Catégorie : Actualités

  • CP/Déforestation illégale, travail forcé et accaparement de territoires : BNP Paribas mis en garde par une organisation brésilienne

    Une organisation brésilienne, soutenue par Notre Affaire à Tous, met en garde BNP Paribas pour ses financements à un important producteur de viande bovine brésilien, Marfrig, suspecté d’être impliqué dans la déforestation illégale, le travail forcé et l’accaparement de territoires autochtones

    Paris/Goiânia, 17 octobre 2022 – Dans le cadre d’une démarche inédite visant à engager la responsabilité des acteurs financiers en matière de déforestation illégale et de graves violations des droits humains liées à l’industrie bovine brésilienne, l’association brésilienne Comissão Pastoral da Terra (CPT) et l’association française Notre Affaire À Tous (NAAT), soutenues par l’ONG nord-américaine Rainforest Action Network, ont adressé une mise en demeure à la banque française BNP Paribas en raison de son appui financier à Marfrig, la deuxième plus grande entreprise de conditionnement de viande du Brésil. Dans une lettre adressée à BNP Paribas, les avocats de NAAT et CPT affirment que Marfrig se rend coupable de graves violations en raison de l’insuffisante réglementation de sa chaîne d’approvisionnement, contribuant ainsi à la déforestation, à l’accaparement de terres de populations autochtones et à des pratiques analogues à l’esclavage dans les élevages bovins qui fournissent Marfrig. En fermant les yeux sur ces abus et en continuant à aider Marfrig à obtenir des milliards de dollars pour son financement, la lettre affirme que BNP Paribas contribue à ces pratiques illégales et pourrait voir sa responsabilité engagée.

    Selon une analyse réalisée par le Center for Climate Crime Analysis (CCCA), portant sur les activités réalisées entre 2009 et 2020 par deux usines de conditionnement de viande exploitées par Marfrig, les fournisseurs de viande bovine de Marfrig auraient été responsables de plus de 120 000 hectares de déforestation illégale dans la forêt amazonienne et la savane du Cerrado au cours de cette période. Il a également été établi que Marfrig s’est, directement et indirectement, approvisionné en bétail auprès d’éleveurs qui élevaient illégalement leurs bêtes sur des territoires autochtones. Une enquête menée par Repórter Brasil a révélé qu’il s’agissait notamment d’exploitations situées sur le territoire autochtone Apyterewa, dans l’État du Pará, l’une des terres autochtones les plus déboisées ces dernières années.

    Selon Xavier Plassat, de la Campagne nationale de la CPT contre l’esclavage : « Comme le gouvernement de Jair Bolsonaro a interrompu toute action de reconnaissance légale des terres autochtones, les éleveurs de bétail s’installent sur les territoires traditionnels des populations autochtones en toute impunité.« 

    En outre, bien que la loi brésilienne interdise rigoureusement les pratiques assimilables à l’esclavage, notamment le travail forcé et la servitude pour dettes, Marfrig s’est également approvisionnée en bétail auprès d’exploitations agricoles impliquées dans de telles pratiques.

    Parmi les secteurs qui profitent de conditions analogues à de l’esclavage au Brésil, celui de l’élevage bovin représente un poids exorbitant : un tiers des travailleurs libérés de cette situation entre 1995 et 2020. Selon un rapport de Greenpeace publié l’année dernière, Marfrig ne dispose toujours pas de procédures efficaces pour garantir que les éleveurs de bétail liés à la déforestation illégale ou à des violations des droits de l’homme soient exclus de sa chaîne d’approvisionnement.

    Il s’agit de la première mise en garde adressée à une banque pour qu’elle se conforme à ses obligations légales en matière de déforestation. La loi française sur le devoir de vigilance exige que les multinationales opérant en France établissent un plan qui « comporte des mesures raisonnables de vigilance pour identifier les risques et prévenir les violations graves des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de la santé et de la sécurité des personnes et de l’environnement, résultant des activités de la société et de celles des sociétés qu’elle contrôle » en France et à l’étranger. Cette plainte est un signal fort à l’attention de tous les acteurs financiers, leur rappelant leurs obligations légales en matière de crise climatique et de violations des droits de l’homme – et les risques juridiques et réputationnels de ne pas s’y conformer immédiatement. 

    Selon Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire À Tous : « Il est grand temps que les banques cessent de financer la déforestation. Elles ne peuvent plus prétendre qu’elles ne savent pas que leurs financements et leurs investissements alimentent activement le chaos climatique, l’effondrement de la biodiversité, l’accaparement des terres autochtones et les pratiques s’apparentant à l’esclavage. La loi est de notre côté, BNP Paribas doit changer ses pratiques. » 

    Contacts presse

    Comissão Pastoral da Terra: Fr. Xavier Plassat, Coordinateur de la campagne nationale de la CPT “Ouvre l’œil pour ne pas devenir un esclave”; comunicacao@cptnacional.org.br, + 5563 99221 9957

    Notre Affaire à Tous : Abdoulaye Diarra, Chargé de communication, communication@notreaffaireatous.org, 07 82 21 38 90

    Rainforest Action Network: Laurel Sutherlin, Responsable de la Communication stratégique, laurel@ran.org, +1 415 246 0161

  • Un an après sa condamnation, l’État n’en fait (toujours pas) assez !

    Un an après sa condamnation, l’État n’en fait (toujours pas) assez !

    Press conference for the Affair of the Century organized by GreenPeace in a forest damaged by fire in Gironde near Landiras. In presence of Jacques HAZERA (Forestry expert) Yann ROBIOU DU PONT (Climatologist), Jean-Francois JULLIARD (Director of Greenpeace FRANCE), Amandine LEBRETON (Director of advocacy and prospective at the Fondation pour la Nature et pour l’Homme (FNH)), Jeremie SUISSA (General Delegate of Notre Affaire a Tous), Cecile DUFLOT (Director General of Oxfam FRANCE). Conference de presse pour L’Affaire du siecle organiser par GreenPeace dans une forets sinistree par les incendie en Gironde pres de Landiras. En presence de Jacques HAZERA (Expert forestier) Yann ROBIOU DU PONT (Climatologue), Jean-Francois JULLIARD (directeur de Greenpeace FRANCE), Amandine LEBRETON (directrice du pole plaidoyer et prospective a la Fondation pour la Nature et pour l’Homme (FNH)), Jeremie SUISSA (delegue general de Notre Affaire a Tous), Cecile DUFLOT (directrice general d’Oxfam FRANCE)

    Le 14 octobre 2021, l’Etat français était condamné par le tribunal administratif de Paris pour inaction climatique, grâce à l’Affaire du Siècle. A moins de trois mois de la date butoir fixée par le tribunal administratif (le 31 décembre 2022), l’Affaire du Siècle s’est rendue dans une forêt ravagée par le feu près de Landiras (Gironde), pour interpeller le gouvernement : un an après sa condamnation, l’Etat n’en fait pas toujours pas assez. Les organisations ont listé des mesures à prendre de toute urgence pour surmonter l’hiver, tout en préparant l’avenir. Yann Robiou du Pont, docteur en climatologie, et Jacques Hazera, propriétaire forestier, sont venus à nos côtés attester des impacts dramatiques déjà causés par le dérèglement climatique.

    Que s’est-il passé depuis un an ?

    Depuis sa condamnation le 14 octobre 2021, et le jugement du Conseil d’Etat en novembre 2020, l’Etat est sous le coup d’une double obligation. Il a non seulement l’obligation de respecter sa trajectoire de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, mais il doit également réparer tout dépassement de cette trajectoire.

