Auteur/autrice : Jeremie Suissa

  • Décryptage de la décision CEDH Greenpeace Nordic and Nature & Youth v. Energy Ministry (The North Sea Fields Case) du 28 octobre 2025

    Article écrit par Anne Stevignon, Juriste chez Notre Affaire à Tous et Charlotte Diericks-Visschers, stagiaire juriste chez Notre Affaire à Tous

    La CEDH vient de rendre une décision importante concernant les obligations procédurales des États en matière climatique : la Cour affirme que les Etats ont l’obligation d’évaluer les émissions aval dites de “scope 3” liées à la combustion du pétrole dans le cadre des études d’impact environnemental des nouveaux projets fossiles (EIE).

    Contexte et objet du litige

    L’affaire portait sur la légalité de décisions d’octroi de licences d’exploration pétrolière par la Norvège en mer de Barents. Les requérants, des individus et des ONG environnementales, soutenaient que ces nouvelles licences contribuent à un réchauffement climatique dangereux de nature à violer leurs droits protégés par la Convention européenne des droits de l’homme, notamment le droit à la vie protégé par l’article 2, le droit au respect de leur vie privée prévu à l’article 8, le droit à un recours effectif prévu par l’article 13 et la prohibition de la discrimination posée à l’article 14. 

    Recevabilité de l’action

    Concernant la recevabilité de l’action, la Cour a repris les critères posés dans l’affaire  KlimaSeniorinnen c. Suisse [1]. Elle confirme la possibilité pour des ONG environnementales d’agir en matière de contentieux climatique, tout en maintenant un seuil élevé pour la reconnaissance de la qualité de victimes pour des requérants individuels.

    Les obligations procédurales des États dans le contexte climatique

    La Cour ne s’est pas prononcée sur les obligations substantielles d’atténuation du réchauffement climatique (comme dans l’affaire KlimaSeniorinnen), mais sur les obligations procédurales de l’État lors de l’octroi de licences d’exploitation d’un projet pétrolier en particulier.

    La Cour réaffirme d’abord l’existence d’une obligation positive de protection contre les effets graves du changement climatique sur la vie, la santé et le bien-être (§314). Elle rappelle également que cette obligation doit peser considérablement lorsqu’il s’agit de mettre en balance différents intérêts potentiellement contraires (§316). 

    Si la Cour souligne le large pouvoir d’appréciation des États en la matière (§315), elle rappelle l’exigence d’une évaluation d’impact environnemental adéquate, en temps utile, complète, fondée sur les meilleures données scientifiques disponibles et réalisée de bonne foi (§318). En outre, elle fixe des conditions minimales pour l’évaluation de l’impact des projets pétroliers : elle affirme notamment que les émissions dites de “scope 3” liées à la combustion du pétrole et du gaz doivent faire partie des études d’impact (§319). 

    Ce faisant, la Cour se place dans la lignée de décisions qui l’ont précédée : l’arrêt de la Cour Suprême de Norvège du 22 décembre 2020 rendu dans la présente affaire [2], l’avis consultatif du Tribunal international du droit de la mer du 21 mai 2024 [3], l’avis consultatif de la Cour AELE du 21 mai 2025 [4] ou encore l’arrêt de la Cour suprême du Royaume Uni du 20 juin 2024 dans l’affaire Finch (confirmé depuis par une décision du 29 janvier 2025) [5].

    La Cour a également tenu compte des avis rendus par des instances internationales, et notamment l’avis de la Cour Internationale de justice du 23 juillet 2025 selon lequel peut constituer un fait international illicite le fait pour un État d’octroyer des permis d’exploration pour les hydrocarbures [6].

    Absence de violation de l’article 8 de la Convention par l’État norvégien

    En l’espèce, la Cour a estimé qu’il n’y avait pas de violation de l’article 8 dès lors que l’évaluation des émissions de “scope 3” – c’est-à-dire des émissions liées à la combustion en aval du pétrole extrait – n’était pas requise à ce stade préliminaire de la procédure, limité à l’octroi d’une licence d’exploration. Elle considère que le cadre juridique norvégien offre des garanties suffisantes dès lors que cette évaluation est exigée lors de la phase ultérieure de développement et d’exploitation du projet.

