Auteur/autrice : Notre affaire à tous

  • 8 octobre 2020 – Le racisme environnemental

    Si nous sommes toutes et tous concerné·e·s par le changement climatique, nous sommes loin d’être égaux face à ses conséquences. Après avoir étudié un nombre important d’inégalités sociales, économiques et territoriales, nous nous concentrons dans ce 13ème numéro de la revue de presse des inégalités climatiques et environnementales sur le racisme environnemental. Originellement pensée dans le contexte des Etats-Unis, la lutte contre ce phénomène a peu à peu traversé les frontières et trouvé un écho sur le territoire français. Le racisme environnemental s’inscrit dans le mouvement plus global de la justice environnementale qui combat à la fois les inégalités raciales et les inégalités d’impacts liées au genre, au statut socio-économique ou encore à l’âge. 

    Pour combattre les inégalités sociales climatiques et environnementales, il nous faut les connaître. C’est le sens de cette revue de presse élaborée par les bénévoles de Notre Affaire à Tous, qui revient chaque mois sur les #IMPACTS différenciés du changement climatique, sur nos vies, nos droits et ceux de la nature.

    Le racisme environnemental : qu’est ce que c’est ?

    La lutte contre les injustices environnementales subies par les minorités ethniques aux Etats-Unis a donné naissance à l’un des premiers mouvements d’ampleur pour la justice environnementale, The Environmental Justice Movement, et a également conduit à l’émergence du concept de racisme environnemental. Cette dernière notion peut être définie comme la tendance des établissements publics ou privés à installer de manière intentionnelle des décharges de déchets toxiques, des sites d’enfouissement, des incinérateurs et des industries polluantes à proximité de quartiers où vivent des minorités ethniques pauvres. 

    Pour le professeur Robert Bullard, le racisme environnemental repose sur un processus d’exclusion territoriale, qu’il définit comme : “l’ensemble des politiques, des pratiques et des directives environnementales qui ont des conséquences négatives disproportionnées, qu’elles soient intentionnelles ou non, sur certaines personnes, certains groupes ou certaines communautés en raison de leur race ou de leur couleur”.

    Les conséquences du racisme environnemental peuvent prendre différentes formes : exposition plus grande aux pollutions des sols, des cours d’eau et de l’air, difficultés d’accès aux ressources naturelles comme l’eau potable et l’énergie, plus grande vulnérabilité face aux événements météorologiques extrêmes et aux conséquences du changement climatique.

    Histoire du mouvement pour la justice environnementale

    Le mouvement pour la justice environnementale est né aux Etats-Unis dans les années 1970 et est issu du mouvement pour les droits civiques. C’est au révérend Benjamin Chavis, leader de la National Association for Advancement of Colored People (NAACP), que l’on doit l’origine du terme “environmental racism”. Il est le coordinateur du rapport “Toxic Waste and Race in the United States”, qui a fait grand bruit au moment de sa publication en 1987, et qui conclut que le critère de la couleur de peau est « la variable la plus significative pour expliquer la localisation des stockages de déchets dangereux (décharges, incinérateurs, bassins de retenue), plus que l’appartenance à une catégorie socio-économique”. En 1982, une première mobilisation historique naît contre l’installation d’un site d’enfouissement de déchets toxiques et dangereux dans le comté de Warren en Caroline du Nord, où 75% de la population vivant près de la zone de la décharge est afro-américaine.

    Juridiquement, la discrimination raciale en matière d’exposition aux déchets toxiques a été reconnue pour la première fois par la décision Bean v. Southwestern Waste Management Corp. en 1979, dans le cas de la lutte de plusieurs résident·es de Houston contre un plan qui prévoyait d’installer une décharge municipale à côté de leur domicile.

    Plus récemment, un des exemples les plus significatifs de racisme environnemental aux États-Unis est l’ouragan Katrina qui, en 2005, a dévasté les quartiers noirs de la Nouvelle-Orléans mal protégés par les digues. Les populations de ces quartiers ont eu plus de mal à évacuer, puisque la majorité des habitations étaient situées en zones inondables. A l’opposé, les habitations des plus riches se situaient majoritairement dans les hauteurs de la ville.

    La catastrophe de l’Ouragan Katrina a mis en lumière l’intersection de plusieurs inégalités : sociales, raciales et de genre. En effet, un tiers de la population de la Nouvelle-Orléans vit sous le seuil de la pauvreté et deux tiers des habitants de la ville sont noirs. On estime aussi que 80% des adultes laissés-pour-compte suite à l’ouragan étaient des femmes. Les grandes vulnérabilités et la moindre résilience sont deux phénomènes frappants de ces inégalités. Une autre affaire de racisme environnemental éclate aux Etats-Unis avec l’affaire de l’eau contaminée au plomb à Flint, une ville du Michigan où 57% des habitants sont afro-américains.

    En 2014, préférant faire des économies plutôt que protéger la santé des citoyens, le gouverneur décide de changer la source d’approvisionnement de l’eau de la ville et de puiser dans la rivière Flint, polluée par des déversements de déchets d’usines. La pollution de l’eau ronge les canalisations en plomb qui n’ont pas été traitées. Il en résulte une contamination au plomb de l’eau avec de graves impacts sanitaires pour la population et plus particulièrement sur les bébés et jeunes enfants : dommages cérébraux, retards de développement, risques accrus de troubles comportementaux et respiratoires etc.

    Quelles sont les conséquences du racisme environnemental ?

    De manière générale, aux Etats-Unis, les afro-américains sont 75% plus susceptibles que le reste de la population de vivre à proximité des installations de déchets toxiques, rapporte The New York Times Magazine. A salaire égal, les afro américains ont plus tendance à vivre dans des zones polluées : ils représentent 69% de la population dans les quartiers américains qui ont des décharges de déchets toxiques. Face à certaines  inégalités environnementales, la couleur de peau est ainsi plus discriminante que la classe sociale.

    Les minorités ethniques sont aussi exposées à des taux de dioxyde d’azote 38% plus élevés que les blancs. Les conséquences sanitaires de ces inégalités environnementales sont nombreuses : une moindre espérance de vie et un état général de santé dégradé qui peut se traduire par le développement d’asthme et d’autres maladies pulmonaires, de cancer, de malformations congénitales et d’autres maladies du développement. Le rapport “Almost Everything you need to know about environmental justice” détaille les conséquences sanitaires des injustices environnementales.

    Racisme environnemental et protection de la nature

    La lutte contre le racisme environnemental est une émanation du mouvement pour les droits civiques des afro-américains. Or, les grandes associations américaines de conservation de la nature ont longtemps été perméables voire hostiles à cette question. Les pères fondateurs du mouvement conservationniste américain étaient imprégnés de la culture raciste de leur époque. L’idéal de wilderness (=nature sauvage) et la création des parcs nationaux se sont ainsi construits sur l’exclusion des peuples autochtones. Les organisations écologistes états-uniennes sont aujourd’hui encore imprégnées de cet héritage raciste et colonial. Alors que les populations racisées sont particulièrement affectées par les crises environnementales, elles ont historiquement été exclues du mouvement pour l’environnement, rapporte le New York Times.

    Dès 1991, Robert Bullard alertait plusieurs grandes associations environnementales américaines comme l’Environmental Defense Fund, le Natural Resources Defense Council ou le Sierra Club, sur leur manque de représentation des personnes non blanches. Cette tendance est aussi observée en France, où le manque de diversité du mouvement écologiste est souvent pointé du doigt.

    Peut-on parler de racisme environnemental en France ?

    En France, pour des raisons culturelles et historiques, la notion de racisme environnemental peine à émerger. Il existe bien des statistiques ethniques produites par l’INSEE pour mesurer les discriminations, mais elles ne prennent pas en compte les inégalités environnementales. Les rares études sur le sujet ont été menées par Lucie Laurian en 2008 et 2014. La dernière étude, publiée par le Journal of Environmental Planning and Management démontre qu’en France, chaque pourcentage supplémentaire de la population d’une ville né à l’étranger augmente de 29% les chances pour qu’un incinérateur à déchets, émetteur de divers types de pollutions, y soit installé. Ce n’est que récemment que la notion de racisme environnemental est apparue dans la sphère écologiste française, en lien avec le mouvement pour une écologie décoloniale et l’actualité du mouvement Black Lives Matter.

    Le cas du chlordécone aux Antilles

    Le chlordécone est un pesticide très toxique qui a été utilisé massivement dans les bananeraies de Guadeloupe et Martinique, pendant plus de vingt ans, de 1972 à 1993. Cet insecticide servait à lutter contre le charançon, un insecte qui détruit les cultures de bananes. Alors que son interdiction était prononcée dès 1976 aux Etats-Unis et que le produit été classé cancérogène possible en 1979 par l’Organisation Mondiale de la Santé, la France n’a interdit le chlordécone qu’en 1990 et seulement en 1993 aux Antilles grâce à deux dérogations successives. Des stocks illégaux de chlordécone ont été retrouvés en 2002, laissant penser que l’utilisation du pesticide a continué longtemps après son interdiction. Le lobbying pour l’utilisation du chlordécone a été mené par les propriétaires agricoles, issus de puissantes familles békés, héritiers des colons européens, ajoutant au scandale sanitaire une dimension sociale et néocoloniale.
     
    L’utilisation du chlordécone aux Antilles a eu des conséquences dévastatrices sur les habitants et les écosystèmes. Dans un rapport publié par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques, il est indiqué que « trois kilos de chlordécone épandus par hectare et par an ne s’éliminent totalement des sols qu’au bout de sept siècles« . De 1972 à 1993, 300 tonnes de chlordécone ont été déversées en Martinique et en Guadeloupe.
     
    Aujourd’hui, vingt-cinq ans après l’interdiction de l’utilisation du pesticide, 18 000 hectares de terres sont contaminés en Martinique et Guadeloupe, soit 25% de la surface agricole utile des deux îles. Ce produit toxique s’est aussi répandu dans les rivières et l’océan, menant à l’interdiction de la pêche dans certains rivages et zones maritimes. La contamination généralisée des sols et des eaux a ainsi des conséquences économiques graves pour les pêcheurs et les agriculteurs.
     