    En un an, quelques efforts allant dans le bon sens sont à saluer, à condition qu’ils soient confirmées prochainement :

    • Dans le domaine de l’énergie, par exemple, la fin des garanties à l’export pour les projets d’exploitation d’énergies fossiles est une bonne nouvelle. Cette annonce doit toutefois être confirmée dans le projet de loi de finances, actuellement en discussion.
    • Dans les transports, l’annonce d’un plan vélo est encourageante pour le développement d’infrastructures cyclables de qualité, continues et sécurisées.
    • En termes de sobriété, le plan présenté marque un tournant dans le discours du gouvernement.Mais ces douze mois ont été aussi marqués par des régressions préoccupantes. Quelques exemples :

    Mais ces douze mois ont été aussi marqués par des régressions préoccupantes. Quelques exemples :

    • Côté énergie, la réouverture de la centrale à charbon de Saint Avold ou encore la création d’un nouveau terminal méthanier au Havre vont à contre-sens de la lutte contre le changement climatique.
    • Dans le secteur de l’agriculture, 3e secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre dans l’Hexagone, la Politique Agricole Commune appliquée en France ne propose que de maigres avancées qui font déjà l’objet de dérogations en 2023.

    Si à court terme, la pandémie de Covid-19 et la crise énergétique ont entraîné une baisse conjoncturelle des émissions de gaz à effet de serre en France, cette diminution ponctuelle reste encore insuffisante pour compenser le retard pris et réparer le préjudice subi en raison du non-respect des engagements climatiques. A long terme, la France n’est toujours pas sur la bonne trajectoire : les politiques publiques prévues jusque-là ne permettront pas d’atteindre les objectifs à 2030.

    Comment l’Etat peut-il encore agir ?

    Les solutions sont connues et de nombreuses propositions de mesures ont déjà été mises sur la table. Le gouvernement a donc trois mois pour réellement changer la donne et montrer son intention de respecter ses engagements climatiques et réparer les préjudices. Trois mois, c’est court. Et beaucoup de temps a déjà été perdu.

    En pleine crise énergétique, la priorité est de privilégier des mesures renforçant la justice sociale, en ciblant celles et ceux qui en ont le plus besoin et favorisant les économies d’énergie dans des secteurs fortement émetteurs de gaz à effet de serre.

    • Dans les transports, 1er secteur émetteur de gaz à effet de serre, des mesures immédiates doivent être prises : extension aux transports et jets privés de l’interdiction des vols si une alternative en train existe en moins de 2h30 ; mise en place d’un forfait à prix réduit pour les transports en commun ; investissements massifs dans les alternatives à la voiture individuelle.
    • Dans les logements et bâtiments, 2e secteur émetteur de gaz à effet de serre, il y a urgence à mettre en place un vaste plan de rénovation énergétique beaucoup plus ambitieux que les mesures jusque-là adoptées et annoncées, en commençant par les « passoires thermiques », ces logements les plus mal isolés.
    • Sur le plan énergétique, le gouvernement tarde aussi beaucoup trop sur deux piliers essentiels de la transition énergétique : la sobriété (son plan manquant d’ambition et se limitant à des mesures conjoncturels pour passer l’hiver) et le développement des énergies renouvelables (la France est le seul pays européen à ne pas avoir respecté ses objectifs sur ce point). Une mesure immédiate de sobriété pourrait être d’interdire les panneaux publicitaires lumineux (qui consomment chacun en moyenne par an l’équivalent de la consommation électrique, hors chauffage et électricité, d’une famille, selon l’Ademe).
    • Sur le volet agricole, le gouvernement doit initier le projet de loi d’orientation agricole annoncé pour fin 2022 et assurer une consultation large des acteurs impliqués. Dans le cadre de cette loi, une attention particulière devra être portée sur la formation qui doit appuyer la transition agroécologique ainsi que sur le renouvellement des générations agricoles. Par ailleurs le gouvernement doit revenir sur les reculs environnementaux concédés en conséquence de la guerre en Ukraine (notamment sur les jachères) sous pression des lobbys agro-industriels.

    Même s’il ne reste plus que trois mois au gouvernement pour redresser la barre, nombre de ces mesures peuvent être prises très rapidement pour passer l’hiver tout en préparant l’avenir, alors même que le budget de l’Etat est actuellement débattu à l’Assemblée nationale. Plus tôt ces décisions seront prises, plus vite elles produiront des effets concrets sur la baisse de nos émissions de CO2 !

  • Recommandations climatiques sur le devoir de vigilance européen

    Notre affaire à tous (NAAT) publie avec ses partenaires européens un document destiné aux décideurs politiques contenant des recommandations importantes sur le devoir de vigilance climatique. Ce texte vise à ce que le projet de directive européen prenne en compte l’expérience pionnière en France, marquée par l’adoption d’une loi nationale similaire et l’émergence de premiers contentieux initiés par NAAT en matière climatique.

    NAAT est à l’origine du contentieux climatique contre Total, fondé sur le devoir de vigilance des multinationales, ainsi que d’un rapport comparatif « Benchmark » sur la conformité de 27 multinationales d’origine française aux obligations de vigilance interprétées à la lumière de l’Accord de Paris. Malgré ces différentes initiatives, ni Total ni les 26 autres entreprises multinationales du Benchmark ne réduisent suffisamment leurs gaz à effet de serre.

    Eu égard à la gravité de la situation et du peu de temps qu’il reste pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, il est essentiel que la directive européenne sur le devoir de vigilance clarifie les obligations des multinationales en matière de changement climatique. C’est la raison pour laquelle NAAT s’est jointe à un collectif d’associations et d’ONG pour présenter des recommandations, à destination des députés et institutions européen.ne.s, sur ce qui est attendu des entreprises en matière de plans de transition. L’objectif est d’éviter que ces plans ne servent de greenwashing et de rappeler clairement que le climat fait partie intégrante du devoir de vigilance des entreprises multinationales. Le document inter-associatif comporte en ce sens des recommandations sur deux articles clés de la proposition de directive : les articles 15 et 3.

    L’article 15 impose aux entreprises d’adopter un plan de transition pour garantir la compatibilité de leur business model avec la transition vers une économie durable et la limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C conformément à l’accord de Paris. Cet article manque toutefois de précision, et compte tenu de l’urgence climatique, il est nécessaire de prescrire le plus précisément possible la marche à suivre aux entreprises afin de restreindre l’interprétation de l’obligation et de faciliter le contrôle de son application.

    Enfin, la vigilance climatique dépasse la seule adoption d’un plan de transition. Il s’agit d’une obligation de comportement juridiquement contraignante. C’est pourquoi ce papier recommande également de modifier l’article 3 en faveur d’une approche exhaustive de la notion d’« incidences négatives sur l’environnement » (adverse environmental impacts) pour que la directive rappelle sans ambiguïté que le climat fait partie intégrante du régime général du devoir de vigilance européen. Ainsi, si les changements proposés par NAAT et ses partenaires sont acceptés, les entreprises multinationales devront prévenir, atténuer et indemniser les dommages climatiques auxquels elles contribuent respectivement.

  • Formulants de pesticides et effet cocktail : Secrets toxiques et 23 députés somment le gouvernement de se mettre en conformité avec la loi

    Ce 5 octobre 2022, 24 organisations et 23 députés mettent en garde la Première Ministre, Elisabeth Borne, sous la forme d’une demande préalable, contre l’absence de procédures scientifiques permettant de s’assurer de l’innocuité des pesticides commercialisés en France, en particulier pour ce qui concerne l’étude de la toxicité chronique des mélanges de molécules au sein d’un même pesticide – connu également sous le nom d’ « effet cocktail ». Cette demande est envoyée dans le cadre de la campagne Secrets Toxiques, portée par plus de 40 organisations. En l’absence de réponse satisfaisante de la part de l’exécutif sous deux mois, les signataires de la demande préalable porteront un recours devant le Conseil d’État.

    La réglementation est claire : elle prévoit qu’un pesticide ne peut être autorisé que s’il est démontré qu’il n’a pas d’effet néfaste à court ou à long terme sur la santé humaine ou l’environnement.

    Pourtant, dès 2019 la Cour de Justice de l’Union Européenne affirmait dans un arrêt que les « tests sommaires » réclamés par les autorités sanitaires « ne sauraient suffire à mener à bien cette vérification ». Un constat confirmé par de récentes expertises collectives de l’INSERM et de l’INRAE-Ifremer, qui démontrent, sur la base de milliers de publications scientifiques, l’existence de nombreux effets délétères des pesticides, tant sur la santé humaine que sur l’environnement, et cela malgré les exigences réglementaires européennes et nationales.

