Les conséquences des changements climatiques sont déjà visibles. Notre Affaire à Tous met régulièrement en avant les différences d’impacts et les inégalités qui y sont liées, tant au niveau international que national. Si nous sommes toutes et tous concernées par le réchauffement climatique, nous ne sommes pas tous responsables au même niveau ni n’avons les mêmes moyens (financiers mais aussi sociaux, juridiques, etc.) pour nous protéger de ces conséquences ou nous adapter. Ces questions sont anciennes et de plus en plus abordées et documentées, notamment au niveau international. On parle de pertes et préjudices (loss and damages), c’est-à-dire les conséquences du changement climatique qui ne peuvent être évitées ce qui amène la question des réparations des préjudices subis (perte de revenus à cause d’une inondation ou d’une vague de chaleur) et celles des compensations pour les pertes qui ne peuvent pas toujours être évaluées en termes économiques (vies humaines ou non, perte d’une culture, etc.). Cependant, si ces problématiques sont bien présentes dans les discussions, leur prise en compte effective et leur intégration dans des plans d’action concrets sont encore trop lentes et limitées.

Dans ce numéro d’IMPACTS, dans le cadre d’une clinique Notre Affaire à Tous et des étudiant.e.s de Sciences Po Toulouse (Manon MERLE & Léo RICHER) font un point détaillé sur la question des pertes et préjudices en retraçant notamment son évolution dans le régime climatique.

SOMMAIRE

La lente consécration des pertes et préjudices comme troisième pilier du régime climatique international : retour sur l’historique de la mise à l’agenda
1. Années 1990 : La lutte des PEID pour la reconnaissance de leur particulière vulnérabilité aux effets résiduels des changements climatiques
2. Premières apparitions de l’expression « loss and damage » dans la soft law : de la COP de Bali en 2007 à la création du Mécanisme international de Varsovie en 2013
3. La consécration des pertes et préjudices comme troisième pilier de l’action climatique internationale avec l’Accord de Paris de 2015
4. L’application concrète de ce troisième pilier : la création du Fonds pour les pertes et préjudices à la COP 27

Compenser les pertes et préjudices ?
1. Le refus de la responsabilité et le choix de la solidarité internationale
2. Dans le cadre de la CCNUCC, une évolution laborieuse du traitement financier des pertes et préjudices depuis la COP 21
3. Le Fonds pour les pertes et préjudices
4. Compenser les pertes non-économiques

La vulnérabilité des Outre-mer au changement climatique

L’exclusion des Outre-mer de la diplomatie internationale sur le climat

Mayotte, territoire insulaire français

Situation socio-économique

La préparation de Mayotte aux changements climatiques et les pertes et préjudices
1. Un habitat fragile face aux évènements climatiques extrêmes
2. La crise de l’eau de 2023 : une crise révélatrice d’une mal-adaptation
3. Les pertes et préjudices auxquelles Mayotte fait ou fera face

La Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) adoptée en 1992 à l’issue du Sommet de la Terre de Rio, constitue le socle du régime international de la lutte contre les changements climatiques. Ce régime est complété par deux autres traités, à savoir le Protocole de Kyoto (1997) et l’Accord de Paris (2015). Sur la base du premier rapport du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) paru en 1990, les Nations Unies reconnaissent au sein de la CCNUCC un principe devenu notoire, celui des responsabilités communes mais différenciées des parties à la convention dans la contribution aux changements climatiques. En conséquence, il appartient « aux pays développés parties d’être à l’avant-garde de la lutte contre les changements climatiques et leurs effets néfastes » (Article 3 de la CCNUCC).

L’action climatique a d’abord été concentrée sur une stratégie d’atténuation des changements climatiques, c’est-à-dire de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), fondée sur l’idée que les effets des changements climatiques pouvaient être évités. Puis, l’échec des politiques d’atténuation, et de l’existence future d’effets inévitables des changements climatiques, font prendre acte aux Etats parties à la CCNUCC de la nécessité de se préparer face à ces effets néfastes. L’adaptation devient alors le second pilier du régime climatique international au côté de l’atténuation. Il est définitivement entériné en 2010 avec la création du Cadre de l’adaptation de Cancún

