le tribunal de La Hague a approuvé les arguments des demandeurs et condamné Shell à baisser ses émissions de gaz à effet de serre.

    Clarisse Macé

    Élève-avocat, bénévole de Notre Affaire À Tous

    Affaires environnementales

    Décision QPC du 18 février 2022, “FNE”

    Il s’agit de la première fois où le Conseil constitutionnel  fait une application directe du droit de vivre dans un environnement sain de l’article 1er de la Charte de l’environnement. Cette reconnaissance ouvre la porte à une importante potentialité de recours.

    Sandy Cassan-Barnel,

    Juriste, référente veille-international Naat.

    Cour de cassation, chambre criminelle, 25 Novembre 2020, Pourvoi n° 18-86.955

    La procédure : Le 28 janvier 2002, un incendie éclate dans des entrepôts de stockage d’archives appartenant à la société Intradis. Le 24 juillet 2017, la société est convoquée à l’audience du tribunal correctionnel du 23 novembre 2017, du chef de destruction involontaire de bien appartenant à autrui par manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi. 

    Avant la date de l’audience, le 31 mars 2017, la société Iron Mountain a absorbé , la société Recall France et sa filiale Intradis. Les parties civiles, ont fait citer la société absorbante Iron Mountain à comparaître à l’audience du 23 novembre 2017.Le tribunal correctionnel, par un jugement en date du 8 février 2018, a ordonné un supplément d’information afin de déterminer les circonstances de l’opération de fusion-absorption, et de rechercher tout élément relatif à la procédure en cours, notamment s’agissant de l’infraction de destruction involontaire initialement poursuivie à l’encontre de la société Intradis. La société Iron Mountain a formé appel de cette décision. La cour d’appel a débouté la société Iron Mountain France de sa demande de nullité du supplément d’information ordonné par le tribunal correctionnel

    La question de droit : En cas de fusion-absorption, la société absorbante peut-elle être condamnée pénalement pour des faits commis, avant la fusion, par la société absorbée ?

    Julie Leroy,

    Bénévole Naat

    Recours devant la Cour Suprême de Taïwan

    La Cour Suprême Taïwanaise reconnaît qu’une société peut faire l’objet de poursuites à Taïwan pour des faits de pollution au Vietnam.

    Julie Leroy

    Bénévole NAAT

    Le projet norvégien de forage pétrolier dans l’Arctique devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme

    La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) s’est saisie du projet de forage pétrolier dans l’Arctique autorisé par la Norvège en 2016. Après plusieurs requêtes infructueuses devant les juridictions nationales, huit requérants – deux associations (Greenpeace Nordic et Young Friends of the Earth), et six personnes physiques qui leur sont affiliés – ont porté l’affaire devant la CEDH. Dans une décision en date du 10 janvier dernier, la Cour demande à la Norvège d’apporter des précisions sur le fond, et notamment de répondre aux accusations des requérants, qui estiment qu’autoriser un tel projet de forage dans un contexte de crise environnementale pourrait constituer une violation des droits humains.
    La Cour a par ailleurs indiqué qu’elle pourrait désigner cette affaire comme étant l’une des affaires dites “à impact” bénéficiant d’un temps de traitement beaucoup plus court et d’une décision plus concise, en accord avec la nouvelle stratégie de traitement des affaires annoncée par la CEDH en 2021.

    Pauline Greiner

    Bénévole Notre Affaire à Tous

    L’indemnisation des agriculteurs exposés aux pesticides au titre des maladies professionnelles

    Le cancer de la prostate lié à une exposition aux pesticides figure dans le tableau des maladies professionnelles depuis la publication au Journal officiel du décret n° 2021-1724 le 22 décembre 2021. Cet ajout était particulièrement demandé par les agriculteurs exposés au chlordécone, le décret fait d’ailleurs partie du plan dit « chlordécone IV » qui vise à traiter les conséquences de la pollution à long terme du chlordécone.

    Clarisse Macé

    Bénévole Naat.

    L’ambition de cette newsletter ? Donner les moyens à toutes et tous de comprendre les enjeux de telles actions en justice face à l’urgence climatique ! Abonnez-vous pour recevoir, chaque mois, les actualités et informations sur ces affaires qui font avancer, partout dans le monde, nos droits et ceux de la nature face aux dégradations environnementales et climatiques : le combat qui se joue dans les tribunaux est bien celui de la défense des pollués face aux pollueurs, nouvel enjeu du XXIe siècle

  • IMPACTS n°18 – 28 janvier 2022 – Fiscalité et justice climatique

    Ce 18e numéro de la revue de presse « IMPACTS«  se concentre sur les thématiques de la fiscalité et ses liens avec la justice climatique. D’après une étude publiée par Oxfam en novembre 2021, l’empreinte carbone des 1% les plus riches du monde sera 30 fois supérieure à celle compatible avec la limitation du réchauffement à 1,5 °C d’ici 2030, fixée lors de l’Accord de Paris. Et tandis qu’environ 50 % des émissions mondiales sont imputables aux 10% des habitant-es de la planète les plus riches, la moitié la plus pauvre de la population mondiale est quant à elle responsable de seulement 10% environ des émissions de CO2 mondiales. Considérée comme un outil essentiel dans la lutte contre les inégalités, la fiscalité est aussi pour de nombreux économistes un levier efficace pour lutter contre le changement climatique. Cependant, aujourd’hui, la fiscalité verte se pense dans le monde et en France au détriment des ménages les plus pauvres et creuse les inégalités alors que ce sont les revenus les plus élevés qui en moyenne polluent le plus. Ainsi, en France, alors que les 1% les plus riches ont une empreinte carbone dix fois plus importante que la moitié la plus pauvre des Français, la fiscalité verte représente 4,5% des revenus des 20% des ménages les plus modestes contre 1,3% pour les 20% des ménages les plus riches. En contestant la hausse de la taxe carbone, le mouvement des Gilets Jaunes a conduit à une meilleure prise en compte des enjeux sociaux et fiscaux dans la lutte contre le changement climatique même si jusqu’ici le gel effectué alors par le gouvernement sur la taxe n’a pas changé l’équilibre existant. La question que résumait bien le rapport du Réseau Action Climat en novembre 2019 est celle-ci : comment réduire de 40% nos émissions de gaz à effet de serre en 2030 en garantissant la justice sociale ? Alors que de nouvelles pistes émergent en France notamment dans le contexte des élections présidentielles 2022, redistributivité de la taxe carbone, soutien aux ménages les plus pauvres plus performant, ISF climatique, à l’échelle internationale, des pistes aussi sont étudiées comme la taxe carbone mondiale dans le sillage de l’accord sur la taxation des multinationales. Ne faudrait-il pas parler de la taxe carbone aux frontières de l’Europe ?
     

    La situation dans le monde

    La fiscalité environnementale vue par les institutions internationales

    Pour l’OCDE, la fiscalité (qui englobe les taxes sur le carbone et différentes taxes spécifiques sur la consommation d’énergie) est un levier efficace pour faire baisser les émissions dommageables liées à la consommation d’énergie.

    Une tribune publiée dans le Wall Street Journal en 2019 défendait également une taxe carbone progressive et redistributrice comme l’un des outils les plus forts pour faire diminuer les émissions carbone. Pourtant, au niveau mondial, la fiscalité appliquée actuellement sur l’énergie par 42 pays émettant 80% de la consommation mondiale d’énergie et des émissions de CO2 correspondantes – et qui inclut les taxes sur le charbon, les taxes sur le transport routier, les taxes sur les carburants – n’est pas suffisante pour lutter contre le changement climatique, selon un rapport de l’OCDE publié en 2018. La fiscalité énergétique a un impact très limité puisque selon l’organisation, 81% des émissions échappent à toute taxation, et « 97% d’entre elles sont soumises à une imposition inférieure à 30 euros par tonne de CO₂, un montant qui représente une estimation objectivement faible des coûts climatiques ». Enfin, le rapport pointe du doigt la quasi-absence d’évolution des taux dans l’ensemble des pays étudiés.

     Cette situation fiscale stagnante a trois effets : les émissions de CO2 continuent d’augmenter avec la hausse des revenus, le gain reste inférieur au coût pour l’environnement de la consommation d’énergie. Les taxes créent seulement des incitations à réduire la consommation d’énergie sans changement notable par rapport à l’urgence requise.