    Malgré ces alertes scientifiques, le gouvernement français n’a toujours pas enclenché les réformes nécessaires pour se mettre en conformité avec la loi et protéger les populations, qui consisteraient notamment à inclure, dans les dossiers de demande d’autorisation de mise sur le marché des pesticides, des analyses de toxicité à long terme et de cancérogénicité portant sur les formulations complètes – c’est-à-dire sur les pesticides tels qu’ils sont commercialisés. Les associations et parlementaires exigent également dans leur demande préalable que ces données soient présentées dans les rapports d’évaluation publics.

    Cette demande préalable à la Première Ministre s’inscrit dans la continuité des efforts d’investigation de la coalition d’associations Secrets Toxiques depuis 2020, pour améliorer notre connaissance et la transparence des pratiques et processus d’évaluation de la toxicité des pesticides autorisés. Tant au niveau européen que français, cette campagne aura permis de mettre en lumière et démontrer dans le détail l’insuffisance des tests pratiqués par les autorités sanitaires.

    Contacts presse

    Andy Battentier, directeur de campagne : 07 69 16 14 18 – andy.battentier@protonmail.ch

    Organisations signataires de la demande préalable

    Association Nationale pour la Protection des Eaux et Rivières, Alterna’bio, Campagne glyphosate France, Collectif Anti-Pesticides 66, Collectif anti-OGM 66, Comité Écologique Ariègeois, Confédération paysanne France (et ses groupes locaux Aveyron, Lot et Ariège), Foll’avoine, Générations Futures, Le Chabot, Nature & Progrès France (et ses groupes locaux Ardèche, Aveyron et Tarn), Nature Rights, Notre Affaire à tous, PIG BZH, Santé Environnement Auvergne/Rhône-Alpes, Secrets Toxiques, SOS MCS, Terre d’abeilles, Union Nationale de l’Apiculture Française

    Députés signataires de la demande préalable

    Gabriel Amard (LFI-NUPES), Ségolène Amiot (LFI-NUPES), Rodrigo Arenas (LFI-NUPES), Julien Bayou (Ecologiste-NUPES), Lisa Belluco (Ecologiste-NUPES), Manuel Bompard (LFI-NUPES), Sylvain Carrière (LFI-NUPES), Sophia Chikirou (LFI-NUPES), Jean-François Coulomme (LFI-NUPES), Catherine Couturier (LFI-NUPES), Alma Dufour (LFI-NUPES), Elsa Faucillon (GDR-NUPES), Marie-Charlotte Garin (Ecologiste-NUPES), Clémence Guetté (LFI-NUPES), Mathilde Hignet (LFI-NUPES), Jérémie Iordanoff (Ecologiste-NUPES), Arnaud Le Gall (LFI-NUPES), Charlotte Leduc (LFI-NUPES), Pascale Martin (LFI-NUPES), Marie Pochon (Ecologiste-NUPES), Loïc Prud’homme (LFI-NUPES), Sandra Regol (Ecologiste-NUPES), Matthias Tavel (LFI-NUPES)

    Secrets Toxiques est une campagne portée par 47 organisations et 17 groupes locaux

  • CP/ D’éminents juristes et organisations unissent leurs forces pour avertir les gouvernements : agissez sur le climat ou affrontez les tribunaux.

    Paris, 27 septembre – Les avocats de plus de vingt organisations affirment dans une lettre ouverte que les pays doivent intensifier leur action en faveur du climat ou faire face à leur responsabilité devant les tribunaux. Leur lettre ouverte intervient alors que le responsable du climat de l’ONU prévient que les plans actuels sont très loin d’être ce qui est nécessaire.

    C’est la première fois dans l’histoire que des avocats et des ONG du monde entier s’unissent pour avertir les gouvernements qu’ils doivent fixer des objectifs et des mesures plus stricts d’ici la COP27, comme l’exige la science – ou s’exposer à d’autres actions en justice.

    Sarah Mead, co-directrice du Climate Litigation Network, a déclaré : « L’action climatique est une obligation légale. Pourtant, les gouvernements ne respectent pas leurs propres lois et engagements. Nous voulons nous assurer que les pays comprennent que la loi est de notre côté. Les avocats et les militants continueront à utiliser ce levier pour tenir les gouvernements responsables de leurs objectifs climatiques manqués. »

    La lettre ouverte s’inscrit dans le cadre de la campagne « Procès climatiques », qui met en lumière la vague de procès climatiques intentés contre des gouvernements qui n’ont pas pris de mesures fortes en faveur du climat, mettant en danger les droits fondamentaux des populations.

    Filippo Sotgiu, plaignant dans l’affaire climatique italienne et porte-parole de Fridays for Future Italy a déclaré : « Les gens perdent espoir et confiance. Nous ne pouvons pas continuer à compter sur la bonne volonté des gouvernements pour protéger nos droits et notre avenir. C’est pourquoi les militants du monde entier se tournent vers la loi pour s’assurer que les souffrances et violations des droits humains soient minimisées. Si nous examinons les affaires récentes, nous pouvons dire : cette tactique fonctionne« .

    Depuis l’affaire climatique néerlandaise qui a fait date, plus de 80 affaires ont été déposées pour contester les réponses des gouvernements à la crise climatique. Les gouvernements visés par un contentieux climatique incluent tous les grands émetteurs comme l’Australie, le Brésil, les pays de l’UE, les États-Unis, l’Afrique du Sud, la Corée du Sud ou encore la Russie. Ces actions en justice ont entraîné des réductions réelles des émissions en Allemagne, aux Pays-Bas et ailleurs.

    Javier Dávalos González, coordinateur du programme climatique de l’Asociación Interamericana para la Defensa del Ambiente (AIDA), a ajouté : « Le monde est témoin d’une avalanche de procès climatiques qui ne peut être arrêtée que lorsque les gouvernements seront à la hauteur. Nos affaires sont intrinsèquement liées. Les tribunaux s’appuient sur des décisions historiques rendues dans d’autres pays. Ainsi, chaque victoire renforce les fondements juridiques pour de futures audiences et de nouveaux défis juridiques visant l’inaction des gouvernement ».

    Signataires :

    Alana (Brazil), AIDA (Latin America and the Caribbean), Aurora (Sweden), The Australian Climate Case (Australia), Grata Fund (Australia), Phi Finney McDonald (Australia), Center for Environmental Rights (South Africa), Natural Justice (South Africa), Client Earth (Global), Climate Action Network Europe (Europe), Climate Case Ireland (Ireland), Ecojustice (Canada), Europäische Klimaklage (Austria), Germanwatch (Germany), Giudizio Universale (Italy), Rete Legalità per il Clima (Italy), A Sud (Italy), Global Legal Action Network (Global), Klimaatzak (Belgium), Klimatická (Czech Republic), Lawyers for Climate Action NZ (New Zealand), Lee Salmon Long (New Zealand), Notre Affaire à Tous
    (France), Affaire du Siècle (France), Adv. Padam Shrestha (Nepal), Plan B (UK), Protect the Planet (Germany), Russian Climate Case (Russia), Urgenda (Netherlands), Youth4ClimateAction (South Korea), Greenpeace International.

    Contact presse international : dorka.bauer@gsccnetwork.org
    Contact presse France : justine.ripoll@notreaffaireatous.org – 06 42 21 37 36

  • CP Dérèglement climatique : Paris et New York interviennent dans l’action judiciaire contre TotalEnergies

    Paris, 21 septembre 2022 – Lors d’une conférence de presse, les villes de Paris et New York ont officialisé rejoindre la coalition d’associations et de collectivités territoriales qui ont assigné TotalEnergies en justice pour manquement à son devoir de vigilance en matière climatique. La ville de Poitiers et Amnesty International France soutiennent également cette action en justice historique.

    Les territoires continuent de se défendre contre les principaux responsables du changement climatique.

