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  • IMPACTS HORS SÉRIE – La relance du nucléaire en France se fait-elle dans le respect de la démocratie environnementale ?

    Sur demande du gouvernement en 2019, le Réseau de Transport d’électricité (RTE) a publié fin 2021 plusieurs scénarios de mix de production permettant d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, « Futurs énergétiques 2050 »[1]. Six scénarios de mix de production ont été proposés dont trois sans relance du nucléaire et trois avec.

    Lors d’un discours à Belfort le 10 février 2022[2], le président de la République Emmanuel Macron a annoncé la trajectoire souhaitée pour la France : l’accélération du développement des énergies renouvelables, mais aussi la construction de six nouveaux réacteurs de type EPR2[3] et l’étude de huits EPR2 additionnels. Les annonces du président rappellent deux scénarios de référence présentés dans « Futurs énergétiques 2050 » : l’un dit « N2 » impliquant la construction de nouveaux réacteurs, l’autre dit N03 prévoyant en plus le prolongement de l’utilisation des centrales nucléaires existantes. Ont donc été mises en avant les hypothèses maximalistes de réindustrialisation.

    Cette relance du nucléaire annoncée par le président a commencé à se matérialiser par un projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes présenté (« Projet de loi d’accélération du nucléaire ») en conseil des ministres le 2 novembre 2022, votée par le Sénat le 24 janvier 2023 et par l’Assemblée nationale le 21 mars 2023.

    En parallèle, la loi d’accélération des énergies renouvelables a été promulguée le 10 mars 2023.

    Il est à noter qu’une loi de programmation énergie et climat doit être votée cette année. Elle doit fixer les priorités d’action de la politique climatique et énergétique nationale en tenant compte de l’objectif européen de réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre de -55% d’ici 2030[4].

    Dans un tel contexte, quel(s) rôle(s) ont les citoyen-ne-s et quels sont leurs droits ?

    La charte de l’environnement donne valeur constitutionnelle au principe de la participation du public et au droit à l’information depuis 2005[5]. Cela s’est traduit par la mise en place de deux procédures dans le code de l’environnement :

    • En amont des plans ou projets : création des procédures de débat public ou de concertation préalable[7] afin d’associer le public à l’élaboration des projets, à un stade où toutes les options sont encore ouvertes, permettant ainsi de questionner l’opportunité du projet.
      • Les procédures de débat public et de concertation préalables sont encadrées par la Commission nationale du débat public[8] (CNDP) qui à l’obligation d’être saisie pour certains projets, ou la faculté de l’être pour d’autres projets.
    • en aval, au stade de l’approbation du plan ou de l’autorisation du projet ont été mises en place des procédures d’enquête publique[9], de participation du public par voie électronique[10] ainsi qu’un dispositif de participation du public hors procédures particulières[11]. Cette consultation porte sur un dossier finalisé, juste avant la délivrance d’une autorisation ou approbation. La procédure appliquée dépend de la nature et de la taille du projet.

    C’est dans ce cadre que le gouvernement a lancé le 20 octobre 2022 une concertation nationale sur le « Système énergétique de demain ». En parallèle, EDF et RTE ont saisi la CNDP afin d’organiser un débat sur les nouveaux réacteurs nucléaires et notamment le projet Penly, visant à agrandir ce site nucléaire en Normandie. Ce débat a eu lieu entre le 27 octobre 2022 et le 27 février 2023.

    Au cœur de ce grand chantier controversé, autant les conditions dans lesquelles la loi est élaborée (I) que les dispositions qu’elle prévoit (II), interrogent quant à la place donnée aux droits garantis par la Constitution, que sont le droit à l’information et le principe de participation du public.

    I. L’élaboration de la loi au regard de la démocratie environnementale

    Outre le contenu du projet de loi d’accélération du nucléaire qui va directement impacter l’information et la participation du public, les modalités d’élaboration de la loi sont critiquables à plusieurs égards :

    • Le rapport législatif de la commission des affaires économiques[12] constate que le gouvernement a légiféré dans le désordre. Afin de prendre en compte les retours des débats publics sur le Système énergétique de demain et le nucléaire, il aurait fallu soumettre en premier au Parlement le projet de loi de programmation énergie et climat, puis le projet de loi d’accélération du nucléaire et le projet de loi d’accélération des énergies renouvelables.
    • Le rapport reconnaît que le gouvernement a légiféré dans la précipitation. Le Sénat a été informé mi-décembre de l’examen du projet de loi nucléaire pour début janvier et de la tenue de la commission mixte paritaire sur le projet de loi des énergies renouvelables pour fin janvier.
    • Le même rapport indique que le gouvernement a omis les consultations en cours : le projet de loi a été discuté au Parlement quand bien même les débats organisés par la CNDP sur ces sujets n’étaient pas clos. La CNDP déplore elle-même cette précipitation, le rapport la cite : « l’existence même de ce projet de loi nucléaire et la publicité qui lui est donnée, alors que son utilité directe paraît faible, laisse à penser que de toute façon les consultations ne servent à rien, ce qui n’est pas un très bon signal donné pour les consultations à venir. »
    • Enfin, le projet de loi omet des questions cruciales telles que l’actualisation de la  planification énergétique et celle relative aux moyens financiers et humains nécessaires. Les retards cumulés sur l’EPR de Flamanville tiendraient plus aux difficultés d’ingénierie et de conception qu’aux procédures d’autorisations administratives. Le rapport précité cite la CNDP sur le projet : « Il [le projet de loi] paraît surtout très peu utile : le retour d’expérience de Flamanville ne fait apparaître à aucun moment les procédures comme élément déterminant du délai de réalisation du projet. La réalisation des études d’ingénierie est beaucoup plus déterminante, et les procédures sont menées en parallèle à la conduite de ces études, de fait en temps masqué. » Cette remarque a été soulevée avant même que soient  dernièrement détectées de nouvelles fissures[13] sur des conduites du système d’injection de sécurité.

    II. Les simplifications administratives prévues dans la loi et les conséquences sur la participation et l’information du public.

    L’un des éléments clés du projet de loi est la suppression de l’objectif de réduire à 50 % la part de l’énergie nucléaire dans le mix électrique à horizon 2035, ainsi que le plafond de 63,2 gigawatts de capacité totale de production nucléaire autorisée. La ministre de la transition énergétique a expliqué qu’elle ne veut «ni plafond ni plancher» sur le sujet.

    Le projet de loi prévoit une simplification des démarches administratives pour la délivrance des autorisations. Les dispositions votées concernant donc principalement les collectivités et les riverains des projets : les procédures d’urbanisme, d’autorisation environnementale et par conséquent la participation du public sont directement impactées. C’est pourquoi l’absence de prise en compte du débat public -qui s’est terminée le 27 février alors que la loi était déjà débattue dès début janvier- est inquiétante au regard de la démocratie environnementale. Le projet de loi prévoit notamment les dispositions suivantes.

    Simplification des documents d’urbanisme aux mains de l’État.

    Le projet simplifie la mise en compatibilité des documents d’urbanisme. La qualification de projet d’intérêt général devra être prononcée par décret en Conseil d’État, à la place d’un arrêté préfectoral ou d’un décret dans le droit existant. L’État pourra engager directement, et sans délai, la modification du document d’urbanisme local. Un examen conjoint étant prévu entre l’État et les collectivités, le rapporteur a souhaité renforcer la participation des collectivités en proposant un amendement leur donnant la possibilité de faire parvenir des observations à l’État. Cette étape aurait permis de mieux identifier dès l’amont les éventuels problèmes et suggestions relevés par les acteurs de terrain, mais l’amendement a été supprimé.

    Dispense d’autorisation au titre du code de l’urbanisme

    Afin de faire émerger de nouveaux réacteurs nucléaires, plusieurs autorisations doivent être délivrées par l’administration : 

    • l’autorisation de création d’une installation nucléaire de base;
    • l’autorisation environnementale qui assure la prévention des dangers et des risques pour l’environnement (eaux, milieux et habitats, sols, arbres), délivrée par décret du ministre chargé de l’environnement;
    • l’autorisation d’urbanisme comprenant le permis de construire, le permis d’aménager ou la déclaration préalable selon les éléments à construire du projet;
    • la déclaration d’utilité publique afin de justifier l’utilité publique d’un projet pour pouvoir conduire des expropriations et pour que des procédures dérogatoires puissent être mises en œuvre (notamment la mise en compatibilité des documents d’urbanisme locaux).

    Le projet de loi vise à dispenser le projet de l’autorisation d’urbanisme. Il prévoit d’unifier les procédures existantes à cet effet au sein de la procédure d’autorisation environnementale. La conformité de ces projets aux règles d’urbanisme sera vérifiée à l’occasion de la demande d’autorisation environnementale ou de la demande d’autorisation de création du réacteur. Cette dispense correspond à une dispense de permis de construire et de permis de démolir. 

    Par conséquent, cette mesure entraînerait une réduction des interlocuteurs et personnes habilitées à accéder aux éléments précis des dossiers[14] et donc limiterait les risques de fuites d’informations sensibles. Cette mesure permettrait une évolution du projet au fil de l’eau sans avoir à solliciter à chaque étape un permis modificatif. Cela permettrait également de réduire l’aléa contentieux puisque les recours devant le Conseil d’État seraient possibles uniquement sur l’autorisation environnementale et l’autorisation de création. Enfin, l’objectif principal (et objet de la loi) est un gain de temps. Celui-ci est relativiser : comme l’a noté le Conseil d’État[15], même en l’absence de permis de construire, les autres autorisations devront être recueillies: ce gain de temps ne pourrait être atteint qu’après un renforcement de l’action des administrations centrales et des services déconcentrés intervenant dans le cadre de l’autorisation environnementale[16]. 