    La situation en Europe

    Au niveau européen, les situations sont très diverses selon les pays. La Bulgarie est le pays européen le plus en pointe concernant les écotaxes avec 9,85% de ses recettes fiscales provenant d’impôts environnementaux en 2019, devant la Grèce et la Slovénie (respectivement 9,79% et 9,58% de recettes environnementales en 2019). La moyenne dans l’Union européenne ne s’élève qu’à 5,89% des recettes.

    Cette diversité dans l’Union européenne peut s’expliquer en partie par l’obligation d’unanimité du Conseil européen en matière fiscale. Cela débouche sur une législation européenne qui inclut de manière inégale les mesures fiscales, soit laissant libre choix aux pays d’y avoir recours ou non, soit permettant aux pays d’adopter des exemptions totales ou partielles. Par exemple, la directive européenne 2003/96/EC concernant la taxation des produits énergétiques et de l’électricité permet aux Etats-membres d’inclure dans leur droit national de larges exemptions. 

    L’Union européenne réfléchit à développer la fiscalité environnementale. Cependant, les discussions semblent encore timides sur ces questions. Le parlement européen s’est prononcé favorablement en vue d’une taxe carbone aux frontières du marché commun dès 2023 mais de nombreux Etats-membres y sont réticents. La solution privilégiée par l’Union est le marché carbone (“Emission Trading System” ou “EU ETS”). Ce marché est basé sur un plafond d’émissions de gaz à effet de serre à ne pas dépasser. Les entreprises dépassant ce plafond doivent acheter des quotas d’émissions qu’elles peuvent échanger sur un marché spécialisé, le marché du carbone (CO2). Ce marché concerne pour l’instant les entreprises les plus polluantes, représentant 40% des émissions de CO2. En 2020, le nombre total de quotas pouvant être créés sur le marché européen du CO2 (le plafond des émissions) représentait 1 720 millions de tonnes d’émissions de CO2 et le prix s’élève aujourd’hui à 80€ la tonne de CO2. Pour de nombreuses ONG, ce marché est en fait un “permis à polluer” et n’incite pas les entreprises à réduire leurs émissions. Malgré les fortes critiques de ce mécanisme, Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne, propose la création d’un second marché du carbone sur le transport routier et le chauffage.

    La situation en France

    Une fiscalité peu probante

    Malgré la reconnaissance du principe pollueur-payeur dans la Charte de l’environnement de 2005, en France, la fiscalité environnementale est limitée et le système fiscal actuel est défavorable à l’environnement. Selon le Réseau Action Climat, la France est à la 27ème place de la fiscalité environnementale dans l’Union Européenne. Selon les chiffres d’Eurostat, la France fait figure de mauvaise élève et se trouve en dessous de la moyenne européenne :Le Conseil des Prélèvements Obligatoires (CPO) sous l’égide de la Cour des Comptes a produit en 2019 un ensemble de rapports sur la fiscalité environnementale et l’urgence climatique

    Selon ces rapports, la fiscalité environnementale française est constituée de 46 instruments fiscaux, d’un rendement de 56 milliards d’euros en 2018, ce qui représente un peu moins de 5% des prélèvements obligatoires. 83% de cette fiscalité environnementale concerne l’énergie et se compose surtout de taxes à la consommation : taxes sur les énergies dont la TICPE, qui s’applique au pétrole utilisé pour le transport et les chauffages, la TICGN, la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel, la TICC, la taxe intérieure de consommation sur le charbon, et les taxes sur l’électricité dont la CSPE. Les transports sont peu taxés en France (taxes sur les certificats d’immatriculation, taxes sur les conventions d’assurance automobile, malus automobile, etc.), et la pollution, les déchets, et les ressources, de façon marginale. Dans ce paysage, la TICPE génère à elle seule 33 milliards de recettes, soit 62% des impôts liés au climat. En comparaison, la taxe carbone rapportait en 2019, 10 milliards à l’État. 

    Bien qu’elle ait rapporté 43 milliards d’euros en 2019 à l’Etat français, et que sa part (3,7%) augmente dans le PIB depuis 2015 pour atteindre la moyenne européenne, la fiscalité liée au climat est dénoncée pour son manque de pertinence et son incohérence. Selon l’Institut de l’Économie pour le Climat (IE4C), la TICPE, la TICGN et la TICC sur le charbon ne sont que partiellement indexées sur les émissions carbone depuis 2014. L’institut dénonce pour les transports le niveau du malus automobile qui “ne décourage pas les consommateurs d’acheter des véhicules polluants” notamment de type SUV. 

    De même, les entreprises bénéficient d’importantes exonérations. Par exemple sur les taxes de consommation des énergies fossiles : la trentaine de dérogations représentent un manque à gagner d’environ 10 milliards d’euros pour l’Etat. Les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre comme les raffineries, le transport routier et le transport aérien bénéficient de subventions qui accentuent leurs pollutions et grèvent le budget de l’État dont les dépenses pourraient financer la transition écologique.

     Le Réseau Action Climat signalait que “de manière générale, le système fiscal français est très défavorable à l’environnement, en comparaison avec nos voisins européens. Les subventions défavorables à la transition énergétique sont supérieures aux subventions qui y sont favorables”. 
     

    La fiscalité verte à l’échelle des collectivités territoriales

    Une étude publiée par l’Agence France Locale en juin 2021 met en avant la nécessité de questionner la pertinence de la fiscalité écologique locale et de procéder à des améliorations afin de pouvoir financer la transition écologique.

    Une part de la fiscalité environnementale revient aux collectivités territoriales, notamment une part importante des recettes du TICPE (12 milliards aux collectivités sur les 30,5 milliards d’euros de recette en 2017).Or l’emploi de ces ressources par les collectivités n’est pas affecté spécifiquement aux projets environnementaux.

    Les pistes actuelles pour une taxation plus juste pour le climat

    La fiscalité a été à certains égards absente des débats sur la Loi Climat et le texte voté en août 2021 ne remet pas en cause l’architecture fiscale du pays. Pour Lucas Chancel, chercheur en économie, “la lutte contre le réchauffement climatique exige une vraie révolution fiscale”. 

    Finalement, la loi climat et résilience comporte seulement quelques mesures de fiscalité énergétique et environnementale dont les principales concernant les secteurs du transport routier et aérien. L’article 30 prévoit une hausse de TICPE pour le secteur du transport routier et l’article 38 du projet de loi entend imposer aux compagnies de navigation aérienne de compenser le carbone émis lors des vols intérieurs métropolitains, et sur la base du volontariat, lors des vols entre la métropole et l’Outre-mer. 

    En dehors de ces mesures, la fiscalité verte a peu évolué. Ainsi, en 2022, alors que le mouvement des gilets jaunes a 3 ans et que l’urgence climatique se fait toujours plus pressante, aucune réforme de fond de la taxe carbone n’a été proposée pour pallier ses défauts, et son taux étant toujours gelé, son efficacité s’en trouve réduite. Le PLF 2022 présenté le 22 septembre 2021 quant à lui ne comporte que des éléments de fiscalité sur la pollution des navires.

    Où en est-on de la taxe carbone ?

    Bien que la taxe carbone, dont les recettes s’élèvent à environ 8 milliards d’euros, rapporte moins à l’heure actuelle que la TICPE, 37 milliards, c’est pourtant elle qui en matière de fiscalité verte est devenue la plus controversée depuis le mouvement des Gilets Jaunes.

    Comme le rappelle une étude de l’OFCE, cette idée de donner un prix au carbone a été lancée en 1997 avec le protocole de Kyoto. En France, la taxe carbone a été proposée par plusieurs gouvernements successifs, en 2000 et 2009. À chaque fois, cependant, elle fut retoquée par le Conseil Constitutionnel. La taxe voit finalement le jour en 2014 sous le gouvernement Ayrault non plus sous la forme d’une taxe mais comme une composante intégrée aux taxes sur l’énergie (TICPE, TICGN, TICC), en fonction de la quantité d’émission de gaz à effet de serre qu’elle produit. Cette composante carbone, payée par les particuliers et les entreprises, est conçue pour augmenter chaque année pour s’établir à 100 euros la tonne de CO2 en 2030 afin de donner un signal prix assez fort qui à terme décourage des modes carbonés et rende les alternatives plus compétitives ; par exemple, inciter à changer de voiture ou isoler les bâtiments.
     
    Alors qu’elle était déjà passée de 7 euros à 44,60 euros depuis 2014, la hausse de la CCE a été ressentie plus fortement en 2018 par les ménages à cause de la hausse conjointe des cours mondiaux du pétrole. Depuis, la taxe est restée à son niveau de 2018 sans que l’on sache ce qu’il adviendra par la suite.
     