    Les travailleurs agricoles noirs sont les premières victimes de cette inégalité environnementale et témoignent de l’atteinte du chlordécone sur leurs corps. Mais les conséquences sanitaires s’étendent aujourd’hui à la quasi-totalité de la population martiniquaise et guadeloupéenne. Selon une étude de 2013 de Santé Publique France, 95% des Guadeloupéens et 92% des Martiniquais sont contaminés. Ce pesticide étant un perturbateur endocrinien, la santé des populations est gravement menacée : impact sur le développement cognitif et moteur des enfants, risques élevés d’infertilité, de naissances prématurées, d’endommagement du système nerveux, et soupçon de survenance augmentée du cancer de la prostate. En Martinique, chaque année 227 nouveaux cas pour 100 000 habitant·es de ce cancer sont déclarés. Le département français détient ainsi le triste record du monde de la survenance de ce cancer.

    Pour le philosophe Malcom Ferdinand : “c’est une minorité qui a choisi le chlordécone et a imposé de vivre en milieu contaminé au reste de la population”. L’injustice environnementale se caractérise ici par des inégalités de responsabilité, d’impact et de participation à la décision publique Le scandale du chlordécone, pesticide utilisé pour une monoculture intensive, destinée à l’exportation en France continentale, met ainsi à jour la structuration néocoloniale de la société antillaise.

    La communauté des gens du voyage

    Le juriste William Acker s’est intéressé au racisme environnemental subi par les Gens du Voyage. Dans son étude sur l’emplacement des aires d’accueil, il démontre que la très grande majorité des aires sont situées dans des zones environnementalement dégradées, comme l’aire de Gex, ou dans des zones qui seront de plus en plus impactées par les tempêtes et orages violents dus au changement climatique, comme dans les Alpes-Maritimes et les Bouches-du-Rhône en 2019 ou en Lorraine en 2018.

    Ces aires peuvent être occupées uniquement par les personnes catégorisées par le droit administratif comme “gens du voyage”, tel que prévu par l’article 1er de la loi Besson de 2000, ce qui pour William Acker démontre “un racisme environnemental systémique et méconnu. Les Gens du Voyage sont ainsi en première ligne face aux pollutions industrielles, comme l’incendie de l’usine Lubrizol le 26 septembre 2019l’aire d’accueil se trouvant à 500m de l’usine. Il s’agit pour William Acker d’un cas majeur d’injustice environnementale.

    Roms et exilés

    Le racisme environnemental est également visible dans le traitement des roms et des migrants qui, pour une grande partie d’entre eux, doivent vivre dans des zones environnementalement dégradées, en Europe mais également en France. Dans un rapport paru en avril 2020, le Bureau Européen de l’Environnement recense 32 cas de racisme environnemental à l’encontre de populations roms en Bulgarie, Roumanie, Hongrie, Macédoine du Nord et Slovaquie, amenant ces communautés à être particulièrement affectées par la pollution et la non-fourniture de services environnementaux. 

    En France, les bidonvilles tolérés sont souvent dans des zones très polluées, comme dans les Yvelines où 17 enfants roms ayant vécu dans un bidonville avaient des taux de plomb supérieurs à 25 microgrammes par litre de sang, amenant l’Agence régionale de Santé (ARS) à faire évacuer le campement. De même, lorsque la préfecture du Pas-de-Calais et la mairie de Calais décident le regroupement des migrants présents sur le territoire de la ville dans un seul secteur en 2015, le terrain choisi pour accueillir les migrants – et qui formera la « Jungle » de Calais – est situé en zone SEVESO. De façon générale, les terrains où ils peuvent installer leurs campements sont parmi les plus à risque en termes d’intempéries et de catastrophes naturelles, comme comme la “Jungle” de Calais ou encore près de Toulouse où un campement a été inondé en décembre 2019.

    Le saturnisme : une maladie de l’immigration

    Maladie ancienne réapparue à Paris dans les années 1980, le saturnisme est une intoxication de l’organisme par le plomb, principalement dûe à l’absorption de poussières de peinture. Les cas de saturnisme sont apparus chez des enfants d’immigrés subsahariens, vivant dans des logements dégradés d’Ile-de-France. La surreprésentation des enfants d’immigrés atteints de saturnisme et la lenteur de leur prise en charge ont ainsi mis à jour des discriminations en matière de santé et d’accès au logement.

    Les banlieues françaises

    Plusieurs études ont démontré la vulnérabilité des quartiers populaires face aux événements climatiques extrêmes. Lors de la canicule de 2003, le deuxième département le plus sévèrement touché après le Val-de-Marne (surmortalité de + 171%) était la Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de France hexagonale, avec une surmortalité de +160%. Cette surmortalité s’explique par le phénomène des îlots de chaleur urbain mais aussi par les conditions de vie des habitant·e·s : logement surpeuplés et mal isolés, peu d’espaces verts, difficultés d’accès à l’eau pour certaines populations, bétonisation à outrance, pollution de l’air, état de santé général dégradé ou encore mauvaise diffusion des informations sur les bonnes pratiques pour se protéger lors des fortes chaleurs. Les habitant·e·s des quartiers populaires sont aussi plus vulnérables aux vagues de froid.

    Selon une enquête de l’Observatoire des inégalités, 30,8% des habitant·e·s des Zones urbaines sensibles ont connu en 2006 des périodes de froid dans leur logement en raison d’une mauvaise isolation ou de problèmes d’installation et de mise en route du chauffage, contre 13 % pour le reste de la population. Les villes de banlieues sont aussi plus exposées aux pollutions atmosphériques. A Saint-Denis la pollution de l’air est particulièrement élevée, “les pics de particules PM 10 sont liés notamment au diesel. L’A1 concentre aux portes de Paris plus de 195 000 véhicules par jour”.

    Conditions de travail et risques environnementaux

    Les minorités ethniques ne sont pas seulement affectées dans leur qualité de vie sur leur lieu de résidence, mais également par leurs conditions de travail. Les populations racisées sont reléguées aux emplois les plus exposés aux pollutions : nettoyage, tri des déchets, transport logistique, peinture en bâtiment, travail saisonnier dans le secteur agricole etc. Aujourd’hui en France, plus de deux tiers des travailleurs immigrés sont des ouvriers ou des employés. L’intersection entre la classe sociale et l’appartenance à une minorité ethnique rend difficile la mesure des inégalités raciales et donc du racisme environnemental. Le débat classe/race est encore vif dans les sciences sociales en France.

    Quelles perspectives pour le mouvement climat ?

    Aux Etats-Unis, la mort de George Floyd a “réactivé les questionnements sur les liens entre couleur de peau et enjeux écologiques”. Cependant, la notion de racisme environnemental reste sujette à controverses et nuances. La chercheure Dorceta Taylor analyse ainsi les expositions aux injustices environnementales à travers la “simultanéité des oppressions” de classe, de race et de genre. Laura Pulido explique également que l’injustice environnementale n’est pas forcément intentionnelle mais qu’elle résulte de la structuration de la société et d’un système complexe d’oppressions défavorables aux personnes de couleurs. 

    La convergence entre les luttes antiracistes et écologistes commence à peine à émerger en France ou des alliances entre différents mouvements se tissent malgré de fortes réticences. La notion de racisme environnemental suscite également un intérêt croissant dans le milieu universitaire. Pour certain·e·s militant·e·s, les apports de la justice environnementale et du concept de racisme environnemental permettent de rendre plus concrètes les luttes pour la protection de l’environnement et du climat et de sortir de l’entre-soi du mouvement écologiste.

    Aller plus loin

  • Lettre des plaignant-es du People’s Climate Case aux députés européens avant le vote de la loi européenne sur le climat

    Cher membre du Parlement européen,

    Nous vous écrivons au nom de tous les Européen-nes touché-es par le changement climatique. Nous sommes des agriculteurs, des bergers, des forestiers, des propriétaires d’hôtels et de restaurants et les représentants de la jeunesse autochtone Sami de Suède, du Portugal, de France, d’Italie, d’Allemagne et de Roumanie, unis dans notre vulnérabilité face au changement climatique.

    La peur et l’espoir. Ces sentiments contradictoires sont constamment présents lorsque nous pensons à l’avenir, et nous ont donné la force de faire quelque chose qui n’a jamais été fait auparavant. Pour protéger notre vie et notre avenir, nous avons décidé de nous battre pour nos droits fondamentaux.

    Je m’appelle Sanna Vannar, et je suis une éleveuse de rennes autochtone Sami, du côté suédois. L’élevage de rennes est au centre de notre culture. Ma famille et d’autres communautés samis d’éleveurs de rennes perdent de nombreux rennes à cause des changements climatiques imprévisibles, qui entraînent de plus en plus de feux de forêt, de sécheresses et de pluies sur la neige dans le cercle arctique. Nous, le peuple Sami, comptons sur nos traditions, nos connaissances et nos pratiques autochtones, qui sont aujourd’hui toutes menacées par la crise climatique. Il ne s’agit pas d’un événement isolé, les changements spectaculaires dans la région arctique influenceront les conditions météorologiques dans toute l’Europe et ailleurs.

    En Allemagne, nous, les Recktenwald, vivons depuis quatre générations sur l’île de Langeoog, en mer du Nord. Notre famille a construit une entreprise d’hôtellerie et de restauration à partir de rien. Nos biens et notre entreprise sont menacés par l’élévation du niveau de la mer, les tempêtes, l’érosion des dunes et la pollution de notre eau potable par l’eau de mer, qui se produira bientôt. Au Portugal, en France et en Italie, nous, Alfredo Sendim, Ildebrando Conceição, Armando Carvalho et Joaquim Caixeiro, Maurice Feschet, Giorgio Elter et nos familles sont agriculteurs et apiculteurs. Nous sommes continuellement confrontés à un climat de plus en plus irrégulier et instable. L’augmentation des températures et les sécheresses rendent très difficile la poursuite de nos activités agricoles.

    Dans les Carpates roumaines, nous, la famille Vlad, risquons de perdre notre ferme et notre bétail en raison de l’augmentation des températures, des sécheresses et du manque d’eau dans notre région. Nous avons déplacé les animaux de plus en plus haut dans les montagnes pour obtenir une végétation plus humide, mais nous ne pouvons plus aller plus haut. Nous avons atteint le sommet.