En parallèle, est discuté au sein des négociations internationales la reconnaissance d’effets résiduels des changements climatiques, c’est-à-dire d’effets qui se produisent et se produiront en dépit de la mise en place de politiques d’atténuation et d’adaptation, aussi conceptualisés sous le vocable de « pertes et préjudices ». Ces effets résiduels peuvent être les conséquences d’événements climatiques extrêmes (ouragans, typhons, submersions, etc.) comme de phénomènes climatiques à évolution lente (montée du niveau des mers, salinisation des sols, etc.). Pour comprendre rapidement et concrètement ce que sont ces pertes et préjudices, il est courant de les distinguer en deux catégories : d’une part, les pertes et préjudices économiques (destruction d’infrastructures, pertes de revenus, etc.) et d’autre part les pertes et préjudices non-économiques (perte de souveraineté, perte d’identité culturelle, etc.), donc difficilement évaluables en termes monétaires. Nous reviendrons sur la construction de cette définition au cours de l’article.  

L’identification et la compensation des pertes et préjudices devient le troisième pilier du régime climatique international en 2015 avec l’adoption de l’Accord de Paris. Or, si l’établissement de ce troisième pilier est le plus récent, et que la décision de mettre en place un Fonds dédié au traitement des pertes et préjudices n’est intervenu qu’à l’issue de la COP 27 (et qu’il n’est pas encore opérationnel), des débats, concernant la reconnaissance de dommages inévitables futurs et la mise en place de mécanismes d’assurance pour y faire face,  animent les négociations internationales dès le Sommet de la Terre de Rio de 1992. Ces questions, portées par des Etats particulièrement vulnérables aux effets des changements climatiques, s’accompagnent au départ d’une demande d’implémentation de mécanismes assurantiels, auxquels seraient soumis à participation les Etats développés, opérant par là la reconnaissance de leur responsabilité juridique. 

Les pertes et préjudices se présentent donc clairement comme une illustration des inégalités climatiques : certaines régions sont particulièrement exposées aux conséquences des changements climatiques. Comme l’ont souligné Marianne Moliner-Dubost et Sabine Lavorel (2024), les pays en développement supportent de manière disproportionnée ces pertes et préjudices. Tout d’abord, ces pays sont plus fréquemment touchés par des événements climatiques extrêmes et leur capacité à y faire face est entravée par leur faible revenu. Qui plus est, une injustice climatique encore plus flagrante réside dans le fait que les pays les plus touchés et les plus vulnérables aux pertes et préjudices sont souvent ceux qui émettent le moins de gaz à effet de serre. En effet, le sixième rapport du GIEC révèle que les contributions historiques des émissions de CO2 varient considérablement en fonction des régions. D’une part, il apparaît qu’historiquement les pays développés représentent près de 45% des émissions de CO2 entre 1850 et 2019. D’autre part, le GIEC souligne que : 

« Les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID) ont des émissions par habitant beaucoup plus faibles (1,7 tCO2-eq et 4,6 tCO2-eq respectivement) que la moyenne mondiale (6,9 tCO2-eq) […]. Les 10% de ménages présentant les émissions par habitant les plus élevées contribuent à hauteur de 34 à 45% des émissions de GES des ménages basées sur la consommation à l’échelle mondiale, tandis que les 50% les moins riches contribuent à hauteur de 13 à 15% » (GIEC, AR6, GTIII: 5). 

Le problème étant que les territoires faiblement responsables des changements climatiques sont plus durement frappées par leurs conséquences. A ce titre, une étude datant de 2022 révèle que 97% des victimes d’événements météorologiques extrêmes depuis 1991 résidaient dans des pays en développement, ce qui représente en moyenne 189 millions de personnes chaque année. De plus, cette étude indique également qu’entre 2021 et 2022, les pays en développement auraient subi environ 119 événements climatiques extrêmes. En outre, rien que durant la première moitié de 2022, six entreprises du secteur des combustibles fossiles auraient généré suffisamment de bénéfices pour compenser tous les dommages subis par ces pays, tout en dégageant 70 milliards de dollars de profits supplémentaires.