    En ciblant une licence d’exploration pétrolière – visant un projet précis – les requérants espéraient ouvrir la voie à une remise en cause plus structurelle de la stratégie fossile norvégienne. Mais la Cour refuse d’apprécier le contenu de la politique climatique nationale et ne consacre aucune incompatibilité de principe entre l’autorisation de nouveaux projets pétroliers et l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C tel qu’imposé par l’Accord  de Paris.

    Néanmoins, la CEDH trace une grille de lecture exigeante pour les obligations procédurales des États en matière d’octroi de permis d’exploitation d’hydrocarbures. 

    Notes

    [1] CEDH, Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse [GC], Requête n° 53600/20, 9 avril 2024, https://hudoc.echr.coe.int/eng#{%22itemid%22:[%22001-233258%22]}

    [2] Norges Høyesterett 22 December 2020, No. 0-051052SIV-HRET, https://cdn.climatepolicyradar.org/navigator/NOR/2016/greenpeace-nordic-assn-v-ministry-of-petroleum-and-energy-people-v-arctic-oil_c4546edcd30d144ba35805a6ce08fe26.pdf

    [3] Tribunal International du Droit de la Mer, Demande d’avis consultatif n° 31 soumise par la Commission des petits États insulaires sur le changement climatique et le droit international (Demande d’avis consultatif soumise au Tribunal), 21 mai 2024, https://www.itlos.org/fileadmin/itlos/documents/cases/31/Advisory_Opinion/A31_avis_cons_21.05.2024_orig.pdf

    [4] EFTA Court (la Cour AELE), Case E-18/24, the Norwegian State, represented by the Ministry of Energy,and Greenpeace Nordic and Nature and Youth Norway, 21 mai 2025, https://eftacourt.int/wp-content/uploads/2025/05/18_24_Judgment_EN.pdf?x74056

    [5] R (on the application of Finch on behalf of the Weald Action Group) (Appellant) v Surrey County Council and others (Respondents), UKSC/2022/0064, 20 juin 2024, https://supremecourt.uk/uploads/uksc_2022_0064_judgment_c3d44bb244.pdf confirmé par la Sessions Court, [2025] CSOH 10, P560/22, P967/23, P1158/23, 29 janvier 2025, https://www.scotcourts.gov.uk/media/v0zkbsxy/2025csoh10-petitions-by-greenpeace-limited-and-uplift-for-judicial-review.pdf

    [6] Cour Internationale de Justice, Obligations des Etats en matière de Changement Climatique, Rôle général n° 187, 23 juillet 2025, https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/187/187-20250723-adv-01-00-fr.pdf §427.

  • Vers une représentation de la Nature dans la gouvernance des entreprises : une proposition de loi inédite remise au député Charles Fournier pour discussion à l’Assemblée nationale

    Communiqué de presseLes associations Corporate Regeneration, Notre Affaire à Tous, Earth Law Center et B Lab France ont remis aujourd’hui au député écologiste Charles Fournier une proposition de loi visant à représenter la Nature au sein des entreprises. Cette initiative ouvre la voie à une économie alignée avec les impératifs écologiques, en donnant à la Nature une place au sein des instances de décision des entreprises.

    Depuis la loi Pacte de 2019, l’entreprise doit “prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité”. Mais dans les faits, la Nature qui est essentielle à la création de valeur ajoutée, reste absente des conseils d’administration, des assemblées générales et du dialogue social, bien que les décisions qui soient prises aient un impact sur son devenir.

    À l’heure où les crises environnementales imposent de repenser le lien d’interdépendance que nous avons avec la Nature et sa contribution allant au-delà d’une valeur strictement marchande, cette proposition de loi entend franchir une étape décisive : faire de la Nature un véritable acteur décisionnaire au sein de l’entreprise.