    En mai 2018, avec nos enfants et l’association Saminuorra, nous avons intenté une action en justice contre l’UE pour l’insuffisance de son objectif climatique à l’horizon 2030. Dans le même temps, la Commission européenne a publié son analyse d’impact qui préconise une réduction d’au moins 55 % des émissions de GES d’ici 2030 (même en incluant les absorptions, ce qui se traduirait par une réduction globale plus faible des émissions), un pas dans la bonne direction, mais loin d’être suffisant si nous voulons être en conformité avec l’Accord de Paris et atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. L’UE a un devoir d’attention et de protection envers ses citoyens et doit protéger leurs droits à la vie, à la santé, au travail et à la propriété. Tout en préparant notre dossier juridique, nous avons travaillé avec des scientifiques qui ont prouvé que l’UE peut faire beaucoup plus que son objectif actuel de réduction des émissions de 40 %. Aujourd’hui, sur la base des données scientifiques les plus récentes, l’UE devrait parvenir à une réduction d’au moins 65 % de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.

    Dans notre cas, nous avons uni nos forces à celles de deux courageuses familles plaignantes extra-européennes : la famille Guyo du nord du Kenya et la famille Qaloibau de l’île de Vanua Levu aux Fidji. Elles ont rejoint notre quête de justice climatique pour rappeler aux tribunaux que les politiques de l’UE ont des conséquences non seulement pour l’Europe mais aussi en dehors des frontières européennes.

    Depuis plus de deux ans, nous attendons d’être entendus par les tribunaux de l’UE pour savoir si les citoyen-nes touché-es par la crise climatique peuvent contester l’UE pour son faible objectif climatique. Alors que la procédure juridique est en cours, nous voulons vous rappeler, à vous nos représentants élus, que vous avez le devoir historique de renforcer votre ambition climatique sans avoir besoin d’une décision de justice.

    Le 6 octobre, en tant que membres du Parlement européen, vous avez l’occasion de vous exprimer sur ces deux points lors de votre vote sur la loi européenne sur le climat. Nous vous invitons à vous aligner sur la science et sur l’appel de Jytte Guteland en faveur d’une ambition accrue de réduction des émissions de 65% d’ici 2030, ainsi qu’à soutenir l’accès des citoyens à la justice. Il est temps pour vous de prendre position contre le changement climatique et d’être du bon côté de l’histoire.

    Avec nos salutations distinguées,  

    Signataires de la lettre – Plaignant-es du People’s Climate Case :

    • Sanna Vannar, présidente de l’association Sáminuorra, Suède (représentante des jeunes Samis)
    • Maurice and Renaud Feschet, agriculteurs, France
    • RobanWako Guyo Guyo and Dima, éleveurs, Kenya
    • Maike and Michael Recktenwald, propriétaires d’un hôtel-restaurant, Allemagne
    • Vlad Petru, berger, Roumanie
    • Armando Carvalho, garde forestier, Portugal
    • Alfredo Sendim, agriculteur, Portugal
    • Ildebrando Conceição, apiculteur, Portugal
    • Joaquim Caixeiro, agriculteur, Portugal
    • Giorgio Elter, agriculteur et propriétaire d’un hôtel, Italie
  • CP / Joyeux anniversaire Lubrizol : l’adoption de la loi ASAP

    Communiqué de presse, 23 septembre 2020

    Mercredi 23 septembre, le gouvernement a adopté la loi ASAP (loi d’accélération et de simplication de l’action publique) qui porte un coup supplémentaire au droit de l’environnement concernant notamment les sites industriels. Ignorant le fait que la catastrophe de Lubrizol a fait naître un sentiment d’insécurité vis à vis des installations classés, le gouvernement fête cet anniversaire en diminuant, encore un peu plus, les procédures protectrices au profit de la productivité industrielle.

    Lubrizol : rappel des faits

    Entre le 26 et 27 septembre 2019, 10 000 tonnes de produits chimiques avaient brûlé sur le site de l’usine chimique Lubrizol et sur celui de son voisin, Normandie Logistique. Un nuage de fumée noire de 22 km de long s’était formé. L’incendie n’avait pas fait de blessé, mais les conséquences à long terme sur la santé et l’environnement restent extrêmement incertaines.
     
    Quelques jours auparavant, le 23 septembre 2019, le rapporteur de la commission spéciale sur la loi ASAP, Guillaum Kasbarian, député LREM d’Eure-et-Loir, remettait au gouvernement un Pacte productif proposant des chantiers pour simplifier et accélérer les installations industrielles. Ce rapport prévoyait notamment :

    • De sécuriser les porteurs de projet notamment face aux changements réglementaires en cours de procédure, d’anticiper les procédures en mettant à disposition des entreprises des « sites industriels clés en main ».
    • D’accélérer les délais au cas par cas en tenant compte de la réalité des territoires, et d’accorder plus de pouvoir au préfet en matière industrielle pour qu’il pilote les procédures et assure la coordination des administrations.

    Malgré cette catastrophe qui a eu lieu dans les quelques jours suivant ce rapport, cela n’a aucunement remis en cause cette volonté de moins informer, de moins évaluer afin d’industrialiser plus, et en moins de temps. Le gouvernement a donc choisi de ne pas renoncer au pacte productif au profit des industriels, et au détriment de notre santé.

    La loi ASAP et les sites industriels “clés en main”

    Le procédé de sites industriels “clés en main”, annoncé au sommet Choose France en janvier 2020 et réaffirmé par communiqué de presse le 20 juillet 2020 désigne 78 sites pour lesquelles certaines procédures environnementales pourront être simplifiées, accélérées et purgées de délais. Cette démarche se simplifie avec les dispositions de la loi ASAP, autre volet de ce pacte productif, qui sera votée dans les prochains jours par l’Assemblée Nationale.
     
    La loi ASAP traite notamment des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE). Les dispositions de cette loi portent atteinte au principe de participation du public en offrant une possibilité élargie de procéder à des consultations par voie électronique plutôt qu’à des enquêtes publiques telles que nous les connaissons.
     
    Cette loi ouvre la possibilité d’entamer les travaux sur décision du préfet alors que l’autorisation environnementale n’a pas encore été obtenue. Cette autorisation environnementale pourra maintenant être facilement “transférée” du pétitionnaire vers un autre maître d’ouvrage. Dès lors, les maîtres d’ouvrage pourront se voir dispensés d’obtenir certaines autorisations et donc pour commencer leur activité sans délais, au risque que celle ci ne soit pas adaptée à l’installation exploitée. Enfin, l’avis de la commission consultative en matière de risques technologiques se voit supprimé pour certaines installations.

    Pour Chloé Gerbier, juriste de Notre Affaire à Tous “Un an après la catastrophe de Lubrizol, quelques mois après celle de Beyrouth, et en pleine crise sanitaire due à une zoonose, le gouvernement n’a rien appris et diminue les protections relatives aux installations industrielles d’une part et à la protection de l’environnement d’autre part, et cela au profit, évidemment, du secteur industriel et de la relance économique”

    Contact presse

    • Chloé Gerbier, Notre Affaire à Tous : 06 46 43 55 09
  • Mise en demeure de Casino

    Notre Affaire à Tous, en partenariat avec une coalition internationale d’associations (Canopée, CPT, Envol Vert, Mighty Earth et Sherpa) et d’organisations représentatives des peuples autochtones de Colombie et du Brésil (OPIAC, COIAB, FEPIPA et FEPOIMT) met en demeure le groupe Casino de prendre les mesures nécessaires pour exclure le boeuf issu de la déforestation et l’accaparement de territoires autochtones de sa chaîne d’approvisionnement au Brésil et en Colombie.

    L’élevage bovin est la cause principale de la déforestation de l’Amazonie

    Selon les données de l’INPE (Institut national de recherche spatiale brésilien), sur la période d’août 2019 à juillet 2020, qui est la référence pour observer l’évolution de la déforestation, 9216 km2 ont été déboisés en Amazonie brésilienne, soit 34,5 % de plus que la période précédente. L’élevage bovin en est la principale cause. Les enquêtes menées depuis près de 10 ans ne cessent de pointer la responsabilité des abattoirs et des distributeurs. Non seulement ils s’approvisionnent régulièrement en viande bovine provenant de zones récemment déforestées mais ils ferment les yeux sur les pratiques de “blanchiment de bétail” visant à contourner la législation brésilienne. Ces pratiques permettent à des exploitations responsables de crimes environnementaux de vendre leurs bœufs en toute impunité.

    De la viande issue de la déforestation dans les supermarchés Casino au Brésil

    Le groupe Casino est le leader de la distribution au Brésil à travers sa filiale “Grupo Pão de Açúcar”. Il y représente 15% des parts du marché, et près de la moitié du chiffre d’affaires mondial du groupe (47%) se fait sur le marché latino-américain. En juin 2020, l’association Envol Vert publiait une enquête accablante, mettant en évidence des preuves de déforestation récente et de pratiques d’accaparement de terres menée à partir d’échantillons de produits carnés vendus dans plusieurs supermarchés du groupe Casino au Brésil.

    « Ces enquêtes démontrent l’existence de liens entre plusieurs fermes impliquées dans la déforestation illégale et des produits vendus dans les supermarchés du groupe Casino. A elles seules, ces fermes représentent 4497 hectares de déforestation. »

    Boris Patentreger, fondateur de l’association Envol Vert

    Casino en violation de son devoir de vigilance ?

    Depuis 2017, le Groupe Casino est pourtant soumis à la loi française sur le devoir de vigilance qui lui impose de prendre des mesures adaptées pour prévenir les atteintes graves aux droits humains, à l’environnement et à la santé et sécurité des personnes résultant de ses activités, de celles de ses filiales, fournisseurs et sous-traitants. Alors que le groupe Casino reconnaît explicitement que la chaîne d’approvisionnement en viande bovine au Brésil est exposée à des risques extrêmement graves, sa politique en la matière est manifestement défaillante. Le seul fait que Casino déclare dans son plan de vigilance que 100% de ses fournisseurs ont adhéré à sa politique sur la déforestation, alors que l’implication de ces mêmes fournisseurs dans la déforestation est régulièrement dénoncée, démontre que cette politique est soit inadaptée, soit non mise en oeuvre, soit les deux.

    Casino achète du bœuf à des fournisseurs comme JBS, l’une des pires entreprises internationales en ce qui concerne la déforestation – et la plus grande entreprise de viande au monde. JBS est devenu célèbre pour sa corruption grâce au scandale « Lava Jato » (lavage express) ainsi que son implication dans l’esclavage moderne, la déforestation, les incendies en Amazonie, et l’accaparement des terres autochtones. Cependant, grâce à la nouvelle loi française, Casino doit enfin assumer une réelle responsabilité envers JBS et tous ses autres fournisseurs de viande responsables de déforestation et des violations des droits humains. En effet, tous les supermarchés français sont désormais avertis : nous avons l’intention de les tenir responsables du respect de la loi.