    Dérogations : loi littoral et concession d’utilisation du domaine public maritime

    Les projets nucléaires pourront s’affranchir des restrictions de construction liées à la loi littoral. De plus, par dérogation aux dispositions de l’article L. 2124-2 du code général de la propriété des personnes publiques, les concessions d’utilisation du domaine public maritime demandées pour la construction et l’exploitation de nouveaux réacteurs implantés en façade maritime pourront être octroyées à l’issue d’une enquête publique mais sans obtention préalable d’une déclaration d’utilité publique. Il sera possible de porter atteinte à l’état naturel du rivage de la mer, notamment par endiguement, assèchement, enrochement ou remblaiement, pour la construction de nouveaux réacteurs nucléaires à proximité ou à l’intérieur du périmètre des installations existantes.

    Le projet de loi permet d’appliquer la procédure d’expropriation avec prise de possession immédiate prévue par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

    En outre, et sans avoir attendu la fin du débat public, un « Conseil de politique nucléaire » réuni par Emmanuel Macron avait, le 3 février dernier, acté la fusion de l’Institut de radioprotection et sûreté nucléaire (IRSN), chargé de surveillance de la radioactivité dans l’environnement et appui technique des pouvoirs publics en matière de risque nucléaire et radiologique, avec de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le gendarme des centrales. Cette décision a aussitôt suscité l’opposition des personnels, de parlementaires et de spécialistes qui y voient une perte d’indépendance, de compétence et de capacité d’expression des experts[17]. Le 15 mars, l’Assemblée nationale a alors rejeté en première lecture cette réforme en votant pour préserver « l’organisation duale » actuelle. Le sujet reste néanmoins d’actualité et il ne peut encore être écarté une future fusion de ces deux autorités.

    Le Sénat a voté en faveur du projet de loi d’accélération du nucléaire le 24 janvier, tandis que l’Assemblée nationale a voté en faveur le 21 mars. Le texte doit encore être amendé en commission mixte paritaire le 4 mai prochain, puis soumis à un second vote parlementaire. 

    Notes

    [1] Voir ici : https://rte-futursenergetiques2050.com/ 

    [2] Voir ici : https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2022/02/10/reprendre-en-main-notre-destin-energetique 

    [3] European Pressurized Reactor = Réacteur pressurisé européen, devenu Evolutionary Power Reactor. Il s’agit d’un réacteur de “génération III+” d’une puissance électrique d’environ 1670 MW.

    [4] Introduite par la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, il s’agit d’une loi de programmation quinquennale devant être actualisée tous les 5 ans. Ses grands axes seront déclinés à travers la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). La LPEC, la SNBC et laPPE émanent de la stratégie française pour l’énergie et le climat (SFEC)

    [5] Article 7 de la Charte de l’environnement : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. »

    [6]Articles L.121-8 et suivants du code de l’environnement

    [7] Articles L.121-15-1 et suivants du code de l’environnement

    [8] Créée en 1995 par la loi Barnier relative au renforcement de la protection de l’environnement. Il s’agit d’une autorité administrative indépendante.

    [9] Articles L.123-2 et suivants du code de l’environnement

    [10] Article L.123-19 du code de l’environnement

    [11] Articles L.123-19-1 et suivants du code de l’environnement

    [12]  Rapport n° 236 (2022-2023) de M. Daniel GREMILLET, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 11 janvier 2023, https://www.senat.fr/rap/l22-236/l22-236.html

    [13] Des contrôles « ont permis de détecter la présence de fissures de fatigue thermique », sur des conduites d’urgence « considérées comme sensibles à la corrosion sous contrainte » dans le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime) et le réacteur 3 de la centrale de Cattenom (Moselle), selon une note de l’ASN. En outre, l’ASN a jugé que “ Cet événement n’a pas eu de conséquence sur le personnel ni sur l’environnement. Néanmoins, il affecte la fonction de sûreté liée au refroidissement du réacteur. En raison de ses conséquences potentielles et de l’augmentation de probabilité d’une rupture, l’ASN le classe au niveau 2 de l’échelle INES en ce qui concerne le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Penly et au niveau 1 pour les autres réacteurs concernés.”

    [14] L’article L.421-5 du code de l’urbanisme prévoit déjà une dispense de formalités pour certains projets “du fait qu’ils nécessitent le secret pour des raisons de sûreté ou que la préservation de leur confidentialité est nécessaire pour la sauvegarde des intérêts de la défense nationale.”

    [15] Avis du Conseil d’Etat sur un projet de loi visant à accélérer la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants, 2 novembre 2022

    [16]  La Cour des comptes a souligné dans un rapport que les services déconcentrés de l’urbanisme ont porté la majorité des suppressions de poste au cours des dernières décennies (voir « Les effectifs de l’administration territoriale de l’État », Cour des comptes, 31 mai 2022)

    [17]  Voir https://www.irsn.fr/actualites/motion-cor-lirsn-contre-demantelement-programme-linstitut ; https://www.irsn.fr/savoir-comprendre/environnement/quel-est-role-lirsn

  • CP / Face aux blocages de la commission européenne sur la révision du règlement sur les produits toxiques, 37 organisations interpellent Elisabeth Borne

    Depuis plusieurs mois de nombreux.ses acteur.ices se mobilisent pour demander une révision du règlement européen (REACH) qui encadre les substances chimiques les plus dangereuses. Prévue par la Commission elle-même dans une feuille de route publiée il y a déjà un an, cette révision est sans cesse repoussée sous la pression des lobbies. Cette révision permettrait notamment de prendre en compte les dernières études et actualités concernant les PFAS, ces « polluants éternels », particulièrement présents dans la vallée du Rhône. L’exposition à ces substances est associée à de nombreuses pathologies telles que des cancers, des troubles du système immunitaire ou du métabolisme comme l’obésité. 

    Avec une coalition d’acteurs, Notre Affaire à Tous interpelle la Première Ministre sur l’importance d’une mobilisation de la France pour permettre de lever rapidement ce blocage très inquiétant et s’alarme de la position du commissaire au marché intérieur Thierry Breton sur ce sujet. 

    Le 18 avril 2023, 

    Objet : 38 organisations vous interpellent pour une publication de la révision de REACH sans plus de retard

    Madame la Première ministre,


    Nos organisations s’inquiètent fortement du retard de la révision du règlement européen sur les produits chimiques, REACH, et de la position du commissaire au marché intérieur Thierry Breton sur ce sujet.


    Le gouvernement français a exprimé son soutien en faveur d’une révision rapide du règlement REACH par les voix de Madame la Secrétaire d’Etat Bérangère Couillard [1] et de Monsieur le Ministre délégué Gabriel Attal [2], ainsi que dans une lettre adressée à la Commission Européenne [3]. Des commissaires européens [4][5] et des eurodéputés de la gauche à la droite sont engagés en faveur d’une révision rapide [5].


    Cependant, au regard d’informations récentes [6], nous sommes inquiets de voir que le commissaire Breton semble déterminé à retarder, voire à supprimer la révision.


    Si elle était confirmée, la position du commissaire français serait alors en rupture avec la position de votre gouvernement, ce qui nous interroge. Un tel blocage serait totalement incohérent avec d’une part l’ambition française pour l’Europe de développer une économie innovante et verte, soutenant les industries pionnières et progressives, d’autre part avec le plan industrie verte récemment initié par le Ministère de l’Economie.


    Il y a pourtant urgence sanitaire et environnementale : 90% des citoyens français s’inquiètent de l’impact des produits chimiques sur leur santé et l’environnement [7], à raison. La pollution du territoire français aux « polluants chimiques éternels » (PFAS) a atteint un niveau sans précédent [8]. Chaque nouveau rapport démontre la présence de substances nocives dans nos produits de consommation quotidiens [9] telles que des perturbateurs endocriniens [10], des nanoparticules [11] et autres substances toxiques pour la reproduction [12]. Vous le savez, l’exposition à ces substances est associée à de nombreuses pathologies telles que des cancers, des troubles du système immunitaire ou du métabolisme comme l’obésité [13]. Le tout engendre des coûts de santé publique considérables [14]. Ces substances contaminent nos sols, notre eau, notre air et notre nourriture [15]. Cette pollution s’est développée alors que REACH était en place.


    Les entreprises appellent de leurs vœux cette réforme, notamment les représentants de l’industrie chimique européenne (Cefic), afin d’assurer davantage de prédictibilité [16] et de garantir des investissements sûrs à long terme. Des marques européennes phares (IKEA, Décathlon, Adidas, etc.) [17], des mutuelles françaises [14] et 200 médecins et chercheurs en toxicologie français [18] appellent à présenter la révision sans délai. Des investisseurs [19] demandent aux entreprises chimiques d’éviter des investissements risqués, par exemple dans les polluants chimiques éternels. Cela démontre que le secteur privé aspire à une production chimique sûre et durable pour rester compétitif sur le long terme. Les entreprises ont besoin d’un cadre juridique clair : elles doivent savoir aujourd’hui dans quelle direction s’engager pour la décennie.


    Si la révision de REACH n’est pas présentée avant l’été, cela entraînera un retard important en raison du calendrier institutionnel européen. Chaque semaine de délai alimente des niveaux toujours plus élevés de pollution toxique et alourdit les coûts de santé et ceux liés à la contamination de notre environnement. Si vous n’agissez pas en faveur d’une révision rapide, la France portera sa part de responsabilité.