    Cette proposition s’inscrit dans le sillage des expérimentations pionnières menées par Patagonia aux Etats-Unis, Faith in Nature au Royaume-Uni ou encore Norsys en France, qui ont déjà introduit des représentants de la Nature dans leurs structures de gouvernance. D’un point de vue philosophique, elle s’inscrit également dans une tendance mondiale visant à reconnaître des droits à la nature et à redéfinir nos interrelations avec le vivant.

    Pour Charles Fournier, député de Tours : “Il est temps de sortir de la vision qui a dominé notre développement économique pendant le siècle dernier, où la nature était considérée comme l’“environnement”, ce qui nous entourait, et qui devait être à notre service, une ressource à exploiter. Représenter la nature dans la gouvernance des entreprises est un acte majeur de ce changement de vision. L’entreprise de demain doit repenser sa gouvernance, c’est aussi ce à quoi je m’engage en parallèle pour une meilleure représentation des salariés.

    Pour les associations co-porteuses de la proposition de loi : “Il est urgent d’intégrer la nature au cœur de la gouvernance des entreprises en lui donnant une voix. En l’état actuel du droit, ce sont les intérêts actionnariaux qui priment dans la gestion des affaires au détriment du vivant. Sans transformation profonde des modèles de gouvernance, aucune réconciliation ne pourra advenir entre économie et écologie.”

    Représenter la Nature au cœur de l’entreprise

    La proposition de loi regroupe trois dispositifs complémentaires :

    1. Nature et dialogue social : une “Nature syndiquée” avec l’obligation de créer une commission environnement dans les comités sociaux et économiques (CSE) des entreprises de plus de 250 salariés. Ces commissions, appuyées par des parties prenantes externes, auront pour mission d’étudier l’impact des activités au regard des neuf limites planétaires et de former les représentants du personnel à la gouvernance écologique.
    1. Nature dans les conseils d’administration : une “Nature administratrice” avec nomination, dans les grandes entreprises, de deux administrateurs représentant la Nature au sein des conseils d’administration. Ces représentants, désignés parmi des organismes d’intérêt général ou des établissements publics, disposeront d’un mandat clair pour défendre les écosystèmes naturels et accompagner la transition environnementale des entreprises. Ils bénéficieront d’une formation adaptée prise en charge par l’entreprise. 
    1. Nature dans les assemblées générales : une “Nature actionnaire” en facilitant la cession d’une partie du capital à une fondation actionnaire représentant la Nature, et l’introduction d’un vote consultatif obligatoire sur la politique environnementale dans les assemblées générales. Inspiré du “Say on Climate”, ce mécanisme permettrait aux actionnaires — et aux fondations agissant au nom de la nature — d’exprimer leur position sur les stratégies climatiques et écologiques des entreprises.

    Les associations alertent toutefois : sans transformation réelle  des pratiques, la représentation de la Nature risque de rester symbolique et de se transformer en greenwashing. Outre un changement des modes de gouvernance, les associations appellent donc également à une intégration systémique des enjeux sociaux et environnementaux dans la stratégie des entreprises.

    Une proposition soutenue par un écosystème d’acteurs

    Aux côtés des associations co-auteurs, plusieurs entreprises et organisations pionnières, dont Norsys et le Fonds de dotation pour la Biodiversité, ont d’ores et déjà apporté leur soutien à cette initiative, convaincues qu’elle constitue un nouveau cadre de gouvernance plus juste et plus soutenable.

    Les signataires invitent l’ensemble des parlementaires, syndicats, réseaux d’entreprises et citoyens à soutenir cette réforme ambitieuse, qui place la préservation du vivant au cœur de la stratégie d’entreprise.

    La proposition de loi est pour le moment sous embargo.

    À propos des associations

    Corporate Regeneration : think & do tank dédié à la refondation de la gouvernance d’entreprise à l’aune des enjeux écologiques et sociaux.

    Notre Affaire à Tous : organisation engagée pour la reconnaissance des droits de la nature et la justice climatique et sociale.