    Il s’agit d’une action historique contre le groupe Casino, fondée sur une loi pionnière qui permettra au juge français de prescrire les mesures qui s’imposent pour enrayer la destruction de l’Amazonie par des compagnies françaises et réparer les préjudices subis.

    Il est nécessaire que les grandes entreprises telle que Casino prennent toute la mesure de la portée de la loi sur le devoir de vigilance qui leur impose de prendre les mesures concrètes visant à prévenir les risques au droits humains, à l’environnement et à la santé, et non pas de se contenter de les identifier de manière formelle dans un document. »

    Célia Jouayed, Notre Affaire à Tous

    OPIAC, COIAB, FEPIPA, FEPOIMT, CPT, Canopée, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa demandent formellement au groupe Casino de respecter ses obligations légales en prenant les mesures nécessaires pour exclure tout le bœuf issu de la déforestation de sa chaîne d’approvisionnement. Si l’entreprise ne se met pas en conformité dans un délai de 3 mois prévu par la loi, les organisations entendent saisir la juridiction compétente.

    Casino et la déforestation au Brésil

    Depuis plus de 10 ans, les organisations brésiliennes alertent sur les multiples atteintes à l’environnement et aux droits humains causées par l’élevage bovin au Brésil : déforestation, accaparement de territoires indigènes, travail forcé. 

    Depuis, les autorités judiciaires brésiliennes ont conclu des accords avec certains des producteurs de viande brésiliens – au premier rang desquels JBS, Marfrig, et Minerva – pour sanctionner les abattoirs s’approvisionnant auprès d’exploitations responsables de telles atteintes.

    Mais les contrôles des abattoirs sont insuffisants et ne concernent que les fermes leur vendant directement de la viande, sans traçabilité. Les pratiques de “blanchiment de bétail” se sont développées – multipliant les intermédiaires entre les fermes et les abattoirs. La déforestation causée par l’élevage a repris de plus belle ces dernières années, incitée par l’impunité en la matière depuis l’arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro.

    Casino contrôle les supermarchés appartenant au Grupo Pao de Açucar (GPA) au Brésil. Le marché latino-américain représente près de la moitié du chiffre d’affaires mondial du groupe (47%).

    En juin dernier, Envol Vert a publié une enquête menée sur un simple échantillon de viandes vendues en rayon de magasins contrôlés par GPA, révélant qu’une partie provenait d’exploitations ayant contribué à la déforestation illégale ou installées sur le territoire indigène Apyterewa. Depuis plusieurs années, les alertes concernant notamment JBS se multiplient.

    Casino s’est contenté, en réponse, de rappeler sa politique et de prôner le besoin de “définir des règles de contrôle communes entre tous les acteurs distributeurs fournisseurs, pouvoirs publics et société civile” se cachant derrière des processus qui piétinent depuis des années.

    La loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères

    Adoptée le 27 mars 2017, la loi sur le devoir de vigilance des sociétés-mères et entreprises donneuses d’ordre oblige les sociétés françaises concernées à établir, publier et mettre en oeuvre de manière effective un plan de vigilance. Les mesures de vigilance doivent être propres à identifier et à prévenir les risques d’atteintes graves aux droits humains et aux libertés fondamentales, à la santé et à la sécurité des personnes, et à l’environnement résultant de leurs activités mais aussi des activités de leurs filiales et fournisseurs à l’étranger.

    En cas de manquement à ces obligations, les entreprises peuvent être attraites en justice et se voir enjoindre de se mettre en conformité avec la loi, voire de réparer les préjudices découlant des fautes de vigilance.

    Nos demandes

    Nous mettons formellement en demeure le groupe Casino de se mettre en conformité avec la loi sur le devoir de vigilance concernant ses approvisionnements en boeuf au Brésil et en Colombie, et ce dans un délai de trois mois. Sans cela, nous nous réservons le droit de demander la réparation des préjudices subis du fait des manquements du groupe Casino à son devoir de vigilance.

    Nous demandons notamment à Casino :

    • D’établir une cartographie présentant, analysant et hiérarchisant les risques d’atteintes graves résultant de l’approvisionnement des filiales de Casino en Amérique du Sud en viande de bœuf, notamment au Brésil et en Colombie, régulièrement mise à jour pour tenir compte des pratiques observées dans la filière bovine (y compris les pratiques dites de « blanchiment de bétail »),
    • D’adopter des mesures d’évaluation de la situation des fournisseurs et des actions adaptées d’atténuation des risques et de prévention des atteintes graves, permettant d’exclure tout approvisionnement en viande de bœuf issue d’exploitations (zones d’approvisionnement et/ou fournisseurs) ayant contribué à la déforestation ou à la conversion d’écosystèmes (telles que définies par l’Accountability Framework Initiative), ayant eu recours au travail forcé ou à des conditions de travail dégradantes ou ayant porté atteinte aux droits des populations indigènes,
    • D’évaluer publiquement et régulièrement l’efficacité et l’effectivité des mesures de vigilance en s’appuyant sur des indicateurs de moyens et sur des indicateurs de résultat en y associant les parties prenantes externes.

    En savoir plus

  • CP / Le groupe Casino mis en demeure de ne plus vendre de boeuf issu de la déforestation au Brésil et en Colombie

    Une coalition internationale d’associations (Canopée, CPT, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa) et d’organisations représentatives des peuples autochtones de Colombie et du Brésil (OPIAC, COIAB, FEPIPA et FEPOIMT) met en demeure le groupe Casino de prendre les mesures nécessaires pour exclure le boeuf issu de la déforestation et l’accaparement de territoires autochtones de sa chaîne d’approvisionnement au Brésil et en Colombie. Elle se réserve également le droit de solliciter la réparation des préjudices qui en découlent. 

    L’élevage bovin est la cause principale de la déforestation de l’Amazonie Selon les données de l’INPE (Institut national de recherche spatiale brésilien), sur la période d’août 2019 à juillet 2020, qui est la référence pour observer l’évolution de la déforestation, 9216 km2 ont été déboisés en Amazonie brésilienne, soit 34,5 % de plus que la période précédente. L’élevage bovin en est la principale cause. Les enquêtes menées depuis près de 10 ans ne cessent de pointer la responsabilité des abattoirs et des distributeurs. Non seulement ils s’approvisionnent régulièrement en viande bovine provenant de zones récemment déforestées mais ils ferment les yeux sur les pratiques de “blanchiment de bétail” visant à contourner la législation brésilienne. Ces pratiques permettent à des exploitations responsables de crimes environnementaux de vendre leurs bœufs en toute impunité. 

    De la viande issue de la déforestation dans les supermarchés Casino au Brésil Le groupe Casino est le leader de la distribution au Brésil à travers sa filiale “Grupo Pão de Açúcar”. Il y représente 15% des parts du marché, et près de la moitié du chiffre d’affaires mondial du groupe (47%) se fait sur le marché latino-américain. En juin 2020, l’association Envol Vert publiait une enquête accablante, mettant en évidence des preuves de déforestation récente et de pratiques d’accaparement de terres menée à partir d’échantillons de produits carnés vendus dans plusieurs supermarchés du groupe Casino au Brésil. 

    Selon Boris Patentreger, fondateur de l’association, « Ces enquêtes démontrent l’existence de liens entre plusieurs fermes impliquées dans la déforestation illégale et des produits vendus dans les supermarchés du groupe Casino. A elles seules, ces fermes représentent 4497 hectares de déforestation ».

    Casino en violation de son devoir de vigilance ? Depuis 2017, le Groupe Casino est pourtant soumis à la loi française sur le devoir de vigilance qui lui impose de prendre des mesures adaptées pour prévenir les atteintes graves aux droits humains, à l’environnement et à la santé et sécurité des personnes résultant de ses activités, de celles de ses filiales, fournisseurs et sous-traitants. Alors que le groupe Casino reconnaît explicitement que la chaîne d’approvisionnement en viande bovine au Brésil est exposée à des risques extrêmement graves, sa politique en la matière est manifestement défaillante.

    Selon Sandra Cossart, de l’association Sherpa, « le seul fait que Casino déclare dans son plan de vigilance que 100% de ses fournisseurs ont adhéré à sa politique sur la déforestation, alors que l’implication de ces mêmes fournisseurs dans la déforestation est régulièrement dénoncée, démontre que cette politique est soit inadaptée, soit non mise en oeuvre, soit les deux ». 

    Etelle Higonnet, directrice de campagnes à Mighty Earth, ajoute: « Casino achète du bœuf à des fournisseurs comme JBS, l’une des pires entreprises internationales en ce qui concerne la déforestation – et la plus grande entreprise de viande au monde. JBS est devenu célèbre pour sa corruption grâce au scandale « Lava Jato » (lavage express) ainsi que son implication dans l’esclavage moderne, la déforestation, les incendies en Amazonie, et l’accaparement des terres autochtones. Cependant, grâce à la nouvelle loi française, Casino doit enfin assumer une réelle responsabilité envers JBS et tous ses autres fournisseurs de viande responsables de déforestation et des violations des droits humains. En effet, tous les supermarchés français sont désormais avertis : nous avons l’intention de les tenir responsables du respect de la loi ». 

    Pour Célia Jouayed, de l’association Notre Affaire à Tous, « il est nécessaire que les grandes entreprises telle que Casino prennent toute la mesure de la portée de la loi sur le devoir de vigilance qui leur impose de prendre les mesures concrètes visant à prévenir les risques au droits humains, à l’environnement et à la santé, et non pas de se contenter de les identifier de manière formelle dans un document. » Pour Me Sébastien Mabile et Me François de Cambiaire du cabinet Seattle, conseils des associations, « il s’agit d’une action historique contre le groupe Casino, fondée sur une loi pionnière qui permettra au juge français de prescrire les mesures qui s’imposent pour enrayer la destruction de l’Amazonie par des compagnies françaises et réparer les préjudices subis ». 

    OPIAC, COIAB, FEPIPA, FEPOIMT, CPT, Canopée, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa demandent formellement au groupe Casino de respecter ses obligations légales en prenant les mesures nécessaires pour exclure tout le bœuf issu de la déforestation de sa chaîne d’approvisionnement. Si l’entreprise ne se met pas en conformité dans un délai de 3 mois prévu par la loi, les organisations entendent saisir la juridiction compétente.

