Depuis mai 2022, le sujet des pollutions aux substances per- et polyfluoroalkylées, la famille des PFAS, s’impose dans le débat public et politique, avec plus de vingt ans de retard sur les États-Unis.

Après près de deux ans de travaux, l’enjeu principal qui s’impose est celui de la réglementation. La production et l’utilisation des PFAS doit impérativement faire l’objet d’un encadrement législatif ambitieux et protecteur de la santé et de l’environnement. Pour nourrir les réflexions et travaux sur ce sujet clé, Notre Affaire à Tous a compilé cette synthèse des réglementations des PFAS dans différents pays, illustrant la diversité et l’efficacité des approches empruntées pour développer la connaissance et le suivi de ces molécules, mais aussi pour sortir de notre dépendance.

Il révèle aussi, en creux, le retard de la France en la matière, y compris face à ses voisins européens. On y observe notamment une convergence des efforts dans plusieurs pays européens, qui tend à s’incarner dans la dynamique européenne. Pour autant, attendre le travail politique européen est synonyme de temps long, ce que ne peuvent se permettre les citoyen.ne.s exposé.e.s. Au niveau local, des mesures de restriction ont déjà été prises, comme en témoigne l’arrêté préfectoral contre Arkema dans le Rhône, de septembre 2022. Face à l’urgence, il n’aurait pas été imaginable que la préfecture attende ici une restriction nationale : de même, la France ne peut se permettre d’attendre l’aboutissement des discussions européennes. De plus, l’Union européenne se nourrit des expériences nationales pour construire ses réglementations. Des mesures de moratoire et de protection doivent arriver avant. Comme elle l’a fait pour l’amiante, la France peut anticiper certaines mesures sans attendre l’atterrissage de la réglementation européenne.

Une action urgente est nécessaire. Les PFAS représentent un enjeu majeur, pour ce qu’ils emportent de problématiques sanitaires et environnementales, mais aussi pour ce qu’ils appellent d’anticipation industrielle et réglementaire. On observe que l’anticipation des industries cosmétiques ou de certaines multinationales comme Patagonia ou McDonalds, qui ont éliminé les PFAS de leur chaîne de production, s’avère gagnante aujourd’hui. À l’heure où un marché sans PFAS se dessine, il est urgent de pousser les entreprises françaises à prendre ce virage en avance afin de protéger les emplois de leurs salariés. D’autant plus que les alternatives existent déjà à ces produits toxiques, et que les usages essentiels (énergies renouvelables, pharmaceutique et médical, semiconducteurs…) ne représentent que 8% des usages globaux.

L’ampleur de la catastrophe sanitaire et écologique liée aux PFAS pose très clairement la question de leur interdiction globale, de la fabrication à l’utilisation. L’impossibilité de les recycler sans créer de nouvelles pollutions diffuses, l’impossibilité d’empêcher les rejets industriels, et les possibilités d’importation de produits provenant de pays aux cadres réglementaires plus souples imposent une approche globale. L’Europe a besoin d’un plan de sortie des PFAS, et la France a la possibilité d’en poser les premiers jalons. Au-delà des impacts économiques et industriels, l’évitement d’une catastrophe sanitaire de type amiante ou chlordécone impose de trouver collectivement une régulation efficace sans attendre.

NOS 3 RECOMMANDATIONS : 

  • Réintroduire l’interdiction des PFAS de tous les ustensiles de cuisine et aller vers une interdiction globale des PFAS, des rejets à l’importation ;
  • Intégrer une définition évolutive et englobante des PFAS ;
  • Encadrer le développement d’alternatives.

Le présent rapport a été rédigé par M. Connor Milton et Mme Aimée Boukandja–Beaudeux de la Clinique de l’École de Droit de Sciences Po à la demande de Notre Affaire à Tous avec l’appui et le soutien de Mme Emma Feyeux pour Notre Affaire à Tous et l’encadrement de leur tutrice, Mme Philippine Garrigue.