    Earth Law Center : ONG internationale pionnière dans la défense des droits de la nature et la promotion d’un droit du vivant.

    B Lab France : B Lab France est l’association loi 1901 qui représente le mouvement B Corp en France. L’association se positionne comme un acteur de transformation sociale, sociétale et environnementale qui remplit une mission d’intérêt général.

    Contacts presse

  • Le manuel militant : comprendre les injustices et agir. les impacts inégalitaires de la crise environnementale en france

    Il est parfois difficile de parler de sujets comme celui de la crise environnementale autour de soi. Pourtant, chez Notre Affaire à Tous, nous sommes convaincu·es qu’il est essentiel de partager les interactions entre enjeux écologiques, sociaux et économiques, pour comprendre l’aspect fondamentalement systémique de notre lutte

    • Car l’information sur les impacts existants de la triple crise environnementale en France reste trop rare, trop cantonnée ; 
    • Car les territoires et personnes premières concernées par les dérèglements climatiques et problématiques environnementales se rassemblent et font porter leur voix, notamment au travers d’actions en justice ; 
    • Car ces problématiques d’inégalités écologiques sont des problématiques de droits humains, dont la garantie doit être une priorité ; 
    • Car, enfin, les premières victimes de ce silence sont celles et ceux qui ont déjà peu de voix dans la décision publique : ce sont les plus précaires, les plus fragiles, qui subissent les premier·es les impacts des changements climatiques, souvent sans faire la une des journaux.

    À l’occasion de ses 10 ans, Notre Affaire à Tous publie un manuel militant qui propose les principales clés pour comprendre facilement ces interactions et pouvoir en parler. 

    Par un format interactif, ce manuel ne souhaite pas rendre le sujet plus léger, mais bien inviter le·a lecteur·rice à adopter une posture active vis-à-vis de ces enjeux fondamentaux, afin de comprendre que la lutte contre les inégalités écologiques est bien notre affaire à tous·tes, et qu’il est possible pour chacun·e d’agir.  

    Au sommaire

    • Édito de Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous
    • IMPACTS : comprendre les injustices environnementales pour agir
    • Un manuel militant : pourquoi faire ?
    • 1. Travailler dans un monde à +4°C
    • 2. Les territoires face au changement climatique : surexposition et mal-adaptation
    • 3. Identités et groupes sociaux : “dis moi qui tu es, je te dirais comment tu es impacté·e”…
    • Et maintenant, on fait quoi ?

  • CP / France – Afrique du Sud : neuf ONG demandent au gouvernement de condamner le jeu dangereux de TotalEnergies

    Paris, le 11 octobre 2023 – Alors que dimanche 15 octobre, la coupe du monde de rugby verra s’affronter en quarts de finale la France et l’Afrique du Sud, les téléspectateurs du monde entier subiront le matraquage publicitaire du sponsor officiel TotalEnergies sans savoir que cette entreprise irresponsable accélère le déclenchement de bombes climatiques en Afrique, et notamment en Afrique du Sud.

    Aujourd’hui, neuf associations (1) dénoncent la mascarade de « consultation publique » qui vient de démarrer en Afrique du Sud à propos des projets d’exploration et de production de TotalEnergies et demandent au gouvernement français de retirer le soutien qu’il apporte à la Major française à travers les « Partenariats pour une transition énergétique juste » ainsi que de condamner publiquement tous les investissements de TotalEnergies dans de nouveaux projets fossiles.

    En totale contradiction avec les conclusions du GIEC et les recommandations de l’Agence internationale de l’énergie (2), qui appellent à ne développer aucun nouveau projet d’extraction de charbon, de pétrole ou de gaz, TotalEnergies développe une stratégie expansionniste agressive en Afrique, et notamment en Afrique du Sud, où la multinationale souhaite ouvrir de nouveaux champs gaziers en offshore profond. Les côtes occidentales et méridionales sud-africaines sont ainsi menacées par une série de projets offshore qui pourraient voir le jour à des profondeurs allant de 200 à 3200 mètres de profondeur, et qui menacent des hotspots de biodiversité, les corridors de migration des baleines, la pêche artisanale et l’économie du littoral.