    Casino et la déforestation au Brésil

    Depuis plus de 10 ans, les organisations brésiliennes alertent sur les multiples atteintes à l’environnement et aux droits humains causées par l’élevage bovin au Brésil : déforestation, accaparement de territoires indigènes, travail forcé. 

    Depuis, les autorités judiciaires brésiliennes ont conclu des accords avec certains des producteurs de viande brésiliens – au premier rang desquels JBS, Marfrig, et Minerva – pour sanctionner les abattoirs s’approvisionnant auprès d’exploitations responsables de telles atteintes.

    Mais les contrôles des abattoirs sont insuffisants et ne concernent que les fermes leur vendant directement de la viande, sans traçabilité. Les pratiques de “blanchiment de bétail” se sont développées – multipliant les intermédiaires entre les fermes et les abattoirs. La déforestation causée par l’élevage a repris de plus belle ces dernières années, incitée par l’impunité en la matière depuis l’arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro.

    Casino contrôle les supermarchés appartenant au Grupo Pao de Açucar (GPA) au Brésil. Le marché latino-américain représente près de la moitié du chiffre d’affaires mondial du groupe (47%).

    En juin dernier, Envol Vert a publié une enquête menée sur un simple échantillon de viandes vendues en rayon de magasins contrôlés par GPA, révélant qu’une partie provenait d’exploitations ayant contribué à la déforestation illégale ou installées sur le territoire indigène Apyterewa. Depuis plusieurs années, les alertes concernant notamment JBS se multiplient.

    Casino s’est contenté, en réponse, de rappeler sa politique et de prôner le besoin de “définir des règles de contrôle communes entre tous les acteurs distributeurs fournisseurs, pouvoirs publics et société civile” se cachant derrière des processus qui piétinent depuis des années.

    La loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères

    Adoptée le 27 mars 2017, la loi sur le devoir de vigilance des sociétés-mères et entreprises donneuses d’ordre oblige les sociétés françaises concernées à établir, publier et mettre en oeuvre de manière effective un plan de vigilance. Les mesures de vigilance doivent être propres à identifier et à prévenir les risques d’atteintes graves aux droits humains et aux libertés fondamentales, à la santé et à la sécurité des personnes, et à l’environnement résultant de leurs activités mais aussi des activités de leurs filiales et fournisseurs à l’étranger.

    En cas de manquement à ces obligations, les entreprises peuvent être attraites en justice et se voir enjoindre de se mettre en conformité avec la loi, voire de réparer les préjudices découlant des fautes de vigilance.

    Nos demandes

    Nos organisations mettent formellement en demeure le groupe Casino de se mettre en conformité avec la loi sur le devoir de vigilance concernant ses approvisionnements en boeuf au Brésil et en Colombie, et ce dans un délai de trois mois.

    Elles demandent notamment à Casino :

    • D’établir une cartographie présentant, analysant et hiérarchisant les risques d’atteintes graves résultant de l’approvisionnement des filiales de Casino en Amérique du Sud en viande de bœuf, notamment au Brésil et en Colombie, régulièrement mise à jour pour tenir compte des pratiques observées dans la filière bovine (y compris les pratiques dites de « blanchiment de bétail »),
    • D’adopter des mesures d’évaluation de la situation des fournisseurs et des actions adaptées d’atténuation des risques et de prévention des atteintes graves, permettant d’exclure tout approvisionnement en viande de bœuf issue d’exploitations (zones d’approvisionnement et/ou fournisseurs) ayant contribué à la déforestation ou à la conversion d’écosystèmes (telles que définies par l’Accountability Framework Initiative), ayant eu recours au travail forcé ou à des conditions de travail dégradantes ou ayant porté atteinte aux droits des populations indigènes,
    • D’évaluer publiquement et régulièrement l’efficacité et l’effectivité des mesures de vigilance en s’appuyant sur des indicateurs de moyens et sur des indicateurs de résultat en y associant les parties prenantes externes.

    Elles se réservent le droit de demander la réparation des préjudices subis du fait des manquements du groupe Casino à son devoir de vigilance.

    Les organisations signataires

    • Canopée est une nouvelle organisation fondée en 2018 qui émerge du besoin critique de construire un contre-pouvoir citoyen pour mieux protéger les forêts en France et dans le monde. Nous sommes une association lanceuse d’alerte qui dénonce les menaces pesant sur les forêts. Nous ne nous contentons pas de dénoncer, ce que nous voulons, c’est agir à la racine des problèmes en produisant une contre-expertise de qualité et en la portant dans l’espace public. Canopée est membre des Amis de la Terre France et du collectif SOS Forêt.
    • Envol Vert agit pour la préservation de la forêt et de la biodiversité en Amérique Latine (principalement Colombie et Pérou) et en France. Depuis 2011, nous développons des projets de terrain concrets et efficaces qui incluent la reforestation d’aires dégradées, le développement de l’agroforesterie et d’alternatives à la coupe illégale comme l’écotourisme, le développement de réserves naturelles, la sauvegarde ou la réintroduction d’espèces.  Envol Vert mène également des campagnes de communication et des actions de sensibilisation afin d’inciter les entreprises et les citoyens à changer leurs modes de production et/ou de consommation. 
    • Mighty Earth est une organisation américaine de plaidoyer qui œuvre pour la protection des forêts tropicales, des océans et du climat. Nous aspirons à être l’organisation environnementale la plus efficace à l’internationale. Nos campagnes et notre équipe ont joué un rôle de premier plan en persuadant les plus grandes entreprises mondiales du secteur de l’alimentation et de l’agriculture d’adopter des politiques visant à éliminer la déforestation et les atteintes aux droits de l’homme de leurs chaînes d’approvisionnement, et ont conduit à l’adoption de transferts de plusieurs milliards de dollars vers l’énergie propre. 
    • Notre Affaire à Tous  est une association qui oeuvre pour protéger le vivant, les communs naturels et le climat via l’utilisation du droit. Issu-es du mouvement pour la reconnaissance du crime d’écocide dans le droit international afin de sanctionner les crimes les plus graves contre l’environnement et à l’origine de l’Affaire du Siècle, les membres de Notre Affaire à Tous se positionnent comme « avocat-es de la planète », en cherchant à établir par la jurisprudence, le plaidoyer juridique et la mobilisation citoyenne une responsabilité effective et objective de l’humain vis-à-vis de l’environnement.
    • OPIAC (Organización Nacional de los Pueblos Indígenas de la Amazonia Colombiana) est une institution colombienne à caractère spécial autochtone sans but lucratif qui exerce la représentation politique des peuples indigènes de l’Amazonie colombienne devant les institutions nationales et internationales. Son principal objectif est de faire en sorte que tous les droits collectifs et individuels de ses membres soient respectés et reconnus par tous les acteurs situés dans la région de l’Amazonie colombienne.
    • Sherpa est une association créée en 2001 qui a pour mission de combattre les nouvelles formes d’impunité liées à la mondialisation et de défendre les communautés victimes de crimes économiques. Sherpa œuvre pour mettre le droit au service d’une mondialisation plus juste. L’action de l’association repose sur quatre outils interdépendants que sont la recherche, le contentieux, le plaidoyer et le renforcement de capacités. Ces actions sont menées par une équipe de juristes et d’avocats. Les activités de Sherpa ont contribué à l’indemnisation de communautés affectées par des crimes économiques, à des décisions judiciaires historiques à l’égard de multinationales et de leurs dirigeants et à des politiques législatives inédites.
    • OPIAC (Organisation Nationale des Peuples Autochtones de l’Amazonie Colombienne) est une institution autochtone colombienne, une organisation à but non lucratif qui exerce une représentation politique des peuples autochtones de l’Amazonie colombienne devant les institutions nationales et internationales. Son objectif principal est de faire en sorte que tous les droits collectifs et individuels de ses membres soient respectés et reconnus par tous les acteurs situés dans la région amazonienne colombienne. 
    • La Commission Pastorale de la Terre (CPT), créée en 1975, est rattachée à la Conférence nationale des évêques du Brésil (CNBB). Elle est engagée sur l’enjeu crucial du partage de la terre et contre la destruction de l’environnement. Ses équipes locales sont présentes dans chacun des Etats du Brésil, accompagnant à la base communautés et groupes en lutte, joignant sa voix aux leurs, dénonçant injustices, violences, discrimination, travail esclave. 
    • COIAB (Coordination des organisations autochtones de l’Amazonie brésilienne) fondée le 19 avril 1989, est la plus grande organisation autochtone régionale du Brésil, qui a émergé à l’initiative des dirigeants des organisations autochtones. La mission du COIAB est de défendre les droits des peuples autochtones à la terre, à la santé, à l’éducation, à la culture et à la durabilité, en tenant compte de la diversité des peuples et en recherchant leur autonomie à travers l’articulation politique et le renforcement des organisation autochtones.
    • FEPIPA (Fédération des Peuples Autochtones du Pará) fondée en avril 2016, est une organisation autochtone, créée pour promouvoir le bien-être social, politique, économique et culturel et les droits de l’homme des peuples autochtones. Elle vise à défendre et à discuter des intérêts collectifs des peuples et communautés autochtones de l’État de Pará, en promouvant leur organisation sociale, culturelle, économique et politique, en renforçant leur autonomie.
    • FEPOIMT (Fédération des Peuples Autochtones du Mato Grosso) créée en juin 2016 est née de la nécessité de s’unir pour l’action et l’articulation politiques, visant à l’organisation sociale, culturelle, économique et au développement durable et politique des peuples et organisations autochtones du Mato Grosso. Ses principaux défis sont la garantie et la régularisation des terres, la gestion de l’environnement, la protection du territoire et la lutte pour les droits des autochtones.

    Le cabinet d’avocat les accompagnant 

    Seattle Avocats est un cabinet d’avocat spécialisé sur les question de responsabilité des entreprises du fait d’atteintes à l’environnement et aux droits humains. Monsieur Sébastien Mabile et Monsieur François de Cambiaire représentent des ONGs et des collectivités dans le cadre des premières actions introduites sur le fondement de la loi devoir de vigilance des entreprises, notamment contre Total et contre le groupe de transport XPO Logistics, et s’intéressent en particulier aux débats en cours au niveau international et européen sur la responsabilité sociale et pénale des multinationales. S’agissant de dommages particulièrement graves à l’environnement ayant des conséquences tout aussi graves sur les droits des populations autochtones, le cabinet Seattle Avocats apporte son soutien et ses compétences à la coalition internationale d’associations qui mettent en demeure le groupe Casino de se conformer à la loi sur le devoir de vigilance.