    Les villes et collectivités territoriales sont en première ligne face aux nombreux enjeux d’adaptation et d’atténuation des impacts du changement climatique. La lutte contre la précarité énergétique, le renforcement des financements pour protéger la biodiversité, la prévention contre les incendies et les inondations sont autant d’exemples de l’accroissement des défis rencontrés par ces acteurs.

    Les collectivités sont également contraintes d’assumer les coûts de l’inaction climatique des entreprises les plus émettrices de gaz à effet de serre, au premier rang desquelles figure TotalEnergies. En lien avec les ONG à l’origine du contentieux, notamment Notre Affaire À Tous, les villes de New-York, Paris et Poitiers ont rejoint la coalition des collectivités et associations visant à réhausser les ambitions climatiques de Total.

    Pour la maire de Paris, Anne Hidalgo, “Tous les signaux sont au rouge. Pour nous en sortir et maintenir l’augmentation de la température de la planète en dessous de 2°C, l’Accord de Paris doit absolument être respecté. Or certains continuent à penser à leurs intérêts financiers avant l’intérêt collectif et la protection de la vie sur Terre. Avec ce procès, nous voulons obliger un acteur incontournable de l’énergie à respecter l’Accord de Paris. Nous savons, à New York, à Grenoble, à Bayonne, à Poitier, combien cette affaire est importante pour redonner espoir.

    Une stratégie en contradiction totale avec les objectifs de l’Accord de Paris

    Au regard de son impact climatique, Total porte une responsabilité particulière dans la crise climatique. Total fait partie du top 20 des entreprises fossiles ayant émis directement et indirectement le plus de gaz à effet de serre (GES) depuis 1965 et demeure encore aujourd’hui à l’origine de près de 1% des émissions mondiales de GES, soit l’équivalent des émissions annuelles de la France[1]. Acteur historique du déni climatique en France[2], dont la politique est contestée pour “blanchiment climatique” ou “greenwashing”[3], TotalEnergies persévère dans l’exploration pétro-gazière. La multinationale continue de consacrer près de 80% de ses investissements au développement des énergies fossiles, qui représentent encore 90% de son activité, en contradiction frontale avec son ambition affichée de devenir “neutre en carbone en 2050”.

    Près de quatre ans après la première interpellation de Total et de son PDG Patrick Pouyanné  par une coalition inédite d’associations et de collectivités territoriales, ce contentieux, désormais soutenu par de nouvelles collectivités territoriales et ONG, vise à ce que le Tribunal judiciaire,  à l’image de la décision Shell aux Pays-Bas, enjoigne à Total, de prendre les mesures nécessaires pour réduire drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre et s’aligner avec les objectifs de l’Accord de Paris, conformément à la loi française du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des sociétés mères .

    Pour Jean-Claude Samouiller, Président d’Amnesty International France (AIF) : “En portant atteinte à la survie de l’humanité, le dérèglement climatique est une menace sans précédent sur les droits humains. Les entreprises de combustibles fossiles comme TotalEnergies ont une responsabilité majeure à l’égard de l’environnement et par conséquent des droits humains, c’est pourquoi nous soutenons les prétentions des parties”.

    Une action en justice historique

    Ce sont désormais 16 collectivités et 6 associations qui demandent au Tribunal judiciaire de Paris d’enjoindre à TotalEnergies de reconnaître les risques générés par ses activités et de lui imposer d’adopter des trajectoires d’émissions de GES compatibles avec les grands objectifs climatiques internationaux. Sans un réel changement de comportement des multinationales fossiles comme Total et d’autres entreprises fortement émettrices, les trajectoires nécessaires à la limitation des impacts du changement climatique ne pourront pas être respectées. Pour ce faire, les injonctions des juges combinées au renforcement des obligations incombant aux entreprises, telles que la proposition de directive européenne sur le devoir de vigilance des multinationales, deviennent indispensables.

    Pour la maire de Poitiers, Léonore Moncond’huy : “Les collectivités territoriales sont en premières lignes face aux effets du changement climatique : gestion des crises, incendies, inondations, mise à l’abri des plus vulnérables, sécheresse… Ce sont elles qui payent le coût financier et humain de l’adaptation. La responsabilité des producteurs d’énergies fossiles vis-à-vis de la situation que nous vivons dans les territoires est considérable.

    Le 21 septembre 2022 a eu lieu une nouvelle audience devant le Tribunal Judiciaire de Paris, qui a permis d’officialiser ces nouvelles interventions et de clarifier les prochaines étapes de la procédure.

    Liste des 16 collectivités impliquées dans cette action en justice :

    Arcueil, Bayonne, Bègles, Bize-Minervois, Région Centre-Val de Loire, Correns, Est Ensemble, Grenoble, La Possession, Mouans-Sartoux, Nanterre, New-York, Paris, Poitiers, Sevran, Vitry-Le-François.

    Liste des 6 associations impliquées dans cette action en justice :

    Notre Affaire À Tous, Sherpa, Les Eco-Maires, France Nature Environnement, et ZEA. Intervenante accessoire volontaire : Amnesty International France.

    Contacts presse :

    Notre Affaire à Tous : Abdoulaye Diarra,Chargé de communication, communication@notreaffaireatous.org, 07 82 21 38 90

    Cabinet Seattle Avocats : Me François de Cambiaire,
    fdecambiaire@seattle-avocats.fr, 06 87 93 62 05

    Amnesty International France : Véronique Tardivel, Attachée de presse,
    vtardivel@amnesty.fr, 06 37 15 48 47

    Eco Maires : Maud Lelièvre, Déléguée générale,
    maud.lelievre@ecomaires.com , 06 85 64 27 26

    Sherpa : Théa Bounfour, Chargée de contentieux et plaidoyer,

    thea.bounfour@asso-sherpa.org, 01 42 21 33 25

    ZEA : Jean Ronan Le Pen, co-président

     jrlepen@gmail.com 06 08 04 76 53

    FNE : Virginie Boquin, chargée des relations avec la presse

    virginie.boquin@fne.asso.fr, 06 07 69 27 10

    Bize-Minervois : Alain Fabre, Maire de Bize-Minervois
    alain.fabre11120@gmail.com, 0784563678

    Grenoble : Aurélie Martin, attachée de presse
    presse@grenoble.fr, 06 07 24 82 79

    Nanterre : Cathy Bruno, cheffe de cabinet

    cathy.bruno@mairie-nanterre.fr; 06 34 13 91 90

    Paris : presse@paris.fr, 01 42 76 49 61

    Poitiers : David Karmann, attaché presse
    06 74 23 09 23

    Vitry-Le-François : Jean-François THOMAS, Directeur de la Communication
    jfthomas@vitry-le-francois.net, 07 78 41 06 05


    [1] Pour les chiffres : v. Total, document de référence 202118, p. 607-608202 et Haut Conseil pour le Climat, Rapport annuel neutralité carbone 2019, p. 29.

    [2] Un article publié dans la revue académique internationale Global Environmental Change a documenté la connaissance précoce du dérèglement climatique par Total ainsi que la mise en place de différentes stratégies de fabrique du doute autour de l’urgence climatique afin d’empêcher, par un lobbying féroce, toute forme de régulation de ses activités.

    [3] Le 2 mars 2022, Greenpeace, Notre Affaire à Tous, et les Amis de la Terre, soutenues par l’association ClientEarth, ont assigné TotalEnergies en justice pour pratiques commerciales trompeuses ou “greenwashing”. De plus, le 28 mai 2020, Notre Affaire à Tous et Sherpa avaient signalé à l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) de potentielles contradictions, inexactitudes et omissions dans les documents financiers et les récentes communications publiques de l’entreprise pétrolière en matière de risques climatiques.