    C’est pourquoi nous vous demandons, Madame la Première Ministre, de faire valoir une position française claire, forte et ambitieuse auprès de la Commission européenne, et notamment auprès du commissaire Thierry Breton, afin de finaliser au plus vite cette réforme.


    Dans l’attente de l’intervention de votre gouvernement sur ce dossier urgent, nous sommes à votre disposition pour échanger avec vous au plus tôt et vous prions d’agréer, madame la Première Ministre, l’expression de notre très haute considération.

    Références:

    [1] Conseil des Ministres de l’Environnement, 20 décembre 2022, intervention de la France


    [2] Lettre du Ministre délégué Gabriel Attal sur la révision de REACH, 27 mars 2023


    [3] Lettre de huit États-membres européens y compris la France, demandant une révision rapide du règlement REACH, 4 octobre 2022


    [4] Événement du groupe Renew au Parlement européen, 9 mars 2023, Séminaire sur l’innovation verte dans la chimie à travers REACH, intervention du Commissaire Sinkevičius et d’eurodéputés


    [5] Le Monde, 25 novembre 2022, interview avec le vice-président de la Commission Timmermans


    [6] Contexte, 21 octobre 2022, Qui a tiré sur Reach ? ; Mediapart, 5 avril 2023, Produits chimiques : Thierry Breton a tenté de torpiller le nouveau règlement européen ; Le Monde, 19 octobre 2022, « Les lobbys de l’industrie chimique ont gagné » : la Commission européenne enterre le plan d’interdiction des substances toxiques pour la santé et l’environnement


    [7] Eurostat, mars 2020, Eurobaromètre


    [8] Le Monde, 23 février 2023, « Polluants éternels » : explorez la carte d’Europe de la contamination par les PFAS


    [9] BEUC, 13 mars 2023, Worrying number of dangerous products reaching consumers highlights need for greater action by authorities


    [10] Endocrine Society, Common EDCs and Where They Are Found


    [11] AVICENN, décembre 2022, En quête de nanos dans les produits du quotidien


    [12] The Guardian, 28 mars 2021, Shanna Swan: ‘Most couples may have to use assisted reproduction by 2045’


    [13] Agence européenne pour l’environnement, mars 2023, Chemicals and health


    [14] Le Monde, 8 avril 2023, Pollution : « La réglementation européenne sur les substances chimiques doit être révisée d’urgence »


    [15] The Guardian, 18 janvier 2022, Chemical pollution has passed safe limit for humanity, say scientists ; Générations futures, 12 janvier 2023, État des lieux de la présence de composés perfluorés dans les eaux de surface en France ; CHEM Trust, décembre 2022, Les substances chimiques nocives dans les matériaux entrant en contact avec les aliments en France


    [16] CHEM Trust et EEB, 15 mars 2023, Waiting for REACH, p. 4, citation du Cefic


    [17] ChemSec, 15 décembre 2022, A company request for an ambitious revision of REACH


    [18] Le Monde, 6 décembre 2022, tribune, « Le report du plan européen d’interdiction des substances toxiques traduit la pression des lobbys industriels»


    [19] ChemSec, 29 novembre 2022, Investors with $8 trillion call for phase-out of dangerous “forever chemicals”

  • CP / Luttes locales : Le tribunal enterre définitivement l’extension du centre commercial Westfield Rosny 2 et donne raison aux associations.

    CP / Luttes locales : Le tribunal enterre définitivement l’extension du centre commercial Westfield Rosny 2 et donne raison aux associations.

    Communiqué de presse du 14 avril 2023

    Le tribunal administratif de Montreuil a annulé les 4 permis de construire de l’extension du centre commercial Westfield Rosny 2, reconnaissant leur caractère illégal et leur impact environnemental insuffisamment évalué. Cette décision est le fruit d’une mobilisation citoyenne exceptionnelle et de la détermination des associations Alternatiba Rosny et MNLE 93, épaulées par les juristes de l’association Notre Affaire à Tous, qui ont contesté ces permis, informé le grand public et protégé le cadre de vie des habitants.

    En Décembre 2021, après un recours porté par les associations, le tribunal administratif de Montreuil avait suspendu les 4 permis de construire de l’extension du centre commercial Westfield Rosny 2 confirmant les vices invoqués par les associations. Le juge avait donné douze mois au promoteur Unibail-Rodamco-Westfield et à la commune de Rosny-sous-Bois pour évaluer concrètement les impacts induits par l’extension du centre commercial sur la qualité de l’air et les îlots de chaleur et de prévoir des mesures adaptées pour contrebalancer ces impacts.

    Après un an et plusieurs annonces publiques promettant un projet différent et plus écologique, le promoteur et la commune décident de soumettre exactement le même projet d’extension sans aucune modification d’amélioration, à enquête publique en décembre 2022. La nouvelle étude d’impact est encore plus alarmante, et semble même ignorer les demandes du juge. 

    Malgré les demandes d’Alternatiba Rosny, la mairie a souhaité s’en tenir aux obligations légales, et n’a pas souhaité promouvoir l’enquête ni proposer de réunion publique de présentation du projet. Les associations ont pris les devants et sont allées à la rencontre des habitants en organisant une réunion pour informer les habitants, et en informant lors de nombreuses séances de tractage.

    Accompagnée par les associations, la mobilisation citoyenne active a permis une participation record à l’enquête publique avec plus de 585 avis dont 95% en opposition au projet. Les observations des citoyens ont mis en avant les incidences du projet sur le trafic routier et la qualité de l’air, l’artificialisation des sols, le manque de végétalisation créant des phénomènes d’îlots de chaleur urbain, mais aussi les effets négatifs sur les commerces locaux. Les conclusions de l’enquête sont sans appel, et l’avis défavorable.

    Suite à cette enquête publique, aucune pièce modificative n’est présentée devant le tribunal administratif. Fin Mars, les promoteurs et la mairie renoncent finalement à déposer des permis de construire de régularisation. Le 6 avril, les conclusions du tribunal mettent donc fin à ce projet nuisible pour l’environnement en reconnaissant que ces permis étaient illégaux, notamment en ce qui concerne l’évaluation de leur impact environnemental. 

    Les points soulevés par les associations et retenus par le tribunal sont les suivants: l’étude d’impact était insuffisante en ce qui concerne la présentation de la mesure des particules en suspension PM 10 et PM 2,5, la description des incidences du projet sur la qualité de l’air due notamment à l’augmentation du transport routier et le phénomène d’îlot de chaleur urbain, l’analyse insuffisante du cumul des effets du projet avec ceux d’autres opérations situées à proximité, et la description de mesures suffisantes prévues pour éviter, réduire ou compenser les incidences du projet en matière de pollution atmosphérique.

    Cette victoire est le fruit d’une mobilisation citoyenne exemplaire et déterminée qui a permis de faire entendre les voix de celles et ceux qui refusent de sacrifier l’environnement sur l’autel de la croissance économique. Les associations remercient chaleureusement tous les citoyens et les bénévoles pour leur soutien et leur engagement tout au long de cette bataille. Grâce à eux, les associations Alternatiba Rosny, MNLE 93, et Notre Affaire à Tous ont pu faire valoir l’intérêt général et protéger l’environnement.

    Nous espérons que cette décision fera date et encouragera les acteurs économiques et les autorités à repenser leurs choix d’investissement en fonction de leurs impacts socio-environnemental, et à prendre en compte l’avis des citoyens dans les projets d’aménagement futurs. Nous resterons vigilants et déterminés pour faire respecter la loi et protéger notre environnement.

    Pour Céline Le phat vinh, de Notre Affaire à Tous 

    “Il est temps aujourd’hui de regarder vers “l’après” et de se reconnecter aux vrais besoins du territoire au lieu d’insister avec un projet de centre commercial non désiré par le public, dans le département champion de France des centres commerciaux. De nombreuses alternatives sont possibles ! Revitaliser les petits commerces, assurer des services publics et améliorer la qualité de vie à Rosny tout en impulsant un avenir en cohérence avec les enjeux écologiques et sociaux, voilà des projets porteurs pour les habitant.e.s.”

    Pour Nicolas Perguet, d’Alternatiba Rosny

    “Cette victoire c’est celle des habitant.e.s qui se sont mobilisé.e.s pendant 3 ans pour répondre à la dernière enquête publique ! Ce sont des milliers d’heures de lecture,  d’analyse, de plaidoyer, d’interpellation, de rencontre et de discussion réalisées par des bénévoles. Nous espérons que les pouvoirs publics reconnaîtront enfin la légitimité des habitant.e.s à prendre part aux décisions d’aménagement du territoire, et garantir un cadre de vie enviable pour les générations présentes et futures.


    Nous sommes satisfait de la décision du tribunal mais nous déplorons l’absence d’obligation de présenter une étude d’impact socio-économique. L’argument du bénéfice économique est systématiquement avancé, y compris par le maire. Pourtant de nombreuses études ont montré l’impact désastreux de ces grands centres commerciaux pour l’emploi à moyen terme. Nous espérons que cette demande sera bien à l’étude si un nouveau projet co-construit entre le promoteur, la mairie et les habitants est proposé.”