Partant, l’objectif de cet article est d’abord de faire une synthèse de l’histoire de la reconnaissance des pertes et préjudices au sein du régime climatique international ainsi qu’une présentation du traitement de ces effets résiduels et des limites de l’action internationale en la matière. Puis, il s’attache à appliquer le concept de pertes et préjudices, consacré en droit international, aux Outre-mer français, compte tenu de leur particulière vulnérabilité aux effets des changements climatiques, en développant particulièrement le cas du département de Mayotte.

Partie 1 – Pertes et préjudices : compenser les inégalités climatiques au niveau international

La « science de l’attribution » : les preuves de sur-risques de survenue de pertes et préjudices dues aux changements climatiques anthropiques 

Pour attribuer les pertes et préjudices au changement climatique, encore faut-il prouver le lien de causalité, ce qui ne va pas de soi puisqu’il existe une pluralité de facteurs de risque. Par ailleurs, il existe aujourd’hui de nombreuses études et méthodes d’attribution des aléas climatiques aux émissions anthropiques de gaz à effet de serre. Les derniers rapports du GIEC soulignent le rôle important joué par les émissions de gaz à effet de serre dans la hausse globale des températures à l’échelle du monde depuis la période préindustrielle. 

La « science de l’attribution » permet en effet de mettre en avant les sur-risques de survenue de phénomènes en raison du changement climatique. A ce propos, certains événements à évolution lente, tels que la hausse globale des températures, l’élévation du niveau de la mer ou encore la fonte des glaces, sont facilement imputables à la hausse des émissions anthropiques. En 2016, une étude a démontré qu’il y avait 95% de probabilité que la moitié des inondations auxquelles les États-Unis ont été confrontés soient attribuables aux changements climatiques d’origine humaine (Strauss, 2016). De même, la probabilité d’attribution des pluies et inondations qui ont frappé la France en 2016 a été estimée à 90% plus probable en raison du changement climatique (McSwenney et Pidcock, 2016). 

Par ailleurs, d’autres aléas climatiques sont plus difficilement attribuables aux changements climatiques : c’est le cas notamment de la salinisation des sols, de la perte de la biodiversité, ainsi que des événements extrêmes (vagues de chaleur, sécheresse, inondations) (European Capacity Building Initiative, 2018: 21). Pour ce qui est des événements extrêmes, le GIEC affirme par ailleurs que les émissions anthropiques entraînent vraisemblablement une augmentation de leur fréquence et de leur intensité. 

Une des limites de cette science de l’attribution repose sur le fait que les pays développés ont davantage de moyens et de données de qualité pour la mettre en œuvre par rapport aux pays en développement.

Partie 2 – Le cas des Outre-mer français

Le territoire français est pluriel et s’étend sur trois océans, avec les territoires d’Outre-mer disséminés à travers l’océan Atlantique, Indien et Pacifique. Dès lors, il faut se garder de l’imaginaire géographique unique de la France qui n’est souvent représentée qu’à travers son territoire européen (Ferdinand, 2018). Malcom Ferdinand souligne en effet l’exclusion symbolique des territoires d’Outre-mer de la France dans le récit géographique national, à l’instar des JT météo qui ne mentionnent que le territoire hexagonal. Pour comprendre la relation de la France au changement climatique, il est donc nécessaire de l’aborder au prisme de ses territoires d’Outre-mer.

Le changement climatique n’épargne aucun territoire, et la France – dans toute sa diversité – ne fait pas exception. D’après le dernier rapport du Haut conseil pour le climat (septembre 2023), la température globale en France aurait augmenté de 1,9°C (moyenne sur la dernière décennie : de 2013 à 2022) par rapport à la période préindustrielle (1850-1900). Pour comparaison, le niveau de réchauffement à l’échelle du monde est de l’ordre de + 1,15°C sur cette même période. Plusieurs événements météorologiques extrêmes ont frappé la France en 2022 : perte de 5 km3 de volume pour l’ensemble des glaciers alpins, baisse d’environ 20% de la production hydroélectrique, baisse des rendements agricoles (à hauteur d’environ 10 à 30% pour certaines filières), une baisse des précipitations de 25% par rapport la période 1991-2020. Le changement climatique a donc d’importantes conséquences sur les écosystèmes, la santé humaine, les infrastructures et les activités économiques en France. Le GIEC le constate dans son sixième rapport, le changement climatique rend plus probables et fréquentes les vagues de chaleur, les pénuries d’eau, la diminution du rendement agricole et les inondations.

