De l’injuste à l’illégal

Les problématiques d’accès à une eau potable sont nombreuses et croissantes dans les DROM. Or, elles ne résultent pas d’un manque de chance ou d’une fatalité, mais de politiques publiques, d’actions ou d’inaction injustifiées et inadaptées qui ont porté préjudice aux habitant·es des DROM. Les DROM ont connu des années de politique de l’eau construites autour de l’objectif de résorber la situation. Bilan, d’après un rapport d’évaluation de 2022 : « Nulle part son impact direct n’a pu être, jusqu’à présent, ressenti comme positif ni sur le plan de l’eau potable ni sur celui de l’assainissement ». 

Ces injustices sont connues depuis longtemps, documentées par différents rapports institutionnels ou issus de la société civile. 

Pour aller au-delà du constat, interroger la nature de ces injustices apparaît désormais essentiel, pour passer de l’injuste à l’illégal. Il devient alors possible de déduire l’existence d’une discrimination environnementale territoriale, défavorisant les DROM par rapport à l’Hexagone en matière d’accès à l’eau potable. La persistance et l’aggravation de ces problématiques doivent être comprises pour ce qu’elles sont : un problème de droit remettant en cause le principe d’égalité.

Si le défi technique ne doit pas être minimisé, un changement de paradigme doit s’opérer pour que les politiques publiques déployées soient justement dimensionnées à la hauteur du défi

Pourquoi un rapport collectif sur le sujet ?

Nous sommes convaincu·es que, tant que les problématiques d’accès à l’eau potable dans les DROM ne seront pas analysées sous le prisme de la discrimination environnementale et comme une rupture d’égalité par rapport au territoire hexagonal, les choses ne changeront pas dans le quotidien des près de trois millions de personnes qui y vivent. 

Ce document collectif, auquel ont participé des collectifs travaillant sur le sujet sur tous les DROM depuis des années, a pour objectif de porter un constat commun quant à l’historique et l’état des lieux des difficultés d’accès à l’eau potable. En fil rouge, il a vocation à expliciter le ressort de la discrimination qui caractérise de fait ces situations. C’est ici sa réelle plus-value, aux côtés d’autres rapports – institutionnels et associatifs – déjà établis sur le sujet. Il est urgent que la situation des DROM soit en effet comprise pour ce qu’elle est – une discrimination environnementale – pour que les actions mises en place aient enfin un impact positif sur le quotidien des Français.es ultramarin·es. Leurs droits fondamentaux sont bafoués par ces situations qui perdurent, par ailleurs amenées à s’aggraver sous l’effet des changements climatiques. De fait, il permettra également de proposer des pistes d’action, juridiques, politiques et citoyennes, sur lesquelles s’accordent les collectifs porte-parole de la voix de la société civile. 

Pour se faire, le rapport “Agir contre les discriminations environnementales d’accès à l’eau potable dans les DROM” propose un décryptage du cadre juridique de l’eau en France, inadapté aux situations des territoires ultramarins, un état des lieux des problématiques, mais surtout des pistes d’évolution. Outre les mesures d’urgence à mettre en place rapidement, nous articulons nos demandes autour de quatre grandes pistes d’action.

  • La reconnaissance de la situation pour ce qu’elle est – une discrimination environnementale.
  • Un redimensionnement important des crédits alloués par l’État, à la hauteur des besoins précisément évalués.
  • Une responsabilisation des acteurs impliqués et une intégration réelle des populations à la construction des politiques publiques.
  • Une construction holistique des politiques publiques déployées dans les DROM autour de ces objectifs de justice environnementale.

Nous sollicitons les Nations Unies

Le constat présenté dans le rapport est trop grave : en juin 2025, nous sollicitons le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur les droits humains à l’eau potable et à l’assainissement, pour qu’il puisse enquêter sur cette discrimination environnementale française.