    Lien vers des visuels

    https://drive.google.com/drive/folders/1EAPCZZgegU5YdJCzEHOp2jNvZ5Mf1iuJ?usp=sharing

    Contacts presse

    Olivier Patté, Alternatiba Rosny : 06 80 15 63 49

    Yves Chaumard, MNLE 93 : 06 18 88 56 62
    Céline Le Phat Vinh, Notre Affaire A Tous : 06 88 58 94 73

  • CP / Devoir de vigilance : les eurodéputé·es conservateur·ices à contre-courant des attentes des citoyen·nes

    Le 12 avril 2023 – A deux semaines d’un vote crucial au Parlement européen sur le projet de directive relatif au devoir de vigilance des multinationales, un nouveau sondage révèle que la grande majorité des Européen·nes souhaite que les entreprises opérant dans l’Union européenne soient légalement tenues de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Cette demande est soutenue par un appel de plus de 200 organisations de la société civile et militant·es écologistes, et une tribune de nombreux experts internationaux. Cet appel citoyen sans équivoque intervient au moment même où les eurodéputé·es conservateur·ices font pression dans les négociations pour affaiblir les obligations des entreprises, notamment en matière environnementale et climatique.

    Un nouveau sondage, réalisé dans 10 pays de l’Union européenne dont la France [1], révèle que les citoyen·nes européen·nes sont très favorables à une législation européenne ambitieuse sur le devoir de vigilance, qui, si elle était adoptée, obligerait les entreprises opérant dans l’UE à prendre des mesures réelles et effectives pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

    A l’instar de la loi française adoptée en 2017, le projet de directive, actuellement débattu au Parlement européen, vise à obliger les entreprises opérant dans l’UE à prévenir les atteintes aux droits humains et à l’environnement dans leurs chaînes de valeur mondiales, et à engager leur responsabilité civile en cas de dommage. 

    En mars dernier, la commission environnement (ENVI) du Parlement européen a voté son avis sur le texte, apportant des avancées notables sur des points clés tels que la définition des atteintes à l’environnement et les obligations des entreprises quant à l’impact de leurs activités sur le climat. Le texte est désormais examiné en commission des affaires juridiques (JURI) où les député·es conservateur·ices continuent de s’opposer à ces avancées. Ces dernier.es font également obstacle à l’inclusion de dispositions visant à faciliter l’accès à la justice des personnes affectées, telles que le renversement de la charge de la preuve.

    Lundi 17 avril, une dernière réunion de négociation doit permettre de trancher sur le texte qui sera soumis au vote de la commission JURI la semaine suivante. Ce vote est capital puisqu’il déterminera le texte qui sera débattu en plénière au Parlement européen.

    La campagne européenne « Justice is everybody’s business », dont plusieurs de nos organisations font partie, a commandité un sondage dans dix pays de l’UE. Les résultats [2] sont sans équivoque :

    • Trois quarts (74 %) des Européen·nes sont favorables à une législation européenne qui obligerait toutes les entreprises à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre afin de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C [3]. 
    • Deux tiers (64 %) pensent que les banques doivent également être tenues légalement responsables des actions des entreprises dans lesquelles elles investissent ou auxquelles elles prêtent de l’argent [4].

    Parallèlement au sondage, plus de 200 personnalités et organisations de la société civile ont signé une déclaration réclamant « une législation européenne forte, adaptée à la lutte contre la crise climatique et à la justice climatique« . Face au greenwashing et engagements purement volontaires des entreprises en matière de transition énergétique, des avocat·es, économistes et scientifiques de toute l’Europe ont également publié récemment une tribune [5] appelant à une réglementation véritablement contraignante.

    Dans un contexte d’urgence climatique et écologique, nos organisations considèrent que le projet de directive, dans sa forme actuelle, doit être renforcé pour que les entreprises soient contraintes de prendre en compte l’ensemble des risques qu’elles font peser sur l’environnement et le climat  et de réduire effectivement leurs émissions de gaz à effet de serre. 

    Nos organisations appellent les eurodéputé·es à écouter les citoyen·nes européen·nes plutôt que les lobbies, et à privilégier la protection des populations et du climat face aux intérêts privés des grandes entreprises. 

    Contacts presse

    Notes

    [1] Le sondage a été réalisé dans les pays suivants :  Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France, Irlande, Pays-Bas, Pologne et Slovénie.

    [2] Tous les chiffres, sauf indication contraire, proviennent de YouGov Plc. Les chiffres relèvent  d’un sondage réalisé auprès d’un échantillon national et politiquement représentatif d’adultes en Allemagne (n=2000) et en France (n=1000). L’enquête d’opinion a également été menée auprès d’un échantillon national représentatif d’adultes en Irlande (n=1000), en Belgique (n=1000), en Finlande (n=1000), en Autriche (n=1000), en Pologne (n=1000), en Slovénie (n=500), en Espagne (n=1000) et aux Pays-Bas (n=1000). Le travail sur le terrain a été entrepris entre le 3 et le 16 février 2023. L’enquête a été réalisée en ligne. Les chiffres au niveau européen sont des moyennes de la proportion de personnes ayant sélectionné chaque réponse dans l’ensemble des pays interrogés.

    [3] Le sondage révèle également que 65 % des répondants demandent que les entreprises réduisent leurs émissions même en cas de crise énergétique.

    [4] Depuis la présentation du projet de directive au Parlement européen, les lobbies de la finance ont dépensé au moins 100 millions d’euros pour faire pression sur les décideurs européens. Au Conseil de l’UE, des pays comme la France ont poussé pour que le secteur financier soit exclu du champ d’application de la nouvelle directive.

    [5] Cette tribune a été publiée le 3 avril dans les Echos, et est également disponible en accès libre ici, avec la liste de tous les signataires. Parmi eux, plusieurs Français·es, tels que Valérie Masson-Delmotte, Gaël Giraud, Laurence Tubiana et Arié Alimi.

  • CP / Un recours dans l’agglomération lyonnaise : Pour un droit à respirer, partout en France

    Communiqué de presse des associations requérantes – Lyon, 07 avril 2023.

    A l’occasion de la Journée Mondiale de la Santé, plusieurs associations et des parents d’élèves rassemblent leurs forces pour demander au Tribunal Administratif de Lyon l’annulation du 3ème Plan de Protection de l’Atmosphère (PPA) de l’agglomération lyonnaise, insuffisant au regard des enjeux soulevés, pour en obtenir une version plus ambitieuse. Ce plan lyonnais n’est pas une exception : il est symptomatique de l’inaction systémique et persistante de l’État en matière de lutte contre la pollution de l’air, et pour laquelle il a plusieurs fois été condamné par le Conseil d’État.

    Le recours lyonnais est le 4e recours demandant l’annulation d’un plan local sur la pollution de l’air en moins d’un an, après Marseille, Nice et Grenoble : il montre la faiblesse des plans locaux de l’Etat sur la qualité de l’air. A Lyon et partout en France, les PPA sont insuffisants, alors qu’ils constituent l’outil principal de l’Etat pour agir : manque d’objectifs chiffrés, calendriers peu ambitieux, manque de moyens alloués aux mesures annoncées… 

    Cette inaction est à mettre en regard des enjeux sanitaires et sociaux soulevés par la pollution de l’air. En France, la pollution de l’air est responsable de plus de 40 000 décès prématurés par an, dont plus de 4 300 dans la région Auvergne-Rhône-Alpes (Santé Publique France). En plus des décès, les études se multiplient pour montrer le lien entre la pollution de l’air et différentes maladies : asthme, maladies cardiovasculaires et pulmonaires, cancers, maladies du foie, ou d’autres maladies du type Alzheimer ou Parkinson. La pollution de l’air est ainsi avant tout une question de santé publique. Elle est également symptomatique des inégalités sociales. De fait, les personnes les plus vulnérables sont celles qui sont le plus exposées aux pollutions. Dans l’agglomération lyonnaise par exemple, les personnes vivant à proximité des grands axes routiers ou autour de la Vallée de la chimie, dont les revenus sont en moyenne plus faibles (Insee), sont aussi celles qui souffrent le plus de la pollution de l’air.

    Ainsi, le décalage entre ces états de fait et les mesures pour le moins insuffisantes engagées par l’État et ses services est inquiétant, et a déjà été condamné par la justice. En août 2022, le Conseil d’État condamnait à nouveau l’État pour son inaction en matière de pollution de l’air, et plus précisément pour son non-respect des normes européennes, notamment dans l’agglomération lyonnaise. L’État ne fait toujours pas assez pour protéger ses citoyen·ne·s et leur offrir un air sain, conformément à l’obligation édictée par la loi sur l’air de 1996. En septembre 2022, le Conseil d’État reconnaissait aussi le droit de tou·te·s à vivre dans un environnement sain comme liberté fondamentale.

    Une action inclusive contre la pollution de l’air est possible, et de nombreuses études le montrent. Une publication scientifique a par exemple étudié en 2022 les actions qui permettraient de réduire de deux tiers les émissions à l’origine de la pollution de l’air (ici, de chercheur.se.s de l’Inserm, de l’Inrae et des Universités de Grenoble et Lille). Il s’agit de faire le choix politique de mettre les moyens pour protéger le droit de chacun.e de vivre dans un environnement sain et en bonne santé.

    A travers ce recours lyonnais, nous souhaitons rappeler que l’État a le devoir de se donner des moyens ambitieux pour lutter, enfin, contre la pollution de l’air. Dans les prochains mois, nous serons prêt.e.s à accompagner, juridiquement s’il le faut, d’autres collectifs et collectivités pour obtenir des PPA à la hauteur des enjeux.

    Pour plus d’informations : voir notre dossier presse ci-dessous.

    Liste des organisations de la campagne “Pour un droit à respirer” : Notre Affaire à Tous, Notre Affaire à Tous – Lyon, Respire, La Rue est à Nous – Lyon, Générations Futures, FNE Rhône.