Par ailleurs, nous l’avons vu, les conséquences du changement climatique diffèrent en fonction des territoires, certains étant bien plus vulnérables que d’autres. Appliqués au cas français, les territoires les plus vulnérables au changement climatique sont indéniablement les Outre-mer (Réseau Action Climat, 2022).

Partie 3 – Le cas de Mayotte

Mayotte fait partie des quatre îles de l’archipel des Comores qui se situe au Nord-Est de Madagascar. Cet archipel était sous protectorat français de 1848 à 1974, date à laquelle un référendum quant à son indépendance est organisé par la France. Parmi les quatre îles, seule la population de Mayotte vote contre l’indépendance. Un second référendum est organisé en 1976 uniquement à Mayotte, confirmant la volonté des Mahorais de rester rattachée à la France, tandis que le reste de l’archipel des Comores devient indépendant. En 2011, à la suite d’un référendum organisé en 2009, Mayotte devient département et région d’Outre-mer (DROM). 

Mayotte constitue de loin le département et la région la plus pauvre de France, avec 77,3% de la population mahoraise vivant en dessous du seuil de pauvreté en 2018 alors que le taux de pauvreté en France hexagonale est de 14,8% (Insee, Revenus et patrimoine des ménages, 2021). Surtout, l’intensité de la pauvreté, c’est-à-dire l’écart relatif entre le niveau de vie médian de la population pauvre et le seuil de pauvreté rapporté au seuil de pauvreté, est de 87,3%, ce qui montre la très grande pauvreté des ménages mahorais. Le taux de chômage de l’île s’élevait à 34 % de la population active en 2022, faisant de Mayotte la région présentant le plus haut taux en France, mais également en Europe

Par ailleurs, de part son histoire liée au Comores, Mayotte a connu une forte immigration comorienne depuis 1976. Alors qu’en 1976, l’île comptait 45 000 habitants, elle en compte environ 131 000 en 1997. En 1995, le gouvernement français met en place une procédure de visa pour les Comoriens souhaitant venir à Mayotte, alors que jusque-là il y avait un régime de libre circulation entre l’île française et le reste de l’archipel. Dès lors, il y a eu une forte immigration clandestine. Aujourd’hui, selon l’Insee, la population de Mayotte est estimée à 321 000 personnes, avec un taux de croissance démographique de 3,8% par an entre 2012 et 2017. Néanmoins, beaucoup de Mahorais critiquent le recensement de l’Insee et estiment que ce nombre est largement sous-estimé en raison de l’immigration illégale mal comptabilisée. Dans un rapport de 2022, la Cour des Comptes rapporte que « la plupart des interlocuteurs s’accordent sur le chiffre de 350 000, voire 400 000 habitants ». Et il n’est pas rare de voir des chiffres encore plus haut mentionnés par des personnes lorsqu’elles sont interrogées par la presse. Lors d’un entretien mené avec Nicolas Salvador, secrétaire de l’association Mayotte à soif, celui-ci parle de 600 000 personnes.

Conclusion

La mise à l’agenda international des pertes et préjudices a donc été le fait des pays les plus vulnérables, pour la plupart insulaires, qui ont alerté sur leur vulnérabilité particulière face au risque de montée du niveau de la mer, menaçant à la fois leur intégrité territoriale et politique. L’Alliance des petits Etats insulaires en développement (AOSIS) s’est rapidement constituée pour porter la voix de ces Etats sur la scène internationale.

Dès lors, la définition des pertes et préjudices s’est progressivement construite depuis 1992 au fil des Conférences des Parties à la CCNUCC et notamment avec la mise en place du mécanisme international de Varsovie relatif aux pertes et préjudices en 2013. Bien qu’il ne semble pas y avoir de définition officielle, il est commun de définir les pertes et préjudices comme les effets résiduels des changements climatiques qui se produisent et se produiront en dépit de la mise en place de politiques d’atténuation et d’adaptation : ces dommages peuvent être la conséquence d’événements météorologiques extrêmes comme de phénomènes climatiques à évolution lente et se distinguent notamment selon leur caractère économique ou non.