    Loin de renoncer à ses investissements mortifères après un an de mobilisation de la société civile en France et en Afrique du Sud et malgré une pétition réunissant près de 100 000 signatures, TotalEnergies vient au contraire d’accélérer les procédures en engageant une « consultation publique » pour développer deux immenses champs gaziers dans les eaux d’Afrique du Sud. Le 22 septembre 2023, les citoyens sud-africains découvraient ainsi une étude d’impact environnemental de plus de 3000 pages, qu’ils sont censés lire et commenter dans un délai de trente jours, le délai de clôture de la consultation étant fixé au 25 octobre 2023. Trente maigres jours concédés aux citoyens, scientifiques, associations et élus locaux pour se prononcer sur un projet déterminant pour la biosphère, alors qu’une première lecture des documents soumis à consultation révèle qu’en plus de la demande déposée officiellement par TotalEnergies pour l’exploitation des champs gaziers de Luiperd et Brulpadda s’ajoute un projet surprise : une nouvelle campagne d’exploration offshore de grande ampleur (3), dénotant la voracité insatiable du géant pétrolier pour les projets climaticides. 

    Nos neuf associations ont écrit à la Première ministre Elisabeth Borne pour demander au gouvernement français de condamner publiquement tous les nouveaux projets fossiles menés par TotalEnergies, de dénoncer les processus antidémocratiques qui accompagnent les projets d’expansion fossiles, et de conditionner l’implication de la France dans des « Partenariats pour une transition énergétique juste » à l’abandon des investissements dans de nouveaux projets fossiles, y compris gaziers en raison de l’entêtement de l’Élysée à présenter le gaz, une énergie strictement fossile, comme une « énergie de transition » dans le cadre du Partenariat établi avec l’Afrique du Sud lors de la COP26 à Glasgow (4).

    Après un été qui a vu les phénomènes climatiques extrêmes se multiplier, alors que la planète enregistre un nouveau record de chaleur pour les mois de septembre et d’octobre, le gouvernement ne peut laisser TotalEnergies instrumentaliser la coupe du monde de rugby et greenwasher ses choix dramatiques pour un monde dont la trajectoire, à l’image du ballon de rugby, ne tourne pourtant déjà plus rond.

    Notes

    1.  BLOOM, The Green Connection, 350.org, Amis de la Terre France, Chilli, Greenpeace France, Mouvement Laudato Si, Notre affaire à Tous et Surfrider Foundation Europe
    2. GIEC (2023), Climate change 2023. Synthesis report, B.5.3 ; AIE (2021) Net Zero by 2050. A roadmap for the global energy sector, chapitre 3.2 ; AIE (2023) Net Zero Roadmap : A Global Pathway to Keep the 1.5°C Goal in Reach, chapitre 2.2.2.
    3. TEEPSA (2023) Environmental and Social Impact Assessment (ESIA) for the offshore production right and environmental autorisation applications for Block 11B/12B. Final Scoping Report. Executive Summary.
    4. Élysée (2022) Partenariats pour une transition énergétique juste en Afrique.
  • CP / Vallée de la chimie : 37 victimes et 10 associations et syndicats se mobilisent contre les PFAS dans le sud de Lyon

    Lundi 5 juin 2023, Lyon – Notre Affaire à Tous – Lyon et le cabinet Kaizen Avocat ont déposé, aux côtés de 37 victimes et de 9 associations et syndicats, un référé pénal environnemental (L. 216-13 du code de l’environnement) au Tribunal judiciaire de Lyon le 25 mai 2023 à l’encontre d’ARKEMA FRANCE, entreprise chimique produisant et rejetant des PFAS à Pierre-Bénite. Nous demandons la limitation à 1kg/mois des rejets de PFAS dans l’eau par ARKEMA FRANCE, afin de réduire au maximum cette pollution et une étude des risques sanitaires visant à évaluer l’ampleur de la contamination.