  • CP / Le groupe Casino mis en demeure de ne plus vendre de boeuf issu de la déforestation au Brésil et en Colombie

    Lundi 21 septembre 2020

    Une coalition internationale d’associations (Canopée, CPT, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa) et d’organisations représentatives des peuples autochtones de Colombie et du Brésil (OPIAC, COIAB, FEPIPA et FEPOIMT) met en demeure le groupe Casino de prendre les mesures nécessaires pour exclure le boeuf issu de la déforestation et l’accaparement de territoires autochtones de sa chaîne d’approvisionnement au Brésil et en Colombie. Elle se réserve également le droit de solliciter la réparation des préjudices qui en découlent. 

    L’élevage bovin est la cause principale de la déforestation en Amazonie

    Selon les données de l’INPE (Institut national de recherche spatiale brésilien), sur la période d’août 2019 à juillet 2020, qui est la référence pour observer l’évolution de la déforestation, 9216 km2 ont été déboisés en Amazonie brésilienne, soit 34,5 % de plus que la période précédente.
     
    L’élevage bovin en est la principale cause. Les enquêtes menées depuis près de 10 ans ne cessent de pointer la responsabilité des abattoirs et des distributeurs. Non seulement ils s’approvisionnent régulièrement en viande bovine provenant de zones récemment déforestées mais ils ferment les yeux sur les pratiques de “blanchiment de bétail” visant à contourner la législation brésilienne. Ces pratiques permettent à des exploitations responsables de crimes environnementaux de vendre leurs bœufs en toute impunité.

    De la viande issue de la déforestation dans les supermarchés Casino au Brésil

    Le groupe Casino est le leader de la distribution au Brésil à travers sa filiale “Grupo Pão de Açúcar”. Il y représente 15% des parts du marché, et près de la moitié du chiffre d’affaires mondial du groupe (47%) se fait sur le marché latino-américain.
     
    En juin 2020, l’association Envol Vert publiait une enquête accablante, mettant en évidence des preuves de déforestation récente et de pratiques d’accaparement de terres menée à partir d’échantillons de produits carnés vendus dans plusieurs supermarchés du groupe Casino au Brésil.

    Selon Boris Patentreger, fondateur d’Envol Vert, « Ces enquêtes démontrent l’existence de liens entre plusieurs fermes impliquées dans la déforestation illégale et des produits vendus dans les supermarchés du groupe Casino. A elles seules, ces fermes représentent 4497 hectares de déforestation ».

    Casino, en violation de son devoir de vigilance ?

    Depuis 2017, le Groupe Casino est pourtant soumis à la loi française sur le devoir de vigilance qui lui impose de prendre des mesures adaptées pour prévenir les atteintes graves aux droits humains, à l’environnement et à la santé et sécurité des personnes résultant de ses activités, de celles de ses filiales, fournisseurs et sous-traitants. Alors que le groupe Casino reconnaît explicitement que la chaîne d’approvisionnement en viande bovine au Brésil est exposée à des risques extrêmement graves, sa politique en la matière est manifestement défaillante.

    Selon Sandra Cossart, de l’association Sherpa, « le seul fait que Casino déclare dans son plan de vigilance que 100% de ses fournisseurs ont adhéré à sa politique sur la déforestation, alors que l’implication de ces mêmes fournisseurs dans la déforestation est régulièrement dénoncée, démontre que cette politique est soit inadaptée, soit non mise en oeuvre, soit les deux ».

    Etelle Higonnet, directrice de campagnes à Mighty Earth, ajoute: « Casino achète du bœuf à des fournisseurs comme JBS, l’une des pires entreprises internationales en ce qui concerne la déforestation – et la plus grande entreprise de viande au monde. JBS est devenu célèbre pour sa corruption grâce au scandale « Lava Jato » (lavage express) ainsi que son implication dans l’esclavage moderne, la déforestation, les incendies en Amazonie, et l’accaparement des terres autochtones. Cependant, grâce à la nouvelle loi française, Casino doit enfin assumer une réelle responsabilité envers JBS et tous ses autres fournisseurs de viande responsables de déforestation et des violations des droits humains. En effet, tous les supermarchés français sont désormais avertis : nous avons l’intention de les tenir responsables du respect de la loi ».

    Pour Célia Jouayed, de l’association Notre Affaire à Tous, « il est nécessaire que les grandes entreprises telle que Casino prennent toute la mesure de la portée de la loi sur le devoir de vigilance qui leur impose de prendre les mesures concrètes visant à prévenir les risques au droits humains, à l’environnement et à la santé, et non pas de se contenter de les identifier de manière formelle dans un document ».

    Pour Me Sébastien Mabile et Me François de Cambiaire du cabinet Seattle, conseils des associations, « il s’agit d’une action historique contre le groupe Casino, fondée sur une loi pionnière qui permettra au juge français de prescrire les mesures qui s’imposent pour enrayer la destruction de l’Amazonie par des compagnies françaises et réparer les préjudices subis. »

    OPIAC, COIAB, FEPIPA, FEPOIMT, CPT, Canopée, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa demandent formellement au groupe Casino de respecter ses obligations légales en prenant les mesures nécessaires pour exclure tout le bœuf issu de la déforestation de sa chaîne d’approvisionnement. Si l’entreprise ne se met pas en conformité dans un délai de 3 mois prévu par la loi, les organisations entendent saisir la juridiction compétente.

    Contacts presse :

    • Envol Vert :
      • Audrey Benard / communication@envol-vert.org / 06 81 25 48 64
      • Boris Patentreger / bpatentreger@envol-vert.org / 07 76 07 44 19
    • Mighty Earth : 
      • Sébastien Mabile / smabile@seattle-avocats.fr / 06 62 65 35
        Etelle Higonnet / etelle@mightyearth.org / +1 202 848 7792
    • Notre Affaire à Tous 
      • Cécilia Rinaudo / cecilia.rinaudo@notreaffaireatous.org / 06 86 41 71 81
    • Sherpa :
      • Lucie Chatelain / lucie.chatelain@asso-sherpa.org / 06 47 11 65 06
    • Seattle Avocats
      • François de Cambiaire / fdecambiaire@seattle-avocats.fr
      • Sébastien Mabile / smabile@seattle-avocats.fr / 06 62 65 35
  • CP / 66 sites clés en main : Notre Affaire à Tous demande au Conseil d’Etat d’annuler le dispositif

    Communiqué de presse – 17 septembre

    Jeudi 17 septembre, Notre Affaire à Tous dépose un recours contre 66 nouveaux sites “clés en main” annoncés par le gouvernement le 20 juillet 2020. Sur ces sites, censés concrétiser un nébuleux “pack rebond”, le gouvernement annonce par un communiqué de presse que « les procédures et études relatives à l’urbanisme, l’archéologie préventive et l’environnement y ont été au maximum anticipées ». Un tel mécanisme menace les procédures environnementales et affaibli, une fois encore, le droit de l’environnement au profit de la relance économique.

    Un site clé en main est un site où les procédures ont été effectuées avant la désignation du maître d’ouvrage, ainsi qu’annoncé fièrement par le gouvernement. Le procédé permet donc d’accélérer les procédures et d’obtenir le permis en trois mois. Mais cet arrangement avec les procédures relève avant tout de la création d’une dérogation portant une profonde atteinte aux droits à l’information et à la participation du public et qui n’est pas aussi protectrice de l’environnement que le gouvernement semble l’affirmer.

    En effet, dans le cas de ces sites “clés en main”, cela signifie que l’étude d’impact “faune et flore” et l’enquête publique sur le site sont effectuées bien en amont de la désignation du maître d’ouvrage, alors que le projet est à ce moment encore très flou, voir inexistant. Malgré les prescriptions législatives concernant l’étude d’impact, celle-ci est réalisée alors qu’il est bien difficile d’établir quelles seront les conséquences du projet dans son ensemble sur l’environnement, la santé ou le cadre de vie.

    Pourtant, l’article R122-5 du code de l’environnement alinéa 5° prescrit “une description des incidences notables que le projet est susceptible d’avoir sur l’environnement”, cette analyse résultant notamment de la construction du projet, de l’utilisation des ressources en phase de fonctionnement, des émissions de polluants et des risques pour la santé humaine. Les alinéas 8 et 9 du même article imposent aussi la prévision de mesures afin d’éviter, de réduire, et de compenser les impacts du projet sur l’environnement. Dès lors, ces sites clés en main posent plusieurs questions : d’une part comment peut-on juger des impacts sur l’environnement sans connaître les projets qui viendront à s’implanter sur les sites ? Et d’autre part comment s’assurer du suivi et de l’exécution des mesures de compensation alors qu’il s’agit de mesures auxquelles l’Etat s’engage tout en sachant pertinemment qu’il n’en sera pas l’exécutant sur le long terme ?

    De la même façon, l’enquête publique invite les citoyens au plus proche du projet à se prononcer mais (comme le démontre l’enquête autour du projet du Carnet) les participants ne peuvent pas se faire une idée claire du ou des projets qui prendront place sur le site.

    Enfin nous pouvons, de manière plus générale douter de la compatibilité avec la SNBC d’un pack rebond en faveur de l’industrie.

    Pour Chloé Gerbier juriste de Notre Affaire à Tous : “Il n’est pas du ressort du gouvernement de porter atteinte au droit de l’environnement par un simple communiqué de presse. Cette simplification des procédures et délais au profit des industriels se réalise manifestement au détriment des citoyens et de l’environnement”.