L’accord de Paris de 2015 a marqué une étape significative dans l’inscription des pertes et préjudices à l’agenda politique, en établissant ces derniers comme le troisième pilier de l’action climatique internationale, aux côtés de l’atténuation et de l’adaptation. Ainsi, l’action climatique doit reposer sur ces trois piliers pour traiter à la fois des causes et des conséquences des changements climatiques, pour ne s’attaquer pas seulement aux responsables mais pour se concentrer également sur ses victimes.

Par ailleurs, force est de constater que le régime climatique international ne repose nullement sur un principe de responsabilité. En effet, les pays développés, qui ont une responsabilité historique dans les émissions anthropiques de gaz à effet de serre à l’origine des changements climatiques, ont toujours lutté pour que ne soit pas reconnu leur responsabilité juridique. Ainsi, le régime climatique international repose davantage sur une logique de solidarité internationale. Par conséquent, bien que la décision de créer un Fonds pour les pertes et préjudices à la COP 27 constitue un pas significatif vers la voie de la compensation de ces dommages résiduels, elle ne traduit pas une volonté de réparation : en droit, la réparation sous-entendrait la reconnaissance d’une responsabilité dans le préjudice.  

Par ailleurs, un autre point de tension limitant des politiques de compensation réside dans le fait qu’une partie non-négligeable des pertes et préjudices n’est pas évaluable en termes monétaires. En effet, c’est le cas des pertes non économiques, telles que la souveraineté politique et l’identité culturelle, qui ne sont pas commensurables. Compenser de telles pertes sous-entendrait la possibilité de trouver un bien substituable. Or, la particularité de ces biens est qu’ils ne sont pas substituables à d’autres, alors qu’ils sont déjà menacés par les effets des changements climatiques.

Les rapports du GIEC n’ont cessé de réaffirmer la responsabilité des activités humaines dans les changements climatiques : « Il est sans équivoque que l’influence humaine a réchauffé l’atmosphère, les océans et les continents » (GIEC, AR6, GTI). Par ailleurs, l’influence humaine n’a pas eu le même poids de part et d’autre du globe : certaines régions du monde sont en effet nettement plus responsables des émissions historiques de GES. L’injustice réside ainsi dans le fait que la part des émissions passées et présentes de certaines régions du monde est faible alors qu’elles subissent frontalement et très concrètement les effets des changements climatiques. A l’échelle du monde, il s’agit des pays en développement en général et des petits États insulaires en développement plus spécifiquement. A l’échelle de la France, il s’agit principalement des Outre-mer, qui pour la plupart (à l’exception de la Guyane) sont insulaires. En effet, les études montrent que les Outre-mer sont responsables de seulement 5,4% des émissions de GES en 2019 alors qu’ils sont directement victimes des conséquences des changements climatiques, sources de pertes et préjudices : leur caractère insulaire les expose à des risques accrus liés à la montée du niveau de la mer ; leurs économies, fortement dépendantes des secteurs du tourisme et de l’agriculture, sont fragilisées par les impacts du changement climatique ; ils sont également plus exposés aux événements climatiques extrêmes, ce qui entraîne des conséquences économiques et sociales graves, alors qu’ils disposent de peu de ressources pour y faire face, etc.

Le cas de Mayotte est particulièrement criant : il s’agit d’un département français depuis 2011, le plus pauvre de tous, avec près de 80% de la population vivant sous le seuil de pauvreté, contre environ 15% pour la France hexagonale. Mayotte subit par ailleurs de plein fouet les conséquences du changement climatique : la moitié des habitations étant construites en tôle, l’île est particulièrement vulnérable aux événements météorologiques extrêmes ; les sécheresses, devenues plus fréquentes et intenses, contribuent à l’importante crise de l’eau dont Mayotte est victime depuis des années ; en outre, l’état de la barrière de corail, cruciale pour l’équilibre de l’écosystème, est préoccupant à Mayotte. Par conséquent, Mayotte subit des préjudices financiers et moraux dus aux changements climatiques. 

Ainsi, cet article s’est attaché à mettre en lumière dans quelles mesures les pertes et préjudices constituent une illustration manifeste des injustices résultant des changements climatiques dus aux émissions anthropiques de gaz à effet de serre à l’échelle du monde.

Bibliographie