    Contacts presse

    Emma Feyeux, Présidente de Notre Affaire à Tous – Lyon

    emma.feyeux@notreaffaireatous.org

    Clément Drognat, Coordinateur de La Rue est à Nous – Lyon

    larueestanous69@protonmail.com

    Pour les questions juridiques : Me Hélène Leleu

    leleu@chanon-leleu.fr

  • Tribune collective : Pour un droit à respirer, partout en France

    Nous lançons à Lyon le quatrième recours demandant l’annulation d’un plan local sur la pollution de l’air en moins d’un an, et il n’est pas une exception : la faiblesse des plans locaux de l’État sur la qualité de l’air est systémique et persistante. Cette tribune nationale, publiée sur Le Monde à l’occasion de la Journée Mondiale de la Santé, unit des voix qui exigent de l’État qu’il se donne enfin les moyens de protéger la santé de ses citoyen.ne.s tout en intégrant réellement le paramètre de la justice sociale.

    La pollution de l’air : un danger mortel invisible…

    En France, la pollution de l’air est responsable de plus de 40 000 décès prématurés par an, dont plus de 4 300 dans la région Auvergne-Rhône-Alpes (Santé Publique France). En 2021, une étude coordonnée par l’université Harvard a même réévalué le nombre de décès prématurés en France à près de 100 000. Au-delà de cet état de fait, les études se multiplient pour montrer le  lien entre la pollution de l’air et différentes maladies : asthme, maladies cardiovasculaires et pulmonaires, cancers, maladies du foie, ou d’autres maladies du type Alzheimer ou Parkinson. La pollution de l’air est ainsi avant tout une question de santé publique. 

    C’est également un enjeu de justice sociale. De fait, les personnes les plus vulnérables sont celles qui sont le plus exposées aux pollutions. Dans l’agglomération lyonnaise par exemple, les personnes vivant à proximité des grands axes routiers ou autour de la Vallée de la chimie, dont les revenus sont en moyenne plus faibles (Insee), sont aussi celles qui souffrent le plus de la pollution de l’air.Ces impacts ont un coût, sanitaire et socio-économique, estimé à près de 100 milliards d’euros par an en France (Sénat).

    …En décalage avec l’inaction de l’Etat

    Ce constat est alarmant, mais le plus inquiétant est le décalage entre les enjeux soulevés par la pollution de l’air et les mesures pour le moins insuffisantes engagées par l’Etat et ses services.

    En octobre 2022, le Conseil d’Etat condamnait à nouveau l’Etat pour son inaction en matière de pollution de l’air, et plus précisément pour son non-respect des normes européennes, notamment dans l’agglomération lyonnaise. L’Etat ne fait toujours pas assez pour protéger ses citoyen·ne·s et leur offrir un air sain, conformément à l’obligation édictée par la loi sur l’air de 1996. En septembre 2022, le Conseil d’Etat reconnaissait aussi le droit de tou·te·s à vivre dans un environnement sain comme liberté fondamentale.

    Pourtant, l’Etat possède plusieurs leviers d’action pour limiter la pollution de l’air, dont les Plans de Protection de l’Atmosphère (PPA), mis en place par les préfectures pour les agglomérations de plus de 250 000 habitants. A Lyon, la deuxième version du PPA (PPA-2) avait été reconnue en 2019 comme insuffisante par le tribunal administratif. En novembre 2022, la nouvelle version du PPA (PPA-3) a été adoptée. Ce nouveau plan aurait pu être l’occasion pour l’Etat de réhausser ses ambitions contre la pollution de l’air, mais il demeure insuffisant et incohérent. En effet, peu d’objectifs sont chiffrés, les calendriers de mise en œuvre des mesures sont trop peu ambitieux et rarement précisés, et il est déjà certain que les moyens alloués par l’Etat seront insuffisants pour mettre en œuvre la totalité des mesures du PPA…

    Pour toutes ces raisons, et parce que protéger la santé de tou·te·s ainsi que l’environnement devrait être la priorité de l’Etat, plusieurs associations et habitant·e·s de l’agglomération lyonnaise ont décidé de demander l’annulation du PPA-3 lyonnais, afin de faire reconnaître son insuffisance et d’en obtenir une version plus ambitieuse.

    Cette problématique du PPA lyonnais n’est pas spécifique à l’agglomération : la faiblesse des plans locaux de qualité de l’air est systémique et persistante, et doit être dénoncée partout. Depuis plusieurs mois, d’autres PPA sont remis en question ailleurs : par les Amis de la Terre Marseille pour l’agglomération marseillaise, par le Collectif Citoyen 06 pour l’agglomération niçoise, par la Mairie de Grenoble pour l’agglomération grenobloise.

    Nous, scientifiques, représentant·e·s de la société civile, avocat·e·s, politiques, citoyen·ne·s, appelons à des plans locaux de lutte contre la pollution de l’air réellement protecteurs. Nous demandons à ce que la pollution de l’air soit désormais considérée comme un enjeu prioritaire de santé publique et de lutte contre les inégalités sociales et environnementales. Nous exigeons un droit à respirer !

    #pourundroitarespirer

    Premiers signataires

    Clément Drognat, Coordinateur de La Rue est à Nous – Lyon

    Emma Feyeux, Présidente de Notre Affaire à Tous – Lyon

    Florian Brunet, Directeur de France Nature Environnement – Rhône

    Jérémie Suissa, Directeur Général de Notre Affaire à Tous

    Nadine Lauverjat, Directrice Générale de Générations Futures

    Tony Renucci, Directeur Général de Respire

    Soutenue par :

    Adrian Saint-Pol, Porte-parole de Greenpeace Lyon

    Airy Chrétien, Fondateur du Collectif Citoyen 06 – Nice

    Alicia Pillot, Fondatrice de PEPS’L

    Anne Souyris, Maire adjointe de Paris sur la santé publique et environnementale, la lutte contre les pollutions, et la réduction des risques

    Charles de Lacombe, Porte-parole d’Alternatiba ANV Rhône

    Claire Dulière, Coordinatrice plaidoyer de Zéro Déchet Lyon

    Dan Lert, Maire adjoint de Paris en charge de la transition écologique, de l’eau et de l’énergie

    David Belliard, Maire adjoint à Paris en charge de la transformation de l’espace public, des transports, des mobilités, du code de la rue et de la voirie

    Éric Piolle, Maire de Grenoble 

    Frédérique Bienvenue, Co-présidente de La Ville à Vélo – Lyon Métropole

    Gabriel Amard, Député de la sixième circonscription du Rhône

    Hélène Leleu, Avocate au Barreau de Lyon

    Isabelle Michallet, Maîtresse de conférences, Université Jean Moulin Lyon 3

    Louise Tschanz, Avocate au Barreau de Lyon

    Marie Pochon, Députée de la troisième circonscription de la Drôme

    Marie-Charlotte Garin, Députée de la troisième circonscription du Rhône

    Sandrine Berterreix, Anthony Delcambre, Marie Guirguis et Orianne Moulinier, Alliance Santé Planétaire

    Sylvain Delavergne, Coordinateur de Clean Cities Campaign France 

    Thomas Bourdrel, Coordinateur de Strasbourg Respire

    Thomas Dossus, Sénateur du Rhône

  • CP / Le Parlement européen plaide pour la reconnaissance du crime d’écocide dans le droit européen

    Le mercredi 29 mars 2023

    Le Parlement vient de rendre son rapport sur la révision de la Directive sur la criminalité environnementale. De manière unanime, il requiert des Etats membres la reconnaissance et la condamnation des crimes les plus graves commis contre l’environnement, les écocides.

    Il s’agit d’une première victoire pour les militant.e.s et associations qui se battent depuis plus de 50 ans pour reconnaître le crime d’écocide au niveau international. La position du Parlement européen est claire et adoptée à l’unanimité : les Etats membres doivent inscrire l’écocide dans leur système juridique. 

    Notre Affaire à Tous, qui milite depuis sa création pour la reconnaissance du crime d’écocide à l’échelle internationale et nationale, se réjouit de cette avancée au niveau européen. Une avancée rendue possible grâce notamment à l’eurodéputée Marie Toussaint, co-fondatrice de Notre Affaire à Tous, qui coordonne l’Ecocide Alliance, une alliance internationale de parlementaires pour la reconnaissance de l’écocide.

    Le préambule du rapport dispose ainsi que “lorsqu’un délit environnemental cause des dommages graves et étendus ou durables ou irréversibles à la qualité de l’air, à la qualité du sol ou à la qualité de l’eau, ou à la biodiversité, aux services et fonctions des écosystèmes, aux animaux ou aux plantes, il devrait être considéré comme un crime d’une gravité particulière, et sanctionné comme tel conformément aux systèmes juridiques des États membres, couvrant l’écocide, pour lequel les Nations unies travaillent actuellement à l’élaboration d’une définition internationale officielle.”

    Cette définition reprend celle du panel d’experts international mis en place en 2021 sous l’égide de la fondation Stop Ecocide, qui avait proposé une définition similaire de l’écocide afin de modifier le Statut de Rome. L’écocide est ainsi entendu comme un crime environnemental “grave” et “étendu ou durable ou irréversible”.

    Alors que la criminalité environnementale est devenue la troisième activité la plus lucrative derrière le trafic de stupéfiants et la contrefaçon, et que des centaines de défenseurs de l’environnement sont assassinés dans le monde chaque année, les crimes les plus graves commis contre l’environnement restent impunis. On peut citer notamment les catastrophes de Bhopal et du Deepwater Horizon, ou encore le scandale sanitaire et environnemental du Chlordécone aux Antilles.