    De nombreux économistes et ONG environnementales considèrent que la taxe carbone, si elle doit être repensée en profondeur, ne doit pas être abandonnée. « Aucune autre mesure ne permet d’avoir un impact aussi important », assure le rapport de Réseau Action Climat. Leurs calculs projettent ainsi qu’un prix de 250 € par tonne de CO2 (contre 44,6 € aujourd’hui) permettrait de réduire les émissions de la France de 18 % par rapport à 2019. La taxe est donc toujours considérée comme l’un des outils les plus efficaces pour lutter contre nos modes de vie carboné, que ce soit par le Haut Conseil pour le Climat, le Conseil des prélèvements obligatoires, l’I4CE (Institute for Climate Economics), ou encore le Conseil d’analyse économique. Mais, sans s’accorder de façon unanime sur les solutions, tous sont d’accord sur le fait qu’à l’heure actuelle la taxe comporte de nombreux défauts.
     
    Comme le rappelle le rapport de l’OFCE, l’un de ses principaux soucis est sa régressivité. Concrètement, les études ont montré que le 1er décile des revenus les plus faibles payaient plus de taxe que le décile des revenus les plus élevés. La taxe entraîne donc un surcoût annuel pour les ménages les plus pauvres qui n’est pas compensé par un mécanisme de redistribution. Toujours selon l’OFCE, « la taxe impacte plus fortement les ménages les plus pauvres du fait d’une consommation généralement contrainte, et d’une faible capacité d’investissement dans des logements mieux isolés ou des véhicules plus sobres ». « La localisation des ménages est une autre source d’inégalité face à la taxe carbone, en raison de l’usage plus important de l’automobile en milieu rural ou dans les communes de moins de 20 000 habitants. » Enfin, la CCE est inégale dans son assiette dans le sens où comme le rappelle l’I4CE, il existe de nombreuses exonérations à cette taxe décidées à l’échelle internationale ou nationale : transport aérien et maritime international, transports aériens et fluviaux nationaux, transport routier de marchandises, taxis, usages agricoles, gazole non routier dans le BTP etc. La taxe est aussi considérée encore trop peu efficace. Concrètement, l’OFCE estime que le signal prix visé de 100 euros la tonne en 2030 ne permet pas de respecter l’objectif d’une augmentation des températures sous le seuil des 2 degrés.
     
    Selon Christian de Perthuis, professeur à l’Université Paris-Dauphine, “la fiscalité carbone reste une nécessité pour que le pays respecte ses objectifs climatiques. Mais elle ne peut fonctionner que si elle n’aggrave pas les inégalités.” Aujourd’hui, les défenseurs de la taxe prônent donc pour la rendre acceptable aux yeux de la population avec plusieurs modifications : intégrer des mécanismes de redistribution, élargir son assiette (Conseil des prélèvements obligatoires), qui ne couvre aujourd’hui que 46% des émissions. D’autres acteurs institutionnels comme l’ADEME demandent même son remplacement par une contribution climat solidarité.
     
    En 2019, le Réseau Action climat, qui propose que les recettes soient utilisées pour financer la transition écologique par un reversement sous la forme d’un revenu climat, de crédit d’impôt, ou de chèque pour les ménages non imposables, a lancé avec Oxfam et le Secours Catholique – Caritas France un calculateur qui permet de calculer le montant actuel de la taxe carbone pour un foyer et le montant que ces foyers pourraient recevoir s’il y avait un dispositif de redistribution des recettes aux ménages, pour protéger leur pouvoir d’achat. Ces calculs qui se basent en grande partie sur les travaux de Thomas Douenne et Adrien Fabre ont nourri les débats de la Convention Citoyenne pour le Climat en 2020 qui a préféré finalement laissé de côté aux termes du débat la réforme de la taxe carbone. Citons un exemple des simulations rendues publiques dans le rapport : Séverine, Adam et leurs deux enfants gagnent 17 000 euros de revenus annuels, ils ont une voiture diesel, et habitent à Lyon dans un logement de 80 mètres carrés chauffé au gaz. Le coût de leur taxe carbone s’élevant à 201 euros, le ménage recevrait 410 euros sous forme de redistribution. Des exemples de redistribution existent ailleurs dans le monde. L’exemple le plus connu est celui de la Colombie-Britannique, au Canada, dont les habitant-es des classes modestes et moyennes ont bien accepté cette taxe.
     
    Le Conseil d’analyse économique a tenté d’évaluer en 2019 dans une note « pour le climat : une taxe juste, pas juste une taxe » plusieurs calculs de mécanismes de redistribution. Leur recommandation est de reprendre le calcul fait par Terra Nova, tout en l’amendant. Celui-ci fonctionnerait sur un transfert qui diminue par décile avec la prise en compte du facteur géographique. La redistribution selon leurs conseils prendrait la forme d’un chèque simplifié, et l’élargissement de la base permettrait d’assouplir la trajectoire haussière du prix de la tonne de CO2.
     
    Les pistes de refonte de la taxe carbone restent à l’heure actuelle ouvertes. Plus largement, les auteurs du rapport d’Action climat insistent sur le fait qu’une évaluation des taxes pour le climat est importante, trop souvent le coût qu’il représente pour les ménages par tranche de revenu est mis de côté.

    Autres pistes en France

    « L’ISF climatique : la fiscalité environnementale, un enjeu dans la campagne présidentielle »

    Le patrimoine financier détenu par les ménages français est fortement émetteur aussi. L’étude menée par Greenpeace avec l’appui du cabinet Carbone 4 en exploitant les données de l’Insee conduit à une empreinte carbone de 46 tCO2eq/an pour le patrimoine financier des 10 % les plus aisés, et même de 189 tCO2eq/an pour les 1% les plus riches, contre 2,9 tCO2eq/an pour les 10 % les plus pauvres. Ainsi, conclut Greenpeace, le patrimoine financier des 1 % des ménages les plus riches est associé à une empreinte carbone 66 fois supérieure à celle des 10 % les plus pauvres. 

    Ces chiffres posent la question du « juste partage de l’effort climatique » et ce d’autant plus dans un contexte budgétaire tendu, où les investissements manquent pour financer l’urgence climatique. En 2019, l’I4CE (qui ne prend pas en compte l’argent temporairement débloqué dans le plan de relance) pointait qu’il manquait 15 à 18 milliards d’euros par an pour respecter la trajectoire du second budget carbone (2019-2023). Selon la même source, il faudrait entre sept et neuf milliards supplémentaires d’argent public d’ici à 2023 pour respecter les objectifs climatiques du pays. « Cela sans compter que les objectifs actuels de la France n’ont pas encore été rehaussés, alors que la Commission européenne propose d’atteindre une baisse des émissions de 55 % en 2030 par rapport à 1990, et qu’il faudrait en réalité viser – 65 % minimum pour se mettre sur une trajectoire compatible avec l’objectif de 1,5 °C. »

    Le patrimoine financier détenu par les ménages français est fortement émetteur aussi. L’étude menée par Greenpeace avec l’appui du cabinet Carbone 4 en exploitant les données de l’Insee conduit à une empreinte carbone de 46 tCO2eq/an pour le patrimoine financier des 10 % les plus aisés, et même de 189 tCO2eq/an pour les 1% les plus riches, contre 2,9 tCO2eq/an pour les 10 % les plus pauvres. Ainsi, conclut Greenpeace, le patrimoine financier des 1 % des ménages les plus riches est associé à une empreinte carbone 66 fois supérieure à celle des 10 % les plus pauvres. 