    Contact presse

    • Chloé Gerbier : 06 46 43 55 09 – gerbierchloe@gmail.com

    Historique des sites "clés en main"

    En janvier dernier le Président annonçait d’ores-et-déjà la concrétisation de 12 de ces sites clé en main, lors du sommet Choose France L’association Notre Affaire à Tous apporte son soutien juridique à des collectifs en lutte contre les projets imposés et polluants. Deux collectifs en lutte contre des projets “clé en main” ont contacté l’association : Stop Carnet, qui s’oppose au projet menaçant près de 200 he de zones humides et un collectif de particuliers opposés au projet d’usine Clarebout visant une production industrielle de produits surgelés à base de pomme de terre. Le projet Carnet fait déjà l’objet d’une étude d’impact en 2017 alors qu’aucun maître d’ouvrage n‘est encore désigné. Les travaux de compensation permettant l’aménagement (une dalle de béton) ont commencé alors que les projets qui prendront place sur celui-ci sont encore inconnus. Les opposants au projet réunis au sein du collectif Stop Carnet n’ont de cesse de rappeler le flou et l’incohérence d’un site industriel construit d’un bloc sur un tel réservoir de biodiversité et l’autorité environnementale elle-même questionne la localisation dans son avis concernant le projet. Le 20 juillet 2020 ce sont 66 sites de plus qui sont ajoutés à l’annonce du pack rebond. 

  • Numéro 8 de la newsletter des affaires climatiques – Droits de la nature et droits humains

    Pour le huitième numéro de la newsletter des affaires climatiques, Notre Affaire à Tous fait un focus sur ce qu’impliquerait pour les droits humains, de protéger les droits de la nature ! La protection des droits de la nature doit-elle se faire au détriment de la protection des droits humains ? Ou, finalement, est-ce que cette nouvelle protection ne permet pas d’accroître la protection de l’ensemble des droits fondamentaux attachés à la personne humaine ? 

    Nous vous proposons ensuite un tour des affaires climatiques récentesMalgré la pandémie, les recours juridiques climatiques et environnementaux n’ont pas faibli. Aux Etats-Unis, des batailles ont été gagnées contre la construction d’oléoducs visant à transporter du gaz de schiste. En Europe, des citoyens du Royaume-Uni, de l’Irlande et de la Suisse encouragent, par leurs recours, les juges à prendre position sur la question de la carence des Etats en matière de lutte contre la crise climatique ! Enfin, nous brossons un panorama des avancées de la France en matière de contentieux environnementaux : ces dernières semaines, deux tribunaux se sont prononcés sur des atteintes à l’environnement constitutives d’un préjudice écologique. Le Conseil d’Etat a aussi ordonné au gouvernement d’adopter des mesures afin de réduire la pollution de l’air sous astreinte et la société Lubrizol a été mise en examen pour “atteinte grave à l’environnement”. Preuve que l’outil juridique peut être un moyen efficace de lutte pour la protection de l’environnement. 

    Sandy Cassan-Barnel

    Focus – La confrontation des droits de la nature et des droits humains

    Reconnaître des droits à la Nature interroge notre rapport au monde. En effet, l’Homme moderne occidental, « maître et possesseur de la nature » l’apprivoise et la soumet pour l’exploiter. A cet état de fait, le droit de l’environnement oppose une autre vision du rapport de l’Homme à la Nature qui permet de corriger les abus de son exploitation par des garanties et protections. 

    En France, l’intégration de la Charte de l’environnement dans le bloc de constitutionnalité en 2004 et la création du préjudice écologique dans le Code civil reflètent cette « préoccupation environnementale ». Par ailleurs, la qualification juridique des biens environnementaux nourrit les réflexions doctrinales. Objet extérieur aux personnes, les entités naturelles ne sont pas non plus des choses. Leur qualification semble donc changer selon la façon dont l’Homme souhaite en disposer. S’il peut exercer son droit de propriété sur certaines choses, il en va différemment lorsque ces entités sont « protégées » par le droit de l’environnement. Dans la perspective française, les « biens communs » bénéficient ainsi d’une protection disparate, non unifiée. Ils ne sont qu’une partie d’un tout, jamais envisagés en tant que détenteurs de droits liés à leur valeur intrinsèque. 

    Pourtant, le dérèglement climatique, les catastrophes environnementales répétées, les conséquences manifestes de la surproduction et la surconsommation sont autant de signaux qui incitent à repenser cette construction juridique anthropo-centrée. Aussi, l’émergence de droits de la nature compris comme un « ensemble de règles reconnaissant et protégeant, au titre leur valeur intrinsèque, les entités naturelles et écosystèmes en tant que membres interdépendants de la communauté indivisible de la vie » révèle-t-elle ce changement de paradigme. Ainsi, il ne s’agit plus de considérer la Nature comme objet mais bien comme sujet de droit autonome, au-delà de ce que permet aujourd’hui le droit de l’environnement. Cette modification radicale de notre relation au monde sape la conception jusnaturaliste du droit qui sacralise l’universalité et l’inaliénabilité des droits humains. En effet, les droits humains sont des droits naturels qui font de l’Homme le fondement et le sujet primordial de notre système de droits et de garanties des droits. Cet édifice juridique ne peut être détaché d’une certaine dimension politique et économique des rapports de l’Homme en société et dans son environnement.

    Affaires climatiques internationales

    Friends of the Irish Environment v. Ireland – 31 juillet 2020

    En 2017, l’association Friends of the Irish Environment (FIE) a déposé un recours contre le plan national d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre (GES) du gouvernement irlandais au motif qu’il entrerait en violation de la loi sur l’action climatique de 2015 mais aussi de la Constitution irlandaise et de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), en particulier des droits à la vie, à l’intégrité physique et au respect de la vie privée et familiale. FIE demande à la Haute Cour (tribunal de première instance) d’invalider le plan d’action du gouvernement et d’enjoindre celui-ci à en adopter un nouveau. Leur requête est rejetée par un jugement du 19 septembre 2019.

    FIE a alors demandé à ce que l’affaire soit entendue directement par la Cour Suprême. Le 31 juillet 2020, la Cour Suprême rend sa décision en faveur des requérants. Le plan d’atténuation du gouvernement est définitivement invalidé. Cela signifie que le gouvernement devra adopter un nouveau plan, plus précis et en accord avec la loi de 2015. En revanche la question d’une potentielle violation des droits de l’Homme n’a pas été abordée.

    US District Court for DC, "Standing Rock Sioux Tribe v. Usace"

    Les tribus amérindiennes Standing Rock et Cheyenne contestent l’octroi par l’US Army Corp of Engineers (USACE) de la servitude permettant à l’oléoduc Dakota Access de traverser le lac Oahe. Il est reproché à l’USACE d’avoir octroyé cette servitude sans établir un “environmental impact statement” ou EIS (étude d’impact environnementale), pourtant requis lorsqu’une construction affecte significativement l’environnement. La US District Court for DC (cour fédérale du premier degré) a annulé la décision d’accorder à l’oléoduc Dakota Access une servitude sur le lac Oahe et a ordonné sa fermeture sous 30 jours. En juin 2016, Dakota Access LLC lança la construction d’un oléoduc, transportant de l’huile de schiste entre le Dakota du Nord et l’Illinois et traversant les Etats du Dakota du Nord et du Sud ; de l’Iowa et de l’Illinois. La construction de l’oléoduc fut achevée en avril 2017. Elle suscita des manifestations à travers tout le pays en raison de son impact sur l’environnement et sur les pratiques religieuses des communautés locales, puisque le tracé de l’oléoduc devait traverser différents sites sacrés amérindiens.

    Plan B Earth et autres contre le secrétaire d’Etat au transport

    Le 27 février 2020, la Cour d’appel d’Angleterre et du Pays de Galles a invalidé la déclaration de politique nationale relative aux aéroports (ANPS) rédigée en 2018 et qui permettait notamment de lancer le projet de construction d’une 3ème piste à l’aéroport londonien d’Heathrow. L’illégalité relevée par la Cour était l’absence de prise en compte dans l’ANPS de l’Accord de Paris. L’autorité administrative devra donc revoir sa déclaration et y expliquer comment elle prend en compte l’Accord de Paris et les engagements pris par le Royaume-Uni, même si elle n’est pas tenue de s’y conformer.

    La société opératrice de l’aéroport d’Heathrow a déposé un recours, jugé recevable, auprès de la Cour suprême contre cette décision.

    Ainées pour la protection du climat contre Conseil Fédéral et autres

    L’association suisse « Aînées pour la protection du climat » se constitue à l’été 2016 avec comme objectif de protéger les droits fondamentaux de ses membres, mais aussi celui de l’ensemble des êtres vivants et des générations à venir. Le 5 mai 2020, le Tribunal fédéral rejette le recours de l’association « Aînées pour la protection du climat » contre les omissions du gouvernement suisse en matière de protection du climat. Pour le Tribunal, les Aînées ne subissent pas un préjudice spécifique d’une intensité suffisante et le fondement invoqué étant un outil de protection juridique individuelle, il ne peut servir comme en l’espèce à une action en défense d’un intérêt public. Cette action pourra se déployer par les autres moyens de la vie institutionnelle et politique du pays.

    Affaires et actualités environnementales

    Conseil d’Etat, 10 juillet 2020, Pollution de l’air

    Par un arrêt en date du 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat avait annulé la décision implicite par laquelle le gouvernement avait refusé de prendre les mesures utiles et d’élaborer des plans conformes à la qualité de l’air ambiant et un air pur permettant de ramener sur l’ensemble du territoire les concentrations en particules fines et en dioxyde d’azote en deçà des valeurs limites. Par cette décision de 2017, le juge administratif avait enjoint le Premier ministre et le ministre chargé de l’environnement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soit élaboré et mis en œuvre un plan relatif à la qualité de l’air dans quinze zones.Estimant que la décision du 12 juillet 2017 n’avait pas été exécutée, Les Amis de la Terre, 68 associations, huit personnes physiques et une commune, ont saisi le Conseil d’État d’une demande d’astreinte. 

    Les requérants demandent ainsi au Conseil d’Etat de constater que la décision du 12 juillet 2017 n’a pas été exécutée et que soit prononcée à l’encontre de l’Etat, s’il ne justifie pas de l’exécution, une astreinte de 100 000 euros par jour de retard. Par un arrêt du 10 juillet 2020, le Conseil d’Etat enjoint au gouvernement d’adopter des mesures afin de réduire la pollution de l’air concernant les concentrations en dioxyde d’azote et particules fines sous astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard. Il s’agit du montant le plus élevé jamais prononcé par le juge administratif dans le but de contraindre l’Etat à exécuter sa décision.