    C’est un grand pas que vient de franchir le Parlement européen en vue de la reconnaissance des crimes les plus graves contre l’environnement. L’environnement est en train de devenir une nouvelle valeur fondamentale digne d’être protégée par le droit pénal .” indique Marine Yzquierdo, avocate et administratrice de Notre Affaire À Tous.  

    Avec l’extension de la liste des crimes environnementaux, dont la référence à l’écocide, le renforcement des peines et l’amélioration de la coopération transfrontalière, la proposition du Parlement européen permet de s’attaquer sérieusement à la “dépénalisation de fait” de la protection de l’environnement.”, ajoute Théophile Keïta, également avocat et administrateur de Notre Affaire à Tous.

    Il reste néanmoins à franchir une dernière étape, le “Trilogue” : cette phase de négociation entre le Parlement européen, la Commission européenne et le Conseil européen (réunissant les représentants des gouvernements) doit permettre de trouver un accord sur un texte final. 

    L’avis du gouvernement français, qui avait refusé de reconnaître le crime d’écocide comme le préconisait la Convention Citoyenne pour le Climat (pour le réduire à un simple “délit d’écocide” vidé de sa substance), aura un poids important dans ces négociations institutionnelles. D’ailleurs, conformément à la loi climat et résilience issue des travaux de la Convention citoyenne pour le climat, la France s’est engagée à mettre en place les actions nécessaires pour reconnaître le crime d’écocide au niveau international.

    Si la position du Parlement européen était retenue en Trilogue, cela pourrait faciliter ensuite la reconnaissance de l’écocide au niveau international, les Etats de l’Union européenne représentant 40% des Etats parties à la Cour pénale internationale.

    Contacts presse

    Marine Yzquierdo

    marine.yzquierdo@notreaffaireatous.org


    Théophile Keita

    theophile.keita@notreaffaireatous.org

  • CP/ Proposition de loi sur l’artificialisation des sols :  Vers l’abandon de l’objectif Zéro Artificialisation Nette (ZAN)

    La Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) estime qu’environ 1 million d’espèces sont aujourd’hui menacées d’extinction. Dans un tel contexte, il est impératif d’assurer la sauvegarde de la richesse écosystémique de notre territoire. En moyenne 27 000 hectares sont artificialisés annuellement en France, avec comme principaux responsables la construction de logements neufs et l’industrie(1). Face à ce constat, la loi Climat et Résilience de 2021 a imposé l’atteinte d’un taux d’artificialisation nette des sols d’ici 2050(2).

    Concrètement, la loi impose , d’ici à 2031, une réduction de moitié du rythme d’artificialisation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) observé au cours des dix années précédant le 24 août 2021. Pour assurer une mise en œuvre adaptée et effective de cet objectif, la loi a désigné l’échelon régional comme étant au cœur de sa déclinaison.  Ce sont les outils d’urbanisme infrarégionaux et locaux qui devront assurer la coordination de l’objectif ZAN au niveau régional.

    Les ONG environnementalistes, dont Notre Affaire À Tous, considèrent que ce dispositif est indispensable pour limiter la destruction de la biodiversité en France et de tous les services qu’elle rend, et soutiennent une mise en œuvre rationnelle . Il ne s’agit pas de s’opposer au développement territorial, mais de mettre en place un développement équilibré qui prenne également en compte la protection de  l’environnement, et la nécessité de construire des territoires résilients qui permettront d’atténuer les effets de la chute de la biodiversité.

    Les collectivités territoriales, de leur côté, sont soumises à de nombreuses contraintes d’ordre économique et social, outre les enjeux environnementaux. L’objectif ZAN, tel que défini par la loi et précisé par deux décrets d’application du 29 avril 2022, a suscité de nombreuses inquiétudes pour les élu.e.s. Ils.elles dénoncent notamment une recentralisation rigide en matière d’aménagements, tant en faveur de la protection de l’environnement que pour la réindustrialisation du pays. 

    Les collectivités territoriales sont au cœur de l’atteinte de l’objectif ZAN, puisque ce sont elles qui devront effectuer un compromis sociétal entre développement économique, atteinte des objectifs de logements sociaux, maintien d’espaces naturels, agricoles et forestiers. Face à la nécessité de préciser l’articulation entre l’atteinte de l’objectif ZAN et la prise en compte de ces enjeux, le Sénat a introduit une proposition de loi, le 14 décembre 2022, visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs ZAN au cœur des territoires. L’examen en séance entamé depuis le 14 mars ne présage rien de rassurant quant aux amendements du texte actuellement discutés.

    Une proposition de loi mettant en péril l’objectif ZAN

    La territorialisation nécessaire de l’objectif ZAN

    Les dispositifs législatifs des vingt dernières années n’ont pas abouti à mettre en œuvre une réduction de la consommation d’espaces naturels, agricoles, et forestiers. En effet, ceux-ci fixaient des objectifs qui étaient insuffisamment opposables au niveau local. Ainsi les dispositifs sont devenus des objectifs généraux qui ne se sont pas appliqués  sur le terrain, et l’artificialisation des sols a pu s’intensifier.

    Par conséquent, il est indispensable que l’objectif ZAN soit le plus opposable possible, et soit territorialisé à petite échelle.

    La loi Climat et résilience prévoit ainsi d’accorder à la région, et notamment à travers le Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), d’importantes prérogatives en matière d’orientations d’aménagement pour une gestion économe des sols. Pour en assurer l’effectivité, elle impose un rapport de compatibilité avec les autres documents de planification tels que les Schémas de cohérence territorial (SCOT) ou Plans locaux d’urbanisme (PLU) non soumis à un SCOT, vis-à-vis des objectifs fixés par le SRADDET. Désormais, ces documents locaux d’urbanisme ne pourront contredire ces objectifs.

    Toutefois, la proposition de loi sénatoriale prévoit de revenir sur cette évolution et d’imposer à la place un simple rapport de prise en compte, qui signifie que les documents d’urbanisme locaux ne doivent pas s’éloigner des orientations fondamentales de la norme supérieure, le SRADDET, mais pourront y déroger en justifiant de l’intérêt d’une opération particulière. Cette évolution correspondrait finalement à transformer une obligation en en simple recommandation, ce qui, en somme,  reviendrait à  un abandon de l’objectif ZAN.

    Cette dérogation s’inscrit dans une série de dérogations envisagées par le législateur afin d’alléger le poids des contraintes pesant sur les collectivités territoriales pour atteindre l’objectif ZAN. 

    Une série de dérogations excessives conduisant à une dénaturation du dispositif Zéro Artificialisation Nette

    La proposition des sénateurs souhaite approfondir la prise en compte des spécificités des territoires dans la mise en œuvre de l’objectif ZAN. Cette opération est délicate puisqu’elle induit le risque  de rendre inopérant cet objectif à travers des dérogations qui, cumulées,  annihilerait l’effort de réduction de l’artificialisation. Plusieurs points suscitent l’inquiétude des associations environnementales :

    1/ Au vu des inquiétudes soulevées par les collectivités territoriales rurales, les sénateurs ont inclu une garantie rurale offrant la possibilité aux communes et EPCI de prévoir une “surface minimale de développement communal” de 1 hectare.

    Ce plancher minimum de 1 hectare est trop élevé compte tenu du nombre de communes rurales concernées par cette garantie, comme l’a relevé la vice Présidente de la région Nouvelle Aquitaine l’a évoqué lors de son audition du 14 février 2023 au Sénat. Il s’agirait plutôt de mettre en place une garantie rurale évaluée, adaptée et plus restrictive afin d’encourager et de faciliter la continuité de l’effort de sobriété foncière.(3).

    2/ Les sénateurs souhaitent aussi répondre aux difficultés subies par les communes et EPCI littoraux face aux recul du trait de côte rendant de nombreuses parcelles inutilisables. Le texte prévoit également que, dans les communes littorales, “les surfaces artificialisées rendues impropre à l’usage en raison de l’érosion côtière [soient] considérées comme ayant fait l’objet d’une renaturation”. De surcroît,  les opérations de relocalisation ne seraient pas comptabilisées comme de l’artificialisation. Néanmoins un amendement propose que les terres délaissées fassent l’objet d’une réelle renaturation afin de garder la cohérence de stratégie de lutte contre l’artificialisation des sols, nous attendons donc beaucoup du vote à venir sur cet amendement.

    Il est indéniable que les collectivités territoriales subissant la réduction progressive de leur territoire à cause du phénomène d’érosion côtière doivent absolument être accompagnées, notamment au regard de l’atteinte de l’objectif ZAN. La réalisation de cet objectif est, nous le rappelons, indispensable pour enrayer la perte dramatique de la biodiversité et faire face aux effets déjà ressentis du changement climatique.

    Ainsi, l’enjeu est double : soutenir financièrement les travaux de renaturation et désimperméabilisation des terres perdues, et repenser l’aménagement des territoires dans le cadre de la relocalisation. La proposition de loi doit prendre en compte ces enjeux, sous peine d’accélérer le rythme d’artificialisation sur le littoral et faillir à l’objectif ZAN.

    3/ La territorialisation de l’objectif ZAN soulève la problématique de la prise en compte des projets d’ampleur ou d’intérêt national. Dans un souci d’équité entre les territoires, la proposition de loi prévoit que les projets d’intérêt national majeur ne soient pas intégrés et fassent l’objet d’une comptabilisation séparée afin de ne pas pénaliser les seuls territoires qui les accueillent.