    Ces chiffres posent la question du « juste partage de l’effort climatique » et ce d’autant plus dans un contexte budgétaire tendu, où les investissements manquent pour financer l’urgence climatique. En 2019, l’I4CE (qui ne prend pas en compte l’argent temporairement débloqué dans le plan de relance) pointait qu’il manquait 15 à 18 milliards d’euros par an pour respecter la trajectoire du second budget carbone (2019-2023). Selon la même source, il faudrait entre sept et neuf milliards supplémentaires d’argent public d’ici à 2023 pour respecter les objectifs climatiques du pays. « Cela sans compter que les objectifs actuels de la France n’ont pas encore été rehaussés, alors que la Commission européenne propose d’atteindre une baisse des émissions de 55 % en 2030 par rapport à 1990, et qu’il faudrait en réalité viser – 65 % minimum pour se mettre sur une trajectoire compatible avec l’objectif de 1,5 °C. »

    Alors que Bruno Le Maire a lancé l’idée de “flécher les recettes fiscales liées aux énergies fossiles vers la lutte contre le réchauffement climatique”, l’idée d’un ISF climatique, né dans les bureaux de Greenpeace, est reprise par de nombreux et nombreuses candidat-es de la gauche, dès la primaire écologiste, mais aussi chez les socialistes, et la France insoumise. Le concept est tiré du rapport de Greenpeace “L’argent sale du capital : Pour l’instauration d’un ISF climatique” publié en octobre 2020 et avait fait partie aussi des pistes retenues par la Convention Citoyenne pour le Climat

    L’impôt sur la fortune climatique est pensé comme une alternative à la taxe carbone qui impacte les ménages les plus pauvres sans impacter de manière efficace la consommation énergétique des ménages les plus riches. Au contraire, l’ISF climatique se fonde sur le constat des inégalités sociales et de pollution et souhaite les corriger. Quelques chiffres de l’OFCE peuvent être cités : sur les 17 milliards d’euros distribués aux ménages lors des trois premiers budgets du quinquennat, plus du quart est allé soutenir le revenu disponible des 5 % de ménages les plus aisés. Les 5 % de Français-es les plus pauvres ont vu leur niveau de vie se réduire d’environ 240 euros par an sous l’effet des mesures fiscales du gouvernement, quand les 5 % les plus riches ont vu leur pouvoir d’achat grimper de 2 905 euros. Par ailleurs, n’échappant pas à la règle selon laquelle la hausse des émissions de carbone grimpe avec les revenus, les 10 % de ménages les plus riches ont, en effet, une empreinte carbone 2,7 fois plus élevée que les plus pauvres. 

    Un autre problème, né de la suppression de l’ISF en 2017, a été pris en compte par le rapport de Greenpeace. L’ISF en 2017 a été remplacé par un IFI, un impôt sur la fortune immobilière qui concerne les personnes détenant un patrimoine immobilier net supérieur à 1,3 million d’euros au 1er janvier de l’année d’imposition. Le problème est donc que les patrimoines financiers ne sont plus taxés. Or, comme l’a montré récemment un rapport fait par Oxfam France et Les Amis de la Terre, les actifs financiers ont une empreinte carbone non négligeable. Pour exemple, en 2018, les émissions de gaz à effet de serre issues des activités de financement et d’investissement des quatre principales banques françaises – BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et BPCE – dans le secteur des énergies fossiles ont atteint plus de 2 milliards de tonnes équivalent CO2, soit 4,5 fois les émissions de la France cette même année.


     Le patrimoine financier détenu par les ménages français est fortement émetteur aussi. L’étude menée par Greenpeace avec l’appui du cabinet Carbone 4 en exploitant les données de l’Insee conduit à une empreinte carbone de 46 tCO2eq/an pour le patrimoine financier des 10 % les plus aisés, et même de 189 tCO2eq/an pour les 1% les plus riches, contre 2,9 tCO2eq/an pour les 10 % les plus pauvres. Ainsi, conclut Greenpeace, le patrimoine financier des 1 % des ménages les plus riches est associé à une empreinte carbone 66 fois supérieure à celle des 10 % les plus pauvres. 

    Ces chiffres posent la question du « juste partage de l’effort climatique » et ce d’autant plus dans un contexte budgétaire tendu, où les investissements manquent pour financer l’urgence climatique. En 2019, l’I4CE (qui ne prend pas en compte l’argent temporairement débloqué dans le plan de relance) pointait qu’il manquait 15 à 18 milliards d’euros par an pour respecter la trajectoire du second budget carbone (2019-2023). Selon la même source, il faudrait entre sept et neuf milliards supplémentaires d’argent public d’ici à 2023 pour respecter les objectifs climatiques du pays. « Cela sans compter que les objectifs actuels de la France n’ont pas encore été rehaussés, alors que la Commission européenne propose d’atteindre une baisse des émissions de 55 % en 2030 par rapport à 1990, et qu’il faudrait en réalité viser – 65 % minimum pour se mettre sur une trajectoire compatible avec l’objectif de 1,5 °C. » 

    Concrètement, à quoi ressemblerait cet outil fiscal ? Greenpeace France propose la création d’un ISF climatique dérivé de l’ISF en vigueur jusqu’en 2017 et qui serait pondéré en fonction non seulement du volume d’actifs financiers détenus par le ménage imposé, mais également de l’empreinte carbone de ces mêmes actifs. Cette pondération consisterait à introduire une composante carbone appliquée au patrimoine financier des ménages assujettis. Celle-ci serait identique à la composante carbone appliquée dans le cadre de la TICPE et suivrait la même trajectoire. 

    Bien que l’ISF soit souvent présenté comme ne répondant pas aux questions de différence de patrimoine au sein de la population, c’est un fait que la France manque d’instruments qui soient acceptables socialement et efficaces pour réduire l’empreinte carbone des français.

    Piste à l’échelle internationale

    Dans leur rapport Carbon and inequality From Kyoto to Paris, Piketty et Chancel montraient en 2015 que les inégalités d’émissions de CO2 mondiales sont de plus en plus expliquées par les inégalités à l’intérieur des pays et non entre pays. Si une hausse des contributions des pays du Nord est nécessaire, l’étude montre ainsi que les classes aisées des pays émergents, du fait de la hausse de leurs revenus et de leurs émissions, pourraient également contribuer à ces fonds.

    Cette étude examine par ce prisme de nouvelles stratégies en vue d’augmenter le volume global de l’aide pour l’adaptation au changement climatique, où les émissions individuelles et non les émissions nationales ou le PIB par tête, seraient la base de calcul des contributions. 

    Piketty et Chancel explorent ainsi 3 stratégies pour la mise en place d’une taxe mondiale progressive sur le CO2. Dans la stratégie 1, tous les émetteurs au-dessus de la moyenne mondiale (i.e. tous les émetteurs au-dessus de 6,2tCO2e par an) contribuent à l’effort en proportion de leurs émissions dépassant le seuil ; dans la stratégie 2, les 10% les plus émetteurs paient ; dans la stratégie 3, ce sont les 1% les plus émetteurs qui paient. Dans la stratégie 3, la plus favorable aux Européen-nes, Piketty et Chancel montrent que le volume de financement provenant du Vieux continent atteindrait 23 milliards d’euros, soit plus de trois fois sa contribution actuelle. (si l’étude date de 2015, en comparaison, le budget de la PAC en 2021 était de 55 milliards). Piketty et Chancel précisaient que d’autres idées pouvaient être mises à l’étude, comme une taxe sur les revenus ou une taxe sur les billets d’avion. 

    Les idées énoncées dans ce rapport qui a déjà 7 ans sont souvent remises au goût du jour. Ce fut le cas en 2019 et récemment en 2021 dans le sillage de l’accord obtenu sur la taxation des multinationales au niveau du G20 en octobre 2021 qui se tint juste avant la COP 26. Dans la version 2021, la taxe était évaluée en fonction non plus des émissions par tête comme recommandés par Piketty et Chancel mais en fonction des émissions nationales. 

    En attendant, c’est au niveau de l’Europe qu’un « mécanisme d’ajustement carbone aux frontières », a été présenté en juillet dernier qui fixera un prix du carbone pour les importations de certains produits.


  • CP/ Les organisations de l’Affaire du Siècle regrettent l’absence de confirmation de Valérie Pécresse, Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron. Ils doivent venir parler urgence écologique et solutions devant les Français.es.

    Communiqué de presse – Paris, 10 mars 2022

    A J-3 du “Débat du Siècle” organisé ce dimanche 13 mars sur la chaîne Twitch du streamer politique Jean Massiet et à J-2 de la grande marche “Look Up” pour le climat, les organisations de l’Affaire du Siècle regrettent l’absence de confirmation de Valérie Pécresse, Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron. Ils doivent venir parler urgence écologique et solutions devant les Français·es. Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Fabien Roussel et Philippe Poutou ont déjà confirmé leur participation. La réponse d’Emmanuel Macron reste en attente.

    Les candidat·e·s Jean-Luc Mélenchon et Valérie Pécresse envisagent, pour l’instant, de décliner leur participation en personne à cette émission spéciale. 