    Selon le rapport de l’IGEDD (Inspection générale de l’environnement et du développement durable) de décembre 2022, ARKEMA FRANCE rejette ainsi 3,5 tonnes par an de PFAS dans le Rhône, une pollution majeure documentée par l’ANSES depuis 2011 ! La société ARKEMA FRANCE exploite en effet une activité de fabrication de produits chimiques fluorés depuis 1957. En 2013, la DREAL, chargée de contrôler l’entreprise, avait d’ailleurs déjà demandé à ARKEMA de surveiller ses rejets en PFAS, ce que l’entreprise n’a pas fait. Ces rejets massifs causent de graves pollutions de l’eau, du sol, de l’air et du lait maternel exposant ainsi la population et les salarié.e.s de l’entreprise à des risques pour leur santé. On retrouve également des PFAS dans l’alimentation, ce qui impacte particulièrement les agriculteur.rice.s et les consommateur.trice.s.

    Le 31 mai 2022, Notre Affaire à Tous – Lyon avait déposé un premier référé à l’encontre d’ARKEMA FRANCE ciblant déjà la pollution aux PFAS. Depuis, des citoyen.ne.s et associations se sont mobilisés pour demander la fin des rejets aqueux de PFAS, une véritable transparence sur la nature et l’ampleur de la pollution et et une étude des risques sanitaires pour mieux connaître la contamination. Nous nous sommes réunis pour agir en justice et faire appliquer le principe de pollueur-payeur.

    Stop à l’impunité des pollueurs !

    Plusieurs documents montrent qu’ARKEMA FRANCE devait surveiller les substances “susceptibles de s’accumuler dans l’environnement” depuis 2007 et que la DREAL avait demandé dès 2013 à la société de surveiller ses rejets. Cette obligation de surveillance n’a pas été respectée par ARKEMA FRANCE, malgré la publication du rapport de l’ANSES en 2011 indiquant l’existence d’une grave pollution aux PFAS à Pierre-Bénite. Ces pollutions ont bien été commises délibérément par ARKEMA FRANCE, au détriment de la qualité de l’eau, de l’air et des sols, et donc de la santé de la population locale.

    Les solutions pour filtrer les PFAS étaient également connues, puisque les rejets du composé 6:2 FTS par ARKEMA sont en très nette diminution grâce à la mise en place en novembre 2022 d’un traitement par ultrafiltration puis par charbons actifs suite à un arrêté préfectoral.

    Afin de stopper ce scandale sanitaire et environnemental, 37 victimes, 10 associations et syndicats demandent au procureur de la République du Tribunal judiciaire de Lyon de saisir le juge des libertés et de la détention afin de faire cesser ces pollutions et d’étudier les risques sanitaires encourus par la population aux frais du pollueur.

    Plus de 17 000 sites sont contaminés en Europe et 2 100 le sont à des taux potentiellement dangereux pour la santé (source : “Forever pollution project”). Pierre-Bénite est l’un des sites les plus contaminés de France.

    Liste des associations et syndicats requérants : Notre Affaire à Tous – Lyon, Notre Affaire à Tous, Agribio Rhône Loire, Alternatiba ANV Rhône, Réseau AMAP AURA, Bien-Vivre à Pierre-Bénite, Fédération Syndicale Unitaire, La Ruche de l’écologie, Les Amis de l’Ile de la Table-Ronde, le Réseau Environnement Santé

    Contact presse

    Camille Panisset, Notre Affaire à Tous – Lyon
    camille.panisset@notreaffaireatous.org

    Pour les questions juridiques : Me Louise Tschanz – Cabinet Kaizen Avocat
    louise.tschanz@kaizen.avocat.fr

    Dossier de presse

    DP Vallée de la chimie 2023

  • CP / Audience de Justice pour le Vivant : premier pas vers une condamnation historique de l’Etat pour inaction face à l’effondrement de la biodiversité

    Paris, le 1er juin 2023 – Ce jeudi s’est tenue l’audience historique du procès Justice pour le Vivant, dans le cadre duquel 5 ONG environnementales attaquent l’Etat pour son inaction face à l’effondrement de la biodiversité. La rapporteure publique a demandé aux juges de condamner l’Etat pour ses carences en matière d’évaluation et de gestion des risques liés aux pesticides.  