    Cette justification est compréhensible, mais il est impératif que ces projets soient limitativement énumérés, et non présumés comme étant d’intérêt national majeur comme le prévoit le texte. Or, l’enveloppe nationale prévue est beaucoup trop large car y inclut beaucoup de types de projets, qui se revendiqueront tous d’intérêt national majeur pour échapper à la comptabilisation régionale, À plus forte raison, les amendements votés élargissent d’autant plus le périmètre de cette enveloppe nationale, par exemple avec les projets industriels « représentant un intérêt pour la souveraineté économique nationale ou européenne », ou les projets internationaux, nationaux, interrégionaux. En somme, l’intérêt économique prend encore plus de place dans la mise en concurrence entre  développement économique et protection de l’environnement, et relève désormais d’un intérêt national majeur (nouvelle notion juridique) alors que l’effondrement de la biodiversité est déjà alarmant.

    En outre, la comptabilisation de cette enveloppe isolée est très floue, et l’on se demande comment l’objectif ZAN va être respecté en instaurant une trajectoire parallèle aux régions, qui comprend autant de projets structurants et consommateurs de terres. Cela est à mettre en relation avec la garantie rurale, qui aurait en soi pu être souhaitable si les projets d’ampleur étaient  comptabilisés strictement. 

    En somme, cette proposition de loi souhaite introduire un ensemble de régimes dérogatoires, qui certes prennent en compte les spécificités des territoires, mais pour autant complexifient et mettent grandement à mal la mise en œuvre du ZAN. L’accentuation de la territorialisation de cet objectif doit se faire sans pour autant dénaturer le dispositif prévu par la loi Climat et Résilience. 

    La complexification de la notion même d’artificialisation

    Outre des critères excessifs incompatibles avec l’objectif ZAN, la proposition de loi appauvrit également la notion de zones non-artificialisée. Elle propose de considérer comme non artificialisées les surfaces végétalisées à usage résidentiel, secondaire ou tertiaire (tels que les parcs urbains, les jardins privés etc…). Dans le cas où elles seraient finalement artificialisées, au sens de recouverte par du bâti ou une couche minérale, cette artificialisation ne serait pas comptabilisée dans l’objectif ZAN.

    La définition des surfaces non-artificialisées est déterminante dans l’atteinte de l’objectif ZAN, et cette disposition en est l’illustration. Si aujourd’hui les surfaces végétalisées à usage résidentiel, secondaire ou tertiaire participent au maintien du cadre de vie, notamment au sein des îlots de chaleur, elles n’ont cependant pas de comparaison avec d’autres types de surface qui sont plus fournies écologiquement et ont des fonctionnalités plus riches pour la biodiversité. 

    Reconnaître ce type de surface comme étant non-artificialisé, c’est ouvrir la porte à des opérations de renaturation considérées comme suffisantes (4), malgré la faible valeur écologique d’une pelouse, à titre d’exemple. La notion de renaturation devient alors dénuée de sens, et le concept même d’artificialisation nette se retrouve vidé de sa substance.

    Quand bien même cette disposition ait pour objectif de conserver ces espaces naturels au sein des villes dans le contexte de la densification, le code de l’urbanisme (5) garantit d’ores et déjà que tout ouverture à l’urbanisation d’ENAF (espaces naturels, agricoles, et forestiers) a soit justifiée par une étude de densification des zones déjà urbanisées. Le zonage PLU, le contrat ORE, sont des outils permettant également une protection de ces espaces.

    Ainsi cette disposition est injustifiée, mais permet de relever la faiblesse de la dualité de la définition de l’artificialisation dans la loi Climat et Résilience : tous les ENAF n’ont pas la même valeur écologique, et il conviendrait de les distinguer en fonction de ces données (une pelouse n’est pas aussi riche en biodiversité, qu’un bois).

    Les lacunes de la proposition de loi s’agissant de la renaturation des sols

    La renaturation est reléguée à la fin de la proposition de loi, dont les rédacteurs auraient dû saisir l’opportunité pour affiner la définition du processus de renaturation. Cette dernière constitue une solution de repli imparfaite en cas d’artificialisation, puisqu’il est difficile, voire illusoire, de considérer que renaturer un autre espace peut compenser la perte d’un sol aux fonctionnalités écologiques importantes et pérennisées. 

    L’enjeu est d’éviter que des mesures de renaturation soient considérées valides sans qu’il soit scientifiquement établi que ce processus permette une restauration équivalente à la biodiversité détruite par l’artificialisation entreprise. 

    Le bon état écologique des sols s’envisage sur le long terme, contrairement à la vision court-termiste du processus de renaturation en compensation de l’artificialisation. L’absence d’artificialisation d’un sol qui remplit des fonctionnalités écologiques est plus important pour la biodiversité et le climat que l’amélioration d’un sol, qui apportera moins à ces enjeux.

    Des mesures provisoires permettant dès maintenant la poursuite de l’objectif ZAN

    Malgré un certain nombre de dispositions risquant de porter atteinte à l’essence même de l’objectif ZAN, il est important de saluer une initiative permettant aux collectivités territoriales d’amorcer, dès à présent, la poursuite de cet objectif.

    En effet, le texte propose d’instaurer un droit de préemption sur les biens et les droits immobiliers contribuant à la préservation de la nature en ville, ou présentant un potentiel fort en matière de renaturation ou de recyclage foncier.

    Ce dispositif doterait les communes ou les EPCI de la possibilité de se substituer à l’acquéreur d’un bien ou d’un terrain au titre de la lutte contre l’artificialisation d’espaces naturels. L’application de ce droit de préemption est soumise au classement en zone de préemption de la zone concernée, ce au sein du document d’urbanisme en vigueur (SCOT, PLU ou carte communale). 

    En l’attente de l’intégration dans les documents d’urbanisme des dispositifs d’atteinte de l’objectif ZAN, la proposition de loi prévoit la possibilité pour les communes ou les EPCI de surseoir à statuer sur les demandes d’urbanisme qui sembleraient aller à l’encontre de la lutte contre l’artificialisation des sols.

    Ces prérogatives permettraient de doter les collectivités territoriales de prérogatives permettant une meilleure prise en compte des enjeux de l’artificialisation à une  échelle locale. Ces mesures ont pour avantage de pallier  l’inquiétude des collectivités de perte de leurs prérogatives à cause du dispositif ZAN, sans pour autant dénaturer cet objectif.

    Notes :

    (1) :  France Stratégie, “Objectif « Zéro artificialisation nette » : quels leviers pour protéger les sols ?”, Juillet 2019

    (2) :  L’artificialisation nette désigne le solde entre l’artificialisation et la renaturation

    (3) : https://videos.senat.fr/video.3259630_63e9771eba13e.zero-artificialisation-nette—auditions?timecode=12087000

    (4) :  La loi climat et résilience définit elle-même la notion : « La renaturation d’un sol, ou désartificialisation, consiste en des actions ou des opérations de restauration ou d’amélioration de la fonctionnalité d’un sol, ayant pour effet de transformer un sol artificialisé en un sol non artificialisé. » (article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme)

    (5) :  Art. L. 151-5, 2°, code de l’urbanisme : “Il ne peut prévoir l’ouverture à l’urbanisation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers que s’il est justifié, au moyen d’une étude de densification des zones déjà urbanisées, que la capacité d’aménager et de construire est déjà mobilisée dans les espaces urbanisés. Pour ce faire, il tient compte de la capacité à mobiliser effectivement les locaux vacants, les friches et les espaces déjà urbanisés pendant la durée comprise entre l’élaboration, la révision ou la modification du plan local d’urbanisme et l’analyse prévue à l’article L. 153-27.”

  • Justice pour le vivant : l’agrochimie défend le système d’autorisation des pesticides aux côtés de l’État

    Paris, le 13 mars 2023. Les associations POLLINIS, Notre Affaire à Tous, ANPER TOS, ASPAS et Biodiversité sous nos pieds ont transmis au Tribunal administratif de Paris leur mémoire en réponse aux arguments du lobby de l’agrochimie qui cherche à maintenir le système actuel d’homologation des pesticides, responsable de l’effondrement sans précédent de la biodiversité.

    Phyteis, le lobby représentant en France les plus grandes entreprises de l’agrochimie (Bayer, Syngenta, BASF…) a déposé le 10 février un mémoire en intervention dans le recours historique « Justice pour le Vivant ». Cette demande, soumise moins de deux heures avant la clôture programmée de l’instruction, est venue in extremis appuyer la défense de l’État, attaqué par 5 ONG environnementales pour son inaction face à l’effondrement de la biodiversité. 

    Alors que l’on constate un déclin de 76 % à 82 % des insectes volants au cours des 27 dernières années en Europe[1], une diminution de 57 % des oiseaux communs des milieux agricoles depuis 1980[2] ainsi qu’une contamination importante de l’eau et l’air par les pesticides[3], les arguments mobilisés par le lobby de l’agrochimie ignorent le consensus scientifique sur la responsabilité des pesticides dans cet effondrement. 

    Dans son mémoire d’une cinquantaine de pages, Phyteis tente également d’empêcher la tenue du procès Justice pour le Vivant en utilisant diverses techniques dilatoires. Le lobby consacre ainsi plus d’une dizaine de page à contester la recevabilité du recours, faisant valoir toute une série d’arguments infondés, parmi lesquels :

    • la remise en cause de la compétence du Tribunal administratif en matière de préjudice écologique, questionnant ce faisant la décision prise par ce même tribunal dans l’Affaire du Siècle.
    • La contestation en question de la participation au procès de 3 des associations requérantes: ANPER TOS, l’ASPAS et Biodiversité sous nos pieds.