    Comment comprendre cette hésitation à participer à ce qui est pour l’heure le seul débat dédié à cet enjeu si fondamental ? Cette décision est d’autant plus incompréhensible que 2,3 millions de Français·es soutiennent l’Affaire du Siècle, que le GIEC a une nouvelle fois sonné l’alarme le 28 février dernier, et que les enjeux d’indépendance énergétique soulevés par la guerre déclenchée en Ukraine inquiètent profondément les Français·es. Huit Français.e.s sur dix et 92% des moins de 35 ans se disent « inquiet.e.s » vis-à-vis de l’environnement et du changement climatique.

    Les règles du jeu du Débat du Siècle ont été clairement posées de longue date.

    Les organisateurs ont invité uniquement les candidat·e·s à la présidentielle, et non pas leurs représentant·e·s, pour entendre les propositions de celles et ceux qui souhaitent gouverner la France.

    Les organisateurs du Débat remercient les candidats Hidalgo, Jadot, Poutou et Roussel d’avoir accepté l’invitation et laissent la porte ouverte aux candidat·e·s Mélenchon et Pécresse en espérant une réponse positive aujourd’hui.

    Quant au candidat Emmanuel Macron, les organisateurs comprennent l’agenda bousculé du président de la république. Ils ont fait savoir leur disponibilité pour adapter l’enregistrement – comme ce fut fait le 7 mars sur LCI – pour lui permettre de participer. Ayant annoncé ne pas vouloir participer aux débats entre candidat·e·s, sa participation à l’émission sur la chaîne Twitch de Jean Massiet,  qui prendra la forme d’un grand oral, est d’autant plus attendue. 

    Pour les organisateurs, le Débat est un événement majeur de la campagne présidentielle : il s’agira du tout premier débat présidentiel consacré exclusivement à l’enjeu climatique jamais organisé en France. Un tel débat s’est déjà tenu en Angleterre en 2019. Si tou·te·s les candidats ne se présentent pas à ce débat, ce sera également un événement car l’absence de certain·e·s candidat·e·s à ce rendez-vous interroge au vu de l’urgence à laquelle nous faisons face.

    Note aux rédactions

    Le 19 novembre 2020 le Conseil d’Etat a rendu une décision historique dans le cadre du recours juridique de la commune de Grande-Synthe, dans lequel les quatre organisations de l’Affaire du Siècle : le gouvernement est condamné à “prendre toutes les mesures nécessaires” pour remettre la France sur la trajectoire de réduction d’émissions de gaz à effet de serre que l’État s’est engagé à respecter.  

    Le 14 octobre 2021 le tribunal administratif de Paris a donné raison à l’Affaire du Siècle : les gouvernements successifs sont désormais obligés de respecter strictement les engagements climatiques de la France. L’État français est également sommé de réparer les dommages causés à l’environnement par son inaction, avant le 31 décembre 2022. Ce jugement inédit oblige le gouvernement actuel, mais aussi le ou la futur·e locataire de l’Élysée

    Contacts presse


    Fondation pour la Nature et l’Homme : Paula Torrente – 07 87 50 74 90
    Oxfam France : Marika Bekier –  06 24 34 99 31 
    Greenpeace France : Kim Dallet – 06 33 58 39 46
    Notre Affaire à Tous : Abdoulaye Diarra – 07 82 21 38 90 

  • CP/ Neutralité carbone et greenwashing : TotalEnergies assignée en justice pour publicité mensongère

    Le 2 mars 2022, Greenpeace France, les Amis de la Terre France et Notre Affaire à Tous, soutenues par l’association ClientEarth, ont assigné TotalEnergies en justice pour pratiques commerciales trompeuses. Les associations dénoncent la vaste campagne de greenwashing de la multinationale pétrolière et gazière dans le cadre de son changement de nom de Total vers TotalEnergies. Dans cette campagne de publicité diffusée auprès de millions de consommateurs français, TotalEnergies prétend être sur la bonne voie pour lutter contre les changements climatiques, et distille des affirmations fallacieuses sur les prétendues vertus environnementales du gaz fossile et de la biomasse.

    Une « ambition neutralité carbone » purement marketing

    Devenir un « acteur majeur de la transition énergétique » pour « atteindre une société #NetZero dès 2050 » grâce à son « ambition neutralité carbone » : TotalEnergies a accompagné son changement de nom en mai 2021 d’une campagne publicitaire colossale qui promeut sa volonté d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Sur fond d’éoliennes, de panneaux solaires et de bornes de recharge de véhicules électriques, ces messages ont été diffusés à grande échelle, en France comme à l’étranger : sur des panneaux d’affichage, dans la presse, sur un site Internet dédié, dans ses stations services, à la télévision et dans des publicités ciblées sur les réseaux sociaux.

    Or, la major n’est pas capable d’étayer ses propres affirmations, sa stratégie réelle n’étant aucunement alignée avec l’objectif « net zero » ou de neutralité carbone d’ici 2050. Non seulement TotalEnergies omet au moins 85% de ses émissions de gaz à effet de serre [1] dans son objectif affiché aux consommateurs, mais l’analyse de ses plans de production entre en conflit avec les exigences minimales requises pour atteindre la neutralité carbone en 2050 [2].

    L’assignation a été déposée au Tribunal judiciaire de Paris, contre TotalEnergies SE, la maison mère, ainsi que TotalEnergies Electricité et Gaz France, filiale du groupe, qui ont toutes deux diffusé les publicités visées.

    « Cette vaste opération de communication est un écran de fumée derrière lequel TotalEnergies tente de cacher la réalité : les énergies fossiles représentent encore 90% de son activité et 80% de ses investissements [3]. Ce ne sont pas les slogans publicitaires qui empêcheront le réchauffement climatique, mais bien les réductions d’émissions. Le droit de la consommation impose une communication honnête et fiable en matière climatique et environnementale pour protéger les consommateurs », explique Clara Gonzales, juriste à Greenpeace France. « Notre dépendance aux énergies fossiles détruit le climat, fait grimper les factures énergétiques et attise les conflits, comme celui qui surgit entre la Russie et l’Ukraine aujourd’hui : il est urgent de mettre un terme à la désinformation de l’industrie pétro-gazière. »

    Pour Juliette Renaud, responsable de campagne aux Amis de la Terre France : « Alors que tous les experts climatiques répètent que plus aucun nouveau projet d’énergies fossiles ne doit être lancé, TotalEnergies multiplie les méga-projets pétroliers et gaziers en Ouganda, au Mozambique ou encore même en Arctique russe. Chacune de ces bombes climatiques, aux lourds impacts aussi sur les droits humains et la biodiversité, vient démentir la communication trompeuse de TotalEnergies, qui prétend être un acteur de la transition énergétique. » [4]

    Pour Justine Ripoll, responsable de campagnes pour Notre Affaire à Tous : « Le greenwashing de TotalEnergies induit les consommateurs en erreur et fait perdurer notre dépendance aux énergies fossiles. La justice doit mettre fin au comportement irresponsable et illégal de TotalEnergies qui, depuis 1971, ne cesse d’empêcher la transition énergétique [5]. En plus d’une communication claire, des mesures de réduction de gaz à effet de serre suffisantes et compatibles avec l’Accord de Paris doivent lui être imposées. » [6]

    Des allégations fallacieuses sur le gaz fossile et la biomasse

    Omettant une part majeure de l’empreinte environnementale de ses produits, TotalEnergies affirme sans vergogne par ailleurs aux consommateurs dans ses publicités que :
    – le gaz fossile est « la moins polluante » et « la moins émettrice de gaz à effet de serre » des énergies fossiles, tout en la présentant comme complémentaire aux énergies renouvelables et bon marché ;
    – les « biocarburants » sont des « alternatives bas-carbone » qui permettraient « de réduire de 50 à 90% les émissions de CO2 par rapport à leur équivalent fossile ».

    La major est ainsi en violation flagrante des recommandations européennes en matière d’allégations publicitaires environnementales, celles-ci devant tenir compte de l’incidence environnementale globale d’un produit tout au long de son cycle de vie (chaîne d’approvisionnement, mode de production).

    Or les agrocarburants sont produits majoritairement grâce à des matières premières agricoles tels que l’huile de palme et le soja. La monopolisation des terres agricoles pour leur production entraîne la destruction d’écosystèmes naturels et des déforestations de grande ampleur. Ainsi pour exemple, le biodiesel, en tenant compte de l’impact de sa production, émet en moyenne 80% plus de gaz à effet de serre que le diesel qu’il remplace.

