Pour le troisième numéro de la newsletter des affaires climatiques, Notre Affaire à Tous met en lumière la question des droits fondamentaux ! Du People’s Climate Case, à l’affaire Urgenda aux Pays-Bas, en passant par l’Afrique du Sud, l’Autriche et le Nigeria, nous montrons que le mouvement pour la justice climatique se développe aux quatre coins du monde et que la justice est en passe de devenir un levier crédible pour protéger les populations et le climat.
L’ambition de cette newsletter ? Donner les moyens à toutes et tous de comprendre les enjeux de telles actions en justice face à l’urgence climatique ! Abonnez-vous pour recevoir, chaque mois, les actualités et informations sur ces affaires qui font avancer, partout dans le monde, nos droits et ceux de la nature face aux dégradations environnementales et climatiques : le combat qui se joue dans les tribunaux est bien celui de la défense des pollués face aux pollueurs, nouvel enjeu du XXIe siècle.
Pas moins de 10 familles européennes du Portugal, de France, d’Allemagne, d’Italie et de Roumanie, ainsi que des familles du Kenya et des Fidji, accompagnées par l’association de jeunesse Saminuorra de Suède, ont assigné le Parlement et le Conseil européen en mai 2018 devant la Cour de Justice de l’Union Européenne afin de voir reconnaître la responsabilité de l’Union pour son incapacité à protéger ses citoyensen ayant autorisé un niveau trop élevé d’émissions de gaz à effet de serre (GES) à l’horizon 2030.
Notre Affaire à Tous a décidé d’accompagner les requerants du People’s Climate Case et d’apporter notre soutien particulier à Maurice Feschet, plaignant français.
Si le tribunal reconnaît dans son ordonnance du 8 mai 2019 les impacts du changement climatique comme menaçant les droits humains des plaignants, il déclare pourtant l’irrecevabilité de la requête en ce que les familles et les jeunes affectés par le changement climatique n’avaient pas le droit de recourir aux tribunaux pour contester les objectifs climatiques européens. Les familles à l’initiative du recours ont prévu de faire appel devant la Cour Européenne de justice (CJUE).
L’Afrique du Sud contribue de façon massive aux émissions mondiales de Gaz à Effet de Serre (GES), cela est notamment dû à ses importantes exploitations minières, au traitement des minéraux et au système énergétique du pays intensément lié à l’utilisation de charbon.
En 2015, le projet de construction d’une centrale au charbon de 1 200 MW près de Lephalale, dans la province de Limpopo d’Afrique du Sud, suscitait des questionnements quant aux impacts qu’un tel chantier pourrait avoir sur l’environnement. Le 25 février 2015, le directeur général du DAE, en tant qu’autorité compétente, a accordé à Thabametsi une autorisation environnementale pour la centrale proposée.
La Haute Cour sud-africaine a récemment été invitée à examiner si, en vertu du « National Environmental Management Act 107 » (NEMA) de 1998, les considérations dites pertinentes pour l’examen environnemental de projets incluent les impacts du projet sur le climat mondial ainsi que les impacts d’un changement climatique sur le projet, et ce concernant le nouveau Plan de Centrale Electrique au Charbon de 1 200 MW Thabametsi.
La Cour observa alors que la loi NEMA n’envisageait pas expressément les changements climatiques. Ainsi, elle estima que de telles considérations étaient en effet pertinentes et que leur absence de l’examen environnemental du projet rendait l’approbation de ce dernier illégale.
Le 2 février 2017, la cour administrative fédérale autrichienne statue sur la construction d’une troisième piste d’atterrissage à l’aéroport de Vienne. Elle rejette l’autorisation environnementale approuvant ce projet au motif qu’il ne répondait pas à l’intérêt général.
La cour innove en ce qu’elle reconnaît la protection de l’environnement comme composante de l’intérêt général : il était nécessaire, en l’espèce, de donner la priorité à la lutte contre le réchauffement climatique. Cela supposait de refuser la construction de la troisième piste qui eût induit des émissions de gaz à effet de serre supplémentaires. La cour fonde sa décision, entre autres, sur la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne.
Cependant, la Cour constitutionnelle annule la décision de la cour administrative fédérale au motif qu’il n’appartient qu’au législateur de définir ce qui relève de l’intérêt général.
La communauté Iwherekan vit dans le Delta du Niger, riche en poches de pétrole. Avec l’installation des compagnies pétrolières dans leur zone d’habitation et la pratique de la techniques du torchage, la communauté a vu la santé de ses membres se dégrader, l’environnement être peu à peu détruit.
La pratique du torchage consiste à brûler, par des torchères, des rejets de gaz naturels à différentes étapes de l’exploitation du pétrole. Le torchage est extrêmement polluant: il entraîne le relâchement de gaz brûlés, chargés en CO2, mais, également, de méthane non brûlé. A un haut degré de concentration dans l’atmosphère, le méthane est extrêmement délétère pour la faune et la flore et peut causer de graves problèmes de santé, voire entraîner la mort.
C’est pourquoi Jonah Gbemre est un représentant de la communauté Iwherekan forme un recours contre le Gouvernement nigérian et des compagnies pétrolières telles que Shell et alii.
Dans un jugement du 14 novembre 2005, la Cour reconnaît que la pratique du torchage du gaz constitue une violation des droits à la dignité de la personne humaine, à la santé, à la vie et à un environnement sain et la déclare illégale. Il faut, toutefois, déplorer que cette décision n’ait jamais reçue d’application effective.
La décision rendue en première instance dans l’affaire Urgenda (Urgenda I) ne se fonde que très peu sur la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme (CESDH), Urgenda utilise la CESDH comme fondement pour soutenir que l’Etat a agi illégalement en ne visant pas une réduction plus importante de ses émissions de GES.
En revanche, la décision rendue en appel dans la même affaire (Urgenda II) présente un intérêt certain pour la justice climatique : elle permet aux groupes d’intérêts ayant un intérêt à agir selon le droit national de bénéficier de l’effet direct de la convention.
Elle reconnaît que le réchauffement climatique menace les droits de l’Homme, en l’espèce, le droit à la vie et le droit à la vie privée et familiale. L’Etat a donc une obligation de vigilance en matière climatique. La voie est ouverte pour une nouvelle forme de responsabilité, la responsabilité climatique.
L’affaire du Siècle va se saisir de l’obligation de vigilance dégagée par la Cour d’appel pour soutenir un principe général de droit selon lequel l’Etat a une obligation générale de lutte contre le changement climatique.