    Sur le volet scientifique, le lobby ignore la majorité des centaines d’études citées par les associations qui montrent les effets néfastes des pesticides sur la biodiversité, ainsi que les lacunes avérées du schéma d’évaluation des risques mises en évidence par les ONG dans leurs précédents mémoires, et largement reconnues par la littérature scientifique et par les autorités sanitaires française et européenne elles-mêmes[4].

    Il écarte ainsi des pans entiers du rapport INRAE-IFREMER (2022), pourtant le résultat d’une expertise collective de plusieurs années des instituts de recherche publics les plus reconnus en agronomie et connaissance des océans sur l’impact des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques.

    Tandis que le représentant des firmes de l’agrochimie accuse de « biais » certaines études scientifiques citées par les 5 ONG, il essaie d’orienter le tribunal vers des études « non-biaisées » selon eux, telle que celle de Tänzler et al. 2022, qui a en réalité été commissionnée et écrite par des scientifiques employés par Bayer (soit Bayer AG, Crop Science, Allemagne, soit Bayer CropScience, Etats-Unis).

    Autre exemple, Phyteis affirme que l’ensemble de données disponibles dans la littérature scientifique des dix dernières années est d’ores et déjà mobilisée dans le cadre de l’évaluation des risques liés aux pesticides En réalité, la science indépendante est notoirement peu prise en compte, comme le souligne le rapport de l’INRAE-Ifremer: « Les fondements scientifiques mobilisés dans le cadre réglementaire ignorent en partie les connaissances scientifiques disponibles dans le champ académique ». 

    Certaines des procédures d’évaluation européennes actuelles datent de 2002 et n’ont pas fait l’objet depuis des mises à jour indispensables au regard des dernières connaissances scientifiques et des exigences de la réglementation. Ainsi, depuis l’adoption du règlement européen sur les pesticides de 2009, aucun nouveau document pour l’évaluation des risques pour les insectes auxiliaires et pour les abeilles n’a vu le jour. Les risques pour les amphibiens et les reptiles ne font toujours l’objet d’aucune évaluation. 

    « Il est inutile d’avoir l’une des règlementations les plus protectrices au monde en matière d’évaluation des pesticides si celle-ci n’est pas appliquée. C’est cette distorsion insupportable entre les objectifs législatifs et la réalité de protocoles sur la base desquels ont été autorisées les substances les plus toxiques pour l’environnement et la santé humaine (néonicotinoïdes, S-méthalochlore, etc.) qui nous a poussé à agir. L’intervention de Phyteis pour défendre l’inaction de l’Etat ne fait que renforcer nos convictions et notre détermination.  », rappellent les 5 associations.

    Contacts presse

    POLLINIS : Cécile Barbière, Directrice de la communication

    cecileb@pollinis.org

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll, Responsable de campagnes.

    justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    ANPER-TOS : Elisabeth Laporte, Juriste.

    juridique@anper-tos.fr

    Biodiversité Sous Nos Pieds  : Dorian Guinard, membre du pôle juridique de BSNP

    daguinard@yahoo.fr

    ASPAS : Cécilia Rinaudo, Responsable Développement et Communication

    cecilia.rinaudo@aspas-nature.org

    Notes

    [1]  Cour des comptes, Le soutien à l’agriculture biologique, Rapport public thématique, juin 2022, p. 203

    [2]  Birdlife International, Etat des Populations d’Oiseaux dans le Monde, 2022

    [3] Cf. par ex. LeMonde, Pesticides : de l’eau potable non conforme pour 20 % des Français, 21 septembre 2022 ; Enquêtes d’actu, L’eau du robinet polluée par les herbicides, 24 novembre 2022 ; France 3 Régions, Pesticides dans l’air. Air Breizh dévoile son bilan : 26 pesticides détectés dont 8 interdits d’utilisation, 27 novembre 2022.

    [4] Notamment, s’agissant de l’évaluation des risques pour les abeilles : EFSA, Scientific Opinion on the science behind the development of a risk assessment of Plant Protection Products on bees (Apis mellifera, Bombus spp. And solitary bees), 2012 ; EFSA, Guidance on the risk assessment of plant protection products on bees (Apis mellifera, Bombus spp. and solitary bees), 2013 ;  EFSA, Outcome of the pesticides peer review meeting on general recurring issues in ecotoxicology, 2015 ; Anses, Avis relatif à l’évolution de la méthodologie d’évaluation du risque vis-à-vis des abeilles domestiques et des insectes pollinisateurs sauvages dans le cadre des dossiers de demande d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, Saisine n° 2019-SA-0097, 5 juillet 2019 ; Topping et al., 2020.

  • CP/ Déjà visée pour ses soutiens financiers au secteur des énergies fossiles, BNP Paribas de nouveau devant la justice française pour son financement d’activités liées à la déforestation

    27 FÉVRIER, PARIS – L’ONG brésilienne Comissão Pastoral da Terra (CPT) et l’association française Notre Affaire À Tous ont déposé une plainte devant le tribunal judiciaire de Paris contre BNP Paribas pour avoir fourni des services financiers à Marfrig, l’un des plus grands producteurs de viande bovine au monde. Les fournisseurs de Marfrig se sont livrés à une déforestation illégale et grave de l’Amazonie, à l’accaparement de terres dans des territoires autochtones protégés et au travail forcé dans des élevages de bétail. Cette action en justice intervient quelques jours après que la BNP ait été assignée en justice pour répondre de son soutien financier à des entreprises développant  de nouveaux projets pétroliers et gaziers. 

    Les associations reprochent à BNP Paribas d’avoir violé la loi française sur le devoir de vigilance qui impose aux multinationales basées en France d’établir un plan qui « comporte des mesures de vigilance raisonnable propres à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement, résultant des activités de la société et de celles des sociétés qu’elle contrôle » en France et à l’étranger.

    Pour Jérémie Suissa, Délégué général de Notre Affaire à Tous : « Malgré ses engagements et ses communications, BNP Paribas ne cherche pas à lutter efficacement contre la déforestation de l’Amazonie. Les preuves accumulées sur le soutien de BNP à Marfrig et le manque de vigilance de Marfrig vis-à-vis de ses fournisseurs révèlent l’insuffisance des mesures prises par la BNP. On ne peut pas fermer les yeux sur la déforestation et le travail forcé et se prétendre acteur du changement et  de la neutralité carbone. La déforestation sur le territoire brésilien est un enjeu d’envergure planétaire : la préservation de l’Amazonie est d’une importance capitale pour notre trajectoire climatique collective et le Brésil reste le premier exportateur mondial de viande bovine”.

    Pour Xavier Plassat, chargé de campagne contre le travail esclave à la CPT : « Pour continuer à générer d’énormes revenus grâce au travail forcé que les militants, les médias et les groupes autochtones ont mis en lumière ces dernières années, Marfrig a réagi en faisant pression pour interdire l’accès aux informations sur ses chaînes d’approvisionnement et en refusant de contrôler les fournisseurs indirects qui commettent des abus.  Une vigilance raisonnable ne devrait pas permettre à la BNP de tolérer une telle situation ! C’est la raison pour laquelle nous nous adressons aux tribunaux français : pour nous assurer que la loi est suffisamment forte pour que ces grandes entreprises ne puissent pas faire de greenwashing pour se soustraire à de graves allégations d’actes répréhensibles. »

    Pour Merel van der Mark de Rainforest Action Network : « Le secteur de la viande bovine est le principal moteur de la déforestation en Amazonie et il fait également partie des principales sources d’émissions de méthane, un gaz à effet de serre très puissant qui aggrave  le changement climatique. Les requérantes considèrent que le plan de devoir de vigilance de la BNP ne fournit pas de garanties assez fortes pour empêcher la déforestation et les violations des droits de l’homme. »

    Selon une analyse réalisée par le Center for Climate Crime Analysis (CCCA), organisme à but non lucratif, portant sur deux usines de conditionnement de viande exploitées par Marfrig entre 2009 et 2020, les exploitations des fournisseurs auraient été responsables de plus de 120 000 hectares de déforestation illégale dans la forêt amazonienne et la savane du Cerrado voisine au cours de cette période. L’année dernière, des scientifiques ont découvert que certaines parties de la forêt amazonienne émettent désormais plus de dioxyde de carbone qu’elle n’est capable d’en absorber, la plupart des émissions étant causées par des incendies, souvent déclenchés délibérément pour défricher des terres destinées à la production de bœuf et de soja.

    Il s’est également avéré que Marfrig s’est directement et indirectement approvisionné en bétail auprès d’éleveurs qui élevaient illégalement des bovins sur des territoires autochtones. Il s’agit notamment d’exploitations situées sur le territoire autochtone d’Apyterewa dans l’État du Pará – l’une des terres autochtones les plus déboisées ces dernières années – et sur le territoire autochtone de Manoki dans l’État du Mato Grosso.

    L’industrie bovine brésilienne est également connue pour ses pratiques de travail forcé. L’Organisation internationale du travail estime qu’elle est responsable de 62 % du travail forcé dans le pays. L’ONG Walk Free a publié en 2018 un index mondial qui estime que 369 000 individus sont victimes de travail forcé au Brésil.

    Contacts Presse :

    Notre Affaire à Tous : Brice Laniyan, Juriste chargé de contentieux et de plaidoyer, brice.laniyan@notreaffaireatous.org.

    Comissao Pastoral da Terra (Commission Pastorale de la Terre) : Fr. Xavier Plassat, Coordinateur de la campagne nationale de la CPT, “Ouvre l’œil pour ne pas devenir un esclave ! », comunicacao@cptnacional.org.br