    De son côté, le gaz fossile est fortement émetteur sur l’ensemble de son cycle de vie. Il est quasi exclusivement composé de méthane, dont chaque tonne relâchée dans l’atmosphère crée un effet de serre 84 fois plus important que la même quantité de CO2 sur 20 ans. Et les fuites sont malheureusement courantes et largement sous-estimées.

    Pour mettre un terme définitif au greenwashing, plus de 20 ONG ont lancé une initiative citoyenne européenne visant à contrer l’influence toxique de l’industrie des énergies fossiles. Objectif : recueillir un million de signatures à travers l’Union européenne pour faire interdire toute publicité, partenariat et mécénat en faveur des entreprises vendant des biens et services fossiles.

    Notes aux rédactions

    [1] Dans ses calculs, TotalEnergies écarte les émissions de CO2 générées par les produits consommés par ses clients (émissions dites de « scope 3 ») représentant 85 à 90% de ses émissions, pour ne garder que les émissions de ses opérations industrielles (scopes 1 et 2). Voir p.31 de la note La pseudo neutralité carbone de TotalEnergies, Greenpeace France, février 2022.

    [2] Dans le scénario « zéro émission nette en 2050 » de l’Agence internationale de l’énergie, atteindre l’objectif de neutralité carbone suppose une augmentation considérable des énergies renouvelables, l’arrêt d’exploration fossile et aucun nouveau champ gazier et pétrolier au-delà de ceux approuvés, des pré-requis pour accompagner la nécessaire diminution de production de pétrole et gaz. Voir p.28 de la note La pseudo neutralité carbone de TotalEnergies, Greenpeace France, février 2022.

    [3] Rapport Total fait du sale : la finance complice ? de Reclaim Finance et Greenpeace France.

    [4] Ouganda et Tanzanie : Total accélère le développement de son projet destructeur, février 2022, Amis de la Terre France.

    [5] Depuis 1971, Total est averti du réchauffement climatique. Depuis 1971, Total ment et organise la désinformation pour protéger ses profits.

    [6] Premier contentieux climatique contre une multinationale du pétrole en France : 14 collectivités et 5 associations assignent Total en justice pour manquement à son devoir de vigilance, janvier 2020, Notre Affaire à Tous.

    Contacts presse

    Greenpeace France – Manon Laudy, 06 13 07 04 29 / manon.laudy@greenpeace.org 

    Amis de la Terre France – Marion Cubizolles, 06 86 41 53 43 / marion.cubizolles@amisdelaterre.org 

    Notre Affaire à Tous – Justine Ripoll, 06 42 21 37 36 / justine.ripoll@notreaffaireatous.org

  • Sortie du livre Les droits de la Nature – Vers un nouveau paradigme de protection du vivant

    Notre Affaire à Tous publie aujourd’hui son livre Les droits de la nature, fruit d’un travail collectif et à long-terme à destination des juristes et des citoyens soucieux de faire évoluer le droit pour mieux protéger le vivant. Avec une contribution de la philosophe Catherine Larrère, une préface de l’écrivain et juriste Camille de Toledo, auteur du Fleuve qui voulait écrire issu des auditions du Parlement de Loire, et une postface de Juan Carlos Henao, avocat, enseignant-chercheur et ancien président de la Cour constitutionnelle colombienne, ce livre combine une approche à la fois juridique, politique et culturelle.

    Reconnaître les  droits de la nature : une demande sociale croissante

    Face à la destruction du monde naturel, de plus en plus de voix s’élèvent pour reconnaître des droits à des écosystèmes et leur permettre de se défendre en justice. La personnalité juridique, jusque-là réservée aux humains, aux Etats et aux entreprises, pourrait également être octroyée à des entités naturelles, comme cela est déjà le cas dans plusieurs pays depuis une quinzaine d’années. Si pour certains, de plus en plus nombreux, les droits de la nature apparaissent comme une évidence et une nécessité, leur utilité continue à questionner certain.es quand la crainte d’une “dictature verte” demeure pour d’autres.

    Cet ouvrage a une vocation pédagogique : celle d’expliciter l’intérêt que représentent les droits de la Nature et de donner à en apercevoir l’état des lieux dans le monde. Car comme le rappelle Camille de Toledo dès la préface, “la matrice culturelle du droit est désormais légitimement troublée. La vision de l’homme, berger de la nature, ne tient plus”.

    Une présentation des enjeux et des débats autour des droits de la nature

    La première partie de l’ouvrage présente les enjeux et les débats des droits de la nature à travers des thèmes spécifiques tels que l’accès à la justice environnementale, le préjudice écologique, l’interaction avec les droits humains ou encore la démocratie environnementale, tout en mobilisant les éthiques environnementales avec la notion centrale de valeur intrinsèque de la nature. Dans sa contribution sur les éthiques environnementales, Catherine Larrère constate en effet que “la considération morale n’est plus réservée à la seule humanité, elle est étendue à l’ensemble du vivant”.

    Pour Marine Yzquierdo, avocate et membre de Notre Affaire de Tous qui a coordonné la rédaction de l’ouvrage, “ces différents thèmes permettent de mettre en perspective les droits de la nature par rapport au cadre juridique existant. La question particulière de l’interaction entre droits de la nature et droits humains apparaît primordiale face aux critiques de certains qui opposent droits de la Nature et droits humains, alors qu’ils sont pourtant complémentaires. La destruction du vivant rend impossible l’exercice de nos libertés individuelles.”

    Un large recueil de décisions commentées

    La deuxième partie de l’ouvrage dresse un état des lieux des droits de la nature en s’appuyant sur l’analyse de 63 cas dans 21 pays, que ce soit par la voie constitutionnelle, législative ou jurisprudentielle. Un véritable travail d’analyse, de synthèse et de traduction qui offre un large panorama de la réalité des droits de la nature dans le monde, au-delà des exemples emblématiques fréquemment cités et déjà connus du grand public. 

    Chacun des cas permet de comprendre le contexte politique, culturel et social ayant permis l’essor des droits de la nature dans le pays concerné, et les difficultés qui demeurent pour les mettre en œuvre. Une analyse enrichie par les points de vue d’avocats locaux et d’ONG locales interviewés par Notre Affaire à Tous.

    Dans de nombreux pays déjà, des juges n’hésitent pas à invoquer l’urgence écologique et la nécessité de changer de paradigme pour reconnaître des droits à des entités naturelles. Juan Carlos Henao, ancien président de la Cour constitutionnelle colombienne, souligne ce rôle primordial des juges dans l’évolution du droit, et explique dans la postface que “la nouvelle fonction sociale du droit a entraîné une profonde mutation de la notion de séparation des pouvoirs”. Et de poursuivre: “la célèbre citation de Montesquieu, selon laquelle « les juges de la nation ne sont […] que la bouche qui prononce les paroles de la loi ; des êtres inanimés, qui n’en peuvent modérer ni la force ni la rigueur », a volé en éclats”.

    Renforcer le plaidoyer en faveur des droits de la nature

    Les droits de la nature figurent parmi les cinq revendications de Notre Affaire à Tous depuis sa création en 2015 et guident quotidiennement ses actions. Notre Affaire à Tous est d’ailleurs à l’origine des deux premières déclarations des droits de fleuves proclamées en France, avec les collectifs qu’elle a accompagnés: le Tavignanu en Corse en juillet 2021, et la Têt dans les Pyrénées Orientales en novembre 2021.

    Avec cet ouvrage, Notre Affaire à Tous espère nourrir les réflexions sur le sujet et encourager les citoyens et les élus à entreprendre des initiatives locales sur leur territoire pour faire progresser les droits de la nature en France et en Europe.

    Contact presse:

    Marine Yzquierdo: marine.yzquierdo@notreaffaireatous.org – 06 50 27 05 78

  • Loi « séparatisme » et contrat d’engagement républicain : recours des associations de défense de l’environnement et de lutte contre la corruption

    Communiqué de presse Sherpa , France Nature Environnement, Greenpeace France, Humanité et Biodiversité, Les Amis de la Terre France, LPO, Transparency Internationale France, Notre Affaire A Tous, Zero Waste France

    25 associations ont déposé le mardi 1er mars un recours devant le Conseil d’État contre le décret d’application de la loi « séparatisme » approuvant le contrat d’engagement républicain des associations. Face à un texte qui menace notamment l’action en justice des associations de défense de l’environnement et de lutte contre la corruption, les requérants appellent à un ultime sursaut en faveur de la liberté d’association et d’expression.