  • CP/ Régulation des multinationales : plus de 100 associations et syndicats européens exigent de faire passer les droits humains avant les profits

    Paris, 6 septembre 2022 – Mettre fin à l’exploitation des travailleur·ses, aux violations des droits des populations et à la destruction de l’environnement par les pratiques néfastes des multinationales européennes [1]. Telles sont les revendications de la campagne « De la justice dans les affaires« , lancée aujourd’hui à Bruxelles et par plus de 100 organisations de la société civile et organisations syndicales à travers toute l’Europe. Elles demandent à l’Union européenne (UE) d’adopter une directive ambitieuse sur le devoir de vigilance des entreprises qui prévienne efficacement les atteintes à l’environnement et aux droits humains et oblige les entreprises à en répondre devant la justice.

    BRUSSELS, BELGIUM – SEPTEMBER 04 : Friends of the Earth activists participating in “Justice is Everybody’s Business”’, a civil society campaign for strong corporate due diligence legislation, pictured on SEPTEMBER 04, 2022 in Brussels, Belgium, 04/09/2022 (Photo by Philip Reynaers / Photonews)

    Même si des pays comme la France et l’Allemagne ont montré la voie en adoptant des lois nationales en la matière, une législation européenne plus large et ambitieuse est nécessaire. En février 2022, la Commission européenne a enfin dévoilé sa proposition de directive européenne exigeant des grandes entreprises qu’elles identifient et préviennent les risques et remédient aux violations des droits humains et dommages environnementaux pouvant être causées par leurs activités et investissements  dans leurs chaînes de valeur au sein et en dehors de l’UE. Cependant, les lobbies ont déjà laissé leurs marques et la proposition contient de dangereuses lacunes.

    Elle ne donne pas suffisamment de moyens aux personnes affectées d’avoir accès à la justice et aux réparations devant les tribunaux des pays membres de l’UE. Au lieu de lever les sérieux obstacles juridiques pour celles et ceux qui tentent d’intenter une action en justice contre des multinationales européennes, la proposition actuelle offre des échappatoires aux sociétés qui leur permettraient de se soustraire facilement à leurs responsabilités.

    La proposition de directive n’oblige pas non plus les entreprises à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et n’engage pas leur responsabilité juridique si elles ne le font pas, alors qu’elles alimentent massivement la crise climatique.

    Le coup d’envoi de la campagne est donné aujourd’hui en ligne dans de nombreux pays européens, et par une action publique à Bruxelles – où une « balance de la justice » de 3 mètres de haut symbolisant les déséquilibres actuels entre la sauvegarde des profits d’un côté, et le respect droits humains et de la justice environnementale et climatique de l’autre, montrera que la pression publique peut faire pencher la balance.

    Un sondage réalisé dans neuf pays de l’UE l’année dernière a indiqué que plus de 80% des citoyens européens souhaitent des législations ambitieuses pour tenir les entreprises responsables des violations des droits humains et de l’environnement à l’étranger. 

    Dans une pétition datant de 2021, plus d’un demi-million de personnes et 700 organisations de la société civile du monde entier ont également exprimé leur soutien à une telle législation européenne. 

    Pour Notre Affaire à Tous : « Sur le plan environnemental, des années après l’entrée en vigueur de la loi sur le devoir de vigilance en France, seule une entreprise sur les 27 analysées dans notre rapport s’engage à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C pour l’ensemble de ses émissions et avec une trajectoire chiffrée dans le temps, d’où la nécessité de règlementations européennes fortes et ambitieuse en la matière.« 

    Contacts presse : 

    Note : 

    [1] Selon la proposition de la Commission, la future directive s’appliquerait aux sociétés européennes dépassant certains seuils d’effectifs salariés et de chiffre d’affaires, ainsi qu’aux sociétés non européennes opérant sur le marché européen et dépassant un certain chiffre d’affaires. Elle couvrira leurs activités dans le monde entier. 

  • CP / Vigilance climatique de 27 multinationales françaises : Notre Affaire à Tous alerte sur de potentiels graves manquements à la loi dans son nouveau rapport

    Résumé : Mercredi 13 juillet, Notre Affaire à Tous publie son édition 2022 du Benchmark de la vigilance climatique des multinationales qui passe au crible les mesures de vigilance climatique de 27 grandes entreprises françaises emblématiques issues de secteurs d’activités fortement émetteurs. 

    Depuis la loi du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance, les grandes entreprises françaises sont tenues d’adopter un plan de vigilance qui identifie les risques d’atteinte aux droits humains et à l’environnement ainsi que les mesures de vigilance raisonnables propres à éviter la survenance de ces risques, dont ceux liés au climat. Comme les Etats qui peuvent être attaqués et condamnés pour inaction climatique (à l’image de l’Etat français dans Grande-Synthe et l’Affaire du Siècle), les grandes entreprises font également face à des risques juridiques de responsabilité en la matière. En effet, au-delà de la loi sur le devoir de vigilance, toutes les personnes publiques et privées, et en particulier les grandes entreprises, doivent être prudentes et vigilantes en matière environnementale et doivent également prévenir les préjudices écologiques

    Notre Affaire À Tous publie cette année un troisième rapport annuel consécutif sur la vigilance climatique des grandes multinationales françaises, en se fondant presque  exclusivement sur des documents publiés par les entreprises elles-mêmes.

    Les enseignements du Benchmark 2022

    Aucune entreprise analysée n’est en mesure de démontrer sa conformité avec l’ensemble de nos critères de vigilance climatique, dont l’observation est nécessaire pour faire de la transition écologique une réalité. Les manquements de la Société Générale, Auchan, Casino, Eiffage, Bolloré, Total Energies, Bouygues et BNP Paribas sont particulièrement préoccupants.

    Jérémie Suissa, Délégué général de Notre Affaire à Tous : “Comme l’a rappelé le Haut Conseil pour le Climat dans son dernier rapport, les impacts de la crise du Vivant sont d’ores et déjà visibles en France et les conséquences quotidiennes et imprévisibles. Et nous ne sommes pas prêts. Si l’Etat doit être le pilote de la transition nécessaire à laquelle la France s’est engagée, les entreprises doivent aussi prendre leur part. Or, une majorité des entreprises que nous avons analysées ne montrent pas de signes de changements structurels. Il est urgent de mettre en œuvre des outils de contrainte proportionnés à l’ampleur des manquements de ces acteurs clés pour la transition.” 

    Alors que l’empreinte carbone cumulée des 27 multinationales évaluées s’élève à 1 651,60  millions de tonnes équivalent CO², soit près de 4 fois le total des émissions territoriales de la France en 2020 (396 Mt CO2e), le rapport Benchmark 2022 dresse les constats principaux suivants :

    • de nombreuses défaillances persistantes en termes d’identification des émissions indirectes, en particulier celles dites du “scope 3” (critère 1-A de la méthodologie) ;
    • une absence générale de reconnaissance de responsabilité, alors qu’il est indiscutable que chacun.e doit faire sa part en matière climatique (critère 1-B) ;
    • de nombreux engagements demeurent non-alignés avec l’objectif 1,5°C de l’Accord de paris et/ou ne portent pas sur l’ensemble des émissions des entreprises (critère 2-A) ;  
    • des carences sérieuses dans la mise en œuvre  de ces engagements (critère 2-B). 
    • certains plans de vigilance n’intègrent toujours pas suffisamment le climat (critère 3).

    L’absence de conformité avec ces critères expose les entreprises au risque contentieux. La justice, dans les contentieux en cours contre Total et Casino, ainsi que dans d’autres potentiels dossiers de vigilance climatique que Notre Affaire à Tous étudie actuellement, aura un rôle déterminant à jouer sur de nombreux dossiers. Au-delà de la France, les institutions européennes et membres du Parlement Européen joueront également un rôle clé, dans le cadre des travaux en cours sur le projet de directive sur le devoir de vigilance uniformisée au sein de l’Union. Ce texte est depuis le début vivement attaqué par les lobbys des grands secteurs polluants, qui multiplient en parallèle les campagnes de greenwashing auprès de leurs salariés et clients.

    Plus de détails sur les enseignements généraux

    Consulter le rapport 2022

    Pour les enseignements par secteur, voir Annexe 2

    ANNEXES

    Contact presse

    Justine Ripoll, Responsable de campagne : justine.ripoll@notreaffaireatous.org – 06 42 21 37 36.