    Mise en examen de Lubrizol – 27 février 2020

    Le 26 septembre 2019 à Rouen, un incendie démarre sur les sites des entreprises Lubrizol, fabricant d’additifs pour lubrifiants, et Normandie Logistique, société de transport routier. La ville de Rouen se réveille alors sous un important nuage de fumée toxique et odorante. Selon le rapport du gouvernement, cet incendie n’a pas engendré de pollution significative de l’air et de l’eau ou mettant en danger la santé des citoyens. Néanmoins, c’est plusieurs milliers de tonnes de produits dangereux qui ont brûlé. Un mois après le départ de feu, une enquête judiciaire est ouverte contre X pour sept chefs d’accusation dont notamment « destruction involontaire par incendie due à la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence » et « mise en danger de la vie d’autrui ». 

    Suite à l’ouverture de l’enquête, la société Lubrizol a été mise en examen le 27 février 2020 par le parquet de Paris pour deux chefs d’accusation : le déversement de substances nuisibles dans les eaux superficielles, souterraines ou les eaux de la mer et pour manquement dans l’exploitation de son site ayant porté une atteinte grave à la santé et à l’environnement. La société Lubrizol a été placée sous contrôle judiciaire avec l’obligation de s’acquitter d’une caution de 375 000 euros et de constituer une provision à hauteur de 4 millions d’euros afin de pouvoir régler, le cas échéant, la réparation des dommages causés.

    Sobegi contre Sepanso 64 – Tribunal judiciaire de Pau

    La Sobegi, chargée du traitement des gaz résiduaires rejetés par les industries du Bassin de Lacq et filiale à 100% de Total, a été condamnée par le Tribunal judiciaire de Pau le 22 juin 2020. Elle devra réparer un préjudice écologique et un préjudice environnemental collectif à la Sepanso 64 qui avait déposé plainte en raison de dépassement des seuils de poussières rejetées par oxydateur thermique, système permettant l’incinération de déchets industriels liquides et d’effluents gazeux, à plusieurs reprises entre 2016 et 2017. Le juge a considéré que le simple dépassement d’un seuil établi par arrêté préfectoral, qui est « fixé pour protéger l’environnement et la santé humaine » constitue un préjudice écologique.

    L’ambition de cette newsletter ? Donner les moyens à toutes et tous de comprendre les enjeux de telles actions en justice face à l’urgence climatique ! Abonnez-vous pour recevoir, chaque mois, les actualités et informations sur ces affaires qui font avancer, partout dans le monde,nos droits et ceux de la nature face aux dégradations environnementales et climatiques : le combat qui se joue dans les tribunaux est bien celui de la défense des pollués face aux pollueurs, nouvel enjeu du XXIe siècle.

  • CP / Appel mondial pour que le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies reconnaisse d’urgence le droit à un environnement sûr, propre, sain et durable

    Communiqué de presse 


    Le 11 septembre 2020
     
    Ce vendredi 11 septembre, près de 840 organisations de la société civile, des mouvements sociaux, des communautés locales et des populations autochtones du monde entier appellent le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies à reconnaître d’urgence le droit à un environnement sûr, propre, sain et durable. Cet appel intervient quelques jours avant la session du Conseil des droits de l’homme, qui débutera le 14 septembre 2020.
     
    Le droit à un environnement sain, déjà incorporé dans les lois et constitutions d’une majorité de pays, est pourtant encore souvent considéré comme un corollaire des droits fondamentaux. Le Conseil des droits de l’homme a par exemple déjà reconnu le droit à un environnement sain dans l’article 18 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et dans l’article 29 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. En France, ce droit a valeur constitutionnelle à travers son intégration dans la charte de l’environnement adossée à la Constitution en 2005. Néanmoins à l’échelle européenne ce droit ne peut encore être invoqué qu’au travers du droit à la vie privée et familiale (article 2 et 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme).
     
    Le droit à un environnement sain se caractérise comme le socle permettant la réalisation des droits fondamentaux. Pourtant, sa reconnaissance est encore balbutiante et ne prime pas suffisamment souvent dans sa confrontation avec d’autres droits fondamentaux tels que la liberté d’entreprendre.
     
    En effet, “un environnement sain est essentiel à la vie et à la dignité humaines. L’air que nous respirons, l’eau que nous buvons, la nourriture que nous mangeons et le climat propre au maintien de la vie dont nous jouissons dépendent tous d’écosystèmes sains, diversifiés, entiers et fonctionnels. Au vu de la crise environnementale mondiale qui actuellement met en péril et viole les droits de l’homme de milliards de personnes sur notre planète, la reconnaissance au niveau universel de ce droit est une question de la plus haute urgence. Comme nous le savons tous, il n’y a pas de droits de l’homme sur une planète morte”.
     
    Aujourd’hui, les organisations de la société civile, peuples autochtones, mouvements sociaux et communautés locales affirment qu’il est temps d’étendre cette reconnaissance pour la protection de toutes les personnes affectées par les impacts inégaux du changement climatique et prévenir les conséquences dévastatrices des dégradations environnementales sur les droits humains. De fait, la pandémie de la covid-19 nous a rappelé que le risque de propagation des maladies augmentera à mesure que les écosystèmes naturels continueront de se dégrader. Les signataires de l’appel affirment notamment que “les droits de l’homme doivent également être garantis quand nous sommes confrontés à de nouveaux défis environnementaux, comme des risques systémiques, des dégradations irréversibles, des pertes irremplaçables et des dommages irréparables, même lorsque de l’incertitude persiste. Ces défis doivent désormais être pris en compte lors de la mise en œuvre des droits de l’homme. Le droit à un environnement sain garantit l’interdépendance et l’indivisibilité des droits de l’homme et leur pertinence par rapport aux réalités environnementales.” 
     
    Pour l’association Notre Affaire à Tous : “L’intégration du droit à un environnement sain par le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies reviendrait à le placer au sommet des normes juridiques, et donc à lui accorder la place qui lui revient. Cette reconnaissance à l’échelle internationale pourrait également pousser chaque Etat membre à intégrer ce droit dans leur propre constitution et permettrait ainsi à chacun et chacune de se voir garantir ce droit. Ces batailles normatives sont nécessaires à plusieurs échelles, tant au niveau international que national, pour faire en sorte que le droit réponde à la crise climatique que nous traversons actuellement. C’est dans cette optique qu’en France, Notre Affaire à Tous défend le projet de réforme de l’article 1er de la Constitution, visant à y inscrire la protection de l’environnement et de la biodiversité, le respect des limites planétaires ainsi que le principe de non-régression.”
     
    Contact presse :
    Cécilia Rinaudo : cecilia.rinaudo@notreaffaireatous.org – 06 86 41 71 81 

    Lire le communiqué en PDF

  • CP / Stop aux structures commerciales en périphérie Recours contre l’extension du centre commercial de Rosny 2

    Communiqué de presse – Lundi 7 septembre

    Ce lundi 7 septembre, les associations Alternatiba Rosny, et le MNLE 93 Nord-Est Parisien soutenues par les juristes de l’association Notre Affaire à Tous déposent un recours en contentieux au tribunal de Montreuil contre le projet d’extension du centre commercial Rosny 2. Alors que la Convention Citoyenne pour le Climat demande un moratoire sur les structures commerciales en périphérie et que le gouvernement a admis soutenir une telle mesure, le projet d’extension du centre Rosny 2 apparaît désuet.


    Le centre commercial de Westfield Rosny 2, refait à neuf en 2015 dispose d’ores et déjà d’une surface de 120 000 m², pour un total d’environ 169 enseignes. Il s’agit ici de porter la surface commerciale à plus de 150 000m² et de créer un immeuble de sept étages pour des bureaux. Sur plusieurs centaines de pages, l’étude d’impact tente de démontrer l’absence d’impacts environnementaux du projet mais présente de nombreuses incohérences. Par exemple, en s’appuyant sur une supposée amélioration du parc automobile, l’étude d’impact affirme que le projet, engendrant une hausse de 13% de véhicules aux abords, aboutira en fait à une amélioration de la qualité de l’air.

    De la même façon, les menaces en termes d’infiltration des eaux pluviales semblent réglées par l’installation d’une dalle de béton qui ouvre, en fait, la porte à d’autre menaces : celles des ruissellements et inondations. 

    En passant d’une structure goudron à une structure béton, le projet entraînera l’imperméabilisation irréversible de près de 50 000m² supplémentaires. Malgré la circulaire du Ministre Jean Castex rappelant aux préfets leurs obligations vis-à-vis de l’objectif de 0 artificialisation nette des sols, les projets tels que Rosny 2 continuent à voir le jour. 

    Face au groupe Westfield, porteur du projet, les arguments environnementaux ne semblent pas faire mouche. En effet, le groupe possède à ce jour 92 centre commerciaux à travers 12 pays, dont 6 en région parisienne : Westfield Les 4 Temps, Westfield Forum des Halles, Westfield Vélizy 2, Westfield Parly 2, Westfield Carré Sénart, et Westfield Rosny 2. 

    Poursuivre la bataille juridique semble essentiel : en effet, le projet se base sur une étude d’impact insuffisante, le document de référence sur la gestion des eaux n’est pas celui en application sur le lieu du projet. Ainsi, les motifs d’illégalités du permis sont nombreux. Suite au dépôt du recours gracieux en mars dernier, les associations déposent aujourd’hui le recours contentieux visant à obtenir l’annulation des permis de construire

    Pour Chloé Gerbier de Notre Affaire à Tous : “Malgré la publicité gouvernementale autour d’un pseudo moratoire, il apparaît nettement que les promoteurs tels que Westfield n’ont aucunement prévu de stopper leur expansion sur le territoire”. 

    Pour Olivier Patté d’Alternatiba Rosny : Le mythe d’une offre commerciale “plus attractive” ne peut qu’aggraver le déséquilibre avec le commerce de proximité. Ce projet imposé est hérité d’une époque révolue, il est socialement néfaste et environnementalement irresponsable. Nous réclamons un autre projet de réhabilitation de cet espace plus cohérent face à l’enjeu social et climatique”. 

    Pour Laurent Desnoyers du MNLE-93 Nord Est Parisien : “Dans le monde d’après, il est nécessaire d’abandonner les projets inutiles, voir aberrant, consommateurs d’espaces et de ressources, comme l’agrandissement du centre commercial Rosny2 de plus de 30 000 m2 et une imperméabilisation de 50 000 m2 de sol”. Contacts presse : 

    Contacts presse

    • Chloé Gerbier, coordinatrice juridique, association Notre Affaire à Tous : 0646435509
    • Olivier Patté, coordinateur Alternatiba Rosny : 0680156349
    • Laurent Desnoyers, MNLE93 et Nord-Est parisien : 0608314559