    La souscription au contrat d’engagement républicain, annexé au décret du 31 décembre 2021, constitue désormais une condition pour l’octroi d’aides publiques et d’agréments aux associations. Ces derniers permettent pourtant à des associations d’agir en justice pour défendre des causes fondamentales telles que la protection de l’environnement ou la lutte contre la corruption.

    Les manquements aux dispositions du contrat exposent l’association à la perte de ces aides et agréments. Ces dispositions floues, au prétexte de lutter contre des risques de séparatisme, exposent les associations, dont certaines reconnues d’utilité publique, à des décisions arbitraires de la part de l’administration et des collectivités territoriales.

    Le contrat prévoit notamment que les associations « ne doivent entreprendre ni inciter à aucune action manifestement contraire à la loi », alors que la désobéissance civile constitue un moyen historique et puissant d’expression et de manifestation dans les milieux associatifs. Ces actions indispensables sont désormais soumises à des risques juridiques particulièrement dissuasifs en raison du contrat d’engagement républicain.

    Le décret est d’autant plus inquiétant qu’il s’inscrit dans un contexte de défiance et de répression à l’égard des associations. En témoignent les difficultés déjà rencontrées par plusieurs d’entre elles pour se voir délivrer les agréments nécessaires à des actions en justice.

    De telles atteintes à la liberté d’association, d’expression et de manifestation, pourtant consacrées par les textes internationaux, sont disproportionnées et déconnectées de l’objectif affiché de la loi. De vives critiques ont été formulées en ce sens, notamment par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), qui recommandait l’abandon pur et simple de ce contrat. Le Conseil constitutionnel est malheureusement resté sourd à ces appels.

    En dépit de l’urgence climatique et sociale, l’espace civique est mis à rude épreuve et l’action des associations, que ce soit dans la rue ou dans les tribunaux, se trouve ainsi fortement menacée.

    Pour ces raisons, nos associations forment un recours devant le Conseil d’État. Notre espoir est celui d’un sursaut de conscience afin de garantir la liberté d’association, d’expression et de manifestation. Il importe aujourd’hui de reconnaître pleinement ces droits fondamentaux et le rôle de ces associations qui permettent l’engagement des citoyens sur des sujets d’intérêt général.

  • Appel : Ensemble, exigeons de parler climat dans le débat présidentiel !

    Rejoignez notre appel, lancé par l’Affaire du siècle dont notre Affaire A Tous, pour que le climat occupe toute la place qu’il mérite dans les débats de l’élection présidentielle. Le texte complet de l’appel est disponible ci-dessous :

    Ensemble, exigeons de parler climat dans le débat présidentiel !

    La météorite climatique est visible à qui veut bien lever le regard. Et à vrai dire, son impact fait déjà sentir ses effets. La crise écologique s’accélère partout dans le monde, y compris en France. Les rapports scientifiques s’accumulent, précisant chaque fois davantage les perspectives dramatiques qui nous attendent sans un sursaut des responsables politiques et économiques.

    En 2021, la France a été doublement condamnée par la justice pour son inaction climatique, notamment par le Conseil d’Etat, la plus haute instance administrative de notre pays. Juridique, l’événement est aussi social. La mobilisation exceptionnelle de 2,3 millions de citoyens en faveur de cette action en justice, et les marches climat rassemblant plusieurs centaines de milliers d’entre nous, auront été des faits particulièrement marquants de ce quinquennat.

    Pourtant, à quelques semaines du premier tour de l’élection présidentielle, l’urgence climatique et l’effondrement de la biodiversité sont largement absents du débat médiatique et politique. Trop de candidats à la magistrature suprême esquivent le sujet. Trop de fois ce thème est absent des discours et des interviews. Où sont leurs réponses? Comment peut-on prétendre défendre l’Etat de droit sans dire comment l’on compte sortir la France de l’illégalité climatique ?

    Rédactions et journalistes doivent prendre leur responsabilité et exiger des réponses concrètes, sans reléguer le climat en fin d’interview ou de débat.

    Après tout, il ne s’agit rien de moins que de notre quotidien – d’aujourd’hui et de demain – de nos factures énergétiques, de nos emplois, de nos récoltes, de notre alimentation, de notre préparation aux canicules ou aux catastrophes naturelles. En somme, de notre possibilité de vivre une vie digne et enthousiasmante dans la France des prochaines décennies. Quelles mesures les candidat.e.s souhaitent-ils mettre en place pour conjuguer urgence climatique et justice sociale ?

    L’essentiel du débat présidentiel est encore devant nous. Il n’y a pas de fatalité à vivre une campagne électorale que deux tiers des Françaises et Français estiment déconnectée des vrais problèmes et qui relègue au second plan l’urgence climatique. L’ensemble des candidat.e.s doit dire aux citoyen.ne.s comment ils et elles comptent sortir la France de l’illégalité et comment ils comptent lutter contre la crise climatique.

    Ensemble, nous avons le pouvoir de replacer le climat au cœur du débat pour l’élection présidentielle.

    Ensemble nous affirmons : Pas de climat, pas de mandat !

    https://laffairedusiecle.net/widget-appel/?utm_source= »

  • CP / PLAN DE PRÉVENTION DU BRUIT DANS L’ENVIRONNEMENT DE L’AÉROPORT DE ROISSY

    Associations et élus mobilisés pour la santé des riverains et contre le retour du projet de Terminal 4

    Le 20 janvier 2022,

    En ce jour de lancement de la consultation publique sur le Plan de Prévention du Bruit dans l’Environnement (PPBE) de l’aéroport de Roissy – une quinzaine d’associations de défense des riverains, de défense de l’environnement, d’élus et d’ONG contre l’augmentation du trafic aérien et pour des raisons climatiques et sanitaires se sont rassemblés sur le parvis de la Préfecture du Val d’Oise à Cergy afin de protester contre ce plan. Le préfet du Val d’Oise a refusé de les rencontrer. 

    Les associations dénoncent ce projet de PPBE car :


    • il ne comporte ni objectif de réduction du bruit aérien, ni aucune mesure efficace pouvant faire baisser significativement ce dernier
    • il mentionne une augmentation de trafic aérien de +180 000 mouvements/an, soit l’équivalent du trafic prévu par le projet de Terminal 4, une extension de l’aéroport pourtant abandonnée il y a un an par le gouvernement. Cette mention doit être retirée.

    Un PPBE aéroport établi pour une durée de 5 ans est censé évaluer, prévenir et réduire le bruit aérien dans l’environnement. Or le premier plan pour Roissy adopté en 2016 est un échec : entre 2013 et 2019, le trafic aérien a connu une forte croissance ainsi que la population impactée dans sa santé de jour comme de nuit par le bruit aérien. Rappelons qu’1,4 million de Franciliens sont exposés à des niveaux de bruit très supérieurs aux recommandations de l’OMS à cause du trafic de l’aéroport de Roissy (Source Bruitparif). De plus, sous les couloirs aériens de Roissy, les Franciliens perdent jusqu’à 3 années d’espérance de vie en bonne santé. 

    De plus, le projet de PPBE mentionne une croissance de trafic de 180 000 mouvements/an identique au projet de Terminal 4, pourtant abandonné pour raisons climatiques par le gouvernement. “On ne peut plus continuer à étendre les aéroports”, estimait Barbara Pompili qui annonçait cet abandon il y a un an. C’est d’ailleurs ce que confirment deux études publiées par des ingénieurs et chercheurs du secteur aérien, qui montrent que la technologie ne permettra pas de réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’aviation si le trafic augmente.

    L’Etat français engage directement sa responsabilité sur la signature de ce PPBE. Ce plan qui scellera notre sort pour 5 ans ne peut pas être adopté en l’état !

    Nos revendications 

    • Prise en compte des valeurs-guide de l’OMS pour la réalisation des cartes de bruit
    • Plafonnement du trafic de Roissy à 500 000 mouvements annuels. 
    • Plafonnement du trafic nocturne à 30 000 mouvements annuels entre 22h et 6h, à l’instar des aéroports de Francfort, Heathrow, Madrid …
    • Adoption d’un échéancier de réduction du trafic nocturne dans l’objectif d’aboutir à un couvre-feu entre 22h et 6h.
    • Interdiction d’une nouvelle catégorie d’avions bruyants la nuit de 22h à 6h.

    Citations

    Françoise Brochot – Advocnar : “A l’unanimité, les associations ont voté contre le projet de PPBE en CCE le 18 janvier et l’avis de la commission a été défavorable. Nous attendons maintenant un plan efficace pour réduire la pollution sonore et protéger vraiment la santé des populations survolées”.