    Abdoulaye Diarra, Chargé de communication : communication@notreaffaireatous.org – 07 82 21 38 90.

    Annexe

    Annexe 1 – Méthodologie 

    Les critères de notation de ce benchmark contribuent à un modèle d’évaluation de la conformité des plans de vigilance en matière climatique. Pour ce faire, pour la troisième année consécutive, le périmètre de cette expertise a porté sur l’étude de l’ensemble des informations réglementées (des “documents de références” – DDR, document rassemblant le rapport de gestion, la déclaration de performance extra-financière, le plan de vigilance, les comptes consolidés, etc.) des entreprises en matière climatique, ce qui a permis notamment de rendre la comparaison possible avec des entreprises qui n’incluent pas forcément le climat au sein de leur plan. Toutefois, l’absence du climat au sein des plans continue à être notée négativement.

    Les critères permettent d’évaluer la cohérence générale des informations ainsi que des engagements climatiques adoptés.  

    Retrouvez l’ensemble de la méthodologie en introduction du Benchmark 2022.

    Le Benchmark 2022 porte sur les informations réglementées publiées en 2020 par les entreprises analysées. Notre Affaire à Tous publiera fin 2022-début 2023, son Benchmark 2023 actualisé des informations réglementées publiées par les entreprises en 2021. 

    Annexe 2 – Enseignements par secteur

    Construction : Une identification des risques liés au changement climatique et du besoin d’agir limitée. Les bases même de leurs politiques générales ne sont pas cohérentes avec une trajectoire sérieuse vers le respect des accords de Paris (selon les cas, le scénario de référence ou les scopes inclus). Des mesures dispersées, à impact limité et/ou qui manquent d’une cohérence globale (souvent les 3).

    Agro-alimentaire : Bilans d’émissions souvent largement incomplets (notamment indirectes alors que ce dernier représente la majorité des émissions du secteur). Des entreprises qui à l’heure actuelle ne reconnaissent toujours pas la responsabilité de leur groupe et activités dans le changement climatique. Les politiques générales des distributeurs analysés affichent des ambitions mais ne fournissent pas de trajectoire et stratégie détaillées et concrètes permettant de les atteindre. Certaines mesures soulevant d’autres problèmes environnementaux ou certaines exemptions sont préoccupantes.

    Financier : Un secteur où les postes d’efforts et graves manquement à la vigilance climatique sont très disparates. Une majorité qui manque de transparence et de cohérence en termes de scénarios et de trajectoires et ainsi de stratégie claire avec des objectifs chiffrés aux horizons 2030 et 2050. Des mesures qui ne permettent pas de mettre un terme au soutien massif de ces acteurs financiers aux secteurs les plus émetteurs – en première ligne celui des énergies fossiles.

    Énergie : Un secteur qui publie maintenant son mix énergétique et son empreinte carbone. Une reconnaissance des risques liés au CC et de leur responsabilité très disparate – et très préoccupante pour certains acteurs du premier secteur d’émission de GES. Des politiques générales décevantes qui manquent d’une trajectoire concrète avec des réductions d’émissions clairement identifiées et chiffrées. Des mesures extrêmement limitées ou parcellaires, dont certaines se fondent sur des technologies qui ne sont pas encore disponibles. 

    Transport : Un secteur de l’aviation qui ne publie que partiellement ses émissions indirectes, et dont les politiques générales insuffisantes évitent de prendre de réels engagements pour l’ensemble leurs scopes et ce sans miser sur des technologies non-disponibles et incertaines. Un secteur automobile qui ne reconnaît que faiblement la nécessité d’agir précisément sur les risques climatiques et propose des politiques générales qui n’intègrent toujours pas l’ensemble des activités des groupes. Un secteur au global qui place une confiance dans des technologies et méthodes contre-productives d’un point de vue environnemental et/ou non-disponibles préoccupante.

    Industriel : Un secteur qui identifie (en général) mieux que la moyenne l’ensemble de ces foyers d’émissions de GES, mais ne perçoit pas l’ampleur des conséquences de ses activités pour le Vivant et ne reconnaît pas de manière claire la participation de son entreprise au changement climatique. Ce qui se traduit pour la plupart dans des politiques générales et mesures concrètes floues, limitées et/ou peu ambitieuses, qui ne permettent pas de convaincre. Le climat est peu ou pas inclus dans les plans de vigilance.

  • Rapport « Vigilance climatique des multinationales » 2022

    Analyse des plans de vigilance climatique 2020 de 27 multinationales françaises

    Mercredi 13 juillet, Notre Affaire à Tous publie le Benchmark 2022 de la vigilance climatique des multinationales, qui passe au crible la conformité de 27 multinationales françaises à leurs obligations légales. L’objet de cette étude est d’évaluer la mise en œuvre de la loi sur le devoir de vigilance en matière climatique. Pour ce faire, des critères de notation ont été développés afin d’évaluer l’action des multinationales.

    Ces critères s’appuient sur :

    • Les bases légales instaurant une responsabilité climatique aux multinationales, notamment l’obligation de vigilance environnementale, la prévention du préjudice écologique ou la loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères.
    • Les objectifs internationaux de l’Accord de Paris.
    • Les données scientifiques du GIEC et de l’Agence Internationale de l’Energie.

    Ces critères constituent une tentative de contribution à un modèle d’évaluation de la conformité du devoir de vigilance en matière climatique.

    À travers le prisme de ces critères, les différentes informations réglementées publiées par les entreprises (des “documents de références” – DDR, document rassemblant le rapport de gestion, la déclaration de performance extra-financière, le plan de vigilance, les comptes consolidés, etc.) sont analysées dans le détail afin d’identifier les nombreuses et persistantes défaillances de 27 multinationales françaises en matière de vigilance climatique. 

    Le Benchmark 2022 porte sur les informations réglementées publiées en 2020 par les entreprises analysées. Notre Affaire à Tous publiera fin 2022-début 2023, son Benchmark 2023 actualisé des informations réglementées publiées par les entreprises en 2021. 

    Rapport Benchmark 2022 de la vigilance climatique des multinationales

    POURQUOI UN RAPPORT SUR LA VIGILANCE CLIMATIQUE DES MULTINATIONALES ?

    Si les pouvoirs publics doivent jouer un rôle fondamental dans la lutte contre le réchauffement climatique, les entreprises partagent aussi cette responsabilité. Très fortement contributrices au réchauffement, les multinationales françaises doivent répondre de leurs actes et accélérer leur transition écologique. Ainsi, Notre Affaire à Tous cherche à remédier au vide juridique concernant la non-application de l’Accord de Paris aux entreprises en s’appuyant notamment sur la loi relative au devoir de vigilance.

    L’objectif final de ce benchmark est de renforcer l’application de la loi sur le devoir de vigilance et de montrer son utilité en matière de lutte contre le dérèglement climatique. 

    SYNTHESE DES RESULTATS

    Aucune entreprise analysée n’est en mesure de démontrer sa conformité avec l’ensemble des obligations et des mesures de vigilance raisonnables nécessaires pour faire de la transition écologique une réalité.

    Jérémie Suissa, Délégué général de Notre Affaire à Tous : “Comme l’a rappelé le Haut Conseil pour le Climat dans son dernier rapport, les impacts de la crise du Vivant sont d’ores et déjà visibles en France et les conséquences quotidiennes et imprévisibles. Et nous ne sommes pas prêts. Si l’Etat doit être le pilote de la transition nécessaire à laquelle la France s’est engagée, les entreprises doivent aussi prendre leur part. Or, une majorité des entreprises que nous avons analysées ne montrent pas de signes de changements structurels. Il est urgent de mettre en œuvre des outils de contrainte proportionnés à l’ampleur des manquements de ces acteurs clés pour la transition.” 