    Les ONG environnementales POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, mobilisées dans le cadre du procès Justice pour le Vivant se sont réunies au Tribunal administratif de Paris pour une audience historique qui les oppose à l’Etat et au syndicat de l’agrochimie, Phyteis. 

    En s’appuyant sur les nombreuses études scientifiques citées par les associations, la rapporteure publique a fermement reconnu le préjudice écologique causé par l’utilisation massive des pesticides en France. Constatant l’effondrement des populations d’insectes, d’oiseaux, des vers de terre et de la faune aquatique, elle a décrit la situation de « contamination généralisée, diffuse, chronique et durable » des écosystèmes.

    Dans ses conclusions, la rapporteure publique propose au tribunal de condamner l’Etat pour sa carence fautive à mettre en place une évaluation des risques réellement protectrice de la biodiversité. Elle l’invite à enjoindre l’Etat de réexaminer la méthodologie d’évaluation des risques des pesticides pour l’environnement. Les associations mobilisées dans le cadre de Justice pour le Vivant ont produit dans leurs mémoires des propositions concrètes d’évolution des tests afin de prendre en compte les effets cocktails des pesticides, leurs effets sublétaux et les impacts sur les espèces et chaînes trophiques, que la méthodologie actuelle ne prend tout simplement pas en compte.

    « Avec cette audience, le mythe selon lequel les procédures d’évaluation des risques seraient réellement protectrices de la biodiversité a été balayé. Si les conclusions de la rapporteure publique sont suivies par le Tribunal, ce que nous espérons, l’Etat sera enfin contraint de mettre en place un système d’évaluation des risques fiable et robuste  pour empêcher la commercialisation des pesticides toxiques pour la biodiversité » ont conclu les associations.

    La rapporteure publique invite également le tribunal à condamner l’Etat en raison du non-respect de ses propres engagements en matière de réduction de l’usage des pesticides sur son territoire, prescrit dans les plans Ecophyto successifs, et de protection des eaux contre la pollution par les pesticides. Elle l’enjoint de ce fait à une dépollution effective des masses d’eau.

    De manière plus générale, la rapporteure publique propose d’enjoindre à l’Etat de mettre un terme à ces différents manquements constatés et de prendre, d’ici le 15 juin 2024,  « toute mesure utile de nature à réparer le préjudice écologique et prévenir l’aggravation des dommages  ».

    A l’audience, aucun représentant du gouvernement n’était présent, laissant de fait la défense de l’Etat aux mains de l’avocat de Phytéis, le syndicat qui regroupe les principales entreprises de l’agrochimie en France (Bayer, BASF, Syngenta, …), et dont l’intervention dans la procédure a été jugée recevable par la rapporteure publique.

    Cette audience constitue une première victoire dans une procédure historique commencée en janvier 2022. Les 5 ONG avaient alors déposé un recours en carence fautive contre l’Etat pour son inaction face à l’effondrement de la biodiversité, dans laquelle elles dénoncent précisément sa défaillance dans la mise en place de procédures d’évaluation des risques et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides réellement protectrices du Vivant.

    La décision du Tribunal administratif de Paris sera rendue publique le 15 juin prochain. 

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    Contacts presse

    POLLINIS
    Cécile Barbière, directrice de la communication
    cecileb@pollinis.org

    Notre Affaire à Tous
    Justine Ripoll, responsables des campagnes
    justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    ASPAS
    Cécilia Rinaudo
    cecilia.rinaudo@aspas-nature.org

    Biodiversité sous nos pieds
    Dorian Guinard
    daguinard@yahoo.fr

    ANPER-TOS
    Elisabeth Laporte
    juridique@anper-tos.fr