    Audrey Boehly – Collectif Non au T4 : “Nous ne sommes pas dupes, et la perspective de croissance du trafic à Roissy inscrite dans le PPBE montre qu’après avoir annoncé l’abandon du Terminal 4, l’Etat compte faire revenir ce projet par la fenêtre.”

    Elisabeth Furtado – Les Amis de la Terre Val d’Oise : “L’Etat ne peut pas laisser l’activité de l’aéroport de Roissy se développer au détriment des habitants, de leur santé et du climat”.

    Virginie Gansmandel – Greenpeace Paris : “Il n’y a pas de solution à court terme pour permettre à l’aviation de respecter l’Accord de Paris sans réduire le trafic aérien”.

    Claude Carsac – FNE IDF : “Le bruit est un problème de santé publique au même titre que la pollution de l’air. 20 ans après la directive européenne sur le sujet, il est grand temps que les pouvoirs publics prennent des mesures à la hauteur des enjeux !”

    Eugénie Ponthier – Collectif d’élus CCEET4 : “Par notre présence devant la Préfecture du Val d’Oise aujourd’hui, nous affirmons une nouvelle fois notre engagement pour préserver le cadre de vie et la santé de nos concitoyens. A l’heure des bonnes résolutions et de la prise de conscience globale des enjeux écologiques, le PPBE doit contribuer plus fortement à protéger les populations impactées par le bruit !”

    Contacts presse

    Françoise Brochot – ADVOCNAR – Groupe G.A.R.E : 06 79 51 25 60

    Audrey Boehly – Collectif NON au T4: 06 77 81 49 40

    Luc Blanchard – FNE-Ile-de-France : 06 63 07 25 87

    Eugénie Ponthier – Collectif d’élus pour le climat contre le Terminal 4 : 06 75 75 15 03       

    Associations signataires

    ADVOCNAR
    Alternatiba Paris
    Les amis de la Terre Paris
    Les Amis de la terre Val d’Oise
    AREC
    CIRENA
    Collectif NON au T4
    DIRAP
    FNE Ile-de-France
    FNE Seine-et-Marne
    Greenpeace Paris
    MNLE 93 Nord Est Parisien
    ONASA
    ROSO
    SOS Valle de Montmorency
    Val-D’oise Environnement
    Environnement 93
    CECCT4
    CSNA
    Notre Affaire à Tous
  • CP / La Collectivité de Corse adopte une motion pour soutenir la Déclaration des droits du fleuve Tavignanu.

    Lundi 10 janvier 2022

    L’Assemblée de Corse a adopté une motion le 17 décembre 2021, publiée le 3 janvier 2022, dans laquelle elle soutient la Déclaration des droits du fleuve Tavignanu.

    La Déclaration des droits du fleuve Tavignanu connaît de plus en plus de soutiens depuis son adoption le 29 juillet dernier. Déjà soutenue par de nombreux élus, conseils municipaux et citoyens, elle vient de recevoir deux soutiens très importants: celui de la ville de Bastia, le 10 novembre 2021, et celui de la Collectivité de Corse, le 17 décembre 2021. Ces dernières ont chacune adopté une motion relative à la reconnaissance des droits du fleuve Tavignanu.

    Dans une traduction libre de la motion publiée en langue corse, la Collectivité de Corse insiste sur la nécessité de “développer des méthodes de protection et de gestion qui préservent durablement la ressource [en eau du fleuve] dans un contexte de raréfaction et de pression”, et invite ainsi le président du conseil exécutif de Corse à s’associer à toutes les actions entreprises par le collectif Tavignanu vivu, Umani et l’association Terres de Lien Corsica-Terra di u Cumunu, qui sont porteurs de la Déclaration des droits du fleuve Tavignanu.

    La mobilisation des élus est primordiale pour porter la Déclaration et la rendre opposable aux personnes publiques et privées par la suite. Des discussions sont en cours avec les différentes parties prenantes pour réfléchir à la mise en œuvre des droits du Tavignanu, une démarche qui inspire d’autres villes dans l’hexagone.

    Contacts presse :

    • Notre Affaire à Tous: Marine Yzquierdo – 06.50.27.05.78
    • Tavignanu Vivu: Pascale Bona – 06.23.56.52.19
    • Umani/Terre de Liens Corsica: Jean-François Bernardini – 06.87.77.83.37

    Pour en savoir plus et soutenir la Déclaration: https://www.tavignanu.corsica/

  • CP/ Effondrement de la biodiversité : cinq ONG déposent un recours contre l’Etat pour demander Justice pour le Vivant

    LE 10 JANVIER 2022 – Ce matin, les associations POLLINIS, Notre Affaire à Tous, ASPAS, Anper-Tos et Biodiversité sous nos pieds ont déposé au Tribunal administratif de Paris leur recours contre l’État français pour manquement à ses obligations de protection de la biodiversité.

    En septembre dernier, lors du Congrès de l’UICN, Notre Affaire à Tous (NAAT), association de juristes à l’origine de l’Affaire du siècle, l’action en justice contre l’État français pour inaction climatique, et POLLINIS, qui défend les pollinisateurs, avaient initié la première étape de ce processus avec le dépôt d’injonctions.

    L’État n’ayant pas répondu dans le délai imparti, les organisations ont décidé de l’attaquer en justice, en déposant le 10 janvier 2022 une requête sommaire au Tribunal administratif de Paris. Une action à laquelle s’associent désormais trois nouvelles associations avec des expertises complémentaires : l’Association pour la protection des animaux sauvages et du patrimoine naturel (ASPAS), l’Association nationale pour la protection des eaux & rivières (ANPER-TOS) et Biodiversité sous nos pieds.

    « Toutes les études scientifiques montrent que la biodiversité dans notre pays est en train de s’effondrer, en grande partie à cause de certaines pratiques agricoles. Ce déclin généralisé des pollinisateurs et insectes, oiseaux, petits mammifères, poissons ou crustacés a des conséquences dramatiques sur les équilibres du vivant, rappellent les associations. L’État français, malgré ses nombreux engagements, a failli à prendre des mesures élémentaires, comme la mise en place d’un système d’homologation des pesticides réellement protecteur des pollinisateurs et de la faune en général. Il est temps, pour notre avenir à tous, que l’État soit tenu responsable de l’effondrement du vivant et respecte ses engagements« 


    À travers le dépôt de ce recours en carence fautive visant à voir reconnaître le préjudice écologique, les associations demandent donc à l’État de prendre toutes les mesures nécessaires à la protection du vivant et, en conséquence, de mettre à jour le processus d’homologation des pesticides, aujourd’hui insuffisant.

    Car si la France tient des discours ambitieux sur la protection de l’environnement et multiplie les engagements internationaux, européens et nationaux, force est de constater que les gouvernements successifs n’atteignent jamais les objectifs de protection de la biodiversité qu’ils se fixent eux-mêmes.

    Les trois plans de réduction des pesticides (Écophyto) ont tous échoué. Les insecticides néonicotinoïdes, interdits en raison de leur toxicité, bénéficient année après année de nouvelles dérogations. Et les substances hautement toxiques pour le vivant telles que le glyphosate ou les fongicides SDHI sont maintenues sur le marché. Comme tous les pesticides, ces produits sont aujourd’hui autorisés par une procédure d’évaluation obsolète qui ne prend pas en compte les effets réels des pesticides sur la biodiversité.

    Par son ampleur et sa visée, cette action en justice pour la biodiversité constitue une première mondiale. Elle s’inspire des récentes actions pour le climat, qui ont abouti à des succès, avec la reconnaissance par les tribunaux d’une obligation pour l’État de respecter strictement la trajectoire prévue pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et de réparer le préjudice écologique engendré par le non-respect de ces objectifs.

    Les associations, qui alertent depuis des années sur la destruction du vivant, estiment que : « Puisque l’expertise scientifique et la mobilisation des citoyens ne suffisent pas à obtenir une politique responsable vis-à-vis du vivant, nous estimons que l’outil du droit est désormais nécessaire pour empêcher sa destruction ».


    Le dépôt de la requête sommaire le 10 janvier, sera complété ultérieurement par un mémoire complémentaire, présentant les arguments juridiques et scientifiques, ainsi que les mesures enjointes à l’État.

    Contacts presse :

    Notre Affaire à Tous
    Justine Ripoll, Responsable de campagnes : justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    POLLINIS
    Julie Pecheur, Directrice du plaidoyer – juliep@pollinis.org