    Alors que l’empreinte carbone cumulée des 27 multinationales évaluées s’élève à 1 651,60  millions de tonnes équivalent CO², soit près de 4 fois le total des émissions territoriales de la France en 2020 (396 Mt CO²), on observe majoritairement :

    • de nombreuses défaillances persistantes en termes d’identification des émissions indirectes, en particulier celles dites du “scope 3” (critère 1-A de la méthodologie) ;
    • une absence générale de reconnaissance de responsabilité, alors qu’il est indiscutable que chacun.e doit faire sa part en matière climatique (critère 1-B) ;
    • de nombreux engagements demeurent non-alignés avec l’objectif 1,5°C de l’Accord de paris et/ou ne portent pas sur l’ensemble des émissions des entreprises (critère 2-A) ; 
    • des carences sérieuses dans la mise en œuvre  de ces engagements (critère 2-B). 
    • certains plans de vigilance n’intègrent toujours pas suffisamment le climat (critère 3).

    L’absence de conformité avec ces critères expose les entreprises au risque contentieux. La justice, dans les contentieux en cours contre Total et Casino, ainsi que dans d’autres potentiels dossiers de vigilance climatique que Notre Affaire à Tous étudie actuellement, aura un rôle déterminant à jouer sur de nombreux dossiers. 

    Au-delà de la France, les institutions européennes et membres du Parlement Européen joueront également un rôle clé, dans le cadre des travaux en cours sur le projet de directive sur le devoir de vigilance uniformisée au sein de l’Union. Ce texte est depuis le début vivement attaqué par les lobbys des grands secteurs polluants, qui multiplient en parallèle les campagnes de greenwashing auprès de leurs salariés et clients. 

    Découvrez nos actions contentieuses contre des multinationales.

    ZOOM SUR LES MULTINATIONALES LES PLUS PREOCCUPANTES

    Société Générale, Auchan, Casino, Eiffage, Bolloré, Total Energies, Bouygues et BNP Paribas se situent tout en bas de notre classement, en raison de politiques climatiques particulièrement insuffisantes.

    Les scores de ces 8 multinationales sont très préoccupants. Une entreprise qui publierait  correctement les scopes 1, 2 et 3 d’émissions et prévoirait une stratégie climat dans le plan de vigilance (des mesures de pur reporting, hors analyse des risques, politiques et mesures d’action),  obtiendrait déjà 25 points. Aucune de ces 8 entreprises ne dépasse 33 points.

    LES ENSEIGNEMENTS CLÉS DU RAPPORT

    1- MANQUE D’INTÉGRATION DU CLIMAT AU PLAN DE VIGILANCE

    3 entreprises sur 27 n’intègrent toujours pas le climat à leur plan de vigilance. Pourtant, l’analyse du risque climat au sein du plan de vigilance devrait être faite de manière systématique, en particulier pour les entreprises fortement contributrices au réchauffement climatique. En effet, la science climatique est extrêmement claire : les différents rapports du GIEC démontrent que l’aggravation du changement climatique comporte des risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement, en particulier au-delà de 1,5°C. Le risque climatique doit donc être intégré dans le plan de vigilance de chaque entreprise. Si 24 entreprises intègrent désormais le climat dans leur plan de vigilance, plus de la moitié (14) d’entre elles ne le font que très partiellement.

    2- EMPREINTE CARBONE ET COMMUNICATION INCOMPLÈTE

    Les entreprises analysées dans le benchmark ont toutes un lourd impact climatique : selon leurs propres communications, l’empreinte carbone cumulée des vingt-sept multinationales analysées s’élève à 1652 Mt CO²e, soit plus de quatre fois les émissions territoriales de la France. Une baisse de l’empreinte carbone cumulée peut être observée pour 2020, mais elle ne pourrait être que conjoncturelle (Covid-19). Par ailleurs, l’impact climatique des entreprises reste encore très insuffisamment retracé. Dix-huit des entreprises sur 27 ne publient pas ou de manière très incomplète leur empreinte carbone.

    3- UNE RECONNAISSANCE LIMITÉE DU RISQUE CLIMATIQUE

    La loi sur le devoir de vigilance exigeant une identification des risques pesant sur les droits humains et sur l’environnement, chaque entreprise doit explicitement reconnaître les conséquences de ses émissions de GES et de sa contribution au changement climatique.

    Pourtant, seules 4 entreprises analysées reconnaissent explicitement leur contribution au changement climatique et analysent correctement les conséquences de ce dérèglement sur les droits humains et l’environnement. Une réelle prise de conscience demeure donc nécessaire afin de saisir l’ampleur de leur responsabilité et de mettre en œuvre les mesures adéquates pour lutter contre le changement climatique.

    4- DES ENGAGEMENTS PEU PRÉCIS ET RAREMENT AMBITIEUX

    Pour prévenir les risques graves d’atteinte aux droits humains et à l’environnement, les entreprises doivent adopter une stratégie efficace et cohérente avec l’Accord de Paris. Pour ce faire, les engagements pris doivent être chiffrés et détaillés en plusieurs étapes avec des objectifs intermédiaires précisés à l’horizon 2030, 2050 et au-delà.

    La trajectoire 1,5°C (visant la neutralité carbone en 2050) est la seule trajectoire permettant de réaliser les objectifs de l’Accord de Paris avec une probabilité raisonnable (voir infra – méthodologie). Seule 1 entreprise sur 27 s’engage sur la trajectoire 1,5°C pour l’ensemble de ses émissions et avec une trajectoire chiffrée dans le temps.

    5- L’ABSENCE MISE EN OEUVRE DE MESURES COHÉRENTES

    La loi sur le devoir de vigilance oblige les entreprises à rendre compte publiquement de la mise en œuvre effective des mesures adaptées de prévention contre les risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement. Autrement dit, les entreprises doivent communiquer les mesures adoptées pour limiter le réchauffement planétaire en-deçà des 2°C, limite au-delà de laquelle le dérèglement climatique est extrêmement dangereux pour nos écosystèmes.

    Les mesures présentées concernent rarement l’ensemble des activités émettrices des groupes et nombre d’entre elles sont basées sur des technologies indisponibles à l’heure actuelle, telles que les technologies de capture et de séquestration du carbone. Par ailleurs, le maintien de certaines activités (par ex. hydrocarbures non conventionnels) ou l’absence de plan de transition pour certains produits (par ex. voitures thermiques) remettent fréquemment en question la cohérence de la stratégie communiquée par l’entreprise. Enfin, aucune entreprise ne publie des informations suffisamment précises pour qu’un observateur extérieur puisse évaluer la mise en œuvre des mesures annoncées.

    En somme, toutes les entreprises font face à un risque de non-conformité avec la loi sur le devoir de vigilance. Si elles ne se conforment pas à ces demandes, les multinationales pourront être attaquées en justice.

    Découvrez les enseignements secteur par secteur.

    NOS RESSOURCES

    Communiqué de presse

    Consulter le rapport 2022

    Consulter les précédents rapports

    CONTACT PRESSE

    Justine Ripoll, Responsable de campagne : justine.ripoll@notreaffaireatous.org – 06 42 21 37 36.

    Abdoulaye Diarra, Chargé de communication : communication@notreaffaireatous.org – 07 82 21 38 90.

  • IMPACTS n°19 – Précarité énergétique 

    “Les inégalités de logement et de précarité énergétique aggravent les inégalités sociales. Résoudre ce problème, c’est résoudre des problèmes d’ordre climatique et d’ordre social.” Danyel Dubreuil

    Ce 19ème numéro d’IMPACTS est consacré à la précarité énergétique et à ses impacts sur la population dans un contexte d’augmentation sans précédent des prix de l’énergie que vient aggraver la guerre en Ukraine. Pour parler de ce sujet urgent qui croise des enjeux sociaux et climatiques, IMPACTS a rencontré Aline To Lulala, en grand témoin de la précarité énergétique, et Danyel Dubreuil, coordinateur du collectif Rénovons engagé en faveur de la rénovation énergétique.

    Aline Lo Tulala, grand témoin

    Copyright Héloïse Philippe

    “Aline, pouvez-vous vous présenter ?


    Aline Lo Tulala, militante contre les passoires thermiques au sein de l’Alliance citoyenne 93 et actuellement suppléante de Bastien Lachaud, député sur Aubervilliers et Pantin et membre de l’Union populaire. En même temps, je suis aide-soignante de fonction et je travaille dans le secteur social.

    Comment définiriez-vous une personne en situation de précarité énergétique ?


    C’est une personne qui vit dans un logement souvent très mal isolé. Comme c’est très mal isolé, cette personne a beau chauffer, il fait trop chaud l’été et trop froid l’hiver, et les factures d’électricité ne cessent d’augmenter et deviennent très chères.
     


    Entretien avec Danyel Dubreuil, coordinateur de l’initiative Rénovons

    L’initiative Rénovons, alliance de 40 organisations mobilisées sur la précarité énergétique et la rénovation du bâti français, a proposé un bouclier énergie à l’hiver 2021 pour une politique efficace de lutte contre la précarité énergétique et de rénovation énergétique des bâtiments. Cette alliance regroupe entre autres la Fondation Abbé Pierre, le Secours Catholique, SoliHa, le CLER – Réseau pour la transition énergétique, le Réseau action climat.

    En France, combien de personnes sont-elles touchées par la précarité énergétique ?


    Tu as plusieurs chiffres qui peuvent servir d’indicateurs. La plupart des gens qui ont peu de ressources sont en précarité énergétique car c’est un rapport de consommation d’énergie sur le revenu. La barre est fixée à 8% pour les consommations de chauffage et d’eau chaude…
     

    Que peut-on retenir du bouclier tarifaire mis en place par le gouvernement cet hiver ?


    Les mesures 2021 ont annulé la hausse des prix de l’énergie pour les ménages concernés. La facture des ménages a augmenté de 100 euros et le chèque supplémentaire était de 100 euros, ce qui fait que les ménages n’ont quasiment rien gagné, ils sont dans la même situation qu’avant. Ils sont protégés de la hausse des prix mais la hausse continue avec des effets de rattrapage à venir, décalés dans le temps. Sur l’assiette dont on dispose, tout le monde n’a pas besoin d’être protégé de la hausse des prix. La hausse des prix est surtout pertinente pour ceux qui ont un usage immodéré de l’énergie, que ce soit en termes de carburant ou d’énergie consommée dans le logement. Pour eux, l’énergie n’est pas assez chère, c’est à dire que le poids de l’énergie dans leur budget est faible. Le taux d’effort énergétique de l’ensemble des français est de 4% environ. 8% pour les ménages en précarité énergétique, c’est déjà le double. Et ça ne concerne que les dépenses d’énergie liées au logement. 
     


    Les catastrophes naturelles, les personnes déplacées et les inégalités climatiques : le cas de la tempête Alex dans la vallée de la Roya

    Entre 1988 et 2017 les intempéries sont à l’origine de 1121 décès par an et représentent un coût de 2,2 milliards de dollars de pertes estimées sur le territoire français. Selon le GIEC, la France métropolitaine a connu un réchauffement d’environ +1,4°C depuis 1900, une valeur plus élevée que la moyenne mondiale estimée à +0,9°C entre 1901 et 2012. La France figure parmi les pays d’Europe les plus vulnérables au dérèglement climatique.

    Le 2 octobre 2020, le département des Alpes-Maritimes a été placé en vigilance rouge « pluie-inondation ». Les cumuls de pluie sur place ont atteint en quelques heures 450 à 500 mm dans l’arrière-pays et plus de 560 millions de tonnes d’eau sur le département, soit l’équivalent de 190 000 piscines olympiques. A l’issue de cet épisode, 55 communes des Alpes-Maritimes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle. La Fédération française de l’assurance a recensé 14 000 déclarations de sinistres enregistrées pour un coût des dommages assurés atteignant 210 millions d’euros. Le coût final de la tempête Alex se répartit entre les dégâts causés aux habitations (72 %), aux biens professionnels et agricoles (25 %) et aux automobiles (3 %). Dans la vallée de la Roya, on recense 4 ponts détruits et 40km de voiries endommagées. Ces dommages s’accompagnent de traumatismes psychologiques pour les personnes sinistrées. Au lendemain de cette catastrophe naturelle exceptionnelle, de nombreuses questions se posent : comment reconstruire la vallée ? Où reconstruire les maisons détruites ? A l’avenir, comment prévenir de tels phénomènes climatiques, de potentielles crues similaires ? 

    Les dégâts de la tempête Alex dans la vallée de la Roya interrogent l’efficacité et l’adéquation de l’actuel régime d’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles « CatNat » (I). Par ailleurs, les catastrophes naturelles, sources d’une augmentation des facteurs de paupérisation et de vulnérabilités nécessitent de questionner le rôle des acteurs publics dans l’adaptation et dans la prévention des catastrophes naturelles (II). 


    Synthèse sur la précarité énergétique

    Alors que les ménages français les plus énergivores consomment 6 à 9 fois plus que les plus économes, une partie croissante de la population française, à cause de la hausse des prix de l’énergie, souffre de précarité énergétique, c’est-à-dire éprouve une difficulté à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins premiers. En 2020, 14% des ménages disaient avoir souffert du froid, en 2021, ils étaient 20%.  Sur les 13 millions de personnes touchées, 40% estiment que c’est à cause d’une mauvaise isolation de leur logement, et 36% à cause de raisons financières. C’est pour dénoncer cette situation que les associations ont lancé le 10 novembre 2021 la journée de précarité énergétique.


    Concrètement, la précarité énergétique a des impacts forts sur les populations touchées, leur santé, les logements, le climat  et elle représente un coût pour la collectivité. La précarité énergétique aggrave fortement les inégalités sociales, et les passoires énergétiques, ces habitations très mal isolées et très énergivores classées F ou G sur les diagnostics de performance énergétique, sont particulièrement émettrices de CO2.

    Plusieurs enjeux urgents se trouvent donc au cœur de ce problème :


    – Celui de la rénovation massive des passoires énergétiques : pour protéger les ménages, améliorer l’efficacité énergétique des logements, et réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES).
    – Celui de la réduction des inégalités sociales puisque ce sont aujourd’hui les ménages les plus modestes qui, proportionnellement à leurs revenus, consacrent la plus grosse part de leur budget à l’énergie.

    Malgré des mesures d’urgence prises en 2022 pour faire face à la flambée des prix de l’énergie, peu d’avancées ont été faites sur le terrain des politiques publiques pour protéger les ménages et rénover le bâti français.

    Sous l’angle des inégalités climatiques et environnementales, plusieurs questions se posent donc : Quel impact la précarité énergétique a-t-elle sur les populations ? Quelles populations sont les plus touchées ? Est-ce que le dérèglement climatique peut renforcer les vulnérabilités existantes ? Quelles solutions peuvent atténuer ces impacts ?

    I. La précarité énergétique, une réalité qui touche toujours plus de ménages en France et en Europe

    II. Précarité énergétique : vers une augmentation dans les années à venir ?

    III. Quelles solutions pour réduire la précarité énergétique et anticiper les effets du dérèglement climatique ?

    Conclusion

    Une réduction des consommations d’énergie est nécessaire pour faire face à la hausse des prix de l’énergie, aux risques d’approvisionnement et à l’enjeu climatique. Malheureusement, aujourd’hui en France, ce sont les besoins de base des ménages les plus vulnérables qui sont les plus menacés.
    Est-il socialement acceptable que 20% de la population ait du mal chaque année à disposer de l’énergie nécessaire pour couvrir ses besoins premiers en France ? Ce laisser-faire a non seulement des conséquences sociales et sanitaires importantes (10 milliards par an selon France Stratégies), notamment sur les enfants qui grandissent dans des foyers en précarité énergétique, et il ne permet pas de réguler les comportements qui sont en excès de consommation d’énergie, ni de régler la question des logements les plus émetteurs de CO2.

    Pour allez plus loin

    France Stratégies

    ONPE

    Fondation Abbé Pierre

    Rénovons

    Insulate Britain

    Précarité énergie